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22/10/2019 | FRANCE | N°19DA01378

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre, 22 octobre 2019, 19DA01378


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... E... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 5 avril 2019 par lequel la préfète de la Seine-Maritime a ordonné son transfert aux autorités italiennes.

Par un jugement n° 1901710 du 29 mai 2019, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Rouen a fait droit à sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 13 juin 2019 et le 30 juillet 2019, le préfet de la Seine-Maritime demande

à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter les conclusions de première instance pr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... E... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 5 avril 2019 par lequel la préfète de la Seine-Maritime a ordonné son transfert aux autorités italiennes.

Par un jugement n° 1901710 du 29 mai 2019, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Rouen a fait droit à sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 13 juin 2019 et le 30 juillet 2019, le préfet de la Seine-Maritime demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter les conclusions de première instance présentées par Mme E....

Il soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier dès lors que le magistrat désigné a omis de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée en première instance ;

- la requête présentée en première instance par Mme E... est irrecevable, car présentée tardivement devant le tribunal ;

- le jugement attaqué est entaché d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation quant à l'application de la clause discrétionnaire prévue par l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;

- il est entaché d'une erreur de droit en méconnaissance de l'article L. 742-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense et un mémoire, enregistrés le 15 juillet 2019 et le 17 septembre 2019, Mme E..., représentée par Me B..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- l'arrêté en litige a été implicitement abrogé par la remise d'une demande d'attestation de demande d'asile ;

- le principe du contradictoire a été méconnu en première instance dès lors que le mémoire de la préfète de la Seine-Maritime ne lui a pas été communiqué ;

- les autres moyens soulevés en première instance par le préfet de la Seine-Maritime ne sont pas fondés.

Mme E... s'est vu maintenir le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 31 juillet 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme G... F..., présidente de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme E..., ressortissante nigériane née le 2 décembre 1989, a présenté le 3 janvier 2019 une demande d'asile auprès de la préfecture de la Seine-Maritime. La consultation du fichier " Eurodac " a révélé que l'intéressée avait été identifiée comme demandeur d'asile en Italie le 9 septembre 2014. Les autorités italiennes, saisies le 8 janvier 2019, ont, par un accord implicite du 23 janvier 2019, accepté de reprendre en charge l'intéressée. Par un arrêté du 5 avril 2019, la préfète de la Seine-Maritime a prononcé son transfert vers l'Italie. Le préfet de la Seine-Maritime interjette appel du jugement par lequel le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Rouen a annulé son arrêté.

Sur l'exception à fin de non-lieu à statuer :

2. En raison du caractère non suspensif de l'appel du jugement des tribunaux administratifs, l'acquiescement ne peut résulter que d'une manifestation de volonté de l'autorité compétente impliquant nécessairement renonciation à former un appel contre ces jugements. Un tel acquiescement ne peut résulter de la simple exécution par l'administration du jugement litigieux. Le préfet de la Seine-Maritime, qui interjette appel du jugement annulant l'arrêté en litige, ne peut être regardé comme ayant entendu donner définitivement satisfaction à Mme E... au motif qu'en exécution de l'article 2 du jugement contesté, une attestation de demande d'asile suivant la procédure normale a été délivrée à l'intéressée le 9 juillet 2019. Dès lors, Mme E... n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté du 5 avril 2019 aurait été abrogé. Par suite, les conclusions tendant à l'annulation du jugement attaqué du 29 mai 2019 n'ont pas perdu leur objet.

Sur la régularité du jugement :

3. Il ressort de l'examen du jugement attaqué que le magistrat désigné a omis de se prononcer sur l'exception soulevée en défense par le préfet de la Seine-Maritime tirée de ce la requête de première instance de Mme E... était irrecevable car présentée tardivement devant le tribunal. Ainsi, le jugement du magistrat désigné est entaché d'une irrégularité et doit être annulé.

4. Il y a lieu dans ces conditions pour la cour de statuer, par la voie de l'évocation, sur la demande présentée par Mme E... devant le tribunal administratif de Rouen.

Sur la tardiveté de la requête présentée en première instance par Mme E... :

5. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve du second alinéa de l'article L. 742-1, l'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre Etat peut faire l'objet d'un transfert vers l'Etat responsable de cet examen ". Aux termes du I de l'article L. 742-4 du même code : " L'étranger qui a fait l'objet d'une décision de transfert mentionnée à l'article L. 742-3 peut, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de cette décision, en demander l'annulation au président du tribunal administratif (...) ".

6. Il ressort des pièces du dossier que la décision attaquée qui comportait la mention des voies et délais de recours a été notifiée le 25 avril 2019 à Mme E... qui disposait alors d'un délai expirant le 10 mai 2019 à minuit. La requête présentée par l'intéressée a été enregistrée au greffe du tribunal administratif de Rouen le 11 mai 2019, soit postérieurement à l'expiration du délai de recours. Dès lors, la demande présentée par Mme E... devant le tribunal administratif était tardive, et par suite, irrecevable.

7. Il résulte de ce qui précède que les conclusions aux fins d'annulation de l'arrêté du 5 avril 2019 présentées par Mme E... doivent être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1901710 du 29 mai 2019 du magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Rouen est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme E... devant le tribunal administratif de Rouen et le surplus des conclusions de sa requête devant la cour sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à Mme A... E....

Copie sera adressée au préfet de la Seine-Maritime.

Délibéré après l'audience publique du 8 octobre 2019 à laquelle siégeaient :

- Mme G... F..., présidente de chambre,

- M. Julien Sorin, président-assesseur,

- Mme D... C..., première conseillère.

Lu en audience publique le 22 octobre 2019.

L'assesseur le plus ancien,

Signé : J. SORINLa présidente de chambre,

rapporteur

Signé : C. F...

La greffière,

Signé : M.T. LEVEQUE La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

La greffière

Marie-Thérèse Lévèque

N°19DA01378 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19DA01378
Date de la décision : 22/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

095-02-03


Composition du Tribunal
Président : Mme Courault
Rapporteur ?: Mme Christine Courault
Rapporteur public ?: Mme Leguin
Avocat(s) : CABINET DAVID BOYLE

Origine de la décision
Date de l'import : 26/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2019-10-22;19da01378 ?
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