Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens de condamner la commune d'Orry-la-Ville à lui verser la somme de 6 808,75 euros après application du partage de responsabilité, en indemnisation des préjudices subis à la suite d'une chute survenue le 6 mai 2013 sur le territoire de la commune.
Par un jugement n° 1500567 du 25 avril 2017, le tribunal administratif d'Amiens a estimé que la responsabilité de la commune d'Orry-la-Ville était engagée à hauteur de 50 % des préjudices subis par Mme B... et a, avant-dire-droit sur les conclusions à fin d'indemnisation, ordonné la réalisation d'une expertise portant sur la réalité et l'étendue des préjudices subis par Mme B....
Par un jugement n° 1500567 du 18 septembre 2018, le tribunal administratif d'Amiens a condamné la commune d'Orry-la-Ville à verser à Mme B... la somme de 1 430 euros, à la mutualité sociale agricole de Picardie la somme de 6 110,21 euros au titre de ses débours et de 1 066 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion et a mis les frais d'expertise à la charge de la commune.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 16 novembre 2018, Mme B... représentée par Me D... A..., demande à la cour :
1°) de réformer ce jugement en tant qu'il n'a fait que partiellement droit à ses demandes indemnitaires ;
2°) de condamner la commune d'Orry-la-Ville à lui verser une somme de 6 808,75 euros après application du partage de responsabilité en indemnisation des préjudices qu'elle a subis ;
3°) de mettre à la charge de la commune d'Orry-la-Ville la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Julien Sorin, président-assesseur,
- et les conclusions de Mme Anne-Marie Leguin, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B... a chuté le 6 mai 2013, alors qu'elle se dirigeait vers une benne à ordures située le long du mur d'enceinte du cimetière de la commune d'Orry-la-Ville, du fait d'une excavation sur la bande enherbée sur laquelle est installée ladite benne. Elle a demandé au tribunal administratif d'Amiens de condamner la commune d'Orry-la-Ville à l'indemniser des préjudices subis à la suite de sa chute. Mme B... interjette appel du jugement du 18 septembre 2018 par lequel le tribunal administratif d'Amiens n'a pas fait droit à l'intégralité de ses prétentions indemnitaires. Par la voie de l'appel incident, la commune d'Orry-la-Ville demande la réformation du jugement en tant qu'il a mis à sa charge les frais d'expertise et a indemnisé Mme B... au titre de l'assistance par tierce personne.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. Pour obtenir réparation, par le maître de l'ouvrage, des dommages qu'il a subis à l'occasion de l'utilisation d'un ouvrage public, l'usager doit démontrer, d'une part, la réalité de son préjudice et, d'autre part, l'existence d'un lien de causalité direct entre l'ouvrage et le dommage. Pour s'exonérer des conséquences de la responsabilité qui pèse ainsi sur lui, il incombe au maître d'ouvrage, soit d'établir qu'il a normalement entretenu l'ouvrage, soit de démontrer la faute de la victime.
3. Aucun élément ne permet de remettre en cause, en droit comme en fait, l'appréciation portée par le tribunal administratif d'Amiens tant sur l'existence de la faute de nature à engager la responsabilité de la commune d'Orry-la-Ville, en raison de la présence d'une excavation d'une profondeur de trente centimètres caractéristique d'un défaut d'entretien normal de l'ouvrage public, que sur la limitation de cette responsabilité à hauteur de 50 % résultant du manquement à l'obligation de prudence incombant à la victime. Il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges aux points 4, 5 et 6 du jugement en date du 25 avril 2017, d'admettre le principe de la responsabilité de la commune d'Orry-la-ville, laquelle ne la conteste plus en appel, et de mettre à sa charge l'indemnisation à hauteur de 50 % des préjudices subis par Mme B....
Sur les préjudices :
4. L'expert désigné par le président du tribunal administratif d'Amiens a fixé la date de consolidation de l'état de santé de Mme B... au 31 décembre 2013.
En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux :
S'agissant de l'assistance par tierce personne
5. Lorsque, au nombre des conséquences dommageables d'un accident engageant la responsabilité d'une personne publique, figure la nécessité pour la victime de recourir à l'assistance d'une tierce personne à domicile pour les actes de la vie courante, la circonstance que cette assistance serait assurée par un membre de sa famille est, par elle-même, sans incidence sur le droit de la victime à en être indemnisée.
6. Il résulte du rapport d'expertise que l'état de santé de Mme B... a nécessité l'assistance d'une tierce personne à raison d'une heure par jour du 16 mai 2013 au 25 juin 2013, soit durant quarante-et-un jours, puis à raison de trois heures par semaine du 26 juin 2013 au 12 juillet 2013, soit durant dix-sept jours. En tenant compte de la valeur moyenne du salaire minimum interprofessionnel de croissance sur la période considérée, augmentée des charges sociales incombant à l'employeur, du coût des congés payés et de la majoration pour dimanche et jours fériés, il sera fait une juste appréciation du préjudice qui a résulté pour Mme B... du besoin d'une aide non spécialisée par une tierce personne en l'indemnisant selon un taux horaire de 13 euros. Il y a, dès lors, lieu de porter la somme de 500 euros allouée par le tribunal administratif d'Amiens avant application du coefficient de partage de responsabilité, à la somme de 627,71 euros, ramenée à 313,85 euros après application de ce coefficient.
En ce qui concerne les préjudices extrapatrimoniaux :
S'agissant du déficit fonctionnel temporaire
7. Il résulte du rapport d'expertise que Mme B... a subi un déficit fonctionnel temporaire total du 6 mai 2013 au 15 mai 2013, soit dix jours, puis partiel à hauteur de 50 % du 16 mai 2013 au 25 juin 2013, soit quarante-et-un jours, puis à hauteur de 25 % du 26 juin 2013 au 12 juillet 2013, soit dix-sept jours, enfin, à hauteur de 10 % du 13 juillet 2013 au 31 décembre 2013, date de consolidation de son état de santé correspondant à un montant total de 674,05 euros, ramené à 337,02 euros après application du partage de responsabilité retenu précédemment. Mme B... n'est par suite pas fondée à se plaindre de ce que les premiers juges lui ont alloué à ce titre, après application de ce partage, la somme de 430 euros.
S'agissant du déficit fonctionnel permanent
8. Il ressort du rapport d'expertise que Mme B... conserve, depuis la consolidation de son état de santé intervenue le 31 décembre 2013, un déficit fonctionnel permanent de 4 %. Mme B... étant âgée de soixante-sept ans à la date de consolidation de son état de santé, il sera fait une juste appréciation de ce chef de préjudice en portant l'évaluation qui en a été faite par les premiers juges à 4 000 euros. Par suite, la somme allouée par le tribunal est portée de 500 euros à 2 000 euros après application du partage de responsabilité retenu précédemment.
S'agissant des souffrances endurées
9. Les douleurs éprouvées par Mme B... ont été estimées par le rapport d'expertise à 3,5 sur une échelle de 7. Il sera fait une juste appréciation de ce chef de préjudice en portant l'évaluation qui en a été faite par le tribunal à la somme de 5 410 euros. Par suite, la somme de 250 euros allouée par les premiers juges est portée à 2 705 euros après application du partage de responsabilité retenu précédemment.
10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... est fondée à soutenir que la somme de 1 430 euros que la commune d'Orry-la-Ville a été condamné à lui verser par le jugement attaqué doit être portée à la somme de 5 448,85 euros.
En ce qui concerne les frais d'instance :
11. Aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat. Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagée entre les parties (...) ".
12. C'est à bon droit que le tribunal administratif d'Amiens a mis les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 750 euros, à la charge définitive de la commune d'Orry-la-Ville.
En ce qui concerne les frais liés au litige :
13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de Mme B..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande la commune d'Orry-la-Ville au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune d'Orry-la-Ville une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme B... et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La somme que la commune d'Orry-la-Ville a été condamnée à verser à Mme B... par l'article 1er du jugement du 18 septembre 2018 du tribunal administratif d'Amiens, est portée à 5 448,85 euros.
Article 2 : Le jugement du 18 septembre 2018 du tribunal administratif d'Amiens est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : La commune d'Orry-la-Ville versera à Mme B... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions de la commune d'Orry-la-Ville sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B..., à la commune d'Orry-la-Ville, à la mutualité sociale agricole de Picardie et à la compagnie d'assurances Groupama.
N°18DA02301 2