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28/03/2019 | FRANCE | N°19DA00103

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre - formation à 3 (bis), 28 mars 2019, 19DA00103


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 18 septembre 2018 par lequel la préfète de la Seine-Maritime a ordonné son transfert aux autorités italiennes.

Par un jugement n° 1803635 du 8 octobre 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 14 janvier 2019, M. B..., représenté par Me C..., demande à la cou

r :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

3°) d'enjoindr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 18 septembre 2018 par lequel la préfète de la Seine-Maritime a ordonné son transfert aux autorités italiennes.

Par un jugement n° 1803635 du 8 octobre 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 14 janvier 2019, M. B..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Seine-Maritime de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et d'enregistrer sa demande d'asile, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Michel Richard, président-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant ivoirien, né le 14 mai 1992, a déposé en France une demande d'asile le 17 juillet 2018. La consultation d'Eurodac a fait apparaître l'existence d'une prise d'empreintes et d'une demande d'asile en Italie. Ce pays, consulté par la France, a accepté de le reprendre en charge. Par un arrêté du 18 septembre 2018, la préfète de la Seine-Maritime a procédé au transfert de l'intéressé vers l'Italie. M. B..., relève appel du jugement du 8 octobre 2018 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. L'arrêté attaqué vise le règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013, indique que les empreintes digitales de M. B... ont été relevées en Italie comme ayant franchi irrégulièrement la frontière et ensuite en tant que demandeur d'asile, que les autorités italiennes ont été saisies d'une demande de reprise en charge sur le fondement des dispositions du b) du 1 de l'article 18 et qu'elles doivent être regardées comme responsables de l'examen de sa demande d'asile en application de l'article 3 et du chapitre III du règlement n° 604/2013. La décision contestée permet ainsi d'identifier le critère de responsabilité retenu par l'autorité administrative. En outre, la circonstance que l'Italie soit le pays responsable de l'examen de la protection internationale du requérant au motif qu'elle a enregistré sa première demande d'asile ne présente pas un caractère contradictoire avec la mention, dans l'arrêté contesté, du 2 de l'article 3 du règlement n° 604/2013 dont les deux derniers alinéas sont relatifs aux éventuelles défaillances systémiques d'un pays membre, que celui-ci soit désigné responsable en application d'un des critères du chapitre III du règlement n° 604-2013 ou parce qu'il a enregistré la première demande d'asile de l'intéressé. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'arrêté attaqué doit être écarté.

3. Si la préfète de la Seine-Maritime a estimé que la situation de l'intéressé ne relevait pas de la dérogation prévue au 2 de l'article 3 du règlement n° 604/2013, elle ne l'a pas pour autant exclu du champ d'application de cet article. Le moyen tiré de l'erreur de droit dans l'application du 2 de l'article 3 du règlement n° 604/2013 doit, par suite, être écarté.

4. Aux termes de l'article 3 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " (...) / Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'Etat membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet Etat membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'Etat membre procédant à la détermination de l'Etat membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre Etat membre peut être désigné comme responsable. / Lorsqu'il est impossible de transférer le demandeur en vertu du présent paragraphe vers un État membre désigné sur la base des critères énoncés au chapitre III ou vers le premier État membre auprès duquel la demande a été introduite, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable devient l'État membre responsable / (...) ". Aux termes de l'article 17 du règlement n° 604/2013 : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque Etat membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement (...) ". Aux termes de l'article 3 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a droit à son intégrité physique et mentale ". Aux termes de l'article 4 de la même Charte : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

5. L'Italie étant membre de l'Union européenne et partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il doit alors être présumé que le traitement réservé aux demandeurs d'asile dans cet Etat membre est conforme aux exigences de ces textes. Cette présomption est toutefois réfragable lorsqu'il y a lieu de craindre qu'il existe des défaillances systémiques de la procédure d'asile et des conditions d'accueil des demandeurs d'asile dans l'Etat membre responsable, impliquant un traitement inhumain ou dégradant. Dans cette hypothèse, il appartient à l'administration d'apprécier dans chaque cas, au vu des pièces qui lui sont soumises et sous le contrôle du juge, si les conditions dans lesquelles un dossier particulier est traité par les autorités italiennes répondent à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile.

6. M. B... n'établit pas que les problèmes psychologiques dont il se prévaut et pour lesquels il est suivi par le pôle de psychiatrie du centre hospitalier du Rouvray seraient un obstacle à son transfert vers l'Italie. Il évoque, en outre, des rapports d'organisations non gouvernementales qui font état de difficultés face à l'afflux de demandeurs d'asile ayant pour effet de le priver de ses droits fondamentaux et l'exposant à des traitements inhumains ou dégradants. Il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier qu'à la date de la décision attaquée, M. B... aurait été exposé à des traitements inhumains et dégradants ou à la privation arbitraire de sa liberté en cas de transfert vers l'Italie. Par conséquent, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 du règlement n° 604/2013, du 1 de l'article 3 et de l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ainsi que celui tiré de l'erreur manifeste d'appréciation à ne pas avoir mis en oeuvre la clause discrétionnaire prévue par l'article 17 du règlement n° 604/2013 doivent être écartés.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre des frais liés au litige doivent être également rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B..., au ministre de l'intérieur et à Me C....

Copie en sera transmise pour information à la préfète de la Seine-Maritime.

N°19DA00103 4


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 19DA00103
Date de la décision : 28/03/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335 Étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. Boulanger
Rapporteur ?: M. Michel Richard
Rapporteur public ?: Mme Fort-Besnard
Avocat(s) : ELATRASSI-DIOME

Origine de la décision
Date de l'import : 04/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2019-03-28;19da00103 ?
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