Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 30 juillet 2016 par lequel le ministre de l'intérieur a prononcé son assignation à résidence sur le territoire de la commune de Roubaix jusqu'à la fin de l'état d'urgence.
Par un jugement n° 1607454 du 20 juillet 2017, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 22 décembre 2017, M.A..., représenté par Me D... C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du ministre de l'intérieur du 30 juillet 2016 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;
- le code des relations entre l'administration et le public ;
- la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- la loi n° 2015-1501 du 20 novembre 2015 ;
- la loi n° 2016-162 du 19 février 2016 ;
- la loi n° 2016-629 du 20 mai 2016 ;
- le décret n° 2015-1475 du 14 novembre 2015 ;
- le décret n° 2015-1476 du 14 novembre 2015 ;
- le décret n° 2015-1478 du 14 novembre 2015 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Julien Sorin, président-assesseur,
- et les conclusions de Mme Anne-Marie Leguin, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. A la suite d'une perquisition ordonnée à son domicile le 27 juillet 2016, M. A...a fait l'objet d'une décision du 30 juillet 2016 du ministre de l'intérieur l'assignant à résidence, prolongée par une décision du 20 décembre 2016. Le juge des référés du Conseil d'Etat a, par ordonnance du 16 novembre 2016, rejeté la demande de M. A...tendant à la suspension de la décision du 30 juillet 2016 et a, par ordonnance du 29 mars 2017, prononcé la suspension de la décision du 20 décembre 2016. M. A...interjette appel du jugement du 20 juillet 2017 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 juillet 2016 par lequel le ministre de l'intérieur a prononcé son assignation à résidence sur le territoire de la commune de Roubaix, l'a astreint à se présenter trois fois par jour au commissariat de police de Roubaix, y compris les dimanches, jours fériés ou chômés, à demeurer tous les jours de 20 heures à 6 heures dans les locaux où il réside, lui a fait interdiction de se déplacer en dehors de son lieu d'assignation sans avoir obtenu préalablement l'autorisation écrite du préfet du Nord, et lui a fait interdiction de se trouver en relation indirectement ou directement avec un ressortissant belge connu pour son prosélytisme actif.
2. En application de la loi du 3 avril 1955, l'état d'urgence a été déclaré par le décret n° 2015-1475 du 14 novembre 2015, à compter du même jour à zéro heure, sur le territoire métropolitain, prorogé pour une durée de trois mois, à compter du 26 novembre 2015, par l'article 1er de la loi du 20 novembre 2015, puis à compter du 26 février 2016 par l'article unique de la loi du 19 février 2016 et, à compter du 26 mai 2016 par l'article unique de la loi du 20 mai 2016. Aux termes de l'article 6 de la loi du 3 avril 1955, dans sa rédaction issue de la loi du 20 novembre 2015 : " Le ministre de l'intérieur peut prononcer l'assignation à résidence, dans le lieu qu'il fixe, de toute personne résidant dans la zone fixée par le décret mentionné à l'article 2 et à l'égard de laquelle il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace pour la sécurité et l'ordre publics dans les circonscriptions territoriales mentionnées au même article 2. (...) / La personne mentionnée au premier alinéa du présent article peut également être astreinte à demeurer dans le lieu d'habitation déterminé par le ministre de l'intérieur, pendant la plage horaire qu'il fixe, dans la limite de douze heures par vingt-quatre heures. / L'assignation à résidence doit permettre à ceux qui en sont l'objet de résider dans une agglomération ou à proximité immédiate d'une agglomération. (...) / L'autorité administrative devra prendre toutes dispositions pour assurer la subsistance des personnes astreintes à résidence ainsi que celle de leur famille. / Le ministre de l'intérieur peut prescrire à la personne assignée à résidence : / 1° L'obligation de se présenter périodiquement aux services de police ou aux unités de gendarmerie, selon une fréquence qu'il détermine dans la limite de trois présentations par jour, en précisant si cette obligation s'applique y compris les dimanches et jours fériés ou chômés (...) ".
3. Les dispositions de l'article 6 de la loi du 3 avril 1955 autorisent le ministre de l'intérieur, tant que l'état d'urgence demeure en vigueur, à décider, sous l'entier contrôle du juge de l'excès de pouvoir, l'assignation à résidence de toute personne résidant dans la zone couverte par l'état d'urgence, dès lors que des raisons sérieuses donnent à penser que le comportement de cette personne constitue, compte tenu du péril imminent ou de la calamité publique ayant conduit à la déclaration de l'état d'urgence, une menace pour la sécurité et l'ordre public. Tant la mesure d'assignation à résidence que sa durée, ses conditions d'application et les obligations complémentaires dont elle peut être assortie doivent être justifiées et proportionnées aux raisons ayant motivé la mesure dans ces circonstances particulières. Il appartient au juge administratif, saisi en application de l'article 14-1 de la loi du 3 avril 1955, de s'assurer que cette mesure est adaptée, nécessaire et proportionnée à la finalité qu'elle poursuit et d'apprécier, au regard des éléments débattus contradictoirement devant lui, l'existence de raisons sérieuses permettant de penser que le comportement de la personne assignée à résidence constitue une menace pour la sécurité et l'ordre public.
4. Eu égard à leur caractère provisoire, les décisions du juge des référés n'ont pas, au principal, l'autorité de chose jugée. Par suite, M. A...n'est pas fondé à soutenir que les premiers juges ont, en rejetant sa demande, méconnu l'autorité de la chose jugée par les ordonnances du juge des référés du Conseil d'Etat des 16 novembre 2016 et 29 mars 2017.
5. L'arrêté en litige vise la loi du 3 avril 1955 relative à l'état d'urgence, les décrets du 14 novembre 2015 relatifs à son application, et les lois des 15 novembre 2015, 19 février, 20 mai et 21 juillet 2016 prorogeant l'application de la loi du 3 avril 1955, et mentionne de façon particulièrement précise les faits sur lesquels il est fondé, et notamment les éléments issus des notes blanches des services de renseignement dont le ministre de l'intérieur n'était pas tenu de préciser la provenance. Dans ces conditions, l'arrêté du 30 juillet 2016 comporte l'ensemble des éléments de fait et de droit sur lesquels il est fondé. Dès lors, le moyen tiré de sa motivation insuffisante ne peut qu'être écarté.
6. Il ressort des termes de l'arrêté en litige que le ministre de l'intérieur s'est fondé, pour assigner M. A...à résidence, sur les relations qu'il a entretenues avec une personne appartenant à la mouvance salafiste lorsqu'il résidait à la Réunion, et sur celles qu'il entretient avec un ressortissant belge connu pour son prosélytisme agressif, sur le caractère radical de ses positions, sur sa haine de l'Occident et son discours hostile à l'égard de la France, et sur des données informatiques découvertes à l'occasion de la perquisition de son domicile relatives notamment à des recherches sur des objets destinés à équiper des armes. M. A...n'établit pas, en se bornant à produire une attestation émanant d'un de ses cousins, que lesdites données appartenaient en réalité à son frère, atteint d'une pathologie psychiatrique, et lui avaient été communiquées par un membre de leur famille inquiet dans le but de l'alerter. Par ailleurs, les attestations produites, et provenant de membres de sa famille ne suffisent pas, compte tenu de la précision des notes blanches produites par le ministre de l'intérieur, et sans élément complémentaire, à établir que la pratique religieuse de M. A...ne revêtirait aucune dimension de radicalité, ni qu'il n'adhérerait pas à la mouvance salafiste. En outre, s'il soutient ne fréquenter le ressortissant belge " connu pour son prosélytisme actif " qu'à la salle de sport, il avait préalablement reconnu se rendre avec lui à la mosquée, une influence dudit ressortissant ne pouvant par suite être exclue. Le ministre établit, en outre, que cet individu a été assigné à résidence en raison de leur fréquentation. Ces éléments pouvaient légitimement conduire le ministre de l'intérieur à considérer, dans l'attente des résultats de l'exploitation du matériel informatique et téléphonique saisi chez M.A..., et eu égard au contexte, marqué par la recrudescence des attentats islamistes en France, à Nice et à Saint-Étienne-du-Rouvray les 14 et 26 juillet 2016, que le comportement de celui-ci représentait une menace pour la sécurité et l'ordre public. Compte tenu de ces éléments, le ministre de l'intérieur, à qui il appartient dans le cadre de la loi du 3 avril 1955 d'assurer la préservation de la sécurité et de l'ordre public n'a pas, à la date du 30 juillet 2016, entaché la décision portant assignation à résidence d'erreur d'appréciation en estimant qu'il existait des raisons sérieuses de penser que le comportement de M. A... pouvait constituer une menace pour la sécurité et l'ordre public.
7. Si M. A...soutient que la décision en litige porte une atteinte disproportionnée à sa liberté d'aller et venir et lui interdit la poursuite de son activité professionnelle, ce moyen n'est pas assorti de précisions suffisantes pour permettre à la cour d'en apprécier le bien-fondé. Il y a donc lieu de l'écarter.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 juillet 2016 du ministre de l'intérieur. Ses conclusions présentées au titre des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A...et au ministre de l'intérieur.
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N°17DA02469