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25/06/2020 | FRANCE | N°19DA01948-19DA01969

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 25 juin 2020, 19DA01948-19DA01969


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Rouen, par deux requêtes distinctes, d'annuler pour excès de pouvoir la décision par laquelle le président du syndicat mixte d'élimination des déchets de l'arrondissement de Rouen a prononcé son licenciement, de condamner le syndicat mixte précité à lui verser les sommes de 13 104,64 euros et 34 742,72 euros et de mettre à la charge du syndicat mixte d'élimination des déchets de l'arrondissement de Rouen la somme de 1 500 euros dans chaque instance a

u titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que le...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Rouen, par deux requêtes distinctes, d'annuler pour excès de pouvoir la décision par laquelle le président du syndicat mixte d'élimination des déchets de l'arrondissement de Rouen a prononcé son licenciement, de condamner le syndicat mixte précité à lui verser les sommes de 13 104,64 euros et 34 742,72 euros et de mettre à la charge du syndicat mixte d'élimination des déchets de l'arrondissement de Rouen la somme de 1 500 euros dans chaque instance au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens.

Par un jugement conjoint n° 1802824, 1802810 du 25 juin 2019, le tribunal administratif de Rouen a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

I Par une requête, enregistrée le 19 août 2019, sous le n° 19DA01948, M. A... D..., représenté par Me F..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la décision par laquelle le président du syndicat mixte d'élimination des déchets de l'arrondissement de Rouen a prononcé son licenciement ;

3°) de condamner le syndicat mixte d'élimination des déchets de l'arrondissement de Rouen à lui verser la somme de 13 104,64 euros en réparation de ses préjudices moral et financier ;

4°) de mettre à la charge du syndicat mixte d'élimination des déchets de l'arrondissement de Rouen la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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II Par une requête, enregistrée le 20 août 2019, sous le n° 19DA01969 M. A... D..., représenté par Me F..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de condamner le syndicat mixte d'élimination des déchets de l'arrondissement de Rouen à lui verser la somme de 13 104,64 euros en raison de l'illégalité du licenciement, la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice liée aux troubles dans les conditions d'existence, en réparation du préjudice moral et en compensation de la perte de chance ;

3°) de mettre à la charge du syndicat mixte d'élimination des déchets de l'arrondissement de Rouen la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée ;

- le décret n° 88-145 du 15 février 1988 modifié ;

- le décret n° 2016-1858 du 23 décembre 2016 ;

- l'ordonnance n°2020-305 du 25 mars 2020 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Ont été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Marc Lavail Dellaporta, président assesseur ;

- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. M. D... a été recruté par le syndicat mixte d'élimination des déchets de l'arrondissement de Rouen, en qualité d'agent de maintenance au centre de tri des déchets du site de Grand Quevilly, à compter du 1er février 2018, par la voie d'un contrat à durée déterminée de neuf mois, comportant une période d'essai de quatorze jours. Il a été convoqué à un premier entretien préalable, le 20 février 2018, au cours duquel il lui a été exposé qu'il n'avait pas les requis et les compétences lui permettant d'exercer ces fonctions. Il a, ensuite, fait l'objet d'un entretien préalable à un licenciement pour insuffisance professionnelle le 28 février 2018, suivi le même jour de la décision prononçant le licenciement, prenant effet à compter du 12 mars 2018. Par courriers du 17 avril 2018, M. D... a présenté un recours hiérarchique à l'encontre de cette décision, ainsi qu'une demande indemnitaire préalable, lesquels ont été expressément rejetés par une première décision du 30 mai 2018. Par une seconde décision de la même date, 30 mai 2018, le syndicat mixte d'élimination des déchets de l'arrondissement de Rouen a retiré la première décision de licenciement du 28 févier 2018 et a, de nouveau, procédé à son licenciement. M. D... a saisi alors le tribunal administratif de Rouen par deux requêtes tendant à l'annulation de la décision le licenciant ainsi qu'à la condamnation du syndicat mixte d'élimination des déchets de l'arrondissement de Rouen à lui verser la somme de 34 742,72 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis. Par un jugement commun du 25 juin 2019, le tribunal administratif de Rouen a rejeté ses demandes. Par deux requêtes distinctes, il relève appel de ce jugement.

2. Les requêtes visées ci-dessus, sous le n°19DA01948 et sous le n°19DA01969, sont dirigées contre le même jugement. Il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par un seul arrêt.

Sur l'étendue du litige :

3. M. D... persiste à demander en appel l'annulation de la décision du 28 février 2018 qui n'aurait, selon lui, pas disparu de l'ordonnancement juridique. Toutefois, comme l'a relevé à bon droit le tribunal administratif dans le jugement attaqué, la décision de licenciement du 30 mai 2018 a retiré la première décision du 28 février 2018 après son recours gracieux, ce qu'elle pouvait légalement faire puisque le délai de retrait de quatre mois n'était pas échu et qu'il a modifié les termes. La cour n'est par suite valablement saisie que de conclusions aux fins d'annulation de la seule décision de licenciement encore dans l'ordonnancement juridique, à savoir celle du 30 mai 2018.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

4. En premier lieu, en vertu des dispositions des dispositions combinées des articles L. 5211-9 et L. 5711-1 du code général des collectivités territoriales, le président du conseil d'administration d'un syndicat mixte est seul chargé de son administration et il est le chef des services. Dès lors, contrairement à ce que soutient M. D..., il n'a pas à justifier de sa compétence pour procéder à son licenciement pour insuffisance professionnelle. La décision en litige du 30 mai 2018 est signée par M. C..., président du syndicat mixte d'élimination des déchets de l'arrondissement de Rouen. Par suite le moyen tiré de l'incompétence de son auteur doit être écarté. En outre, la circonstance que les actes de la mise en oeuvre de la procédure de licenciement et particulièrement le courrier portant convocation de M. D... à l'entretien préalable au licenciement, qui ne mentionne pas qu'il est signé par délégation, aient été signés par M. E..., directeur général des services, qui a reçu une délégation à cet effet de la part du président du syndicat mixte d'élimination des déchets de l'arrondissement de Rouen, par arrêté n° 2017-972 du 20 novembre 2017, à une date antérieure aux actes de la procédure de licenciement, pour signer les actes relatifs à la gestion des ressources humaines, et non par le président du syndicat mixte précité, est sans incidence sur la légalité de la décision du 30 mai 2018. Si l'appelant affirme aussi que les signatures de M E... diffèrent selon les courriers adressés, qu'il en est de même de la signature de M. C... pour la décision de licenciement du 30 mai 2018 et celle figurant sous l'arrêté de délégation du 20 novembre 2017, il n'est pas établi pour autant que ceux-ci ne seraient pas les auteurs de ces courriers ou décision. Le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision en litige ne peut qu'être écarté.

5. En deuxième lieu, la décision attaquée du 30 mai 2018 vise les textes dont il est fait application, l'entretien préalable au licenciement dont M. D... a bénéficié le 28 février 2018 et se réfère de manière précise aux manquements qui lui sont reprochés, notamment à des erreurs techniques commises lors d'une intervention de remplacement d'un roulement sur un convoyeur, au caractère désorganisé de son travail, à l'absence de remise en cause de sa manière de servir face aux remarques de son supérieur hiérarchique et aussi à ses difficultés d'intégration au sein de l'équipe de travail. Dès lors, le moyen tiré du défaut de motivation doit être écarté.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article 39-2 du décret du 15 février 1988, dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce : " L'agent contractuel peut être licencié pour un motif d'insuffisance professionnelle. /L'agent doit préalablement être mis à même de demander la communication de l'intégralité de toute pièce figurant dans son dossier individuel, dans un délai suffisant permettant à l'intéressé d'en prendre connaissance. Le droit à communication concerne également toute pièce sur laquelle l'autorité territoriale entend fonder sa décision, même si elle ne figure pas au dossier individuel. ".

7. Tout d'abord, si M. D... a été reçu pour un entretien le 20 février 2018, avec son responsable hiérarchique, celui-ci portait sur le bilan de son activité à l'issue des trois premières semaines d'exercice de ses fonctions, à l'occasion duquel ce dernier lui a fait part des manquements reprochés, ainsi que les compétences attendues à son égard. Cet entretien ne constituait pas un entretien préalable au licenciement. La circonstance que cet entretien n'est prévu par aucun texte ou règlement concernant le fonctionnement du syndicat mixte d'élimination des déchets de l'arrondissement de Rouen est par elle-même sans incidence sur la légalité de la décision en litige.

8. Ensuite, M. D... a été informé de ce qu'il avait la possibilité de prendre connaissance de son dossier individuel et de toutes les pièces relatives à sa situation, le mardi 27 février 2018, à 9 heures. La seule circonstance que le 27 février était une journée travaillée n'est pas de nature à établir qu'il aurait été de ce fait empêché de prendre connaissance de l'ensemble des éléments motivant la décision de licenciement, alors au demeurant qu'il n'a pas manifesté le souhait de modifier cette date. M. D..., s'est ainsi trouvé mis à même de prendre connaissance de son dossier, n'a pas utilisé cette faculté. Par suite, le moyen tiré de ce qu'il a été privé de la garantie visée à l'article 39-2 du décret du 15 février 1988 doit être écarté.

9. En quatrième lieu, aux termes de l'article 42 du décret du 15 février 1988 dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce : " Le licenciement ne peut intervenir qu'à l'issue d'un entretien préalable. La convocation à l'entretien préalable est effectuée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par lettre remise en main propre contre décharge. Cette lettre indique l'objet de la convocation. /L'entretien préalable ne peut avoir lieu moins de cinq jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou la remise en main propre de la lettre de convocation. L'agent peut se faire accompagner par la personne de son choix. /Au cours de l'entretien préalable, l'autorité territoriale indique à l'agent le ou les motifs du licenciement. (...) ".

10. D'abord, si ainsi qu'il a été exposé au point 7, M. D... a été reçu à l'occasion d'un premier entretien par son supérieur hiérarchique, le 20 février 2018, afin de dresser un bilan à l'issue de trois semaines d'exercice de ses fonctions, à l'occasion duquel ce dernier lui a fait part des manquements qui lui étaient reprochés, en lui rappelant les compétences attendues de sa part, cet entretien ne constitue pas, eu égard à son objet, un entretien préalable au licenciement au sens des dispositions précitées. Ainsi, l'administration n'était pas tenue de le mettre en mesure de présenter des observations avant cet entretien. Le moyen soulevé en ce sens par M. D... est inopérant et ne peut donc qu'être écarté.

11. Ensuite, M. D... a été convoqué par lettre du 22 février 2018 à un entretien préalable à son licenciement pour insuffisance professionnelle, devant se tenir le 28 février 2018. Par une attestation produite en cause d'appel, dûment revêtue de sa signature, M. D... a reconnu s'être fait remettre cette lettre en main propre, le 22 février 2018. Par suite, le délai de cinq jours ouvrables prévu à l'article 42 du décret du 15 février 1988 précité a bien été respecté.

12. En outre, contrairement à ce qu'il persiste à soutenir en appel, le courrier du 22 février 2018 par lequel M. D... a été convoqué à un entretien préalable à son licenciement, le 28 février 2018, l'informe de la possibilité pour lui de se faire assister par la personne de son choix au cours de cet entretien et de prendre connaissance de son dossier individuel ainsi que de toutes les pièces relatives à sa situation. Le fait que l'entretien préalable ait eu lieu le 28 février 2018, et qu'après cet entretien M. D... se soit vu remettre, en main propre et contre décharge, la notification de son licenciement, ne constitue nullement une irrégularité comme l'affirme l'appelant, puisque les dispositions de l'article 42 du décret du 22 février 2018, qui ont été respectées, ne prohibent nullement que ces formalités soient accomplies le même jour, comme l'a jugé à bon droit le tribunal administratif de Rouen en motivant suffisamment sa réponse.

13. En cinquième lieu, M. D... confond " commission administrative paritaire " et " commission consultative paritaire " en soutenant que la commission administrative paritaire n'a pas été saisie pour avis préalablement à son licenciement, en se fondant sur les dispositions applicables aux licenciements pour motif disciplinaire, alors que le motif du licenciement est, en l'espèce, tiré de son insuffisance professionnelle, qui n'est pas un motif disciplinaire, de sorte que le moyen est inopérant.

14. En outre, s'il peut être regardé comme soutenant que son licenciement pour insuffisance e professionnelle n'a pas donné lieu à la consultation de la commission consultative paritaire prévue à cet effet, l'article 46 de la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique a complété l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 relative à la fonction publique territoriale en prévoyant qu'un décret à intervenir : " (...) fixe (...) les conditions dans lesquelles des commissions consultatives paritaires, organisées par catégorie et placées auprès des collectivités, établissements ou des centres de gestion dans les conditions fixées à l'article 28 connaissent des questions individuelles résultant de l'application des alinéas précédents, des décisions de mutation interne à la collectivité ou l'établissement, de sanction et de licenciement des agents non titulaires recrutés en application de l'article 3-3. ". Ainsi, l'article 45 du décret n° 2015-1912 du 29 décembre 2015 portant diverses dispositions relatives aux agents contractuels de la fonction publique territoriale a créé l'article 39-5 du décret du 15 février 1988 pris pour l'application de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif aux agents contractuels de la fonction publique territoriale dispose que : " /.../ II. - Lorsque l'autorité territoriale envisage de licencier un agent pour l'un des motifs mentionnés au I du présent article, elle convoque l'intéressé à un entretien préalable selon les modalités définies à l'article 42. A l'issue de la consultation de la commission consultative paritaire, prévue à l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée, elle lui notifie sa décision par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par lettre remise en main propre contre décharge. / (...) ".

15. L'article 52 de la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires a ensuite complété l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 relative à la fonction publique territoriale et a modifié ces dispositions en prévoyant que : " Les commissions consultatives paritaires connaissent des décisions individuelles prises à l'égard des agents contractuels et de toute question d'ordre individuel concernant leur situation professionnelle. " Le même article renvoie à un décret en Conseil d'Etat sa mise en oeuvre : " Les dispositions relatives à la composition, aux modalités d'élection et de désignation des membres, à l'organisation, aux compétences et aux règles de fonctionnement des commissions consultatives paritaires sont définies par décret en Conseil d'Etat. ". Il s'agit du décret n° 2016-1858 du 23 décembre 2016 relatif aux commissions consultatives paritaires et aux conseils de discipline de recours des agents contractuels de la fonction publique territoriale, à l'évidence indispensables à l'entrée en vigueur des dispositions législatives, contrairement à ce que soutient D.... Toutefois, l'article 33 de ce décret du 23 décembre 2016 a prévu que " Les premières élections des représentants du personnel aux commissions consultatives paritaires sont organisées à la date du prochain renouvellement général des instances représentatives du personnel de la fonction publique territoriale. Pour l'organisation de ces élections, la consultation des organisations syndicales prévue aux articles 13, 14 et 16 est celle des organisations syndicales représentées au comité technique. ". Ce renouvellement, conformément à l'arrêté interministériel du 4 juin 2018 fixant la date des prochaines élections professionnelles dans la fonction publique territoriale, publié au journal officiel du 5 juin 2018, a eu lieu le 6 décembre 2018. Ainsi, les premières élections pour la mise en place des commissions consultatives paritaires n'ont pu avoir lieu qu'à compter de cette date, s'agissant de l'élection, pour la première fois, des représentants du personnel contractuel. Dès lors, à la date de la décision contestée du 30 mai 2018, les commissions consultatives paritaires, dans leur composition incluant des représentants du personnel, contractuel n'étaient pas encore mises en place au sein des collectivités territoriales, de sorte que les dispositions citées aux points 15 et 16, prévoyant leur consultation pour des questions d'ordre individuel autres que disciplinaires touchant des agents contractuels, ne pouvaient pas être appliquées. Eu égard à ces circonstances particulières, qui, en l'espèce, rendaient alors impossible la mise en oeuvre de la procédure prévue par ces dispositions, la consultation de la commission consultative paritaire constituait une formalité impossible. Le moyen ne peut dès lors qu'être écarté comme inopérant.

En ce qui concerne la légalité interne :

16. Le licenciement pour inaptitude professionnelle d'un agent public ne peut être fondé que sur des éléments révélant l'inaptitude de l'agent à exercer normalement les fonctions pour lesquelles il a été engagé ou correspondant à son grade et non sur une carence ponctuelle dans l'exercice de ces fonctions. Toutefois, une telle mesure ne saurait être subordonnée à ce que l'insuffisance professionnelle ait été constatée à plusieurs reprises au cours de la carrière de l'agent ni qu'elle ait persisté après qu'il ait été invité à remédier aux insuffisances constatées. Par suite, une évaluation portant sur la manière dont l'agent a exercé ses fonctions durant une période suffisante et révélant son inaptitude à un exercice normal de ses fonctions est de nature à justifier légalement son licenciement.

17. Pour prononcer le licenciement de M. D..., le président du syndicat mixte d'élimination des déchets de l'arrondissement de Rouen s'est fondé sur le fait que l'intéressé ne disposait pas des compétences de base ainsi que celles requises afin d'occuper le poste d'agent de maintenance, à la suite de nombreuses erreurs techniques commises lors d'une intervention banale de remplacement d'un roulement sur un convoyeur, sur la désorganisation dans son travail, sur la circonstance qu'il n'a pas manifesté une volonté de remise en question de sa manière de servir face aux remarques énoncées par son responsable hiérarchique au cours de l'entretien du 20 février 2018 et sur les difficultés d'intégration au sein de l'équipe de travail.

18. En sixième lieu, il ressort des pièces du dossier qu'il a été relevé par le responsable " maintenance-unité de tri et d'affinage " que M. D... avait commis de nombreuses erreurs techniques lors d'une intervention banale de remplacement d'un roulement sur un convoyeur, telles que le démontage d'une bague de serrage avec un marteau et tournevis, le remontage de celle-ci de travers, l'oubli de la pose de la clavette moteur, le démontage de la vis de réglage puis l'oubli du remontage, et aussi la perte de vis. La circonstance que la date de l'intervention ne soit pas précisée est sans incidence, dès lors que les faits tels que décrits ne sont pas sérieusement contestés. Il a aussi noté une désorganisation dans le travail de M. D... et précisé qu'il n'avait pas manifesté de volonté de remise en question s'agissant de sa manière de servir lors de l'entretien du 20 février 2018 et qu'il a rencontré des difficultés d'intégration au sein de l'équipe de travail. Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, la matérialité des manquements reprochés doit être regardée comme établie.

19. En septième lieu, s'agissant de l'appréciation des faits, l'offre d'emploi à laquelle M. D... a postulé faisait état de manière précise des différentes missions qui devaient être exercées par l'agent de maintenance affecté au centre de tri des déchets de Grand-Quevilly et précisait les compétences attendues de celui-ci. Au regard des manquements retenus par son employeur, et quand bien même une fiche de poste ne lui aurait pas été remise après sa prise de fonctions, il a révélé une incapacité à assurer sa mission. En outre, si le courrier du 22 décembre 2017, portant notification du recrutement de l'intéressé, lui indiquait qu'à l'issue de la période de neuf mois de son contrat à durée déterminée, un point serait fait par la directrice des ressources humaines avec les responsables hiérarchiques du centre de tri, de manière à envisager des perspectives d'embauche " si les compétences professionnelles se sont avérées suffisantes " cette circonstance ne s'opposait pas à la possibilité d'apprécier l'aptitude professionnelle dont M. D... avait fait preuve trois semaines après son recrutement. Le responsable " maintenance-unité de tri et d'affinage ", dans un courrier électronique du 21 février 2018 à la directrice des ressources humaines du syndicat mixte, a ainsi précisé que M. D... n'avait pas le profil recherché pour un agent de maintenance, en relevant d'emblée son manque de compétence et l'absence de prise d'initiatives qu'il avait observée, M. D... étant passif et laissant très souvent ses collègues intervenir sans les aider. M. D... a en outre été recruté compte tenu des diplômes et de l'expérience dont il pouvait justifier, puisqu'il établit avoir obtenu en 1997 un baccalauréat professionnel mention " maintenance des systèmes mécaniques automatisés ", a pu acquérir une expérience en maintenance industrielle depuis 1995, a aussi récemment suivi une formation portant sur la méthodologie de dépannage électrique en 2016, et exerçait, depuis le mois d'octobre 2017, les fonctions d'agent de maintenance au sein d'un établissement de la société Renault. Il ne peut dès lors, sérieusement se prévaloir d'une absence de formation, après avoir reconnu qu'il avait aussi bénéficié de la part de son employeur, le 1er février 2018, d'une formation complémentaire obligatoire de sécurité, suivie d'une procédure d'accueil et de découverte des activités du service pendant deux jours. Dans ces conditions, la décision prononçant le licenciement de M. D..., prise après une période de vingt jours, suffisante pour apprécier l'insuffisance professionnelle et qui ne revêt aucun caractère vexatoire, n'est entachée ni d'erreur de fait, ni d'erreur d'appréciation.

Sur les conclusions indemnitaires :

20. Les conclusions indemnitaires de M. D..., fondées sur l'illégalité fautive de la décision de licenciement, laquelle n'est toutefois pas entachée d'illégalité compte tenu de l'ensemble de ce qui a été dit, ne peuvent qu'être rejetées en l'absence de faute, sans qu'il soit besoin d'examiner la réalité des préjudices invoqués.

21. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées par le syndicat mixte d'élimination des déchets de l'arrondissement de Rouen, que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 25 juin 2019, le tribunal administratif de Rouen a rejeté ses demandes. Les conclusions qu'il présente au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées ainsi que les conclusions au titre des dépens, alors d'ailleurs, que la présente instance n'a entraîné aucun dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de M. D... une somme au titre des frais exposés par le syndicat mixte d'élimination des déchets de l'arrondissement de Rouen et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Les requêtes n° 19DA01948, 19DA01969 de M. D... sont rejetées.

Article 2 : Les conclusions du syndicat mixte d'élimination des déchets de l'arrondissement de Rouen au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... D... et au syndicat mixte d'élimination des déchets de l'arrondissement de Rouen.

N° 19DA01948, 19DA01969 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19DA01948-19DA01969
Date de la décision : 25/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-12-03-01 Fonctionnaires et agents publics. Agents contractuels et temporaires. Fin du contrat. Licenciement.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Marc Lavail Dellaporta
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : CABINET AMELE MANSOURI

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-06-25;19da01948.19da01969 ?
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