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02/04/2020 | FRANCE | N°17DA02069

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3 (quater), 02 avril 2020, 17DA02069


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile Groupement Forestier de Bayard a demandé au tribunal administratif d'Amiens de lui accorder la décharge de l'obligation de payer les sommes de 14,52 euros réclamées, au titre de l'année 2015 par titre exécutoire n° 000156 du 5 mai 2015 et au titre de l'année 2016 par titre exécutoire n° 000046 du 5 avril 2016, pour le recouvrement de sa participation annuelle aux ouvrages d'aménagement hydraulique du vignoble de Chézy-sur-Marne.

Par un jugement n° 1501933,1601438 du 29 septe

mbre 2017, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté ces demandes.

Procédure dev...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile Groupement Forestier de Bayard a demandé au tribunal administratif d'Amiens de lui accorder la décharge de l'obligation de payer les sommes de 14,52 euros réclamées, au titre de l'année 2015 par titre exécutoire n° 000156 du 5 mai 2015 et au titre de l'année 2016 par titre exécutoire n° 000046 du 5 avril 2016, pour le recouvrement de sa participation annuelle aux ouvrages d'aménagement hydraulique du vignoble de Chézy-sur-Marne.

Par un jugement n° 1501933,1601438 du 29 septembre 2017, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté ces demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 31 octobre 2017 et 28 février 2018, la société civile Groupement Forestier de Bayard, représentée par Me B... D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de la décharger des obligations de payer les sommes réclamées par les titres exécutoires émis le 5 mai 2015 et le 5 avril 2016 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Chézy-sur-Marne la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code rural et de la pêche maritime ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A... C..., première conseillère,

- et les conclusions de Mme Anne-Marie Leguin, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Pour lutter contre les inondations qui se produisent sur son territoire, notamment dans le village situé en contrebas de coteaux viticoles, la commune de Chézy-sur-Marne a élaboré un projet d'aménagement hydraulique de son vignoble situé dans le périmètre de l'appellation " Champagne ". Un arrêté du préfet de l'Aisne en date du 24 juin 2014 a déclaré d'intérêt général au sens de l'article L. 211-7 du code de l'environnement les travaux nécessaires à la réalisation de ce projet, lui-même déclaré d'utilité publique par ce même arrêté. Il comprend, outre des aménagements tels que chaussées, fossés et autres canalisations, la réalisation de bassins de rétention des eaux. Sur le secteur A, appelé " Vieilles Vignes ", dans lequel la société civile Groupement Forestier de Bayard est propriétaire de deux parcelles, une tranche de travaux prévoit la réalisation de fossés et d'un bassin A1 d'une capacité de 463 m3 retenant et décantant les eaux de ruissellement, avant leur rejet dans le cours d'eau appelé le Dolloir. Pour avoir paiement par la société civile Groupement Forestier de Bayard de sa participation au financement de ces ouvrages, la commune de Chézy-sur-Marne a émis, sous le n° 000156 le 5 mai 2015 au titre de l'année 2015, et sous le n° 000046 le 5 avril 2016 au titre de l'année 2016, deux titres exécutoires, chacun d'un montant de 14,52 euros. Cette société relève appel du jugement du 29 septembre 2017, par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à la décharge des obligations de payer procédant de ces titres exécutoires.

2. L'article L. 211-7 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable à la date des titres exécutoires en litige, dispose : " I. - Les collectivités territoriales et leurs groupements (...) sont habilités à utiliser les articles L. 151-36 à L. 151-40 du code rural et de la pêche maritime pour entreprendre l'étude, l'exécution et l'exploitation de tous travaux, actions, ouvrages ou installations présentant un caractère d'intérêt général ou d'urgence, dans le cadre du schéma d'aménagement et de gestion des eaux s'il existe, et visant : (...) 5° La défense contre les inondations et contre la mer ; (...) ". Aux termes de l'article L. 151-36 du code rural et de la pêche maritime en vigueur à la même date : " Les départements, les communes (...) peuvent prescrire ou exécuter les travaux entrant dans les catégories ci-dessous définies, lorsqu'ils présentent, du point de vue agricole ou forestier, un caractère d'intérêt général ou d'urgence (...). / Les personnes morales mentionnées au premier alinéa prennent en charge les travaux qu'elles ont prescrits ou exécutés. Elles peuvent toutefois, dans les conditions prévues à l'article L. 151-37, faire participer aux dépenses de premier établissement, d'entretien et d'exploitation des ouvrages les personnes qui ont rendu les travaux nécessaires ou qui y trouvent intérêt. (...) ". Le premier alinéa de l'article L. 151-37 du même code dispose : " Le programme des travaux à réaliser est arrêté par la ou les personnes morales concernées. Il prévoit la répartition des dépenses de premier établissement, d'exploitation et d'entretien des ouvrages entre la ou les personnes morales et les personnes mentionnées à l'article L. 151-36. Les bases générales de cette répartition sont fixées compte tenu de la mesure dans laquelle chacune a rendu les travaux nécessaires ou y trouve un intérêt. (...) ". Il résulte de ces dispositions que la commune de Chézy-sur-Marne peut légalement faire participer financièrement aux travaux d'aménagement hydraulique décidés par elle les seules personnes qui les ont rendus nécessaires, ou qui y trouvent un intérêt.

3. D'une part, il résulte de l'instruction, et notamment du dernier rapport daté du 16 janvier 2018, effectué par un expert à la demande de la société appelante en présence du maire de la commune et d'autres conseillers municipaux, que les deux parcelles, cadastrées section D n° 324 et n° 684, au titre desquelles les cotisations ont été réclamées à la société appelante, se situent au sommet d'un coteau, en amont des travaux et du bassin de rétention envisagés, qui ne pourraient en conséquence limiter d'éventuels ruissellements se produisant sur ces parcelles. Par suite, les aménagements prévus, dont l'objet est précisément de limiter le ruissellement des eaux de pluie, ne présentent aucun intérêt pour le propriétaire de ces parcelles.

4. D'autre part, il résulte également de l'instruction, et notamment du rapport précité, que les parcelles précitées sont boisées, et que, non seulement elles ne sont cause d'aucun ruissellement des eaux de pluie sur leur superficie, mais absorbent les importantes quantités d'eau, même en cas de pluviométrie importante, que dévie vers la parcelle n° 684 le chemin communal qui la borde. Par suite, le propriétaire de ces parcelles, qui ne contribuent pas au ruissellement susceptible de produire en aval des inondations, ne peut être regardé comme une personne ayant rendu les travaux nécessaires. Par ailleurs, la commune ne peut utilement faire valoir l'absence de certitude quant à l'immutabilité de l'enherbement des sols des autres parcelles constituant le secteur des " Vieilles Vignes " dès lors que les cotisations en litige ne concernent pas ces parcelles et qu'elles sont appelées au titre des années 2015 et 2016.

5. Au surplus, les aménagements relatifs au bassin A1, au titre desquels les titres exécutoires ont été émis, font partie d'une tranche conditionnelle n° 2. Or, si, par délibération du 7 mai 2015 le conseil municipal de Chézy-sur-Marne a autorisé le maire à effectuer en tout ou en partie les travaux envisagés dans cette tranche conditionnelle, il ne résulte d'aucune des pièces versées au dossier que ces travaux auraient été effectivement lancés.

6. Dans ces conditions, l'appelante ne pouvant être regardée ni comme une personne ayant intérêt aux travaux envisagés, ni comme une personne les ayant rendus nécessaires, les dispositions de l'article L. 151-36 du code rural et de la pêche maritime ne peuvent légalement fonder les titres exécutoires en litige.

7. Il résulte de ce qui précède que la société civile Groupement Forestier de Bayard est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande. Par suite, le jugement doit être annulé, ainsi que les titres exécutoires en litige, et la société civile Groupement Forestier de Bayard doit être déchargée des obligations de payer la somme de 14,52 euros résultant de chacun de ces titres exécutoires.

Sur les frais liés à l'instance :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société civile Groupement Forestier de Bayard, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la commune de Chézy-sur-Marne demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la commune de Chézy-sur-Marne une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par l'appelante et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1501933,1601438 du tribunal administratif d'Amiens du 29 septembre 2017 et les titres exécutoires n° 000156 du 5 mai 2015 et n° 000046 du 5 avril 2016 émis par l'ordonnateur de la commune de Chézy-sur-Marne sont annulés.

Article 2 : La société civile Groupement Forestier de Bayard est déchargée de l'obligation de payer, d'une part, la somme de 14,52 euros procédant du titre exécutoire n° 000156 du 5 mai 2015, d'autre part, la somme de 14,52 euros procédant du titre exécutoire n° 000046 du 5 avril 2016.

Article 3 : La commune de Chézy-sur-Marne versera à la société civile Groupement Forestier du Bayard une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de la commune de Chézy-sur-Marne tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société civile Groupement Forestier du Bayard et à la commune de Chézy-sur-Marne.

Copie sera adressée à la direction départementale des finances publiques de l'Aisne.

N°17DA02069 4


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3 (quater)
Numéro d'arrêt : 17DA02069
Date de la décision : 02/04/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

60-02-01-01 Responsabilité de la puissance publique. Responsabilité en raison des différentes activités des services publics. Service public de santé. Établissements publics d'hospitalisation.


Composition du Tribunal
Président : Mme Courault
Rapporteur ?: Mme Hélène Busidan
Rapporteur public ?: Mme Leguin
Avocat(s) : LEFEVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 18/04/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-04-02;17da02069 ?
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