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31/07/2019 | FRANCE | N°18DA01216

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 31 juillet 2019, 18DA01216


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... B... a demandé au tribunal administratif de Lille de condamner la commune de Fourmies à lui verser la somme de 110 000 euros en réparation des préjudices subis du fait de l'illégalité des décisions de suspension des fonctions et lui infligeant une sanction disciplinaire, et du fait du harcèlement moral dont il a été victime.

Par un jugement n° 1606545 du 10 avril 2018, le tribunal administratif de Lille a condamné la commune de Fourmies à verser à M. B... la somme de 1 000 euros, avec i

ntérêts au taux légal à compter du 2 mai 2016, les intérêts échus le 2 mai 2017 pu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... B... a demandé au tribunal administratif de Lille de condamner la commune de Fourmies à lui verser la somme de 110 000 euros en réparation des préjudices subis du fait de l'illégalité des décisions de suspension des fonctions et lui infligeant une sanction disciplinaire, et du fait du harcèlement moral dont il a été victime.

Par un jugement n° 1606545 du 10 avril 2018, le tribunal administratif de Lille a condamné la commune de Fourmies à verser à M. B... la somme de 1 000 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 2 mai 2016, les intérêts échus le 2 mai 2017 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date étant capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts, et a rejeté le surplus sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 12 juin 2018, M. B..., représenté par Me D... A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de condamner la commune de Fourmies à lui verser la somme globale de 90 000 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait du harcèlement moral dont il a été victime ;

3°) d'ordonner la capitalisation des intérêts à compter du 2 septembre 2016 ;

4°) de condamner la commune de Fourmies aux dépens ;

5°) de mettre à la charge de la commune de Fourmies la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Paul-Louis Albertini, président de chambre,

- les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public,

- les observations de Me F..., substituant Me C..., représentant la commune de Fourmies.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., technicien territorial titulaire, exerçait depuis août 2003 les fonctions de responsable du centre technique municipal de la commune de Fourmies. Par arrêté du 26 février 2015, il a été suspendu temporairement de ses fonctions. Par un jugement n° 1503601 du 10 avril 2018, le tribunal administratif a rejeté les conclusions à fin d'annulation de M. B... dirigées contre la mesure de suspension provisoire. Par arrêté du 19 juin 2015, le maire de la commune de Fourmies lui a infligé la sanction d'exclusion temporaire des fonctions d'un mois. Par un jugement n° 1506573 du 10 avril 2018, le tribunal administratif a annulé cette sanction disciplinaire comme étant disproportionnée. Par un jugement n° 1606545 du même jour, le tribunal administratif de Lille a condamné la commune de Fourmies à verser à M. B... une somme de 1 000 euros en réparation de son préjudice moral subi du fait de l'illégalité de la sanction prononcée à son encontre mais a rejeté le surplus de sa demande tendant à l'indemnisation de ses préjudices du fait de l'illégalité fautive de la mesure de suspension et du harcèlement moral. M. B... relève appel de ce dernier jugement n° 1606545 du 10 avril 2018 en tant seulement que le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande indemnitaire fondée sur les agissements constitutifs de harcèlement moral qu'il aurait subis.

2. Aux termes de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ".

3. Il appartient à un agent public, qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile. Pour être qualifiés de harcèlement moral, les agissements en cause doivent excéder les limites de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique. Dès lors qu'elle n'excède pas ces limites, une simple diminution des attributions justifiée par l'intérêt du service, en raison d'une manière de servir inadéquate ou de difficultés relationnelles, n'est pas constitutive de harcèlement moral.

4. M. B... soutient avoir été victime de harcèlement moral de la part du directeur des services techniques, son supérieur hiérarchique, à compter de l'année 2013. Il fait valoir qu'il s'est vu retirer, de manière unilatérale, une partie importante de ses attributions, et qu'il a aussi perdu, notamment, ses fonctions d'adjoint au directeur des services techniques et l'encadrement de vingt personnes. Des reproches systématiques et injustifiés lui auraient été aussi adressés. Il aurait été discriminé et évincé de certaines réunions et manifestations le concernant. En dépit de ses courriers, la commune n'aurait pris aucune mesure. Ces agissements se seraient accentués lorsqu'il est devenu secrétaire général de la Confédération française démocratique du travail (CFDT) des communaux en mai 2014, et ce, dans un contexte plus global de changement de majorité municipale, en mars 2014. Il soutient avoir fait également l'objet d'une mesure de suspension de fonctions injustifiée et d'une sanction disciplinaire. Ces agissements auraient conduit à une dégradation de ses conditions de travail et de son état de santé, deux arrêts de travail lui ayant été prescrits au cours de l'année 2014.

5. Toutefois, s'il est vrai que des ajustements sont intervenus dans certaines missions confiées à M. B..., il résulte de l'instruction et, en particulier du procès-verbal de la réunion du 26 juin 2014, que le maire de Fourmies, chargé de l'organisation de l'administration communale, a décidé de " recadrer le fonctionnement des services techniques " en vue de clarifier les tâches de chacun et d'organiser une bonne coordination entre M. B..., responsable du centre technique municipal et son supérieur hiérarchique. Il a ainsi été acté que les relations avec les entreprises sont du seul ressort du directeur des services techniques ou, en son absence, du bureau d'études, M. B... conservant les relations avec les fournisseurs du centre technique. Une note de service sur l'organisation des services techniques du 15 juillet 2014 a d'ailleurs été adressée aux agents communaux pour les en informer. Une nouvelle fiche de poste actualisée a également été soumise à M. B.... Si celui-ci fait valoir ne plus être adjoint au directeur des services techniques et ne plus assurer que l'encadrement de cinquante personnes, au lieu des soixante-dix initialement indiqués dans sa fiche de poste, la commune de Fourmies justifie cette différence par le transfert de personnels employés sous contrats aidés à la communauté de communes Actions Fourmies et Environs, qui a repris les compétences " balayage mécanique " et " insertion par le biais de brigades ". Par suite, il ne résulte pas de l'instruction que cette modification limitée des attributions de M. B..., justifiée par l'intérêt du service, aurait excédé le cadre normal du pouvoir d'organisation du service.

6. Il ne résulte pas davantage de l'instruction que les quelques griefs ou demandes d'explications adressés à M. B..., concernant notamment le fait d'avoir permis l'installation dans un supermarché, pour les 23 et 24 décembre 2014, de deux chalets appartenant à la commune, sans autorisation préalable ou encore les difficultés d'approvisionnement récurrentes des écoles en produits d'entretien, révèleraient des agissements constitutifs de harcèlement moral. Les allégations selon lesquelles il aurait été évincé de certaines réunions ou aurait été privé de certaines informations ne sont pas non plus établies par les seuls courriers électroniques émanant de M. B.... Dès lors, si les relations entre l'appelant et son supérieur hiérarchique étaient difficiles, il ne résulte pas de l'instruction que ce dernier aurait excédé les limites de l'exercice normal de son pouvoir hiérarchique.

7. S'agissant de la procédure disciplinaire dont M. B... a fait l'objet pour avoir, notamment, insulté et interpellé avec agressivité un de ses agents, en faisant une allusion appuyée et humiliante à une tentative de suicide récente de celui-ci, il résulte de l'instruction que la légalité de la décision de suspension provisoire a été confirmée par le tribunal administratif de Lille dans un jugement n° 1503601 du 10 avril 2018, dont M. B... n'a pas relevé appel. Si par un autre jugement n° 1506573 du même jour, le tribunal administratif de Lille a, en revanche, annulé la sanction d'exclusion temporaire d'un mois prononcée à l'encontre de M. B..., il ressort des motifs du jugement, devenu définitif, que le tribunal a estimé que la sanction du troisième groupe était disproportionnée compte tenu du seul grief précité, considéré comme seul établi parmi les trois avancés par la commune, et de ses états de services irréprochables. Quand bien même le conseil de discipline a estimé, dans son avis, que les éléments et témoignages produits par la commune ne permettaient pas de faire présumer l'existence d'agissements répétés de harcèlement moral de la part de M. B... sur l'un de ses subordonnés, cette circonstance n'est pas de nature à révéler que la commune aurait eu une attitude déloyale et malhonnête, lors du conseil de discipline, en l'accusant à tort d'agissements de harcèlement moral. Dans ces conditions, il ne résulte pas de l'instruction que la procédure disciplinaire engagée à l'encontre de M. B..., quand bien même la sanction a été annulée, révèlerait un agissement constitutif d'un harcèlement moral.

8. Il se s'ensuit qu'aucun des agissements invoqués par M. B... ne saurait être regardé comme constitutif d'un harcèlement moral de nature à engager la responsabilité de la commune de Fourmies.

9. Il résulte de tout de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande indemnitaire fondée sur les faits de harcèlement moral qu'il prétend avoir subis. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. M. B... ne justifiant d'aucuns dépens, ses conclusions présentées à ce titre doivent également être rejetées. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B..., la somme demandée par la commune de Fourmies au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Fourmies présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... B... et à la commune de Fourmies.

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N°18DA01216

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18DA01216
Date de la décision : 31/07/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-13-03 Fonctionnaires et agents publics. Contentieux de la fonction publique. Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Paul Louis Albertini
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : FILLIEUX - FASSEU AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 03/09/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2019-07-31;18da01216 ?
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