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09/07/2019 | FRANCE | N°17DA02362

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 09 juillet 2019, 17DA02362


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile immobilière (SCI) Bali a demandé au tribunal administratif de Rouen de prescrire le remboursement du surplus du crédit de taxe sur la valeur ajoutée qu'elle a porté sur la déclaration souscrite par elle au titre de l'année 2012 et qui ne lui a été que partiellement reversé.

Par un jugement n° 1500193 du 12 octobre 2017, le tribunal administratif de Rouen a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 13 déce

mbre 2017 et le 25 juin 2019, la SCI Bali, représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile immobilière (SCI) Bali a demandé au tribunal administratif de Rouen de prescrire le remboursement du surplus du crédit de taxe sur la valeur ajoutée qu'elle a porté sur la déclaration souscrite par elle au titre de l'année 2012 et qui ne lui a été que partiellement reversé.

Par un jugement n° 1500193 du 12 octobre 2017, le tribunal administratif de Rouen a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 13 décembre 2017 et le 25 juin 2019, la SCI Bali, représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de faire droit à sa demande de remboursement ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Jean-Michel Riou, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société civile immobilière (SCI) Bali, dont le siège est situé à Hermeville (Seine-Maritime), a pour activité la construction d'immeubles en vue de leur vente. Assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée selon le régime réel simplifié, la SCI Bali a souscrit, le 8 juillet 2011, une déclaration annuelle modèle CA 12 relative à l'année 2010 et faisant apparaître un crédit de taxe sur la valeur ajoutée à reporter de 41 103 euros. Ensuite, elle a souscrit, le 22 août 2013, les mêmes déclarations au titre des années 2011 et 2012, lesquelles faisaient respectivement apparaître, d'une part, un crédit de taxe sur la valeur ajoutée à reporter de 88 281 euros, d'autre part, un crédit de taxe sur la valeur ajoutée de 116 458 euros dont elle sollicitait le remboursement. A la suite de ces déclarations successives, la SCI Bali a toutefois été informée, par un avis daté du 4 octobre 2013, de ce qu'elle ferait l'objet d'une vérification de comptabilité, sur la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2012. A l'issue de ce contrôle, des rehaussements en matière de taxe sur la valeur ajoutée ont été envisagés et portés à sa connaissance par des propositions de rectification datées des 20 décembre 2013 et 11 juillet 2014. Ces rehaussements concernaient les périodes couvrant les années 2010, 2011 et 2012 et ont été en grande partie maintenus malgré les observations formulées par la SCI Bali. Dans ces conditions, la demande de remboursement de crédit de taxe sur la valeur ajoutée formée par la SCI Bali en ce qui concerne l'année 2012 a été accueillie, non pas pour le montant de 116 458 euros qu'elle revendiquait, mais à hauteur de la somme de 11 135 euros résultant de la rectification opérée par l'administration. Insatisfaite de cette issue, la SCI Bali a porté le litige devant le tribunal administratif de Rouen, en lui demandant de prescrire le remboursement du surplus du crédit de taxe sur la valeur ajoutée qu'elle a porté sur la déclaration souscrite par elle au titre de l'année 2012 et qui ne lui a été que partiellement reversé. Par un jugement du 12 octobre 2017, le tribunal administratif de Rouen a rejeté cette demande. La SCI Bali relève appel de ce jugement et demande qu'il soit fait droit à sa demande de remboursement.

2. Aux termes de l'article 271 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable : " I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. / 2. Le droit à déduction prend naissance lorsque la taxe déductible devient exigible chez le redevable. / (...) / 3. La déduction de la taxe ayant grevé les biens et les services est opérée par imputation sur la taxe due par le redevable au titre du mois pendant lequel le droit à déduction a pris naissance. / (...) / IV. La taxe déductible dont l'imputation n'a pu être opérée peut faire l'objet d'un remboursement dans les conditions, selon les modalités et dans les limites fixées par décret en Conseil d'Etat. / (...) ". En outre, le I de l'article 208 de l'annexe II à ce code, pris pour l'application de ce IV, dispose que : " Le montant de la taxe déductible doit être mentionné sur les déclarations déposées pour le paiement de la taxe sur la valeur ajoutée. Toutefois, à condition qu'elle fasse l'objet d'une inscription distincte, la taxe dont la déduction a été omise sur cette déclaration peut figurer sur les déclarations ultérieures déposées avant le 31 décembre de la deuxième année qui suit celle de l'omission. (...) ".

Sur la charge de la preuve :

3. La SCI Bali, qui s'est vu notifier selon la procédure de taxation d'office les rappels de taxe sur la valeur ajoutée dont procède le crédit de taxe en litige pour n'avoir souscrit ses déclarations annuelles de taxe sur la valeur ajoutée des années 2010 à 2012 qu'avec retard, supporte la charge de la preuve, en application de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales. Dans ce cadre, pour obtenir la décharge ou la réduction des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis ainsi à sa charge en conséquence de la remise en cause partielle de ce crédit de taxe, il lui appartient, en vertu de l'article R. 193 de ce code, d'en démontrer le caractère exagéré.

Sur la réalité du crédit d'impôt invoqué :

4. Ainsi qu'il a été dit au point 1, les rehaussements notifiés à la SCI Bali en matière de taxe sur la valeur ajoutée en ce qui concerne la période couvrant les années 2010, 2011 et 2012 ont eu pour conséquence que sa demande de remboursement de crédit de taxe sur la valeur ajoutée au titre de l'année 2012 n'a été accueillie qu'à hauteur de la somme de 11 135 euros. Pour démontrer qu'elle aurait eu droit à percevoir un remboursement de 116 458 euros, la SCI Bali soutient que la déductibilité de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé plusieurs opérations qu'elle a effectuées au cours des exercices clos en 2010, 2011 et 2012 aurait été remise en cause à tort par l'administration fiscale.

En ce qui concerne le bien-fondé des rectifications afférentes à la période couvrant l'année 2010 :

5. La SCI Bali a porté, dans la déclaration annuelle de taxe sur la valeur ajoutée qu'elle a souscrite au titre de la période couvrant l'année 2010, un montant de taxe déductible sur immobilisations s'élevant à 48 050 euros. A l'appui de cette déclaration, elle a fourni une facture n°37-2009, établie le 30 décembre 2009 par la société à responsabilité limité (SARL) Anjual et correspondant à des travaux effectués sur un immeuble situé au Havre pour un montant de 101 550 euros toutes taxes comprises incluant 16 641,97 euros de taxe sur la valeur ajoutée. Il est apparu, au cours du contrôle dont la SCI Bali a fait l'objet, que le compte fournisseur ouvert au nom de la SARL Anjual avait été soldé au 31 décembre 2010 par une écriture dont le libellé mentionnait le déblocage, au cours de l'année 2010, de deux emprunts intitulés " Gruchet " et " Mannev ", pour les montants respectifs de 73 700 euros et de 260 000 euros. Si la SCI Bali se prévaut de ces déblocages d'emprunt, en soulignant que ceux-ci sont nécessairement intervenus sur présentation de factures, elle ne conteste toutefois pas que ces deux emprunts avaient, en réalité, été contractés par elle afin de financer d'autres travaux, effectués sur deux terrains à bâtir dont elle était respectivement propriétaire à Gruchet-le-Valasse et à Mannevillette (Seine-Maritime). Le déblocage de ces deux emprunts n'est ainsi pas de nature à permettre à la SCI Bali de justifier du paiement effectif de la facture n°37-2009 du 30 décembre 2009, qui, ainsi qu'il a été dit, correspond à des travaux effectués au Havre. Si, au soutien de ses dernières écritures, la SCI Bali a produit plusieurs justificatifs, à savoir un relevé de compte bancaire et plusieurs factures, ces documents se rapportent toutefois exclusivement aux mouvements de fonds intervenus en exécution des emprunts intitulés " Gruchet " et " Mannev ", ainsi qu'aux travaux réalisés à Gruchet-le-Valasse et à Mannevillette, pour le financement desquels ces emprunts ont été contractés. En revanche, aucun de ces justificatifs n'est de nature à établir le paiement en 2010 de la facture n°37-2009 du 30 décembre 2009 se rapportant aux travaux effectués au Havre. Au demeurant, l'exercice par l'administration de son droit à communication auprès de la SARL Anjual n'a pas davantage permis d'établir ce paiement durant la période couvrant l'année 2010. Dans ces conditions, la SCI Bali n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, de la déductibilité de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé cette facture et que l'administration fiscale a remise en cause à bon droit.

En ce qui concerne le bien-fondé des rectifications afférentes à la période couvrant l'année 2011 :

6. Si les dispositions du I de l'article 208 de l'annexe II du code général des impôts, citées au point 2, prévoient que la taxe sur la valeur ajoutée dont la déduction a été omise sur la déclaration afférente à l'année concernée puisse valablement être portée sur une déclaration ultérieure, elles subordonnent toutefois cette faculté à la condition que cette déclaration différée soit déposée avant le 31 décembre de la deuxième année qui suit celle de l'omission, qui, selon les dispositions précitées du 2 du I de l'article 271 du code général des impôts, est aussi celle à laquelle la taxe déductible devient exigible auprès du redevable. En vertu du a bis) du 2 de l'article 269 de ce code, pour les livraisons d'immeubles à construire, la taxe est exigible lors de chaque versement des sommes correspondant aux différentes échéances prévues par le contrat en fonction de l'avancement des travaux.

7. La SCI Bali a souscrit, le 23 août 2013, une déclaration différée faisant apparaître un montant de taxe sur la valeur ajoutée déductible sur immobilisations de 98 032 euros au titre de la période couvrant l'année 2011. Pour justifier de ce montant, elle a joint à cette déclaration plusieurs factures dont certaines, émises par la SARL Anjual au cours des années 2008 et 2009 dans le cadre de l'exécution du chantier de construction d'immeuble de Gruchet-le-Valasse pour un montant total de 386 875,84 euros hors taxes et pour une taxe sur la valeur ajoutée correspondante de 75 827,66 euros, avaient été payées au cours de l'année 2009. Or, il résulte des principes rappelés au point précédent que la taxe sur la valeur ajoutée ainsi mentionnée sur ces factures était exigible et, par suite, déductible en 2009. La SCI Bali, qui n'avait pas fait état de cette taxe sur la déclaration de cette année, avait ainsi la faculté de la mentionner sur une déclaration ultérieure, à condition que celle-ci soit déposée avant le 31 décembre 2011. Ayant seulement souscrit cette déclaration le 23 août 2013, elle a pu à bon droit se voir refuser la déductibilité de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé les factures en cause et représentant un montant de 75 827,66 euros. La SCI Bali n'est, à cet égard, pas fondée à soutenir que la procédure de contrôle dont elle a fait l'objet aurait eu pour effet de lui ouvrir un nouveau délai pour déclarer la taxe sur la valeur ajoutée déductible se rapportant aux années vérifiées.

En ce qui concerne le bien-fondé des rectifications afférentes à la période couvrant l'année 2012 :

8. La SCI Bali a porté sur la déclaration annuelle qu'elle a souscrite au titre de l'année 2012 un montant total de taxe sur la valeur ajoutée déductible sur immobilisations de 34 408 euros. Toutefois, elle n'a pu justifier de la déductibilité de la taxe sur la valeur ajoutée ainsi mentionnée qu'à concurrence de 21 463 euros, le surplus, soit la somme de 12 945 euros, n'ayant été appuyé par la production d'aucune facture. La SCI Bali est demeurée défaillante à produire un tel document, tant en première instance qu'en appel. Dans ces conditions, elle n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, de la déductibilité, à concurrence de cette dernière somme, de la taxe déclarée et l'administration a pu à bon droit remettre celle-ci en cause, dans cette mesure.

En ce qui concerne le calcul du montant du crédit de taxe sur la valeur ajoutée accordé :

9. Il résulte de l'instruction et notamment des états détaillés figurant dans les écritures du ministre que le montant de 11 135 euros que l'administration a retenu comme correspondant au crédit d'impôt dont pouvait se prévaloir la SCI Bali au titre de la période couvrant l'année 2012, tient compte des montants de taxe sur la valeur ajoutée collectée portés sur les déclarations annuelles souscrites par la SCI Bali au titre des années 2010 à 2012, des montants de taxe sur la valeur ajoutée déductible sur immobilisations et sur les biens autres ou services qui ont également été mentionnés sur ces documents, moyennant les rectifications apportées à l'issue de la vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet, enfin, des acomptes de taxe sur la valeur ajoutée déjà versés. Si la SCI Bali soutient qu'elle aurait dû prétendre, même après confirmation des rectifications qui lui ont été notifiées, à un crédit de taxe sur la valeur ajoutée de 27 227 euros, elle n'assortit pas cette prétention de précisions suffisantes pour permettre à la cour d'en apprécier le bien-fondé.

10. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'action et des comptes publics, que la SCI Bali n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 12 octobre 2017, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Les conclusions qu'elle présente au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SCI Bali est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Bali et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

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2

N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 17DA02362
Date de la décision : 09/07/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06-02 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée.


Composition du Tribunal
Président : M. Lavail Dellaporta
Rapporteur ?: M. Jean-François Papin
Rapporteur public ?: M. Riou
Avocat(s) : MAZOT

Origine de la décision
Date de l'import : 24/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2019-07-09;17da02362 ?
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