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13/06/2019 | FRANCE | N°17DA00156

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 13 juin 2019, 17DA00156


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par action simplifiée Osca Féron Peintures a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 11 juin 2015 par laquelle l'inspecteur du travail de la 10ème section de l'unité territoriale de Seine-Maritime a refusé d'autoriser le licenciement pour inaptitude de M. D...B....

Par un jugement n° 1502479 du 24 novembre 2016, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un m

moire, enregistrés le 24 janvier 2017 et le 17 janvier 2019, la société Osca Féron Peintures, ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par action simplifiée Osca Féron Peintures a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 11 juin 2015 par laquelle l'inspecteur du travail de la 10ème section de l'unité territoriale de Seine-Maritime a refusé d'autoriser le licenciement pour inaptitude de M. D...B....

Par un jugement n° 1502479 du 24 novembre 2016, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 24 janvier 2017 et le 17 janvier 2019, la société Osca Féron Peintures, représentée par Me F...A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 11 juin 2015 de l'inspecteur du travail de la 10ème section de l'unité territoriale de Seine-Maritime ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller,

- les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public,

- et les observations de Me F...A..., représentant la SAS Osca Féron Peintures.

Considérant ce qui suit :

1. M.B..., né le 10 avril 1972, a été recruté le 27 mai 2003 en tant qu'agent de fabrication sur le site du Havre de la société Osca Féron Peintures, spécialisée dans la fabrication de peintures, vernis, encres et mastics. Il exerce les mandats de membre élu de la délégation unique du personnel, depuis le 22 juin 2012, et de représentant du syndicat CGT, depuis le 6 juillet 2012. Lors de la visite de reprise de M.B..., le 23 décembre 2014, après un congé de maladie, le médecin du travail a noté : " Inapte définitivement à son poste de travail à dater de ce jour en application de la procédure " Danger immédiat " au sens de l'article R. 4624-31 (une seule visite mais peut travailler à un poste similaire dans un environnement différent. L'état de santé du salarié ne permet pas de formuler de proposition de reclassement ni d'indiquer les capacités restantes ". La société Osca Féron Peintures relève appel du jugement du 24 novembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 11 juin 2015 par laquelle l'inspecteur du travail de la 10 ème section de l'unité territoriale de Seine-Maritime a refusé d'autoriser le licenciement pour inaptitude de M.B....

2. En vertu du code du travail, les salariés protégés bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que lorsque le licenciement de l'un de ces salariés est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées par l'intéressé ou avec son appartenance syndicale. Dans le cas où la demande de licenciement est motivée par l'inaptitude physique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge, si cette inaptitude est telle qu'elle justifie le licenciement envisagé. La circonstance que l'avis du médecin du travail, auquel il incombe de se prononcer sur l'aptitude du salarié à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment ou à exercer d'autres tâches existantes, déclare le salarié protégé " inapte à tout emploi dans l'entreprise " ne dispense pas l'employeur, qui connaît les possibilités d'aménagement de l'entreprise et peut solliciter le groupe auquel, le cas échéant, celle-ci appartient, de rechercher toute possibilité de reclassement dans l'entreprise ou au sein du groupe, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations des postes de travail ou aménagement du temps de travail.

3. Aux termes de l'article L. 1226-10 du code travail, dans sa rédaction alors en vigueur, " Lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. / Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise. Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, le médecin du travail formule également des indications sur l'aptitude du salarié à bénéficier d'une formation destinée à lui proposer un poste adapté. (...) ". Aux termes de l'article L. 1226-12 de ce code, dans sa rédaction alors en vigueur : " Lorsque l'employeur est dans l'impossibilité de proposer un autre emploi au salarié, il lui fait connaître par écrit les motifs qui s'opposent au reclassement. L'employeur ne peut rompre le contrat de travail que s'il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l'article L. 1226-10, soit du refus par le salarié de l'emploi proposé dans ces conditions. S'il prononce le licenciement, l'employeur respecte la procédure applicable au licenciement pour motif personnel prévue au chapitre II du titre III ".

4. Il ressort des pièces du dossier qu'une première demande d'autorisation de licenciement, pour inaptitude a été rejetée le 26 février 2015 par l'inspecteur du travail, au double motif que l'employeur n'apportait pas la preuve de recherche d'aménagement ou de reclassement interne au sein des établissements de Petit-Quevilly, Saint-Denis et Chevilly-Larue de la société Osca Féron Peintures et d'autre part, d'une absence de respect du délai de cinq jours ouvrables prévu à l'article L. 1232-2 du code du travail entre la présentation de la convocation à l'entretien préalable et l'entretien lui-même.

5. La recherche d'un reclassement pour un salarié reconnu inapte implique pour l'employeur, qui connaît les possibilités d'aménagement de l'entreprise, de rechercher toute possibilité de reclassement en son sein, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations des postes de travail ou aménagement du temps de travail. Aucune proposition de reclassement n'a été faite à M.B.... D'une part, la seule production, par la société Osca Féron Peintures, du registre du personnel retraçant seulement les recrutements et les départs du personnel, postérieurement à la recherche de reclassement de M.B..., pour l'établissement du Havre cette société, pour son siège à Petit-Quevilly et pour ses filiales, la société Diprotex à Petit-Quevilly et la société FPB à Saint-Denis et à Chevilly-Larue, censée démontrer qu'aucun des emplois créés ne pouvait lui convenir, ne peut démontrer la réalité d'une recherche réelle de reclassement au sein du groupe Osca Féron Peintures. D'autre part, si la taille réduite de ce groupe était de nature à rendre impossible la transformation ou d'adaptation du poste de travail de M.B..., cette impossibilité devait résulter d'une recherche préalable effective et loyale. Enfin, la société Osca Féron Peintures, qui n'indique pas pourquoi aucun poste n'était disponible, soit compte tenu du niveau de formation du salarié, soit, même, avec aménagement, des préconisations du médecin du travail, ne produit aucun document de nature à établir la réalité des contacts effectifs avec ces différents établissements et sociétés en vue du reclassement de M.B.... Les seuls documents produits au dossier, y compris en cause d'appel, sont constitués par des lettres-type, envoyées à cinq entreprises géographiquement proches, ne contenant aucun élément sur la formation et la carrière de M.B..., ainsi que la nature de son inaptitude, et ne précisant même pas son âge. Par suite, le moyen tiré du caractère sérieux des efforts de reclassement de la société Osca Féron Peintures doit être écarté.

6. Si la société Osca Féron Peintures soutient qu'il n'existe aucun lien entre les mandats détenus par M. B...et le licenciement intervenu, il ne résulte pas de la décision contestée que l'inspecteur du travail se serait fondé sur ce motif pour refuser l'autorisation demandée.

7. Il résulte de tout ce qui précède que la société Osca Féron Peintures n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement en litige du 24 novembre 2016, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. En revanche, M. B...ayant été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de société Osca Féron Peintures, qui est, dans la présente instance, la partie perdante, la somme de 1 500 euros à verser à Me E...C..., conseil de M.B..., au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de sa renonciation à la part contributive de l'Etat.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Osca Féron Peintures est rejetée.

Article 2 : La société Osca Féron Peintures versera la somme de 1 500 euros à Me E...C...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, sous réserve de sa renonciation à la part contributive de l'Etat.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Osca Féron Peintures, à la ministre du travail et à Me E...C....

Copie en sera adressée, pour information, à M. D...B...et au directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Normandie.

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N°17DA00156

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17DA00156
Date de la décision : 13/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01-04 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés. Conditions de fond de l'autorisation ou du refus d'autorisation.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Jean-Jacques Gauthé
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : HUAUME LEPELLETIER ARIN PELLETIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2019-06-13;17da00156 ?
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