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09/05/2019 | FRANCE | N°18DA02645

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre - formation à 3, 09 mai 2019, 18DA02645


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 26 février 2018 par lequel la préfète de la Seine-Maritime a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1802576 du 27 novembre 2018, le tribunal administratif de Rouen a annulé cet arrêté.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistr

e le 27 décembre 2018, la préfète de la Seine-Maritime, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jug...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 26 février 2018 par lequel la préfète de la Seine-Maritime a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1802576 du 27 novembre 2018, le tribunal administratif de Rouen a annulé cet arrêté.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 27 décembre 2018, la préfète de la Seine-Maritime, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande de M.B....

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Christian Boulanger, président de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant guinéen, né le 28 juin 1999, déclare être entré en France le 25 août 2016. Il a été pris en charge par l'aide sociale à l'enfance jusqu'à sa majorité et a ensuite sollicité son admission au séjour. La préfète de la Seine-Maritime relève appel du jugement du 27 novembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Rouen a annulé son arrêté du 26 février 2018 refusant au requérant un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.

Sur le motif d'annulation retenu par le tribunal administratif de Rouen :

2. M. B... n'est présent en France que depuis dix-huit mois à la date de l'arrêté attaqué. Il est célibataire et sans enfant à charge. Il ne fait état d'aucun lien personnel en France. S'il démontre avoir fourni des efforts pour s'insérer professionnellement grâce à des formations, des stages et un certain nombre de démarches effectuées dans le but d'obtenir un contrat d'apprentissage, qu'il a finalement conclu mais postérieurement à l'arrêté attaqué, il ne justifie pas avoir noué des liens sociaux et professionnels d'une particulière intensité en France. Il n'établit pas être dépourvu d'attaches en Guinée où il a vécu au moins jusqu'à l'âge de dix-sept ans et où réside encore son père. Dès lors, compte tenu des conditions et de la durée du séjour en France de l'intéressé et en dépit de ses efforts d'intégration, la préfète de la Seine-Maritime, en lui refusant un titre de séjour, n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle. Par suite, la préfète est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Rouen a retenu ce moyen pour annuler son arrêté du 26 février 2018.

3. Il appartient toutefois à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. B... devant la juridiction administrative.

Sur le moyen commun à toutes les décisions :

4. Par un arrêté du 27 octobre 2017, régulièrement publié, M. Yvan Cordier, secrétaire général de la préfecture de la Seine-Maritime, a reçu délégation à l'effet de signer tous arrêtés, décisions, circulaires, rapports, correspondances et documents relevant des attributions de l'Etat dans le département, à l'exclusion de certaines mesures limitativement énumérées. Au nombre de ces exceptions, ne figurent pas les actes et décisions concernant le séjour et l'éloignement des étrangers. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision attaquée manque en fait et doit être écarté.

Sur les moyens propres à la décision portant refus de titre de séjour :

5. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 2, les moyens tirés, d'une part, de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et, d'autre part, de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés.

6. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision lui refusant un titre de séjour est entachée d'illégalité.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

7. Compte-tenu de ce qui a été dit au point 6, le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité du refus de titre de séjour doit être écarté.

8. Aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / (...) / 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; / (...) ". Aux termes de l'article R. 511-1 du même code : " L'état de santé défini au 10° de l'article L. 511-4 est constaté au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / (...) ".

9. Dès lors qu'elle dispose d'éléments d'informations suffisamment précis permettant d'établir qu'un étranger, résidant habituellement en France, présente un état de santé susceptible de le faire entrer dans la catégorie qu'elle prévoit des étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire, l'autorité préfectorale doit, lorsqu'elle envisage de prendre une telle mesure à son égard, et alors même que l'intéressé n'a pas sollicité le bénéfice d'une prise en charge médicale en France, recueillir préalablement l'avis de l'Office français de l'immigration et de l'intégration.

10. Il ressort des pièces du dossier que M. B... est suivi régulièrement par le centre médico-psychologique Marie Duboccage depuis le 11 octobre 2017 et qu'il bénéficie d'un traitement composé d'un somnifère, d'un antidépresseur et d'un neuroleptique. Il a déposé auprès de la préfecture une demande de titre de séjour en qualité d'étranger malade en septembre 2017. Cependant, dès le 2 novembre 2017, il a retiré cette demande indiquant que le dernier contrôle médical était " très rassurant ". En outre, les certificats médicaux versés aux débats sont peu circonstanciés et ne sont pas de nature à établir que l'état de santé de l'intéressé nécessite une prise en charge dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il ne pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Dans ces conditions, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la préfète de la Seine-Maritime disposait, à la date de la décision contestée, d'éléments d'information précis lui permettant d'établir que son état de santé était susceptible de le faire entrer dans la catégorie des étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire. Par suite, le moyen tiré du défaut de saisine du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration doit être écarté. Pour les mêmes raisons, le moyen tiré de la méconnaissance du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit également être écarté.

11. Pour les motifs mentionnés au point 2, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la préfète de la Seine-Maritime aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier qu'elle aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé.

12. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire est entachée d'illégalité.

Sur la décision fixant le pays de destination :

13. Compte-tenu de ce qui a été dit au point 12, le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté.

14. Les motivations en fait de la décision fixant le pays de destination et de la décision portant obligation de quitter le territoire français ne se confondent pas nécessairement. En revanche, la motivation en droit de ces deux décisions est identique et résulte des termes mêmes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. L'arrêté attaqué précise la nationalité de M. B... et énonce notamment que rien ne permet de considérer que la décision porterait une atteinte disproportionnée aux dispositions de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Ainsi, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision contestée fixant le pays de destination de l'éloignement doit être écarté.

15. M. B... soutient être menacé en cas de retour en Guinée en raison de sa conversion au christianisme. Il ne justifie toutefois pas de la réalité de sa démarche de conversion. Il n'apporte en outre aucun élément probant de nature à établir la réalité des risques personnels encourus en cas de retour en Guinée, alors, au demeurant, qu'il n'a pas déposé de demande d'asile. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés.

16. Il résulte de tout ce qui précède que la préfète de la Seine-Maritime est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a annulé son arrêté du 26 février 2018.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 27 novembre 2018 du tribunal administratif de Rouen est annulé.

Article 2 : La demande de M. B...est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. A...B....

Copie en sera transmise pour information au préfet de la Seine-Maritime.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18DA02645
Date de la décision : 09/05/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Boulanger
Rapporteur ?: M. Christian Boulanger
Rapporteur public ?: Mme Fort-Besnard

Origine de la décision
Date de l'import : 21/05/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2019-05-09;18da02645 ?
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