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05/02/2019 | FRANCE | N°17DA00881

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4e chambre - formation à 3, 05 février 2019, 17DA00881


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée unipersonnelle (SASU) Clariance a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge des cotisations d'impôt sur les sociétés mises à sa charge en 2008 et 2009 à hauteur de la somme globale de 263 423 euros, ainsi que des intérêts de retard.

Par un jugement n° 1304705 du 7 mars 2017, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 12 mai 2017 et

14 janvier 2019, ce mémoire n'ayant pas été communiqué, la SASU Clariance, représentée par MeB...,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée unipersonnelle (SASU) Clariance a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge des cotisations d'impôt sur les sociétés mises à sa charge en 2008 et 2009 à hauteur de la somme globale de 263 423 euros, ainsi que des intérêts de retard.

Par un jugement n° 1304705 du 7 mars 2017, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 12 mai 2017 et 14 janvier 2019, ce mémoire n'ayant pas été communiqué, la SASU Clariance, représentée par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 7 mars 2017 ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des années 2008 et 2009, ainsi que des intérêts de retard, à hauteur de la somme globale de 263 423 euros;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- le code général des impôts ;

- le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Rodolphe Féral, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Jean-Michel Riou, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. la SASU Clariance, qui exerce une activité de commercialisation de matériel chirurgical, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration fiscale a remis en cause l'application du taux majoré de 50 % et de 40 % du crédit d'impôt recherche dont elle a bénéficié respectivement au titre des années 2008 et 2009. La SASU Clariance relève appel du jugement du 7 mars 2017 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à ce qu'il prononce la décharge des cotisations d'impôt sur les sociétés mises à sa charge en 2008 et 2009 à hauteur de la somme globale de 263 423 euros, ainsi que des intérêts de retard.

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

2. Aux termes de l'article 244 quater B du code général des impôts dans sa rédaction applicable au litige : " I. Les entreprises industrielles et commerciales ou agricoles imposées d'après leur bénéfice réel (...) peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des dépenses de recherche qu'elles exposent au cours de l'année. Le taux du crédit d'impôt est de 30 % pour la fraction des dépenses de recherche inférieure ou égale à 100 millions d'euros (...). / Le taux de 30 % mentionné au premier alinéa est porté à 50 % et 40 % au titre respectivement de la première et de la deuxième année qui suivent l'expiration d'une période de cinq années consécutives au titre desquelles l'entreprise n'a pas bénéficié du crédit d'impôt et à condition qu'il n'existe aucun lien de dépendance au sens du 12 de l'article 39 entre cette entreprise et une autre entreprise ayant bénéficié du crédit d'impôt au cours de la même période de cinq années. ". Aux termes du 12° de l'article 39 du même code : " Des liens de dépendance sont réputés exister entre deux entreprises : / a- Lorsque l'une détient directement ou par personne interposée la majorité du capital social de l'autre ou y exerce en fait le pouvoir de décision ; / b- Lorsqu'elles sont placées l'une et l'autre, dans les conditions définies au a, sous le contrôle d'une même tierce entreprise. ".

3. Il résulte de ces dispositions qu'un lien de dépendance est réputé exister entre deux sociétés au sens du 12° de l'article 39, alors même qu'il n'existe aucun lien capitalistique direct entre elles, soit lorsque l'une de ces sociétés, par personne interposée, exerce en fait le pouvoir de décision au sein de l'autre, soit lorsque ces deux sociétés sont sous le contrôle d'une même tierce entreprise, Une personne physique peut, au sens de ces dispositions, être qualifiée de tierce entreprise. Toutefois, cette qualification d'entreprise s'agissant d'une personne physique ne saurait résulter seulement des pouvoirs de décision que cette personne détient au sein des sociétés dont elle possède une part du capital social ni de la seule détention d'une part du capital social de ces dernières et ce quelle que soit l'importance de la part du capital social ainsi détenue. Il est en effet nécessaire pour qu'une personne physique puisse être qualifiée d'entreprise du fait de la détention de parts sociales que cette détention constitue pour elle une activité économique et professionnelle.

4. D'une part, il est constant que M. A...est l'associé unique de la SASU Clariance et qu'il détient 43,87 % de parts sociales de la SAS Phusis, dont le reste du capital social est détenu par deux autres actionnaires, à hauteur respectivement de 28,57 % et de 27,53 %. Il est également constant que la SASU Clariance et la SAS Phusis n'ont aucun lien capitalistique entre elles. Il résulte de l'instruction que, dans ses écritures devant la cour, l'administration fiscale ne soutient plus expressément, comme elle le faisait en première instance, que la SASU Clariance exercerait en fait le pouvoir de décision au sein de la SAS Phusis par personne interposée, à savoir M. A.... En tout état de cause, à supposer même, comme le soutient l'administration fiscale, que M. A...contrôle la SASU Clariance et la SAS Phusis au regard des dispositions de l'article L. 233-3 du code de commerce, cette seule circonstance ne peut permettre de considérer que la SASU Clariance contrôlerait la SAS Phusis par personne physique interposée. Ainsi, au sens des dispositions du a) du 12° de l'article 39 du code général des impôts il n'existe pas de lien de dépendance entre les sociétés Clariance et Phusis.

5. D'autre part, l'administration fiscale fait valoir devant la cour que les sociétés Clariance et Phusis sont sous le contrôle d'une même tierce entreprise, M.A..., au sens des dispositions précitées du b) du 12° de l'article 39 du code général des impôts. Toutefois, si l'administration fiscale soutient que M. A...contrôlerait la SASU Clariance en tant qu'associé unique et la SAS Phusis dès lors que conformément aux dispositions de l'article L. 233-3 du code de commerce il détient plus de 40 % des droits de vote et qu'aucun autre associé ou actionnaire ne détient une fraction supérieure à la sienne, cette circonstance, à la supposer même établie ne permet pas, ainsi qu'il a été dit au point 3, de qualifier M. A...d'entreprise. En effet, il n'est ni établi ni même allégué par l'administration fiscale que la détention de ces parts sociales par M. A...constituerait pour ce dernier l'exercice d'une activité économique et professionnelle et que les dividendes versés par les sociétés Clariance et Phusis à M. A...à raison des parts sociales de ces sociétés qu'il détient auraient été imposables entre les mains de ce dernier en tant que revenus issus d'un actif professionnel, s'intégrant à un bénéfice net imposable en vertu de l'article 38 du code général des impôts. Par suite, M. A...ne pouvant être qualifié d'entreprise au sens et pour l'application des dispositions du b) du 12 ° de l'article 39 du code général des impôts, il n'existe pas de dépendance entre les sociétés Clariance et Phusis au sens de ces dispositions.

6. L'administration fiscale, qui ne peut se fonder sur sa propre doctrine pour fonder une imposition, ne saurait utilement se prévaloir de la réponse ministérielle Missoffe (AN 11 novembre 1972, p. 5042, n° 25677) pour justifier les impositions en litige.

7. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que la SASU Clariance est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Par suite la SASU Clariance est fondée à demander la décharge des cotisations d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des années 2008 et 2009 pour les montants respectifs de 154 736 euros et 100 806 euros.

Sur les frais liés au litige :

8. Dans les circonstances de l'espèce il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à la SASU Clariance sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1304705 du 7 mars 2017 du tribunal administratif de Lille est annulé.

Article 2 : La SASU Clariance est déchargée des cotisations d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des années 2008 et 2009 à hauteur de la somme globale de 255 542 euros.

Article 3 : L'Etat versera à la SASU Clariance une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SASU Clariance et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

4

N° 17DA00881


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17DA00881
Date de la décision : 05/02/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-01-08-01-01 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux. Calcul de l'impôt.


Composition du Tribunal
Président : Mme Grand d'Esnon
Rapporteur ?: M. Rodolphe Féral
Rapporteur public ?: M. Riou
Avocat(s) : SELAS TAJ

Origine de la décision
Date de l'import : 05/03/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2019-02-05;17da00881 ?
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