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20/12/2018 | FRANCE | N°18DA00938

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4e chambre - formation à 3, 20 décembre 2018, 18DA00938


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...D...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 13 octobre 2017 par lequel la préfète de la Seine-Maritime a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et lui a indiqué qu'à l'expiration de ce délai il pourrait être reconduit d'office à la frontière à destination du pays dont il a la nationalité ou de tout autre pays pour lequel il établit être légalement admissi

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Par un jugement n° 1703473 du 22 février 2018, le tribunal administratif de R...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...D...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 13 octobre 2017 par lequel la préfète de la Seine-Maritime a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et lui a indiqué qu'à l'expiration de ce délai il pourrait être reconduit d'office à la frontière à destination du pays dont il a la nationalité ou de tout autre pays pour lequel il établit être légalement admissible.

Par un jugement n° 1703473 du 22 février 2018, le tribunal administratif de Rouen a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 10 mai 2018, M. B...D..., représenté par la SELARL Eden avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Seine-Maritime :

- à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour valable un an, portant la mention " salariée " ou " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de cent euros par jour de retard ;

- à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer, sans délai, une autorisation provisoire de séjour, le temps de ce réexamen, sous astreinte de cent euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros

- à titre principal, à verser à la SELARL Eden avocats, de la somme de 2 000 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 contre renonciation de la part de ce conseil au bénéfice de l'indemnité versée au titre de l'aide juridictionnelle ;

- à titre subsidiaire, à verser à son bénéfice propre, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Xavier Fabre, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

Sur la régularité du jugement :

1. D'une part, M. D...étant algérien, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation commise au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, soulevé en première instance, était inopérant. D'autre part, M. D...n'a pas soulevé, en première instance, le moyen tiré de ce que la préfète de la Seine-Maritime avait commis une erreur manifeste d'appréciation en refusant de faire usage du pouvoir général de régularisation dont elle dispose, même sans texte et l'appelant ne saurait donc reprocher aux premiers juges de ne pas avoir répondu à un moyen qu'il n'avait pas soulevé. Le moyen tiré de l'irrégularité du jugement de première instance pour omission à statuer sur un moyen n'est donc pas fondé.

Sur la décision de refus de séjour :

2. La décision de refus de séjour titre de séjour cite le b) de l'article 7 de l'accord franco-algérien susvisé et expose que la DIRECCTE a émis un avis défavorable dont elle précise les motifs et en déduit qu'ainsi l'intéressé ne justifie pas d'un contrat de travail ni d'un visa de long séjour. La préfète de la Seine-Maritime n'était pas tenue de faire état de la circulaire du 28 novembre 2012 relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière dans le cadre des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dont l'intéressé ne peut en tout état de cause utilement se prévaloir dès lors qu'elle ne contient aucune ligne directrice susceptible de s'imposer à l'autorité préfectorale. La préfète de la Seine-Maritime n'était pas plus tenue de faire explicitement état des motifs qui l'ont conduite à décider de ne pas faire usage de son pouvoir général de régularisation dont elle dispose même sans texte. Dès lors, la décision de refus de titre de séjour comportant l'énoncé des considérations de fait et de droit sur lesquelles elle se fonde, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision de refus de séjour doit être écarté.

3. Il ressort des pièces du dossier, en particulier de l'arrêté en litige, qui est longuement motivé, qu'avant de prendre la décision de refus de séjour, la préfète de la Seine-Maritime a procédé à un examen de la situation personnelle de M.D....

4. Par lettre du 9 janvier 2017, M. D...a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en se prévalant de sa situation professionnelle, en particulier de la volonté de l'entreprise SARL La Piazza de le recruter sous contrat à durée indéterminée, à temps plein en qualité d'employé polyvalent. Sollicitée pour avis par la préfète de la Seine-Maritime, la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) de Normandie s'est prononcée défavorablement à la demande présentée, en faisant valoir que " M. D...(...) travaille depuis décembre 2016 dans la SARL La Piazza , sans bulletins de salaire et payé en espèces et est locataire de son employeur (loyer de 320 euros) ; plusieurs irrégularités ont été constatées - suspicion de travail dissimulé ; un contrôle plus approfondi est envisagé pour donner les suites qu'il convient au nombreuses irrégularités ; avis défavorable de la DIRECCTE ". Pour fonder sa décision de refus de titre de séjour, la préfète de la Seine-Maritime a fait état de cet avis et de ses motifs.

5. Il ressort des pièces du dossier que M. D...est locataire, depuis le 6 août 2016 d'un studio à usage d'habitation à Rouen qu'il loue à une personne, dont il n'est pas contesté qu'elle est son employeur, pour la somme de 300 euros mensuels à laquelle s'ajoute 20 euros de charges. Si M. D...produit un contrat de travail avec la société la Piazza qui prévoit une embauche à compter du 1er mars 2017, une demande d'autorisation de travail pour conclure un contrat de travail avec un salarié étranger remplie par cette société le 5 janvier 2017 ainsi qu'une lettre d'accompagnement à destination de la préfecture remplie par le même employeur, les bulletins de paie de M. D...mentionnent une date d'embauche le 1er décembre 2016, période au cours de laquelle il ne disposait d'aucun contrat de travail. Le requérant ne justifie par ailleurs de bulletins de salaire qu'à compter de janvier 2017 seulement. Enfin, il ne justifie de paiement par chèque qu'à compter du mois d'avril 2017 mais pas antérieurement. Il résulte de l'ensemble de ce qui vient d'être dit que, si les éléments relevés par la DIRECCTE de Normandie sont partiellement inexacts, ces inexactitudes, au regard de leur caractère limité, d'une part, et des autres éléments défavorables à la société qui ne sont pas sérieusement contestés, d'autre part, n'ont pas été susceptibles, en l'espèce, d'avoir une incidence sur la décision prise par la préfète de la Seine-Maritime. Le moyen tiré de ce que la préfète de la Seine-Maritime ne pouvait légalement reprendre à son compte l'avis de la DIRRECTE partiellement inexact doit, par suite, être écarté.

6. Il ne ressort pas des pièces du dossier que la préfète de la Seine-Maritime se serait, avant de prendre l'arrêté contesté, refusée à apprécier s'il convenait de lui accorder un titre de séjour en vertu de son pouvoir général de régularisation, ce qui ne saurait être inféré du seul silence de l'arrêté sur ce point

7. M. B...D..., né le 24 avril 1975 en Algérie, de nationalité algérienne, est entré en France en 2011. S'il est ainsi exact que sa durée de séjour en France à la date de l'arrêté attaqué, était de plus de six ans et non de quatre ans, comme l'ont retenu à tort les premiers juges, il demeure que, contrairement à ce qu'il soutient, il n'établit pas avoir occupé de manière continue un emploi durant la même période, et n'établit pas l'existence d'autres liens privilégiés en France, pays où il n'est entré qu'âgé de trente-six ans. M.D..., qui a vécu l'essentiel de sa vie en Algérie, est célibataire et sans enfant en France. Si la présence de son frère Abdelkader et de la famille de celui-ci sur le territoire français ressort des pièces du dossier, il n'est pas établi qu'il serait dépourvu de toute famille en Algérie. Compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et notamment eu égard aux conditions d'entrée et de séjour du requérant en France, la préfète de la Seine-Maritime n'a pas, en prenant la décision portant refus de séjour, porté au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressé une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision a été prise. Par suite, ne saurait être accueilli le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

8. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point précédent et en dépit de l'activité professionnelle exercée pendant plusieurs années par l'intéressé, la préfète de la Seine-Maritime n'a pas, en prenant la décision portant refus de séjour, commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle.

9. Il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 8 que la décision de refus de séjour n'est pas entachée d'illégalité.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

10. Il résulte de ce qui a été dit au point 9 que le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision de refus de séjour doit être écarté.

11. Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 2, une obligation de quitter le territoire français n'ayant pas à faire l'objet d'une motivation distincte de la décision de refus de titre de séjour lorsqu'elle est prise concomitamment et que la décision de refus de séjour est suffisamment motivée.

12. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux énoncés au 7.

13. Le moyen tiré de l'erreur manifeste commise par la préfète de la Seine-Maritime dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de M. D... doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 7 et 8.

14. Il résulte de ce qui a été dit aux points 10 à 13 que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas entachée d'illégalité.

Sur la décision fixant le pays de destination :

15. Il résulte de ce qui a été dit aux points 9 et 14 que le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité des décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français doit être écarté.

16. L'arrêté contesté, qui fait état de la nationalité algérienne de l'intéressé, vise le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, fondement de la décision fixant le pays de destination, ainsi qu'il est rappelé dans la citation de l'article L. 511-1 de ce code contenue dans l'arrêté. Le moyen tiré de l'insuffisance motivation de la décision fixant le pays de destination doit donc être écarté.

17. Il résulte de ce qui a été dit aux points 15 et 16 que la décision fixant le pays de destination n'est pas entachée d'illégalité.

18. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, les autres conclusions présentées en appel par M. D... doivent également être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...D..., au ministre de l'intérieur et à Me A...C....

Copie en sera transmise pour information au préfet de la Seine-Maritime.

2

N°18DA00938


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18DA00938
Date de la décision : 20/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335 Étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme Grand d'Esnon
Rapporteur ?: M. Xavier Fabre
Rapporteur public ?: M. Riou
Avocat(s) : SELARL MADELINE-LEPRINCE-MAHIEU

Origine de la décision
Date de l'import : 15/01/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2018-12-20;18da00938 ?
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