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13/06/2019 | FRANCE | N°19DA00354

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 13 juin 2019, 19DA00354


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 24 juillet 2018 par lequel la préfète de la Seine-Maritime a refusé de lui délivrer un certificat de résidence, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office.

Par un jugement n° 1803701 du 14 janvier 2019, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la

cour :

Par une requête enregistrée le 13 février 2019, MmeD..., représentée par Me A...B......

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 24 juillet 2018 par lequel la préfète de la Seine-Maritime a refusé de lui délivrer un certificat de résidence, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office.

Par un jugement n° 1803701 du 14 janvier 2019, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 13 février 2019, MmeD..., représentée par Me A...B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

3°) d'enjoindre à la préfète de Seine-Maritime de délivrer à Mme D...un certificat de résidence algérien " vie privée et familiale ", dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, subsidiairement, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Paul-Louis Albertini, président de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

Sur la régularité du jugement :

1. Aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : " La requête et les mémoires, ainsi que les pièces produites par les parties, sont déposés ou adressés au greffe. / La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties (...) ". Aux termes du premier alinéa de l'article R. 613-2 du même code : " Si le président de la formation de jugement n'a pas pris une ordonnance de clôture, l'instruction est close trois jours francs avant la date de l'audience indiquée dans l'avis d'audience prévu à l'article R. 711-2. Cet avis le mentionne ". Aux termes de l'article R. 613-3 de ce même code : " Les mémoires produits après la clôture de l'instruction ne donnent pas lieu à communication, sauf réouverture de l'instruction ". Aux termes de l'article R. 613-4 du même code : " Le président de la formation de jugement peut rouvrir l'instruction par une décision qui n'est pas motivée et ne peut faire l'objet d'aucun recours. Cette décision est notifiée dans les mêmes formes que l'ordonnance de clôture. / La réouverture de l'instruction peut également résulter d'un jugement ou d'une mesure d'investigation ordonnant un supplément d'instruction. / Les mémoires qui auraient été produits pendant la période comprise entre la clôture et la réouverture de l'instruction sont communiqués aux parties ".

2. Il résulte de ces dispositions que lorsqu'il décide de soumettre au contradictoire une production de l'une des parties après la clôture de l'instruction, le président de la formation de jugement doit être regardé comme ayant rouvert l'instruction. Ce n'est que lorsque le délai qui reste à courir jusqu'à la date de l'audience ne permet plus l'intervention de la clôture automatique trois jours francs avant l'audience prévue par l'article R. 613-2 du code de justice administrative mentionné ci-dessus, qu'il appartient à ce président, qui, par ailleurs, peut toujours, s'il l'estime nécessaire, fixer une nouvelle date d'audience, de clore l'instruction ainsi rouverte.

3. Si, par une ordonnance du 3 octobre 2018, le président de la formation de jugement du tribunal administratif de Rouen a clos l'instruction à la date du 12 novembre 2018, il a communiqué le mémoire en défense de la préfète de la Seine-Maritime le 23 novembre 2018 à Mme D...et doit être regardé comme ayant rouvert l'instruction avant l'audience du 21 décembre 2018. L'appelante a, ainsi, disposé d'un délai suffisant pour y répondre avant la clôture automatique de l'instruction intervenue trois jours francs avant l'audience. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement doit être écarté.

Sur la légalité de la décision de refus de titre de séjour :

4. Aux termes des stipulations de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / (...) / 5° au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédents ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs de son refus (...) ". Par ailleurs, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

5. MmeD..., ressortissante algérienne née le 23 juin 1976 à Sig (Algérie) est entrée récemment sur le territoire français le 13 décembre 2017, sous couvert d'un visa Schengen valable trente jours. Il ressort des pièces du dossier qu'elle est divorcée et qu'elle a confié en 2009 ses deux enfants à leur père, qui résidait en France, pour des raisons financières. Le fils et la fille de MmeD..., aujourd'hui majeurs, résident en France, sous couvert de certificats de résidence algérien valables dix ans, respectivement jusqu'en 2022 et 2024, de même que son petit-fils en très bas âge, né après son entrée sur le territoire français. Toutefois, elle ne justifie pas être dépourvue de toute attache familiale dans son pays d'origine, où elle a vécu jusqu'à l'âge de quarante-et-un ans et où réside l'ensemble de sa fratrie. Elle se borne à préciser qu'elle est hébergée chez sa fille, titulaire d'un titre de séjour, et son beau-fils, qui entendait la prendre en charge financièrement, ou que son fils pourrait aussi subvenir à ses besoins et ne démontre pas non plus avoir noué des liens sociaux et professionnels d'une particulière intensité sur le territoire français depuis son arrivée à la fin de l'année 2017. Dès lors, compte tenu des conditions du séjour en France et de sa durée, la décision de la préfète de la Seine-Maritime n'a pas porté à son droit au respect de la vie privée et familiale une atteinte excessive aux buts en vue desquels sa décision a été prise. Par suite, elle n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes raisons, la préfète n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de MmeD....

6. Les dispositions de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 régissent de manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle, les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés, ainsi que les conditions dans lesquelles leur conjoint et leurs enfants mineurs peuvent s'installer en France. Dès lors, les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives aux différents titres de séjour qui peuvent être délivrés aux étrangers en général et aux conditions de leur délivrance ne sont pas applicables aux ressortissants algériens. Par suite, Mme D...ne peut utilement invoquer les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui ne lui sont pas applicables.

7. Il résulte de ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que la décision lui refusant un titre de séjour est entachée d'illégalité.

Sur la légalité de la décision d'obligation de quitter le territoire français :

8. La décision attaquée énonce les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.

9. Pour les mêmes raisons que celles énoncées au point 6, Mme D...n'est pas fondée à soutenir que la préfète de la Seine-Maritime aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressée.

10. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5, la décision en litige ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de MmeD....

11. Il résulte de ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale.

12. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction assorties d'une astreinte ainsi que la demande présentée par son conseil au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE:

Article 1er : La requête de Mme D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...D..., au ministre de l'intérieur et à Me A...B....

Copie en sera transmise pour information au préfet de la Seine-Maritime.

2

N° 19DA00354


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 19DA00354
Date de la décision : 13/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-02 Étrangers. Expulsion.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Paul Louis Albertini
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : SEYREK

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2019-06-13;19da00354 ?
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