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16/06/2020 | FRANCE | N°19DA00668

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3 (ter), 16 juin 2020, 19DA00668


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme J... G... et M. K... I... ont demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler la décision du 31 mai 2016 par laquelle le maire de Saint-Etienne-Roilaye ne s'est pas opposé à la déclaration préalable déposée par M. E... L... et portant sur la réalisation d'un abri pour chevaux sur un terrain situé au 27 rue du Trou à Loups sur le territoire de la commune.

Par un jugement n° 1603380 du 28 décembre 2018, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande.

Procédure devant

la cour :

Par une requête, enregistrée le 18 mars 2019, et un mémoire, enregistré le 15...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme J... G... et M. K... I... ont demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler la décision du 31 mai 2016 par laquelle le maire de Saint-Etienne-Roilaye ne s'est pas opposé à la déclaration préalable déposée par M. E... L... et portant sur la réalisation d'un abri pour chevaux sur un terrain situé au 27 rue du Trou à Loups sur le territoire de la commune.

Par un jugement n° 1603380 du 28 décembre 2018, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 18 mars 2019, et un mémoire, enregistré le 15 octobre 2019, M. I... et Mme G..., représentés par Me B... D..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 31 mai 2016 de non-opposition à déclaration préalable ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Etienne-Roilaye et de M. L... la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif modifiée par les ordonnances n° 2020-405 du 8 avril 2020, n° 2020-427 du 15 avril 2020 et n° 2020-558 du 13 mai 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-Pierre Bouchut, premier conseiller,

- les conclusions de M. Charles-Edouard Minet, rapporteur public,

- et les observations de Me H... F... représentant la commune de Saint-Etienne-Roilaye, et de Me A... C..., représentant M. L....

Considérant ce qui suit :

1. M. L... a déposé une déclaration préalable à la réalisation de travaux, le 19 avril 2016, en vue de la construction d'un abri en bois pour ses chevaux sur une parcelle cadastrée section C n° 699 et située 27 rue du Trou à Loups sur le territoire de la commune de Saint-Etienne-Roilaye. M. I... et Mme G... relèvent appel du jugement du 28 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision du 31 mai 2016 du maire de Saint-Etienne-Roilaye ne s'opposant pas à cette déclaration.

Sur la fin de non-recevoir opposée à la requête d'appel, tirée de l'absence de la notification prévue par l'article R. 6001 du code de l'urbanisme :

2. Il ressort des pièces du dossier que M. I... et Mme G..., par des courriers recommandés avec avis de réception postal envoyés le 20 mars 2019, ont notifié leur requête d'appel à M. L... et à la commune de SaintEtienne-Roilaye qui en ont accusé réception. Dès lors, la fin de nonrecevoir tirée de la méconnaissance de l'obligation de notification prescrite par l'article R. 6001 du code de l'urbanisme ne peut être accueillie.

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme dans leur rédaction alors en vigueur : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation ".

4. Il ressort des pièces du dossier soumis aux premiers juges que M. I... et Mme G..., propriétaires d'une parcelle limitrophe du terrain d'assiette du projet, ont la qualité de voisins immédiats de la propriété destinée à recevoir l'abri à chevaux litigieux. Cet abri, d'une superficie au sol d'un peu plus de 38 m² et de hauteur maximale de 2,70 mètres, est situé à une cinquantaine de mètres de la construction des appelants. L'abri en litige est visible de leur habitation, à l'exception de la partie de l'année durant laquelle le feuillage d'un rideau d'arbres est suffisamment garni pour cacher l'abri, et depuis l'arrière de leur propriété. Par les odeurs qui émanent notamment de cet abri à chevaux, la construction autorisée affecte, par elle-même, les conditions de jouissance de leur propriété. Dès lors, les appelants, qui présentent un intérêt leur donnant qualité pour agir à l'encontre de la décision en litige, sont fondés à soutenir que le jugement attaqué est entaché d'irrégularité au motif qu'il a déclaré irrecevable leur demande, en se fondant au demeurant sur les dispositions citées au point 3, lesquelles ne sont pas applicables aux recours relatifs aux déclarations préalables qu'elles ne visent pas. Par suite, le jugement attaqué doit être annulé. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. I... et Mme G... devant le tribunal administratif d'Amiens.

Sur les autres fins de non-recevoir opposées :

5. Pour les mêmes motifs que ceux qui sont exposés au point précédent, M. I... et Mme G... ont intérêt leur donnant qualité à agir contre la décision du 31 mai 2016. Par suite, la fin de non-recevoir, tirée du défaut d'un tel intérêt, doit être écartée.

6. Aux termes de l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme : " Le délai de recours contentieux à l'encontre d'une décision de non opposition à déclaration préalable (...) court à l'égard des tiers à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l'article R. 424-15 ". Aux termes de cet article R. 42415 du même code : " Mention (...) de la déclaration préalable doit être affichée sur le terrain, de manière visible de l'extérieur, par les soins de son bénéficiaire, dès la notification de l'arrêté (...) et pendant toute la durée du chantier. (...) / (...) / Un arrêté du ministre chargé de l'urbanisme règle le contenu et les formes de l'affichage ". Aux termes de l'article A. 424-18 de ce code : " Le panneau d'affichage doit être installé de telle sorte que les renseignements qu'il contient demeurent lisibles de la voie publique ou des espaces ouverts au public pendant toute la durée du chantier ". S'il incombe au bénéficiaire d'une non opposition à déclaration préalable de justifier qu'il a bien rempli les formalités d'affichage prescrites par les dispositions précitées, le juge doit apprécier la continuité de l'affichage en examinant l'ensemble des pièces qui figurent au dossier qui lui est soumis.

7. Si pour justifier avoir accompli les formalités d'affichage prévues par les dispositions précitées, M. L... verse au dossier des attestations indiquant que le panneau d'affichage était visible depuis la voie publique, les appelants produisent des témoignages en plus grand nombre qui contredisent les attestations produites par M. L.... Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'affichage, comportant notamment la mention des voies et délais de recours, ait été régulier et continu pendant la période de deux mois prévue par les dispositions de l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme citées au point précédent, ni, par suite, qu'il ait été de nature à faire courir le délai de recours contentieux. Dès lors, la fin de non-recevoir opposée par M. L... doit être écartée.

Sur la légalité de la décision du 31 mai 2016 du maire de Saint-Etienne-Roilaye :

8. Aux termes de l'article L. 113-2 du code de l'urbanisme : " Le classement interdit tout changement d'affectation ou tout mode d'occupation du sol de nature à compromettre la conservation, la protection ou la création des boisements. (...) ".

9. Il ressort des pièces du dossier que la construction autorisée est implantée sur la parcelle n° C 699, située en espace boisé classé au plan local d'urbanisme de la commune de Saint-Etienne-Roilaye, que M. L... a d'ailleurs défrichée sans autorisation, fait pour lequel il a été condamné par un jugement du tribunal de grande instance de Compiègne du 15 février 2019. La construction en litige, malgré sa faible superficie, ne pouvait pas dès lors être réalisée sur la parcelle comprise dans un espace boisé classé où tout mode d'occupation du sol de nature à compromettre la conservation ou la création des boisements est interdite en application des dispositions précitées de l'article L. 113-2 du code de l'urbanisme. Il en résulte que la décision du 31 mai 2016 par laquelle le maire de Saint-Etienne-Roilaye ne s'est pas opposé à la déclaration préalable déposée par M. L... méconnaît ces dispositions et doit être annulée.

10. Pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun des autres moyens invoqués n'est susceptible d'entraîner, en l'état du dossier soumis à la cour, l'annulation de la décision contestée.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. I... et Mme G... sont fondés à demander l'annulation de la décision contestée.

Sur les frais liés au litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. I... et de Mme G..., qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, la somme que réclament la commune de Saint-Etienne-Roilaye et M. L... au titre des frais liés au litige. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la commune de Saint-Etienne-Roilaye et de M. L..., chacun, une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés au même titre par M. I... et par Mme G....

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif d'Amiens en date du 28 décembre 2018 est annulé.

Article 2 : La décision du 31 mai 2016 par laquelle le maire de Saint-Etienne-Roilaye ne s'est pas opposé à la déclaration préalable déposée par M. L... est annulée.

Article 3 : La commune de Saint-Etienne-Roilaye et M. L... verseront chacun une somme de 1 000 euros à M. I... et à Mme G... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de la commune de Saint-Etienne-Roilaye et de M. L... présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. K... I..., à Mme J... G..., à la commune de Saint-Etienne-Roilaye, à M. E... L... et à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

Copie en sera transmise pour information au préfet de l'Oise.

N°19DA00668 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3 (ter)
Numéro d'arrêt : 19DA00668
Date de la décision : 16/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-04-045 Urbanisme et aménagement du territoire. Autorisations d`utilisation des sols diverses. Régimes de déclaration préalable.


Composition du Tribunal
Président : M. Boulanger
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre Bouchut
Rapporteur public ?: M. Minet
Avocat(s) : COUSSY AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-06-16;19da00668 ?
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