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04/06/2020 | FRANCE | N°18DA00527

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 04 juin 2020, 18DA00527


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Rouen de prononcer la décharge, à concurrence des sommes respectives de 813 euros, 279 euros et 588 euros, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2011, 2012 et 2013 en conséquence de la remise en cause par l'administration d'une partie des frais professionnels réels qu'il avait portés en déduction.

Par un jugement n° 1600840 du 11 janvier 2018, le tribunal administratif de Rouen a

rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Rouen de prononcer la décharge, à concurrence des sommes respectives de 813 euros, 279 euros et 588 euros, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2011, 2012 et 2013 en conséquence de la remise en cause par l'administration d'une partie des frais professionnels réels qu'il avait portés en déduction.

Par un jugement n° 1600840 du 11 janvier 2018, le tribunal administratif de Rouen a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 12 mars 2018, M. D..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge des impositions en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., domicilié à Berthenonville (Eure) au cours des années en cause, exerçait la profession de chauffeur de car scolaire. Il était employé par une entreprise de transport, dont le siège était situé à Gisors (Eure), ville distante par la route de dix-sept kilomètres de son domicile. M. D... indique que, dans le cadre de son travail, il lui incombait d'effectuer deux vacations par jour, voire trois, à savoir, le plus souvent, un trajet en car scolaire entre le dépôt de l'entreprise, situé à Gisors, et le terminus situé aux Andelys (Eure), puis de ramener son car au dépôt de Gisors. M. D..., qui précise qu'il regagnait son domicile entre deux vacations, a entendu, lors de la souscription de ses déclarations de revenus au titre des années 2011, 2012 et 2013, opter pour la déduction de ses frais professionnels réels et porter en déduction les dépenses inhérentes non seulement à un trajet aller et retour entre son domicile et son lieu de travail, mais aussi à ces trajets supplémentaires. Dans le cadre d'un contrôle sur pièces, l'administration a remis en cause ces déductions en en ramenant le montant à celui correspondant aux frais inhérents à un seul trajet aller et retour quotidien, ce qu'elle a fait connaître au contribuable par une proposition de rectification qu'elle lui a adressée le 27 novembre 2014. Ces rectifications ont été maintenues malgré les observations formulées par M. D... et les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu en résultant ont été mises en recouvrement le 30 juin 2015, en droits et pénalités. Après réclamation du contribuable et par mesure de tolérance, l'administration a admis la déduction de frais correspondant à une partie des trajets supplémentaires revendiqués par l'intéressé au titre de l'année 2012. M. D... relève appel du jugement du 11 janvier 2018 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à la décharge, à concurrence des sommes respectives de 813 euros, 279 euros et 588 euros, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2011, 2012 et 2013 en conséquence de la remise en cause par l'administration d'une partie des frais professionnels réels qu'il avait portés en déduction.

Sur l'application de la loi fiscale :

2. En vertu des dispositions de l'article 83 du code général des impôts, les frais de transport réellement exposés par les contribuables salariés pour se rendre à leur lieu de travail et en revenir doivent, en règle générale et à condition qu'ils ne soient pas couverts par des allocations spéciales, être regardés comme inhérents à leur fonction ou à leur emploi et, par suite, admis, sur demande, en déduction de leurs rémunérations brutes. La déduction de ces frais s'effectue, en principe, sur la base d'un aller et retour quotidien. Il appartient au contribuable qui soutient devoir effectuer, pour des raisons particulières inhérentes à son emploi, un ou plusieurs trajets aller et retour supplémentaires, de l'établir et de justifier avoir effectivement exposé les frais correspondants.

3. Pour démontrer que c'est pour des raisons inhérentes à son emploi qu'il a effectué les trajets aller et retour supplémentaires dont il demande la prise en compte, M. D... soutient qu'au cours des trois années d'imposition en litige, il était astreint, dans le cadre de son emploi de chauffeur de car scolaire, à des horaires atypiques résultant de ce qu'il lui incombait habituellement d'effectuer deux itinéraires quotidiens, voire trois, pour acheminer les élèves vers leur établissement scolaire et en revenir. A l'appui de cette assertion, il produit six feuilles d'horaires sur lesquelles figurent, pour chacune des journées correspondantes, à savoir pour le 20 juin 2011, les 29 et 31 octobre 2012, les 5 et 6 novembre 2012 et pour le 30 septembre 2013, le détail des parcours qu'il effectués avec le car qui lui était confié. Il ressort de ces documents qu'au cours de la première et de la dernière de ces journées, M. D... a assuré trois rotations, qui étaient, au plus, espacées de deux heures, délai qui rendait peu envisageable un trajet aller et retour pour retourner à son domicile afin d'y bénéficier d'une pause, puis pour regagner son lieu de travail en temps utile pour rejoindre son poste. En revanche, il ressort des mêmes documents qu'au cours des autres journées, M. D... a effectué deux parcours espacés d'environ sept heures, durant lesquelles il a pu disposer d'un délai suffisant pour regagner son domicile et en revenir. Le ministre de l'action et des comptes publics produit, à l'appui de son mémoire en défense, quatre autres feuilles de journée, pour les 6 avril 2011, 22 février 2013, 20 décembre 2012 et 16 octobre 2014, desquelles il ressort que M. D... a effectué, la première de ces journées, deux vacations espacées d'une pause de deux heures, au cours de la deuxième journée, également deux vacations, mais espacées d'une pause d'environ cinq heures, enfin, au cours des deux autres journées, trois vacations espacées de pauses d'environ deux heures.

4. Toutefois, ainsi que l'oppose le ministre en défense, sur les dix feuilles de journée ainsi versées à l'instruction, cinq correspondent à des journées situées dans des périodes de vacances scolaires. Ces feuilles, qui sont d'ailleurs l'ensemble de celles mentionnant la réalisation par M. D... de deux vacations espacées de sept heures de pause, ne peuvent ainsi être regardées comme représentatives des horaires et parcours habituellement assurés par l'intéressé. M. D... a également fourni à l'administration, pour chacune des trois années d'imposition en litige, une feuille de journée théorique présentant, en période scolaire, les horaires et parcours de référence pour la journée du mercredi et une autre feuille comportant, durant la même période, ces renseignements pour les quatre autres jours ouvrables de la semaine. Il résulte de ces documents que M. D... assure habituellement, le mercredi, deux services espacés d'une pause d'environ deux heures et, les autres jours ouvrables de la semaine, trois services entre lesquels prennent place deux périodes de pause d'une durée d'une heure trente à deux heures trente. Dans ces conditions, si M. D... soutient être astreint certains jours à des horaires atypiques durant lesquels il effectue deux vacations séparées d'une longue pause durant laquelle il est en mesure de regagner son domicile, il résulte de l'examen des feuilles de journées produites que ces horaires particuliers, qui se situent exclusivement durant les vacances scolaires, n'ont été assignés à M. D... que durant un nombre réduit de jours au cours de chacune des années d'imposition en litige. En revanche, en ce qui concerne l'essentiel des jours de travail qu'il a accomplis au cours de ces mêmes années, durant lesquels M. D... a assuré des vacations qui n'étaient au plus espacées que par une pause de deux heures et demi, l'intéressé n'établit pas que des circonstances particulières, autres que de pures convenances personnelles, auraient justifié qu'il effectue plus d'un trajet aller et retour quotidien entre son domicile et son lieu de travail. Par suite, dès lors qu'il n'est pas établi que les frais correspondants ont été exposés par M. D... pour des motifs inhérents à son emploi, la déduction de ces frais sur le fondement des dispositions de l'article 83 du code général des impôts a été à bon droit remise en cause par l'administration. Enfin, M. D... ne peut utilement se prévaloir de l'admission par l'administration, pour des motifs de pure tolérance, de la déduction de ses revenus imposables d'une partie de ces frais.

Sur l'interprétation de la loi fiscale par l'administration :

5. D'une part, le paragraphe n°180 de l'instruction BOI-RSA-BASE-30-50-30-20 et le paragraphe n°20 de l'instruction BOI-RSA-BASE-30-50-30-10, dans leur rédaction au 12 septembre 2012, ne comportent aucune interprétation de la loi fiscale qui soit différente de celle dont le présent arrêt fait application. M. D... n'est, par suite, pas fondé à s'en prévaloir sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales.

6. D'autre part, M. D... ne peut utilement se prévaloir, sur le fondement des mêmes dispositions, de la réponse ministérielle apportée le 24 avril 1981 à M. A..., député, précisant qu'il est recommandé à l'administration de faire preuve de compréhension dans l'appréciation du caractère probant des documents présentés par les contribuables à titre de justification de frais réels, laquelle ne comporte aucune interprétation formelle de la loi fiscale au sens des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Les conclusions qu'il présente au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D... et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

1

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N°18DA00527


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18DA00527
Date de la décision : 04/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02-03 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu. Détermination du revenu imposable.


Composition du Tribunal
Président : M. Heu
Rapporteur ?: M. Jean-François Papin
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : KPMG AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-06-04;18da00527 ?
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