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26/05/2020 | FRANCE | N°18DA02653

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre, 26 mai 2020, 18DA02653


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La communauté de communes du Val de Noye, les communes de La Faloise et de Guyencourt-sur-Noye, M. P... L..., Mme O... G..., M. B... J..., M. E... F..., M. C... H..., M. D... M... et M. Q... A... I... ont demandé au tribunal administratif d'Amiens, d'une part, d'annuler l'avis du 1er juillet 2016 par lequel la chambre régionale des comptes du Nord-Pas-de-Calais, Picardie, a constaté que les mesures de redressement prises par la communauté de communes Avre, Luce, Moreuil étaient suffisantes, a proposé au pré

fet de la Somme de mettre fin au plan de redressement engagé en 2015 e...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La communauté de communes du Val de Noye, les communes de La Faloise et de Guyencourt-sur-Noye, M. P... L..., Mme O... G..., M. B... J..., M. E... F..., M. C... H..., M. D... M... et M. Q... A... I... ont demandé au tribunal administratif d'Amiens, d'une part, d'annuler l'avis du 1er juillet 2016 par lequel la chambre régionale des comptes du Nord-Pas-de-Calais, Picardie, a constaté que les mesures de redressement prises par la communauté de communes Avre, Luce, Moreuil étaient suffisantes, a proposé au préfet de la Somme de mettre fin au plan de redressement engagé en 2015 et a invité la collectivité à prendre une décision modificative du budget primitif pour 2016, et, d'autre part, d'annuler l'arrêté du 22 décembre 2016 du préfet de la Somme portant création de la communauté de communes Avre, Luce, Noye issue de la fusion de la communauté de communes Avre, Luce, Moreuil et de la communauté de communes du Val de Noye à compter du 1er janvier 2017.

Par un jugement n° 1603866 du 26 octobre 2018, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 28 décembre 2018 et 6 janvier 2020, la communauté de communes du Val de Noye, la commune de La Faloise, la commune de Guyencourt-sur-Noye, M. L..., Mme G..., M. H..., M. M... et M. A... I... représentés par Me K... N..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté leurs conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Somme du 22 décembre 2016, ensemble cet arrêté ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat les entiers dépens ainsi qu'une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales,

- la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Julien Sorin, président-assesseur,

- les conclusions de Mme O... Leguin, rapporteur public,

- et les observations de Me N..., représentant la communauté de communes du Val de Noye et autres.

Considérant ce qui suit :

1. La communauté de communes du Val de Noye, la commune de La Faloise, la commune de Guyencourt-sur-Noye, M. L..., Mme G..., M. H..., M. M... et M. A... I... interjettent appel du jugement du 26 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Somme du 22 décembre 2016 portant création de la communauté de communes Avre, Luce, Noye.

2. Aux termes de l'article R. 811-10 du code de justice administrative : " Devant la cour administrative d'appel, l'Etat est dispensé de ministère d'avocat soit en demande, soit en défense, soit en intervention. Sauf dispositions contraires, les ministres intéressés présentent devant la cour administrative d'appel les mémoires et observations produits au nom de l'Etat (...) ". Il résulte de ces dispositions que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, le ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales est compétent pour défendre l'Etat dans le cadre de l'appel qu'ils ont dirigé contre le jugement du tribunal administratif d'Amiens du 26 octobre 2018.

3. Aux termes de l'article 35 de la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République : " /.../ III. Dès la publication du schéma départemental de coopération intercommunale prévu au II de l'article 33 de la présente loi et jusqu'au 15 juin 2016, le représentant de l'Etat dans le département définit par arrêté, pour la mise en oeuvre du schéma, la fusion d'établissements publics de coopération intercommunale dont l'un au moins est à fiscalité propre. /.../ L'arrêté portant projet de fusion dresse la liste des établissements publics de coopération intercommunale appelés à fusionner, ainsi que des communes, appartenant ou non à un autre établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, incluses dans le périmètre du nouvel établissement public. / Cet arrêté est notifié par le représentant de l'Etat dans le département aux présidents des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre intéressés afin de recueillir l'avis de l'organe délibérant et, concomitamment, au maire de chaque commune incluse dans le projet de périmètre afin de recueillir l'accord de chaque conseil municipal. A compter de la notification de l'arrêté de projet de périmètre, les organes délibérants des établissements publics de coopération intercommunale et les conseils municipaux disposent d'un délai de soixante-quinze jours pour se prononcer. A défaut de délibération dans ce délai, l'avis est réputé favorable. / La fusion est prononcée par arrêté du ou des représentants de l'Etat dans le ou les départements concernés après accord des conseils municipaux des communes incluses dans le projet de périmètre. L'accord des communes doit être exprimé par la moitié au moins des conseils municipaux des communes intéressées, représentant la moitié au moins de la population totale de celles-ci, y compris le conseil municipal de la commune dont la population est la plus nombreuse si cette dernière représente au moins le tiers de la population totale. /.../ La fusion est prononcée par arrêté du ou des représentants de l'Etat dans le ou les départements intéressés, avant le 31 décembre 2016. /.../ L'arrêté de fusion fixe également le nom, le siège et les compétences du nouvel établissement public. / Les III et V de l'article L. 5211-41-3 du même code sont applicables. Par dérogation au troisième alinéa du même III, le délai de trois mois est porté à un an pour les compétences optionnelles prévues au II de l'article L. 5214-16 du même code pour les communautés de communes et au II de l'article L. 5216-5 dudit code pour les communautés d'agglomération. /.../ ".

4. Aux termes de l'article L. 5211-41-3 du code général des collectivités territoriales dans sa rédaction applicable au litige : " /.../ III. - L'établissement public issu de la fusion relève de la catégorie de celui des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre inclus dans le projet auquel la loi a confié le plus grand nombre de compétences ou d'une catégorie disposant de compétences obligatoires en nombre supérieur, sous réserve qu'il remplisse les conditions de création de l'établissement public prévues pour celle-ci. / Les compétences transférées par les communes aux établissements publics existant avant la fusion, à titre obligatoire, sont exercées par le nouvel établissement public sur l'ensemble de son périmètre. / Sans préjudice des dispositions du II des articles L. 5214-16 et L. 5216-5, les compétences transférées à titre optionnel et celles transférées à titre supplémentaire par les communes aux établissements publics de coopération intercommunale existant avant la fusion sont exercées par le nouvel établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre sur l'ensemble de son périmètre ou, si l'organe délibérant de celui-ci le décide dans un délai de trois mois à compter de l'entrée en vigueur de l'arrêté décidant la fusion, font l'objet d'une restitution aux communes. Toutefois, ce délai est porté à deux ans lorsque cette restitution porte sur des compétences ni obligatoires, ni optionnelles. La délibération de l'organe délibérant peut prévoir que ces compétences font l'objet d'une restitution partielle. Jusqu'à cette délibération ou, au plus tard, jusqu'à l'expiration du délai précité, le nouvel établissement public exerce, dans les anciens périmètres correspondant à chacun des établissements publics de coopération intercommunale ayant fusionné, les compétences transférées à titre optionnel ou supplémentaire par les communes à chacun de ces établissements publics. /.../ Lorsque l'exercice des compétences du nouvel établissement public est subordonné à la reconnaissance de leur intérêt communautaire, cet intérêt est défini au plus tard deux ans après l'entrée en vigueur de l'arrêté prononçant la fusion. A défaut, l'établissement public exerce l'intégralité de la compétence transférée. Jusqu'à la définition de l'intérêt communautaire, celui qui était défini au sein de chacun des établissements publics de coopération intercommunale ayant fusionné est maintenu dans les anciens périmètres correspondant à chacun de ces établissements (...) ". Enfin aux termes de l'article L. 5211-6-1 du même code : " I. - Le nombre et la répartition des sièges de conseiller communautaire sont établis : / 1° Soit selon les modalités prévues aux II à VI du présent article ; / 2° Soit, dans les communautés de communes et dans les communautés d'agglomération, par accord des deux tiers au moins des conseils municipaux des communes membres représentant plus de la moitié de la population de celles-ci ou de la moitié au moins des conseils municipaux des communes membres représentant plus des deux tiers de la population de celles-ci. Cette majorité doit comprendre le conseil municipal de la commune dont la population est la plus nombreuse, lorsque celle-ci est supérieure au quart de la population des communes membres. / La répartition des sièges effectuée par l'accord prévu au présent 2° respecte les modalités suivantes : /.../ En cas de création d'un nouvel établissement public de coopération intercommunale par application des articles L. 5211-5, L. 5211-41, L. 5211-41-1 ou L. 5211-41-3, les délibérations prévues aux I, IV et VI du présent article s'effectuent en même temps que celle relative au projet de périmètre de l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre. L'acte de création ou de fusion mentionne le nombre total de sièges de l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale ainsi que celui attribué à chaque commune membre ".

Sur la légalité externe :

5. Il ressort des pièces du dossier que la procédure de fusion des établissements publics de coopération intercommunale respectivement dénommés " communauté de communes du Val de Noye " et " communauté de communes Avre, Luce, Moreuil ", a été conduite en application des dispositions précitées du III de l'article 35 de la loi du 7 août 2015, et non sur le fondement de l'article L. 5211-5 du code général des collectivités territoriales, applicable à la création des établissements publics de coopération intercommunale. Par suite, le moyen tiré par les requérants de la méconnaissance de cet article est inopérant et doit être écarté. En tout état de cause, c'est à bon droit que les premiers juges, après avoir requalifié le moyen en cause pour lui conférer son bon fondement juridique, ont écarté la méconnaissance des articles L. 5211-41-3 et L. 5211-6-1 du code général des collectivités territoriales précités, par des motifs pertinents énoncés au point 6 du jugement litigieux qu'il y a lieu d'adopter.

Sur la légalité interne :

6. En premier lieu, l'arrêté préfectoral du 22 décembre 2016 n'a pas été pris pour l'application de l'avis de la chambre régionale des comptes du Nord-Pas-de-Calais, Picardie relatif à la situation budgétaire et financière de la communauté de communes Avre, Luce, Moreuil, du 1er juillet 2016, qui ne constitue pas la base légale de cet arrêté. Par suite, le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité de cet avis ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté.

7. En deuxième lieu, aucune disposition normative ni aucun principe ne s'oppose à la fusion de deux communautés de communes dont la situation financière ne serait pas comparable. Par suite, les difficultés financières, à les supposer établies, de la communauté de communes Avre, Luce, Moreuil, ne sont en tout état de cause pas de nature à entacher d'illégalité, pour cette seule raison, l'arrêté de fusion litigieux.

8. En troisième lieu, contrairement à ce que soutiennent les requérants, la circonstance que le préfet de la Somme n'ait pas accédé à la demande d'audition adressée par le président de la communauté de communes du Val de Noye le 25 août 2015 n'est pas de nature à établir qu'il n'aurait pas exercé son pouvoir discrétionnaire lui permettant, alors-même que les conditions en étaient réunies, de ne pas adopter l'arrêté de fusion des deux communautés de communes. Le moyen tiré de l'erreur de droit de n'avoir pas exercé ce pouvoir discrétionnaire doit, par suite, et en tout état de cause, être écarté.

9. En quatrième lieu, aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 5214-1 du code général des collectivités territoriales, la communauté de communes " a pour objet d'associer des communes au sein d'un espace de solidarité, en vue de l'élaboration d'un projet commun de développement et d'aménagement de l'espace ". L'article L. 5210-1-1, applicable à l'ensemble des établissements publics de coopération intercommunale, dispose que " le schéma [départemental de coopération intercommunale] prend en compte (...) 3° L'accroissement de la solidarité financière et de la solidarité territoriale (...) ". En se bornant à soutenir, à l'appui du moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions, que " la communauté de communes du Val de Noye et la communauté de communes Avre, Luce, Moreuil n'avaient pas réellement un projet commun de développement et d'aménagement ", les requérants n'assortissent pas ledit moyen des précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé.

10. En cinquième lieu, aux termes dudit article L. 5210-1-1 : " III. Le schéma [départemental de coopération intercommunale] prend en compte (...) 2° La cohérence spatiale des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre au regard notamment du périmètre des unités urbaines au sens de l'Institut national de la statistique et des études économiques, des bassins de vie et des schémas de cohérence territoriale (...) ". D'une part, les requérants n'établissent pas qu'en adoptant l'arrêté litigieux, le préfet de la Somme aurait méconnu ces dispositions, et notamment réduit ou rendu plus difficile l'accès des citoyens aux services et commerces de première nécessité. La circonstance invoquée selon laquelle le siège de la nouvelle communauté se trouverait dans la commune de Moreuil n'est pas, à elle seule, de nature à établir une telle méconnaissance. D'autre part, contrairement à ce qu'ils soutiennent, la constitution d'une communauté de communes n'a pas pour objet la création d'une unité urbaine au sens que l'Institut national de la statistique et des études économiques donne à cette notion, à savoir " une commune ou un ensemble de communes présentant une zone de bâti continu (pas de coupure de plus de 200 mètres entre deux constructions) qui compte au moins 2 000 habitants ". Dans ces conditions, la circonstance que la nouvelle communauté ne constitue pas une telle unité est sans incidence sur la légalité de l'arrêté litigieux.

11. Enfin, le moyen tiré du détournement de pouvoir qu'aurait commis le préfet en adoptant l'arrêté litigieux, qui n'aurait eu pour autre objectif que de faire supporter à la communauté de communes du Val de Noye les difficultés financières de la communauté de communes Avre, Luce, Moreuil, n'est pas établi.

12. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Somme du 22 décembre 2016 portant création de la communauté de communes Avre, Luce, Noye. Par voie de conséquence, leurs conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la communauté de communes du Val de Noye, de la commune de La Faloise, de la commune de Guyencourt-sur-Noye, de M. L..., de Mme G..., de M. H..., de M. M... et de M. A... I... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la communauté de communes du Val de Noye, à la commune de La Faloise, à la commune de Guyencourt-sur-Noye, à M. P... L..., à Mme O... G..., à M. C... H..., à M. D... M..., à M. Q... A... I... et au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18DA02653
Date de la décision : 26/05/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

135-05-01-02 Collectivités territoriales. Coopération. Établissements publics de coopération intercommunale - Questions générales. Ententes et conférences intercommunales.


Composition du Tribunal
Président : Mme Courault
Rapporteur ?: M. Julien Sorin
Rapporteur public ?: Mme Leguin
Avocat(s) : AARPI QUENNEHEN et TOURBIER

Origine de la décision
Date de l'import : 29/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-05-26;18da02653 ?
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