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02/04/2020 | FRANCE | N°18DA00969

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre, 02 avril 2020, 18DA00969


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... D... épouse C... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision par laquelle le directeur de l'institut départemental Albert Calmette a implicitement rejeté sa demande tendant à la titularisation dans le corps des cadres socio-éducatifs adressée le 22 décembre 2014 et de lui enjoindre de procéder au calcul et au versement du supplément de rémunération relative au corps de cadre supérieur socio-éducatif ou au corps de cadre socio-éducatif, avec effet rétroactif au 12 nov

embre 1996, dans un délai de trente jours à compter du jugement à venir sous as...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... D... épouse C... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision par laquelle le directeur de l'institut départemental Albert Calmette a implicitement rejeté sa demande tendant à la titularisation dans le corps des cadres socio-éducatifs adressée le 22 décembre 2014 et de lui enjoindre de procéder au calcul et au versement du supplément de rémunération relative au corps de cadre supérieur socio-éducatif ou au corps de cadre socio-éducatif, avec effet rétroactif au 12 novembre 1996, dans un délai de trente jours à compter du jugement à venir sous astreinte de 200 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 1503260 du 15 mars 2018, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Par une requête et des mémoires en réplique, enregistrés les 15 mai 2018, 4 juin 2019 et 3 mars 2020, Mme C..., représentée par Me A... B..., demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement et la décision implicite de rejet née du silence gardé à la suite de sa demande, en date du 22 décembre 2014, tendant à l'engagement d'une procédure de titularisation dans le corps des cadres socio-éducatifs ;

2°) d'enjoindre au directeur de l'institut départemental Albert Calmette de procéder au calcul et au versement du supplément de rémunération relative au corps de cadre supérieur socio-éducatif ou au corps de cadre socio-éducatif, avec effet rétroactif au 12 novembre 1996, et au minimum de celui découlant de l'avancement d'échelon auquel elle pouvait prétendre, dans un délai de trente jours à compter de l'arrêt à venir sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

3°) de reconnaître le harcèlement moral dont elle a été victime et de reconnaître le refus de la titulariser comme une conséquence de ce harcèlement ;

4°) de condamner l'Institut départemental Albert Calmette à lui verser une somme de 20 000 euros en indemnisation du préjudice moral subi, avec intérêts au taux légal et capitalisation des intérêts ;

5°) de mettre à la charge de l'institut départemental Albert Calmette une somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

- la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 ;

- le décret n° 2007-196 du 13 février 2007 ;

- le décret n° 2007-839 du 11 mai 2007 ;

- le décret n° 2013-121 du 6 février 2013 ;

- l'arrêté du 6 juin 2013 pris en application de l'article 8 du décret n° 2013-121 du 6 février 2013 et fixant la nature des épreuves et les règles d'organisation générale des concours réservés pour l'accès au corps des cadres socio-éducatifs de la fonction publique hospitalière ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Julien Sorin, président-assesseur,

- les conclusions de Mme Anne-Marie Leguin, rapporteur public,

- et les observations de Me E... substituant Me B..., représentant Mme C..., et de Me G..., substituant Me H..., représentant l'institut départemental Albert Calmette.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C... interjette régulièrement appel du jugement du 15 mars 2018 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision née du silence gardé par le directeur de l'institut départemental Albert Calmette sur sa demande, adressée le 22 décembre 2014, tendant à l'engagement d'une procédure de recrutement dérogatoire et à la revalorisation de sa situation salariale.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la décision de refus d'engager la procédure de titularisation :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 29 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière : " Les fonctionnaires sont recrutés par voie de concours (...) ". Aux termes de l'article 24 de la loi du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique : " Par dérogation à l'article 29 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, l'accès aux corps de fonctionnaires hospitaliers dont les statuts particuliers prévoient un recrutement par la voie externe peut être ouvert par la voie de modes de recrutement réservés valorisant les acquis professionnels, dans les conditions définies par le présent chapitre et précisées par des décrets en Conseil d'Etat, pendant une durée de quatre ans à compter de la date de publication de la présente loi ". Aux termes de l'article 27 de la même loi : " L'accès à la fonction publique hospitalière prévu à l'article 24 est organisé selon : 1° Des examens professionnalisés réservés ; / 2° Des concours réservés ; / 3° Des recrutements réservés sans concours pour l'accès au premier grade des corps de catégorie C accessibles sans concours. / Ces recrutements sont fondés notamment sur la prise en compte des acquis de l'expérience professionnelle correspondant aux fonctions auxquelles destine le corps d'accueil sollicité par le candidat (...) ". Aux termes de l'article 29 de la même loi : " Les décrets en Conseil d'Etat mentionnés à l'article 24 déterminent, en fonction des besoins du service et des objectifs de la gestion prévisionnelle des effectifs, des emplois et des compétences, les corps auxquels les agents contractuels peuvent accéder et les modalités selon lesquelles sont définis, pour chaque agent candidat, le ou les corps qui lui sont accessibles. Ils fixent le mode de recrutement retenu pour l'accès à chaque corps. / L'autorité investie du pouvoir de nomination dans chaque établissement fixe le nombre de postes ouverts, dans les corps intéressés, en vue des recrutements prévus au même article 24 ". Aux termes de l'article 6 du décret du 6 février 2013 pris pour l'application du chapitre III du titre Ier de la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique : " I. - Les établissements mentionnés à l'article 2 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée procèdent chaque année à l'information des agents contractuels qu'ils emploient ou dont le contrat a pris fin depuis le 1er janvier 2011 sur les conditions fixées par les articles 25 et 26 de la loi du 12 mars 2012 susvisée pour l'accès à la fonction publique hospitalière prévu à l'article 24 de cette loi. / II. - La mise en oeuvre du dispositif prévu par la loi du 12 mars 2012 susvisée et par le présent décret fait l'objet d'un suivi régulier. Un bilan annuel est présenté, dans chaque établissement mentionné à l'article 2 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée, devant le comité technique d'établissement et, à l'échelon national, devant le Conseil supérieur de la fonction publique hospitalière ".

3. Ainsi que l'ont relevé à bon droit les premiers juges, les dispositions citées ne créent ni un droit à la titularisation, ni un droit à l'ouverture d'une procédure de recrutement au profit des agents non-titulaires qui rempliraient les conditions requises pour pouvoir présenter une candidature dans le cadre des voies de recrutement dérogatoires qu'elles instaurent. La décision par laquelle un établissement hospitalier refuse l'engagement d'une procédure à cette fin ne saurait par suite être discutée devant le juge de l'excès de pouvoir que dans la mesure où elle reposerait sur des faits matériellement inexacts, qu'elle serait entachée d'erreur de droit, d'erreur manifeste d'appréciation, ou de détournement de pouvoir.

4. En l'espèce, Mme C... soutient d'abord que les dispositions précitées de l'article 6 du décret du 6 février 2013, qui organisent les modalités d'information des agents contractuels et imposent la rédaction d'un bilan annuel, ont été méconnues. S'il est vrai qu'en se bornant à soutenir qu'une réunion relative à la mise en oeuvre du dispositif législatif en cause a été organisée avec les organisations syndicales, l'institut départemental Albert Calmette établit avoir procédé à la recherche des possibilités de mise en oeuvre du dispositif législatif de recrutement dérogatoire mais n'établit pas le respect de ces dispositions, cette circonstance est sans incidence sur la légalité de la décision litigieuse, qui rejette la demande de Mme C... d'engager une procédure de recrutement sur le fondement des dispositions précitées. Le moyen, inopérant, et auquel les premiers juges n'étaient par suite pas tenus de répondre, ne peut par suite qu'être écarté.

5. En second lieu, aux termes de l'article 8 du décret du 6 février 2013 : " I. - Les règles d'organisation générale des examens professionnalisés et des concours réservés mentionnés aux 1° et 2° de l'article 27 de la loi du 12 mars 2012 susvisée, la nature des épreuves ainsi que, le cas échéant, la liste des spécialités sont fixées par arrêté conjoint du ministre chargé de la santé et du ministre chargé de la fonction publique (...) ". Aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 6 juin 2013 pris en application de l'article 8 du décret n° 2013-121 du 6 février 2013 et fixant la nature des épreuves et les règles d'organisation générale des concours réservés pour l'accès au corps des cadres socio-éducatifs de la fonction publique hospitalière : " L'épreuve unique d'admissibilité porte sur l'examen des titres détenus par les candidats qui doivent être titulaires : 1° Des diplômes ou titres requis pour être recrutés dans les corps d'assistants socio-éducatifs, de conseillers en économie sociale et familiale, d'éducateurs techniques spécialisés, d'éducateurs de jeunes enfants ; / 2° Du diplôme d'Etat de la jeunesse, de l'éducation populaire et des sports (DEJEPS), spécialité animation socio-éducative ou culturelle, mention animation sociale. / Les candidats visés aux 1° et 2° doivent en outre être titulaires du certificat d'aptitude aux fonctions d'encadrement et de responsable d'unité d'intervention sociale institué par le décret du 25 mars 2004 susvisé ou d'une autre qualification reconnue comme équivalente par la commission instituée par l'article 8 du décret du 13 février 2007 susvisé ". Aux termes de l'article 7 de ce décret du 13 février 2007 relatif aux équivalences de diplômes requises pour se présenter aux concours d'accès aux corps et cadres d'emplois de la fonction publique : " Lorsque le recrutement par voie de concours est subordonné à la possession d'un titre de formation ou d'un diplôme spécifique portant sur une spécialité précise, les candidats présentent leur demande d'équivalence conformément au présent chapitre ". Aux termes de l'article 8 du même décret : " La demande est adressée à une commission instituée dans les conditions fixées au chapitre IV. Celle-ci procède à une comparaison des connaissances, compétences et aptitudes attestées par le ou les titres de formation, éventuellement complétés par l'expérience professionnelle du candidat au regard du titre ou diplôme requis. Seuls les titres de formation ou l'expérience professionnelle relevant du domaine d'activité de la profession à laquelle le concours donne accès peuvent être utilement pris en compte. Pour établir cette comparaison, la commission tient compte de la durée, incluant, le cas échéant, les périodes de formation pratique, du cycle d'études nécessaire pour obtenir le diplôme requis, des matières couvertes par ce cycle ainsi que du niveau initial requis pour y accéder ".

6. Il résulte de ces dispositions que, s'il n'appartient qu'à la commission instituée par l'article 8 du décret du 13 février 2007 d'apprécier l'équivalence entre les diplômes détenus par un candidat à un concours de la fonction publique et ceux conditionnant l'inscription à ce concours, les candidats doivent, si leur présentation à un concours est subordonnée à la reconnaissance d'une telle équivalence, saisir eux-mêmes, préalablement à toute démarche, ladite commission.

7. En l'espèce, d'une part, l'institut départemental Albert Calmette a pu légalement fonder la décision litigieuse sur l'absence, non contestée, de détention par Mme C... du certificat d'aptitude aux fonctions d'encadrement et de responsable d'unité d'intervention sociale et, d'autre part, observer qu'en l'absence de reconnaissance de l'équivalence entre les diplômes qu'elle détenait et ce certificat par la commission d'équivalence, qu'il appartenait à l'intéressée de saisir au préalable, elle ne justifiait pas des conditions requises à l'organisation de la procédure de recrutement spéciale instaurée par les dispositions précitées de la loi du 12 mars 2012. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté.

En ce qui concerne la décision de refus d'avancement d'échelon :

8. Ainsi que l'ont relevé à bon droit les premiers juges, les agents contractuels et les fonctionnaires titulaires ne se trouvent pas dans la même situation juridique au regard du service public, alors-même qu'ils exerceraient les mêmes fonctions. Par suite, l'administration n'est pas tenue de soumettre les uns et les autres à la même réglementation, notamment en ce qui concerne les modalités de leur rémunération et de leur avancement. En appel, Mme C... n'apporte aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à ses écritures de première instance. Il y a lieu, dans ces conditions, d'écarter le moyen tiré de l'illégalité du refus de lui accorder une évolution indiciaire comparable à celle des cadres socio-éducatifs titulaires, dont le statut est régi par le décret du 11 mai 2007 portant statut particulier du corps des cadres socio-éducatifs de la fonction publique hospitalière, par adoption des motifs pertinents retenus aux points 6 et 7 du jugement attaqué.

En ce qui concerne les moyens communs aux décisions attaquées :

9. Si Mme C... soutient que la décision implicite de rejet née du silence gardé par l'administration sur sa demande du 22 décembre 2014 est insuffisamment motivée, elle n'apporte en appel aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à la première instance. Il y a, par suite, lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges au point 3 du jugement attaqué.

10. Mme C... soutient, enfin, que la décision litigieuse n'a été adoptée que dans le but de lui nuire, ne constitue que l'une des manifestations du harcèlement moral qu'elle subit depuis plusieurs années, et est ainsi entachée de détournement de pouvoir. Toutefois, d'une part, les documents produits par Mme C... à l'appui de ses allégations sont pour l'essentiel datés de 2015, et sont donc postérieurs à la décision attaquée et, d'autre part et en tout état de cause, si ces documents, et notamment ceux antérieurs à l'année 2015, révèlent que, depuis de nombreuses années, les relations de travail au sein de l'institut départemental Albert Calmette se sont dégradées, ils ne permettent pas d'établir la réalité du harcèlement moral personnellement subi par l'intéressée, ni, partant, le détournement de pouvoir dont serait entachée la décision litigieuse.

Sur les conclusions indemnitaires :

11. Les conclusions présentées par Mme C... tendant à la condamnation de l'institut départemental Albert Calmette à lui verser une somme de 20 000 euros en indemnisation du préjudice subi sont nouvelles en appel et, par suite, irrecevables.

12. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Il y a, par suite, lieu de rejeter sa requête d'appel, ensemble les conclusions aux fins d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative dont elle est assortie. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par l'institut départemental Albert Calmette au même titre.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par l'institut départemental Albert Calmette au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F... D... épouse C... et à l'institut départemental Albert Calmette.

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N°18DA00969


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18DA00969
Date de la décision : 02/04/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-03-03-01 Fonctionnaires et agents publics. Entrée en service. Nominations. Titularisation.


Composition du Tribunal
Président : Mme Courault
Rapporteur ?: M. Julien Sorin
Rapporteur public ?: Mme Leguin
Avocat(s) : CABINET ADEKWA MARCQ EN BAROEUL

Origine de la décision
Date de l'import : 18/04/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-04-02;18da00969 ?
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