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23/04/2019 | FRANCE | N°18DA01959-18DA01960

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4e chambre - formation à 3, 23 avril 2019, 18DA01959-18DA01960


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler, pour excès de pouvoir, d'une part la décision du 20 juin 2017 par laquelle le préfet du Nord a refusé de délivrer l'autorisation de travail sollicitée dans son intérêt et de faire injonction, sous astreinte, à cette autorité de lui délivrer cette autorisation, à défaut, de procéder à un nouvel examen de sa situation et d'autre part l'arrêté du 27 septembre 2017 du même préfet qui a refusé de lui délivrer une carte de séjour te

mporaire portant la mention " salarié ", lui a fait obligation de quitter le territoi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler, pour excès de pouvoir, d'une part la décision du 20 juin 2017 par laquelle le préfet du Nord a refusé de délivrer l'autorisation de travail sollicitée dans son intérêt et de faire injonction, sous astreinte, à cette autorité de lui délivrer cette autorisation, à défaut, de procéder à un nouvel examen de sa situation et d'autre part l'arrêté du 27 septembre 2017 du même préfet qui a refusé de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office .

Par deux jugements, n° 1707804 du 14 juin 2018 et n° 1709456 du 21 juin 2018, le tribunal administratif de Lille a rejeté respectivement ces deux demandes.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête, enregistrée le 25 septembre 2018, M.A..., représenté par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Lille du 14 juin 2018 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du préfet du Nord du 20 juin 2017 portant refus d'autorisation de travail ;

3°) d'enjoindre au préfet du Nord, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de quinze jours à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, de lui délivrer une autorisation de travail, à défaut, de procéder à un nouvel examen de la demande d'autorisation de travail formée dans son intérêt ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

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II. Par une requête, enregistrée le 25 septembre 2018, M.A..., représenté par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Lille du 21 juin 2018 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet du Nord du 27 septembre 2017 portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixation du pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet du Nord, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de quinze jours à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, de lui délivrer un titre de séjour, à défaut, de procéder à un nouvel examen de sa demande de titre de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

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Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code du travail ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- l'arrêté du 28 octobre 2016 fixant la liste des pièces à fournir pour l'exercice, par un ressortissant étranger, d'une activité professionnelle salariée ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes enregistrées sous les numéros 18DA01959 et 18DA01960 concernent la situation du même ressortissant étranger et présentent à juger des questions communes. Il y a donc lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par un seul arrêt.

2. M.A..., ressortissant de la République de Guinée né le 13 juillet 1971, serait, selon ses déclarations, entré le 23 novembre 2009 sur le territoire français. Sa demande d'asile ayant été rejetée par une décision définitive, M. A...s'est maintenu en France et a sollicité la régularisation de sa situation administrative en faisant état du pacte civil de solidarité qu'il avait conclu le 4 août 2014 avec une ressortissante française. Il s'est alors vu délivrer, le 13 avril 2016, une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " l'autorisant à travailler et valable jusqu'au 12 avril 2017. Cependant, la partenaire de M. A...ayant demandé la dissolution de leur pacte civil de solidarité, l'intéressé a sollicité du préfet du Nord un changement de statut afin de pouvoir bénéficier de la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ". Cette autorité lui a alors délivré un récépissé de demande de titre de séjour, valable du 13 avril 2017 au 12 juillet 2017 et l'autorisant à travailler, ce document ayant été renouvelé jusqu'au 6 octobre 2017. Parallèlement, la société qui l'avait recruté le 2 août 2016, en tant qu'agent de sécurité mobile, et qui a conclu ensuite avec lui, le 1er mars 2017, un contrat de travail à durée indéterminée à temps complet, a présenté une demande tendant à être autorisée à continuer à employer l'intéressé. Toutefois, par une décision du 20 juin 2017, le préfet du Nord a refusé de délivrer l'autorisation de travail sollicitée dans l'intérêt de M. A.... Ensuite, par un arrêté du 27 septembre 2017, cette même autorité a refusé de délivrer un titre de séjour à ce dernier, lui a fait obligation de quitter le territoire français en lui accordant un délai de départ volontaire de trente jours et a désigné le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office. M. A...relève appel des jugements des 14 et 21 juin 2018 par lesquels le tribunal administratif de Lille a rejeté ses demandes tendant à l'annulation, pour excès de pouvoir, de cette décision et de cet arrêté.

Sur la légalité du refus d'autorisation de travail :

En ce qui concerne la légalité externe :

3. La décision du 20 juin 2017 refusant de délivrer l'autorisation de travail qui avait été sollicitée dans l'intérêt de M. A...a été signée, pour le préfet du Nord, par Mme H...I..., directrice adjointe du travail. Il ressort des pièces du dossier que Mme I...a agi dans le cadre d'une délégation de signature qui lui avait été consentie par une décision de M. J... D..., directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi des Hauts-de-France par intérim, du 13 juin 2017, publiée au numéro 2017-140 du 16 juin 2017 du recueil des actes administratifs de la préfecture. Cette délégation habilitait MmeI..., en cas d'absence ou d'empêchement de M. F...G..., directeur du travail chargé de l'intérim du responsable de l'unité départementale du Nord-Lille, laquelle situation n'est pas contestée, à l'effet de signer notamment les décisions prises sur les demandes d'autorisation de travail formées dans le but de recruter des ressortissants étrangers. M. D...bénéficiait lui-même d'une délégation de signature qui lui avait été consentie par un arrêté du préfet du Nord du 7 juin 2017 aux fins notamment de l'habiliter à signer les mêmes décisions, cet arrêté ayant été publié au numéro 2017-132 du 7 juin 2017 du recueil des actes administratifs de la préfecture. Il suit de là que le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision contestée manque en fait.

4. Il résulte de l'examen des motifs de la décision du 20 juin 2017 contestée que ceux-ci, qui ne se bornent pas à reprendre des formules préétablies, comportent l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision refusant de délivrer l'autorisation de travail qui avait été sollicitée pour M.A..., en précisant notamment que le dossier de demande fourni par l'entreprise qui souhaitait continuer à employer l'intéressé demeurait incomplet, malgré les demandes de pièces complémentaires formées par le service. Ainsi et alors même que ces motifs ne reprennent pas l'ensemble des éléments de fait caractérisant la situation de M. A...et qu'ils ne font, en particulier, pas mention de l'autorisation de travail précédemment obtenue par l'intéressé pour occuper un autre emploi, ni des formations suivies par lui, ils constituent, pour cette décision, une motivation suffisante au regard des dispositions de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration.

En ce qui concerne la légalité interne :

5. D'une part, en vertu des articles L. 5221-2 et L. 5221-5 du code du travail, un ressortissant étranger qui désire exercer en France une activité professionnelle salariée doit être en possession d'une autorisation de travail qui peut prendre la forme d'un visa apposé par l'autorité administrative compétente sur son contrat de travail. Toutefois, l'article L. 5221-6 de ce code ajoute que la délivrance d'un titre de séjour peut, par elle-même, ouvrir droit, dans certaines conditions, à l'exercice d'une activité professionnelle salariée. Pour l'application de ces dernières dispositions, l'article R. 5221-3 du même code précise que l'autorisation de travail peut notamment être constituée par la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", délivrée en application de l'article L. 313-11 de ce code ou même par le récépissé de première demande ou de demande de renouvellement d'un titre de séjour portant la mention " autorise son titulaire à travailler ".

6. D'autre part, les articles R. 5221-17 et R. 5221-21 du code du travail disposent que, lorsque l'administration est saisie d'une demande d'autorisation de travail, il appartient au préfet de se prononcer sur celle-ci en prenant notamment en compte la situation de l'emploi dans la profession et dans la zone géographique pour lesquelles la demande est formulée, compte tenu des spécificités requises pour le poste de travail considéré. Ces dispositions ajoutent que, dans le cadre de cette appréciation, le préfet tient compte des recherches déjà accomplies par l'employeur auprès des organismes concourant au service public de l'emploi pour recruter un candidat déjà présent sur le marché du travail.

7. Enfin, l'article R. 5221-11 du code du travail dispose que la demande de délivrance de l'autorisation de travail nécessaire à l'obtention de la carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " visée à l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est formée par l'employeur. L'article R. 5221-12 du code du travail précise que la liste des documents à présenter à l'appui d'une demande d'autorisation de travail est fixée par un arrêté conjoint des ministres chargés de l'immigration et du travail. En vertu de l'article 1er de cet arrêté interministériel, pris le 28 octobre 2016, l'employeur qui sollicite une autorisation de travail préalable à la délivrance, au bénéfice du ressortissant étranger concerné, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " doit joindre au formulaire de demande qu'il a renseigné un certain nombre de pièces parmi lesquelles figurent les justificatifs des recherches effectuées auprès des organismes concourant au service public de l'emploi pour recruter un candidat déjà présent sur le marché du travail. Toutefois, l'article 3 du même arrêté précise que ces justificatifs ne sont pas exigés de l'employeur qui présente une demande d'autorisation de travail au bénéfice d'un ressortissant étranger qui occupe déjà, sous couvert d'un contrat à durée déterminée, un poste similaire dans l'entreprise.

8. Il ressort des motifs de la décision du 20 juin 2017 en litige, par laquelle le préfet du Nord a refusé de délivrer à l'employeur de M. A...l'autorisation de travail qu'il avait présentée afin de pouvoir continuer à l'employer en tant qu'agent de sécurité mobile, que ce refus est exclusivement fondé sur l'irrecevabilité de la demande au motif que le dossier présenté à son soutien était incomplet. Ce motif précise en effet que cet employeur n'a, en dépit de plusieurs demandes du service instructeur, pas fourni des documents suffisants pour justifier des recherches effectuées auprès des organismes concourant au service public de l'emploi dans le but de recruter un candidat déjà présent sur le marché du travail, puisque ceux produits ne précisent pas le nombre de candidatures recueillies, ni celui des entretiens d'embauche réalisés et qu'ils n'indiquent pas les motifs pour lesquels les autres candidats n'ont pas été retenus. M. A...se prévaut des dispositions, rappelées au point précédent, de l'article 3 de l'arrêté du 28 octobre 2016, pour soutenir que de tels justificatifs ne pouvaient légalement être exigés en l'espèce, dès lors qu'il occupait déjà un poste similaire dans l'entreprise dans les effectifs de laquelle il était entré, alors qu'il était titulaire d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " et l'autorisant à travailler.

9. Toutefois, comme M. A...le précise lui-même, son recrutement a été effectué dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée, sous le couvert duquel l'intéressé avait continué à travailler depuis lors au sein de la même entreprise. Il n'entrait donc pas, à la date de la décision du 20 juin 2017 en litige, dans le champ de la dérogation de l'article 3 de l'arrêté du 28 octobre 2016 qu'il invoque. En effet, cette dérogation, qui doit s'interpréter strictement, est réservée, de sa lettre même, aux ressortissants étrangers qui occupent déjà, sous couvert d'un contrat à durée déterminée, un poste similaire dans l'entreprise. Il suit de là que le préfet du Nord a pu, sans méconnaître ces dispositions, ni celles, rappelées aux points 5 à 6, des articles L. 5221-5 et R. 5221-3 du code du travail, rejeter cette demande d'autorisation de travail au motif que les justificatifs précités n'avaient pas été produits. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que, pour refuser de délivrer cette autorisation de travail, le préfet du Nord se soit mépris dans l'appréciation de la situation de M.A....

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 14 juin 2018, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation, pour excès de pouvoir, de cette décision du 20 juin 2017 du préfet du Nord refusant la délivrance de l'autorisation de travail sollicitée dans son intérêt. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction assortie d'astreinte doivent être rejetées. Il en est de même des conclusions qu'il présente au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Sur la légalité du refus de séjour :

En ce qui concerne la légalité externe :

11. Il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges au point 2 du jugement du 21 juin 2018, d'écarter le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté du 27 septembre 2017 du préfet du Nord refusant de délivrer un titre de séjour à M.A....

12. Il résulte de l'examen des motifs de l'arrêté du 27 septembre 2017 contesté que ceux-ci, qui ne se bornent pas à constater que la demande d'autorisation de travail formée dans l'intérêt de M. A...a été rejetée, comportent l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision refusant de délivrer un titre de séjour à l'intéressé, en précisant notamment que ce dernier ne satisfait pas aux conditions requises pour se voir délivrer la carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " et que sa situation privée et familiale ne justifie pas davantage la délivrance d'une carte de séjour temporaire à ce titre. Ainsi et alors même que ces motifs ne reprennent pas l'ensemble des éléments de fait caractérisant la situation de M. A...et qu'ils ne font, en particulier, pas mention de l'autorisation de travail précédemment obtenue par l'intéressé pour occuper un autre emploi, ils constituent, pour cette décision, une motivation suffisante au regard des dispositions de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration.

En ce qui concerne la légalité interne :

13. Eu égard notamment à ce qui vient d'être dit au point précédent, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Nord ne se serait pas livré à un examen particulier et suffisamment approfondi de la situation de M. A...avant de refuser de lui délivrer un titre de séjour.

S'agissant du refus de séjour opposé au titre du travail :

14. En vertu de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, une carte de séjour temporaire, d'une durée maximale d'un an, autorisant l'exercice d'une activité professionnelle et portant la mention " salarié " peut être délivrée à l'étranger qui souhaite exercer une activité salariée sous contrat de travail à durée indéterminée, à condition qu'il y ait été préalablement autorisé.

15. Il résulte de ce qui a été dit au point 9 que le préfet du Nord a pu légalement refuser, par sa décision du 20 juin 2017, d'autoriser M. A...à poursuivre son activité salariée, au motif que son employeur n'avait pas complété son dossier de demande en dépit des courriers qui lui avaient été adressés à cette fin par le service et qu'en particulier, cette décision ne méconnaît pas les dispositions des articles L. 5221-5 et R. 5221-3 du code du travail, ni celles de l'article 3 de l'arrêté du 28 octobre 2016, prises pour leur application. Par suite, M. A...n'est pas fondé, en soulevant ces mêmes moyens, à exciper de l'illégalité de cette décision au soutien des conclusions qu'il dirige contre la décision de refus de séjour prise sur son fondement.

16. Compte-tenu de ce qui vient d'être dit au point précédent, M. A...ne remplissait pas la condition, rappelée au point 14, requise pour pouvoir prétendre à la délivrance de la carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " prévue par les dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Ce motif suffisait à justifier légalement le refus de délivrance de ce titre opposé par le préfet du Nord. Dès lors, les moyens tirés de la méconnaissance de ces dispositions et de ce que, pour refuser de délivrer ce titre à M. A..., le préfet du Nord aurait méconnu l'étendue de sa compétence doivent être écartés. Il en est de même du moyen tiré de ce que, pour opposer ce refus, cette autorité se serait méprise dans l'appréciation de la situation de l'intéressé.

S'agissant du refus de séjour opposé au titre de la vie privée et familiale :

17. Il ressort des motifs de l'arrêté du 27 septembre 2017 en litige que le préfet du Nord a examiné d'office si M.A..., qui avait seulement sollicité la délivrance de la carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", ne pouvait pas bénéficier d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ". Il peut ainsi utilement invoquer le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

18. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. (...) ".

19. M.A..., qui, ainsi qu'il a été dit au point 1, serait entré sur le territoire français le 23 novembre 2009, soutient qu'il pouvait se prévaloir, à la date à laquelle l'arrêté du 27 septembre 2017 en litige a été pris, d'un séjour de près de huit années, effectué, qui plus est, dans des conditions régulières du 13 avril 2016 au 6 octobre 2017. Toutefois, ces éléments permettent aussi de retenir que les conditions de ce séjour ont été en majeure partie irrégulières. En outre, si M. A... avait conclu, le 4 août 2014, un pacte civil de solidarité avec une ressortissante française, il est constant que cet engagement a été dissous au mois de juillet 2016, soit à une date antérieure à celle à laquelle a été pris l'arrêté du 27 septembre 2017 en litige. M. A... était ainsi, à la date de cet arrêté, célibataire et sans enfant, son mariage avec une autre ressortissante française n'ayant été célébré que le 15 septembre 2018, soit à une date postérieure à celle de l'arrêté en litige, et l'intéressé n'apportant aucun élément de nature à justifier d'une vie maritale antérieure à ce mariage. Par ailleurs, M. A...ne conteste pas avoir conservé des attaches familiales proches dans son pays d'origine, où il a habituellement vécu jusqu'à l'âge de trente-huit ans. Dans ces circonstances, ni les perspectives d'insertion professionnelle dont témoignent les formations suivies par M. A...ni l'expérience qu'il a acquise avant le refus d'autorisation de travail dont il a fait l'objet ne suffisent pas à établir, même en tenant compte de l'ancienneté et des conditions du séjour de l'intéressé en France, que la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte excessive. Par suite, cette décision n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions précitées du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dans ces conditions et malgré les perspectives d'insertion professionnelle dont il bénéficie, il n'est pas davantage établi que, pour refuser de lui délivrer un titre de séjour, le préfet du Nord aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé.

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

20. Il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges au point 2 du jugement du 21 juin 2018, d'écarter le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté du 27 septembre 2017 du préfet du Nord, en tant qu'il fait obligation à M. A...de quitter le territoire français.

21. Il résulte de ce qui a été dit aux points 11 à 19 que la décision refusant de délivrer un titre de séjour à M. A...n'est entachée d'aucune des illégalités invoquées. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision faisant obligation à l'intéressé de quitter le territoire français devrait être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision lui refusant cette délivrance ne peut qu'être écarté.

22. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 19, les moyens tirés de ce que la décision faisant obligation à M. A...de quitter le territoire français aurait été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et qu'elle serait entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé doivent être écartés.

Sur la légalité de la décision fixant le délai de départ volontaire :

23. Il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges au point 2 du jugement du 21 juin 2018, d'écarter le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté du 27 septembre 2017 du préfet du Nord accordant à M. A...un délai de départ volontaire de trente jours.

24. En vertu du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification. Toutefois, la même disposition précise qu'eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours.

25. Il ne ressort pas des pièces du dossier, ni n'est même allégué que M. A...aurait sollicité du préfet du Nord, en invoquant des circonstances particulières tirées de sa situation, l'octroi d'un délai de départ volontaire supérieur au délai de droit commun de trente jours prévu par les dispositions, rappelées au point précédent, du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour quitter volontairement le territoire français. Par suite, le préfet du Nord n'était pas tenu de préciser dans les motifs de son arrêté les raisons pour lesquelles il a estimé que ce délai était approprié à la situation de M.A.... Il suit de là que le moyen tiré de ce que l'arrêté du 27 septembre 2017, en tant qu'il décide de lui impartir un délai de départ volontaire de trente jours, serait insuffisamment motivé au regard de l'exigence posée par l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration doit être écarté. Enfin, les dispositions du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'imposent au préfet de motiver la décision relative au délai de départ volontaire que lorsqu'il refuse d'accorder un tel délai.

26. Il résulte de ce qui a été dit aux points 20 à 22 que la décision faisant obligation à M. A... de quitter le territoire français n'est entachée d'aucune des illégalités invoquées. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision impartissant à l'intéressé un délai de départ volontaire de trente jours devrait être annulée par voie de conséquence de l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté.

27. Si M. A...soutient que le délai de départ volontaire de trente jours qui lui a été imparti serait inadapté à son cas, il ne ressort d'aucune des pièces du dossier, ainsi qu'il a été dit au point 25, que l'intéressé aurait sollicité de l'autorité préfectorale l'octroi d'un délai plus long. En tout état de cause, la seule circonstance que M. A...bénéficiait d'une promesse d'embauche en vue de la conclusion d'un contrat de travail à durée indéterminée ne suffit pas à établir, compte tenu de ce qui a été dit au point 19 en ce qui concerne la situation personnelle et familiale de M.A..., que, pour estimer qu'il n'y avait pas lieu de le faire bénéficier d'un délai plus long, le préfet du Nord aurait commis une erreur manifeste d'appréciation.

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

28. L'arrêté du 27 septembre 2017 précise dans ses motifs, sous le visa de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la nationalité de M. A... et énonce que celui-ci n'établit pas être exposé à des peines ou à des traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine. Ainsi, la décision fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement prise à l'égard de M. A...doit être regardée comme suffisamment motivée.

29. Il résulte de ce qui a été dit aux points 20 à 22 que la décision faisant obligation à M. A... de quitter le territoire français n'est entachée d'aucune des illégalités invoquées. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination de cette mesure devrait être annulée par voie de conséquence de l'annulation de cette dernière ne peut qu'être écarté.

30. Il résulte de ce qui précède, aux points 11 à 29, que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 21 juin 2018, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation, pour excès de pouvoir, de l'arrêté du 27 septembre 2017 du préfet du Nord refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction assortie d'astreinte doivent être rejetées. Il en est de même des conclusions qu'il présente au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

DÉCIDE :

Article 1er : Les requêtes, enregistrées sous les numéros 18DA01959 et 18DA01960, présentées par M. A...sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A..., à Me C...E...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise au préfet du Nord.

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Nos18DA01959,18DA01960


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18DA01959-18DA01960
Date de la décision : 23/04/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.

Étrangers - Emploi des étrangers - Mesures individuelles - Titre de travail.


Composition du Tribunal
Président : M. Lavail Dellaporta
Rapporteur ?: M. Jean-François Papin
Rapporteur public ?: M. Riou
Avocat(s) : DEWAELE ; DEWAELE ; DEWAELE

Origine de la décision
Date de l'import : 07/05/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2019-04-23;18da01959.18da01960 ?
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