Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... D...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 9 mai 2017 par lequel le préfet de l'Eure a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 1702610 du 24 octobre 2017, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 18 janvier 2018, M. D..., représenté par Me A...C..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rouen du 24 octobre 2017 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Eure du 9 mai 2017 ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Eure de lui délivrer une carte de séjour temporaire d'un an portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour dans un délai de huit jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ou, à défaut, mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Julien Sorin, président-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... D..., ressortissant de la République démocratique du Congo né le 23 juin 1980, interjette appel du jugement du 24 octobre 2017 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 9 mai 2017 du préfet de l'Eure refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.
Sur le refus de titre de séjour :
2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée (...) ".
3. Il est constant que M. D..., entré irrégulièrement en France en 2010, a épousé une ressortissante française le 18 juin 2011, et qu'ils ont eu deux enfants français, nés le 13 novembre 2012 et le 18 mai 2015. Il résulte toutefois des pièces du dossier que les époux sont séparés depuis le mois de juin 2015, et qu'une requête en divorce a été introduite par M. D... le 13 décembre 2017. L'épouse du requérant et les deux enfants ont quitté le domicile familial le 9 juin 2015. Un rapport rédigé le 13 avril 2016 après enquête par les services de police permet d'établir que M. D...ne voit, selon ses propres déclarations, ses enfants qu'une fois par mois, et qu'il ne participe pas financièrement à leur entretien. L'intéressé ne produit aucune pièce susceptible d'établir la réalité de l'allégation selon laquelle il serait empêché par son épouse et sa belle-famille de voir ses enfants plus souvent, et de contribuer effectivement à leur éducation et à leur entretien financier. En outre, M. D...ne produit aucune pièce, document ou photographie susceptible d'établir la réalité du lien affectif qu'il dit entretenir avec ses enfants depuis le départ de son épouse, alors qu'il ressort du rapport d'enquête qu'il ne dispose, dans son domicile, d'aucun jouet, nourriture ou vêtement d'enfant. Les seuls termes de la requête en divorce, au demeurant postérieure à la décision en litige, et selon lesquels il souhaiterait bénéficier d'un droit de visite plus étendu, et contribuer lorsqu'il sera en mesure de le faire, à l'entretien financier de ses enfants, ne suffit pas à établir la réalité de ce lien affectif. Dans ces conditions, le préfet n'a pas méconnu les stipulations précitées du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant à M. D...un titre de séjour sur ce fondement au motif qu'il n'établissait pas contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de ses deux enfants.
4. L'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Une carte de séjour temporaire, d'une durée maximale d'un an, autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée à l'étranger : 1° Pour l'exercice d'une activité salariée sous contrat de travail à durée indéterminée, dans les conditions prévues à l'article L. 5221-2 du code du travail. Elle porte la mention " salarié " (...) ". Aux termes de l'article L. 313-3 du même code : " La carte de séjour temporaire ou la carte de séjour pluriannuelle peut, par une décision motivée, être refusée ou retirée à tout étranger dont la présence en France constitue une menace pour l'ordre public ".
5. Il ressort des pièces du dossier que, pour refuser de délivrer un titre de séjour à M. D..., titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée en qualité de chauffeur de bus en période scolaire, le préfet de l'Eure s'est fondé sur la circonstance que l'intéressé est connu des services de police pour des faits d'agression sexuelle qui auraient été commis dans le cadre de son activité professionnelle, et qu'il a été condamné, le 25 janvier 2017, par le tribunal de grande instance d'Evreux à six mois de suspension de son permis de conduire et 300 euros d'amende pour conduite en état d'ébriété. Ainsi que l'ont relevé les premiers juges, la procédure relative à l'agression sexuelle a été classée sans suite. Si, par ailleurs, M. D...produit une attestation de son employeur, datée du 18 mai 2017, indiquant que l'intéressé n'a " jamais été mis en défaut sur des sujets de conduite sous l'emprise d'alcool ou suite à des réclamations clients ", cette attestation est directement contredite par la circonstance que le permis de conduire de M. D...a été suspendu du 3 octobre 2016 au 4 avril 2017 pour des faits de conduites sous emprise alcoolique. M. D...fait valoir que cette sanction est isolée et qu'il conduisait son véhicule personnel lors de son interpellation en état d'ébriété. Toutefois, dans les circonstances particulières de l'espèce, compte tenu du caractère indissociable des faits commis par le requérant avec la profession qu'il exerce, et de la nature de celle-ci, et en dépit de son caractère isolé, en considérant que la condamnation de M. D...était incompatible avec l'exercice de son activité professionnelle, le préfet de l'Eure n'a pas commis d'erreur de droit au regard des dispositions citées au point 3, ni d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle.
6. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; / (...) ". Aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
7. Il est constant que M. D...est présent sur le territoire français depuis l'année 2010, qu'il a obtenu, en 2014, le titre professionnel de conducteur de transport routier interurbain de voyageurs, et qu'il était, de 2014 à 2017, titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée en qualité de conducteur de bus en période scolaire. Toutefois, et ainsi qu'il a été dit au point 3, M. D...est séparé de son épouse depuis le mois de juin 2015. Il n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales en République démocratique du Congo, où il a vécu jusqu'à l'âge de vingt-neuf ans. Il n'établit pas avoir, en dehors de son épouse et de ses enfants, noué d'attaches personnelles particulières en France. S'agissant des deux enfants du requérant, et ainsi qu'il a été dit au point 3, l'intéressé ne produit aucune pièce, document ou photographie susceptible d'établir la réalité du lien affectif qu'il dit entretenir avec eux depuis le départ de son épouse, alors qu'il ressort du rapport d'enquête qu'il ne dispose, dans son domicile, d'aucun jouet, nourriture ou vêtement d'enfant. Les seuls termes de la requête en divorce, au demeurant postérieure à la décision en litige, et selon lesquels il souhaiterait bénéficier d'un droit de visite plus étendu, et contribuer lorsqu'il sera en mesure de le faire, à l'entretien financier de ses enfants, ne suffisent pas à établir la réalité de ce lien affectif. M. D... ne produit, en outre, aucune pièce susceptible d'établir la réalité de l'allégation selon laquelle il serait empêché par son épouse et sa belle-famille, de voir ses enfants plus souvent. Par suite, et dans les circonstances de l'espèce, il n'est pas établi que le préfet de l'Eure aurait porté une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de M. D...au regard des buts poursuivis par la décision en litige. Il n'a, par suite, méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
8. Aux termes de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3. (...) ". Il résulte de ces dispositions que le préfet n'est tenu de saisir la commission du titre de séjour que du seul cas des étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues à l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions.
9. M. D...reprend, en appel, le moyen tiré de la méconnaissance, par la décision attaquée, des dispositions de l'article L. 313-14 sans l'assortir d'éléments nouveaux. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par les premiers juges.
10. Il résulte de ce qui a été dit aux points 3, 5 et 7, que M. D...ne remplit pas effectivement les conditions résultant des dispositions de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour obtenir un titre de séjour prévu par les 6° et 7° de l'article L. 313-11, et par le 1° de l'article L. 313-10 du même code. L'arrêté en litige n'a pas été pris à l'issue d'une procédure irrégulière en l'absence de consultation préalable de la commission du titre de séjour.
11. Ainsi qu'il a été dit aux points 3 et 7, M. D...n'établit pas la réalité du lien qu'il dit entretenir avec ses enfants, qui vivent avec leur mère française depuis le mois de juin 2016, qu'il ne voit qu'épisodiquement, et qu'il ne reçoit pas à son domicile, compte tenu de l'absence d'objets, de nourriture ou de vêtements d'enfants lors de la visite des inspecteurs de police. Dans ces conditions, M. D...n'établit pas que le préfet de l'Eure aurait, en prenant la décision en litige, méconnu les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
Sur l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de renvoi :
12. M. D...se borne à soutenir, comme en première instance, que la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée, qu'elle est illégale dès lors qu'elle se fonde sur un refus de séjour lui-même illégal, qu'elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, le 6° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, et que la décision fixant le pays de renvoi est illégale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français. Toutefois, il n'apporte, en appel, aucun élément de fait ou de droit de nature à remettre en cause l'appréciation portée par les premiers juges sur ces moyens. Par suite, il y a lieu, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, de les écarter.
13. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 9 mai 2017 du préfet de l'Eure. Ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées au titre des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... D..., au ministre de l'intérieur et à Me A...C....
Copie sera adressée au préfet de l'Eure.
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N°18DA00140