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11/12/2018 | FRANCE | N°18DA01529

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4e chambre - formation à 3, 11 décembre 2018, 18DA01529


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a notamment demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 25 septembre 2017 par lequel la préfète de la Seine-Maritime lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1800555 du 22 mai 2018, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 23 juillet 2018,

M.A..., représenté par Me Leprince, avocate, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a notamment demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 25 septembre 2017 par lequel la préfète de la Seine-Maritime lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1800555 du 22 mai 2018, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 23 juillet 2018, M.A..., représenté par Me Leprince, avocate, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet arrêté du 25 septembre 2017 de la préfète de la Seine-Maritime ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Seine-Maritime, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de lui délivrer une carte de séjour temporaire valable un an et portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir en cas d'admission d'un moyen de légalité interne, ou à défaut, en cas d'admission d'un moyen de légalité externe, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de procéder au réexamen de son dossier ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à la Selarl Eden Avocats en application de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991, ladite condamnation valant renonciation au versement de l'aide juridictionnelle, à titre subsidiaire de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à lui verser en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Marc Lavail-Dellaporta, président-assesseur a été entendu au cours de l'audience publique du 27 novembre 2018.

Considérant ce qui suit :

1. M.A..., se déclarant ressortissant malien né le 27 décembre 1997, déclare être entré en France de manière irrégulière le 27 octobre 2014. Par une ordonnance du juge des enfants, il a été pris en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance du département de la Seine-Maritime, en qualité de mineur puis, par le service d'accompagnement personnalisé jeunes majeurs, dans le cadre d'un contrat jeune majeur. Le 24 février 2016, il a demandé son admission au séjour sur le fondement des dispositions du 2° bis et du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que sur celui des dispositions de l'article L. 313-14 du même code. Par sa requête il relève appel du jugement du 22 mai 2018 par lequel le tribunal administratif de Rouen a notamment rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 septembre 2017 de la préfète de la Seine-Maritime lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et fixant le pays de destination.

Sur la décision de refus de titre de séjour :

2. L'arrêté du 25 septembre 2017 de la préfète de la Seine-Maritime cite le 2° bis et le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que son article L. 313-15 et son article L. 313-14. Il relève notamment que M. A...est entré irrégulièrement en France à l'âge de seize ans et dix mois, est célibataire et sans charge de famille est isolé en France, et n'établit pas être dépourvu d'attaches au Mali, qu'il ne justifie pas avoir obtenu dans les deux années précédentes un diplôme ou une qualification lui permettant de s'insérer dans la société française. Ainsi, il comporte les considérations de droit et de fait sur lesquelles se fonde le refus de titre de séjour. Il suit de là que le moyen tiré du défaut de motivation doit être écarté, peu important la circonstance que la préfète de la Seine-Maritime n'ait pas mentionné tous les éléments factuels de la situation de l'intéressé.

3. Il ne ressort ni des pièces du dossier, ni des termes de l'arrêté attaqué, ni enfin de la seule circonstance que l'arrêté ne fait pas mention de tous les différents éléments apportés par le requérant pour compléter son dossier, sur demande des services préfectoraux, que la préfète de la Seine-Maritime aurait procédé à un examen insuffisant de la situation particulière de M.A....

4. M. A...a présenté sa demande de titre de séjour sur le fondement du 2°bis et du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que sur le fondement de l'article L. 313-14 du même code. Par l'arrêté contesté, la préfète de la Seine-Maritime a également répondu sur le fondement de l'article L. 313-15 du code précité.

5. Il résulte de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qu'à " titre exceptionnel et sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire prévue aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 portant la mention " salarié " ou la mention " travailleur temporaire " peut être délivrée, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, à l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. ".

6. Il ressort des pièces du dossier et notamment de la note sociale du 19 janvier 2018 réalisée par le responsable du centre d'hébergement et de réinsertion sociale où réside le requérant depuis le 30 septembre 2016 qu'à la date de l'arrêté attaqué, l'intéressé ne suivait aucune formation qualifiante, ayant achevé son contrat de qualification comme commis de cuisine fin décembre 2016, formation qu'il n'a d'ailleurs pu valider que partiellement, étant précisé que les cours de langue française pour les étrangers qu'il suivait en plus de son emploi d'agent d'entretien à temps partiel ne sauraient être regardés comme constituant une " formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle " au sens de ces dispositions. Dès lors, il n'est pas fondé à soutenir que la préfète de la Seine-Maritime, qui a d'elle-même examiné la possibilité de procéder à la délivrance à titre exceptionnel d'une carte de séjour sur le fondement de l'article L. 313-15 du code précité, a méconnu les dispositions citées au point précédent en refusant de lui délivrer un titre de séjour sur ce fondement.

7. Le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit l'attribution de plein droit et dans les mêmes conditions d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. Pour l'application de cette disposition, l'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (...) ".

8. Ainsi qu'il a été dit au point 2, il ressort des pièces du dossier que M.A..., est entré irrégulièrement en France et n'y séjourne que depuis trois ans à la date de l'arrêté en litige. Il ne démontre pas qu'il y aurait fixé le centre de ses intérêts bien qu'il se prévale de relations amicales nouées avec la famille de son ancienne amie. Enfin, célibataire et sans charge de famille, s'il affirme être orphelin de mère et n'avoir aucune nouvelle de son père, il ne démontre pas, en tout état de cause, qu'il serait isolé en cas de retour dans son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à l'âge de seize ans. Dès lors, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et eu égard notamment aux conditions d'entrée et de séjour de l'intéressé ainsi qu'au caractère récent de son séjour, l'arrêté attaqué ne porte pas au droit de M. A... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts qu'il poursuit. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés. Pour les mêmes raisons, celui tiré de l'erreur manifeste d'appréciation qu'aurait commise la préfète quant aux conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé doit également être écarté.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

9. Il ressort des termes mêmes de l'arrêté attaqué que l'obligation de quitter le territoire français a été prise sur le fondement du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui permettent de prononcer une obligation de quitter le territoire français à l'encontre d'un étranger auquel a été refusée la délivrance d'un titre de séjour. Or, dans un tel cas, l'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle relative au séjour. La décision refusant un titre de séjour étant elle-même suffisamment motivée, ainsi qu'il a été dit au point 2 ci-dessus, le moyen tiré du défaut de motivation de l'obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté.

10. Pour les motifs énoncés aux points 2 à 8 ci-dessus, l'exception d'illégalité de la décision de refus de séjour à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écartée.

11. Enfin, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 8 ci-dessus, les moyens tirés de l'erreur manifeste d'appréciation et de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés.

Sur la décision fixant le pays de destination :

12. L'arrêté vise le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mentionne la nationalité de l'intéressé et relève que celui-ci n'allègue ni n'établit aucun risque en cas de retour dans son pays. Il comporte, dès lors, l'ensemble des considérations de droit et de fait qui fondent la décision fixant le pays de renvoi, sans qu'il soit nécessaire que les dispositions de l'article L. 513-3 de ce code soient visées. Il suit de là que le moyen tiré du défaut de motivation doit être écarté.

13. Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

14. En se bornant à se prévaloir en termes généraux, de la situation actuelle au Mali, M. A..., qui n'a au demeurant jamais déposé de demande d'asile, ne saurait être regardé comme établissant qu'il serait personnellement exposé, en cas de retour dans ce pays, à un réel risque de traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il n'est, par suite, pas fondé à soutenir que la décision fixant le Mali comme le pays de destination serait contraire à ces stipulations ou aux dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

15. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté ses conclusions en annulation de l'arrêté du 25 septembre 2017 de la préfète de la Seine-Maritime. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A..., au ministre de l'intérieur et à Me C... Leprince.

Copie en sera transmise, pour information, à la préfète de la Seine-Maritime.

2

N°18DA01529


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18DA01529
Date de la décision : 11/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme Grand d'Esnon
Rapporteur ?: M. Marc Lavail Dellaporta
Rapporteur public ?: M. Riou
Avocat(s) : SELARL MADELINE-LEPRINCE-MAHIEU

Origine de la décision
Date de l'import : 25/12/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2018-12-11;18da01529 ?
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