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26/06/2019 | FRANCE | N°17DA00306

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 26 juin 2019, 17DA00306


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...D...a demandé au tribunal administratif de Rouen de condamner l'Etat à lui verser la somme de 121 405 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis, résultant de l'illégalité de la décision du 5 juillet 2006 par laquelle le ministre chargé du travail a refusé d'inscrire le site de la société Yorkshire France sur la liste des établissements ouvrant droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante au titre de la période courant de 1983 à 199

6.

Par un jugement n° 1400357 du 3 janvier 2017, le tribunal administratif de R...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...D...a demandé au tribunal administratif de Rouen de condamner l'Etat à lui verser la somme de 121 405 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis, résultant de l'illégalité de la décision du 5 juillet 2006 par laquelle le ministre chargé du travail a refusé d'inscrire le site de la société Yorkshire France sur la liste des établissements ouvrant droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante au titre de la période courant de 1983 à 1996.

Par un jugement n° 1400357 du 3 janvier 2017, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 14 février 2017, M. A...D..., représenté par Me B...C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 121 405 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis, résultant de l'illégalité de la décision du 5 juillet 2006 par laquelle le ministre chargé du travail a refusé d'inscrire le site de la société Yorkshire France sur la liste des établissements ouvrant droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante au titre de la période courant de 1983 à 1996;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ;

- la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 ;

- le décret n° 99-247 du 29 mars 1999 ;

- l'arrêté du 24 septembre 2010 modifiant la liste des établissements de fabrication, flocage et calorifugeage à l'amiante susceptibles d'ouvrir droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Hervé Cassara, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. A...D..., né le 29 août 1955, employé sur le site de Oissel par la société Yorkshire jusqu'à son licenciement pour motif économique le 22 avril 2005, relève appel du jugement du 3 janvier 2017 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 121 405 euros en réparation des préjudices résultant de l'illégalité de la décision du 5 juillet 2006 par laquelle le ministre chargé du travail a refusé d'inscrire le site de la société Yorkshire France sur la liste des établissements ouvrant droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante au titre de la période courant de 1983 à 1996.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. D'une part, aux termes de l'article 41 de la loi 23 décembre 1998 de financement de la sécurité sociale pour 1999 : " I.-Une allocation de cessation anticipée d'activité est versée aux salariés et anciens salariés des établissements de fabrication de matériaux contenant de l'amiante, des établissements de flocage et de calorifugeage à l'amiante ou de construction et de réparation navales, sous réserve qu'ils cessent toute activité professionnelle, lorsqu'ils remplissent les conditions suivantes : / 1° Travailler ou avoir travaillé dans un des établissements mentionnés ci-dessus et figurant sur une liste établie par arrêté des ministres chargés du travail, de la sécurité sociale et du budget, pendant la période où y étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante. L'exercice des activités de fabrication de matériaux contenant de l'amiante, de flocage et de calorifugeage à l'amiante de l'établissement doit présenter un caractère significatif ; / 2° Avoir atteint l'âge de soixante ans diminué du tiers de la durée du travail effectué dans les établissements visés au 1°, sans que cet âge puisse être inférieur à cinquante ans ; / (...) II.-Le montant de l'allocation est calculé en fonction de la moyenne actualisée des salaires mensuels bruts des douze derniers mois d'activité salariée du bénéficiaire pour lesquels ne sont pas prises en compte dans des conditions prévues par décret, certaines périodes d'activité donnant lieu à rémunération réduite. Il est revalorisé comme les avantages alloués en application du deuxième alinéa de l'article L. 322-4 du code du travail. (...) L'allocation cesse d'être versée lorsque le bénéficiaire remplit les conditions de durée d'assurance requises pour bénéficier d'une pension de vieillesse au taux plein, à condition qu'il soit âgé d'au moins soixante ans. Par dérogation aux dispositions de l'article L. 161-17-2 du code de la sécurité sociale, elle est alors remplacée par la ou les pensions de vieillesse auxquelles l'intéressé peut prétendre. Pour l'appréciation du taux plein, les conditions de durée d'assurance sont réputées remplies au plus tard à l'âge de soixante-cinq ans. (...) / VII.-1. Un décret en Conseil d'Etat définit : (...) / -les conditions de fixation des périodes de référence mentionnées au 1° du I ; (...) / 2. Un décret fixe : / -les conditions d'octroi, les modalités de calcul et les modalités de coordination de l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante ; (...) ".

3. D'autre part, aux termes de l'article 1er du décret du 29 mars 1999 relatif à l'allocation de cessation anticipée d'activité prévue à l'article 41 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 : " La durée de travail mentionnée aux troisième et septième alinéas de l'article 41 de la loi susvisée est ainsi déterminée : / a) Durée du travail effectuée dans les établissements dont la liste est déterminée par l'arrêt prévu au 1° du premier alinéa du I de l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 susvisée pour les périodes fixées par cet arrêté ; (...) / La durée du travail mentionnée aux a, b et c est complétée, le cas échéant, par la durée du travail effectuée dans les établissements ou navires ouvrant droit à l'accès aux dispositifs de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante relevant d'un régime spécial mentionné à l'article L. 711-1 du code de la sécurité sociale, dans les conditions prévues par ces dispositifs. / Cette durée est arrondie au nombre de jours le plus proche. / Le droit à l'allocation est ouvert au premier jour du mois civil suivant la date à laquelle les conditions fixées au Ier de l'article 41 de la loi susvisée sont remplies. Toutefois, ce droit ne peut être antérieur au premier jour du mois civil suivant le dépôt de la demande ", et aux termes de l'article 2 du même décret : " Le salaire de référence servant de base à la détermination de l'allocation est fixé d'après les rémunérations visées à l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale perçues par l'intéressé au cours de ses douze derniers mois d'activité salariée sous réserve qu'elles présentent un caractère régulier et habituel. Ces rémunérations, revalorisées, le cas échéant, selon les règles définies à l'article L. 161-23-1 du code de la sécurité sociale, sont prises en compte dans la limite du double du plafond prévu à l'article L. 241-3 du même code en vigueur à la date de l'ouverture du droit à l'allocation. Le salaire de référence est égal à la moyenne mensuelle des rémunérations ainsi déterminées. / Le montant mensuel de l'allocation est égal à 65 % du salaire de référence défini à l'alinéa précédent dans la limite du plafond prévu à l'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale auxquels s'ajoutent 50 % du salaire de référence pour la part de ce salaire comprise entre une et deux fois ce même plafond. / Le montant minimal de l'allocation ne peut être inférieur au montant minimal de l'allocation d'assurance prévue à l'article L. 5422-1 du code du travail majoré de 20 %. Toutefois, le montant de l'allocation ainsi garantie ne peut excéder 85 % du salaire de référence ".

4. Pour rejeter la demande de M.D..., le tribunal administratif de Rouen s'est fondé sur le fait que M. D... n'a pas travaillé sur le site de l'usine au cours des années 1976, 1977, 1978, 1983, 1984 et 1985, pour en déduire qu'il ne remplissait pas les conditions, notamment de durée de travail, prévues par les dispositions citées aux points 2 et 3. Toutefois, nonobstant la circonstance que le récapitulatif établi le 4 novembre 2011 par sa caisse de retraite au titre du régime général de la sécurité sociale comporte, pour certaines années de sa carrière, quelques imprécisions quant à l'identité de son employeur, il résulte des pièces produites par M. D...devant la cour, en particulier de l'ensemble de ses bulletins de salaire pour les années 1976, 1977, 1978, 1983, 1984 et 1985, mais aussi du certificat de travail, déjà produit devant les premiers juges, établi par le mandataire judiciaire de la société Yorkshire le 22 avril 2005 qui " certifie que M. D...A...a été employé dans notre Société du 8 juillet 1974 au 22 avril 2005 en qualité d'agent de prévention et d'intervention ", que M. D...a travaillé sur le site de Oissel, à compter de son embauche le 8 juillet 1974 par la société Pechiney Ugine Kuhlmann qui exploitait alors le site, jusqu'à son licenciement pour motif économique, le 22 avril 2005, par la société Yorkshire France qui avait repris le site, à la suite de la société Crompton Knowles, elle-même venue aux droits de la société ICI. Dès lors, M. D... est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Rouen s'est fondé sur ce motif pour rejeter sa demande. Le jugement attaqué doit, par suite, être annulé.

5. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés devant le tribunal administratif de Rouen et devant elle.

Sur les autres moyens soulevés :

En ce qui concerne l'exception de prescription quadriennale opposée par la ministre chargée du travail devant les premiers juges :

6. Aux termes de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics : " Sont prescrites, au profit de (...), toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis ". L'article 2 de la même loi dispose que : " la prescription est interrompue par toute demande de paiement ou toute réclamation écrite adressée par un créancier à l'autorité administrative, dès lors que la demande ou la réclamation a trait au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance (...), tout recours formé devant une juridiction relatif au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance (...) " et " qu'un nouveau délai de quatre ans court à compter du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle a eu lieu l'interruption. Toutefois, si l'interruption résulte d'un recours juridictionnel, le nouveau délai court à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle la décision est passée en force de chose jugée ".

7. Devant les premiers juges, la ministre chargée du travail a fait valoir que la créance dont se prévaut M. D...est prescrite depuis le 1er janvier 2011, compte tenu du fait que la décision, dont l'illégalité constitue le fait générateur de sa demande de réparation, date du 5 juillet 2006. Il résulte toutefois de l'instruction que cette décision a fait l'objet d'un recours en annulation enregistré le 1er septembre 2006 par le greffe du tribunal administratif de Rouen, qui a eu pour effet d'interrompre le cours de la prescription, et que, par un jugement n° 0602313 du 18 février 2010 devenu définitif, le tribunal administratif de Rouen l'a annulée. Par suite, au jour de la réception de sa demande préalable indemnitaire, le 30 août 2013, la créance dont M. D...se prévaut n'était pas prescrite.

En ce qui concerne la faute :

8. Il est constant que la décision du 5 juillet 2006 par laquelle le ministre chargé du travail a refusé d'inscrire le site de la société Yorkshire France sur la liste des établissements ouvrant droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante, prévue par les dispositions de l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 citées au point 2, au titre de la période courant de 1983 à 1996, a été annulée, au motif que l'établissement peut être regardé comme pouvant être inscrit sur cette liste pour cette période, par le jugement du 18 février 2010 du tribunal administratif de Rouen précité, devenu définitif. L'illégalité de cette décision constitue une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat.

En ce qui concerne les préjudices et le lien de causalité :

S'agissant du préjudice résultant de la perte de chance d'avoir pu solliciter plus tôt l'allocation de cessation anticipée d'activité :

9. Il résulte de l'instruction, ainsi que l'a d'ailleurs relevé le tribunal administratif de Rouen dans le jugement attaqué, que la carence fautive de l'Etat mentionnée au point 8 a eu pour effet de priver M. D... de la possibilité de demander et de percevoir plus tôt l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante. Ainsi, cette faute est directement à l'origine du préjudice de M. D... résultant de la perte de chance d'avoir pu solliciter et obtenir plus tôt cette allocation, dont il est fondé à demander réparation.

10. Ainsi qu'il a été dit au point 4, M. D...a travaillé sur le site de l'usine de Oissel du 8 juillet 1974 au 22 avril 2005. Par un arrêté du 24 septembre 2010 modifiant la liste des établissements de fabrication, flocage et calorifugeage à l'amiante susceptibles d'ouvrir droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante, le ministre chargé du travail a tiré les conséquences du jugement précité du 18 février 2010 en fixant la période où étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante sur le site de l'usine de Oissel de 1919 à 1996. Il s'ensuit que M. D...doit être regardé comme ayant travaillé sur ce site pendant cette période, du 8 juillet 1974 au 31 décembre 1996, soit durant 22 ans, 5 mois et 23 jours.

11. En outre, en application du 2° du I de l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 mentionné au point 2, il y a lieu de retrancher de l'âge de soixante ans le tiers de cette durée, soit sept ans et demi. Ainsi, il résulte de l'instruction que M. D...aurait pu bénéficier du versement de l'allocation de cessation anticipée d'activité à compter de l'âge de cinquante-deux ans et demi. M. D... étant né le 29 août 1955, il a donc eu cinquante-deux ans et demi le 29 février 2008. Par suite, c'est à compter du 1er mars 2008 qu'il remplissait les conditions fixées par les dispositions citées aux points 2 et 3 pour bénéficier de cette allocation. Or, il n'a pu en demander le bénéfice qu'à compter du 1er octobre 2010 par l'effet de l'arrêté du 24 septembre 2010 précité. La perte de chance de bénéficier de cette allocation à compter du 1er mars 2008 doit dès lors être calculée sur la période comprise entre le 1er mars 2008 et le 1er octobre 2010, c'est-à-dire trente-et-un mois.

12. Pour établir le montant qu'il réclame en réparation de ce préjudice, M. D...soutient, sans être contredit par la ministre chargée du travail en défense, que le montant de l'allocation de cessation anticipée d'activité qu'il aurait perçue doit être calculé, conformément aux dispositions citées au point 3, sur la base du salaire brut de référence de 2004 qu'il percevait de la société Yorkshire France, soit un montant mensuel de 1 996 euros. Il s'ensuit que M. D... aurait pu percevoir 61 876 euros d'allocation de cessation anticipée d'activité sur la période considérée de trente-et-un mois, en l'absence de faute de l'administration. Il y a toutefois lieu de déduire de cette somme les rémunérations qu'il a effectivement perçues au titre de ses activités salariées sur cette période, auxquelles il aurait dû nécessairement renoncer s'il avait demandé le bénéfice de l'allocation de cessation anticipée d'activité. Il résulte du récapitulatif établi le 4 novembre 2011 par sa caisse de retraite au titre du régime général de la sécurité sociale que M. D... a perçu, à ce titre, pour l'année 2008, les sommes de 10 297 et 11 399 euros, soit au prorata de la période du 1er mars au 31 décembre 2008 la somme de 18 080 euros, ainsi que la somme de 18 850 euros pour l'année 2009, et au titre de l'ensemble de l'année 2010, la somme de 16 480 euros, soit au prorata pour la période du 1er janvier au 30 septembre 2010, la somme de 12 360 euros. Après déduction de ces sommes de celle de 61 876 euros, qu'il aurait pu percevoir en cas d'octroi du bénéfice de l'allocation de cessation anticipée d'activité à compter du 1er mars 2008, il y a donc lieu de condamner l'Etat à verser à M. D...la somme de 12 586 euros en réparation du préjudice qu'il a subi résultant de la perte de chance d'avoir pu solliciter et obtenir plus tôt l'allocation de cessation anticipée d'activité.

S'agissant du préjudice financier dans le calcul des droits à la retraite :

13. Si M. D...sollicite également la somme de 35 834 euros en réparation du préjudice qu'il aurait subi en matière de calcul de ses doits à la retraite, il ne résulte pas de l'instruction que ce préjudice, dont le caractère certain n'est au demeurant pas démontré par les pièces produites, présente un lien de causalité direct avec la faute mentionnée au point 8. Par suite, M. D...n'est pas fondé à demander la réparation d'un préjudice à ce titre.

S'agissant des préjudices moral et d'anxiété :

14. A l'appui de sa demande tendant à la réparation du préjudice moral qu'il aurait subi, M. D... se borne à alléguer que si la décision illégale du 5 juillet 2006 n'était pas intervenue, " cela lui aurait évité le traumatisme du dépôt de bilan et ses conséquences ". Toutefois, ainsi qu'il a été dit au point 11, ce n'est qu'à compter du 1er mars 2008 que M. D...aurait pu prétendre au bénéfice de l'allocation de cessation anticipée d'activité, alors qu'il est constant que le dépôt de bilan de la société Yorkshire est intervenu au début de l'année 2005. Ainsi, la faute mentionnée au point 8 ne présente aucun lien de causalité avec la cessation d'activité de la société Yorkshire et donc avec le préjudice moral qui en résulterait. En outre, M.D..., qui se borne à faire valoir " l'anxiété relative à son état de santé en raison de sa durée d'exposition à l'amiante, ainsi que la perte de chance de mener à son terme un carrière professionnelle normale ", sans produire aucune pièce au soutien de ses allégations, ne peut être regardé comme faisant état d'éléments personnels et circonstanciés tenant à des conditions de temps, de lieu et d'activité de nature à établir la réalité d'un préjudice d'anxiété. Par suite, M. D... n'est pas fondé à demander la réparation des préjudices moral et d'anxiété qu'il invoque.

15. Il résulte de tout ce qui précède que M. D...est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande et qu'il y a lieu, compte tenu de ce qui a été dit aux points 8 à 14, de condamner l'Etat à lui verser la somme de 12 586 euros.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

16. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à M. D...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1400357 du 3 janvier 2017 du tribunal administratif de Rouen est annulé.

Article 2 : L'Etat est condamné à verser la somme de 12 586 euros à M.D....

Article 3 : L'Etat versera à M. D...une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...D...et à la ministre du travail.

N°17DA00306 7


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17DA00306
Date de la décision : 26/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Responsabilité de la puissance publique - Réparation - Préjudice.

Santé publique - Protection générale de la santé publique - Police et réglementation sanitaire - Salubrité des immeubles - Amiante.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Hervé Cassara
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : BAUDEU ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2019-06-26;17da00306 ?
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