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04/12/2018 | FRANCE | N°18DA00004

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre - formation à 3, 04 décembre 2018, 18DA00004


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...A...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 3 novembre 2017 du préfet de l'Yonne lui faisant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixant le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office et prononçant une interdiction de retour sur le territoire français d'un an.

Par un jugement n° 1703329 du 13 novembre 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a fait droit à sa demande.

Procédu

re devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 2 janvier 2018, le préfet de l'Yonne...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...A...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 3 novembre 2017 du préfet de l'Yonne lui faisant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixant le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office et prononçant une interdiction de retour sur le territoire français d'un an.

Par un jugement n° 1703329 du 13 novembre 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a fait droit à sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 2 janvier 2018, le préfet de l'Yonne, représenté par Me B... C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen du 13 novembre 2017 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif de Rouen.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Muriel Milard, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.A..., ressortissant guinéen, entré sur le territoire français via l'Espagne en octobre 2017, démuni de tout document d'identité et de voyage, se déclarant né le 28 avril 2002, s'est présenté spontanément aux services de police du commissariat d'Auxerre le 2 novembre 2017 afin d'être pris en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance en sa qualité de mineur. Le préfet de l'Yonne relève appel du jugement du 13 novembre 2017 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a annulé l'arrêté du 3 novembre 2017 faisant obligation à M. A...de quitter le territoire français sans délai, fixant le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office et prononçant une interdiction de retour sur le territoire français d'un an.

Sur le motif d'annulation retenu par le tribunal administratif :

2. Le 1° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que " l'étranger mineur de dix-huit ans " ne peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire. En vertu de l'article L. 111-6 du même code, la vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil aux termes duquel " tout acte de l'état civil (...) fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ". Il incombe à l'administration de renverser cette présomption de validité des actes d'état civil établis par une autorité étrangère en apportant la preuve du caractère irrégulier, falsifié ou non conforme à la réalité des actes en question. En revanche, l'administration française n'est pas tenue de solliciter nécessairement et systématiquement les autorités d'un autre Etat afin d'établir qu'un acte d'état civil présenté comme émanant de cet Etat est dépourvu d'authenticité, en particulier lorsque l'acte est, compte tenu de sa forme et des informations dont dispose l'administration française sur la forme habituelle du document en question, manifestement falsifié. De plus, cette preuve peut être apportée par tous moyens et notamment par les données à caractère personnel enregistrées dans le traitement automatisé dénommé Visabio, qui sont présumées exactes. Il appartient alors à l'intéressé de renverser cette présomption.

3. Pour annuler l'arrêté du 3 novembre 2017 en litige, le premier juge a estimé qu'au regard du caractère très imprécis de ses conclusions et de la marge d'erreur inhérente à tout examen osseux réalisé en vue de déterminer l'âge d'une personne, le rapport médical produit ne pouvait être regardé comme permettant de remettre en cause les mentions figurant sur les documents d'état civil produits par M.A..., que, dans ces conditions, la présomption de validité, qui s'attache aux actes d'état civil étrangers en vertu des dispositions de l'article 47 du code civil, n'était pas renversée et qu'ainsi M. A... devait être regardé comme établissant qu'il était âgé de moins de dix-huit ans à la date de la décision en litige. Il ressort des pièces du dossier que, pour prouver sa minorité, M. A...a produit un jugement supplétif de naissance établi à son nom tenant lieu d'acte de naissance et un extrait d'acte de naissance indiquant tous deux qu'il était né le 28 avril 2002. Cependant, la consultation des données à caractère personnel enregistrées dans le traitement automatisé dénommé Visabio au vu des empreintes digitales de l'intéressé, qui sont présumées exactes, a fait apparaître que celui-ci était connu sous l'identité de M. D...A..., exerçant la profession de sportif et ayant fait l'objet d'un refus de visa pour risque migratoire au vu d'un passeport guinéen N°O00034621 valable jusqu'au 19 novembre 2019 et qu'il était né le 25 septembre 1998 à Conakry en Guinée et non le 28 avril 2002. En outre, l'administration préfectorale, qui a sollicité le concours d'un expert en fraude documentaire de la gendarmerie départementale, a émis un avis selon lequel les documents produits par M. A...étaient faux, notamment au regard de la comparaison avec d'autres documents du même type. Enfin, ces éléments sont corroborés par les résultats d'un examen radiographique du poignet et de la main gauche de M.A..., par comparaison avec le tableau de Greulich et Pyle, et une radiographie du bassin, qui font apparaître que l'âge osseux de l'intéressé est supérieur à dix-huit ans. Il résulte de l'ensemble de ces éléments, et dans la mesure où M. A...ne fournit aucun autre document permettant de justifier de sa minorité, que le préfet de l'Yonne est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a annulé l'arrêté du 3 novembre 2017 en litige au motif que la présomption de validité, qui s'attache aux actes d'état civil étrangers en vertu des dispositions de l'article 47 du code civil, n'était pas renversée et qu'ainsi, M. A...devait être regardé comme établissant qu'il était mineur à la date de la décision en litige.

4. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A...devant le tribunal administratif de Rouen.

Sur le moyen commun aux décisions attaquées :

5. Par un arrêté du 28 août 2017, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de l'Yonne du 28 août 2017, le préfet de l'Yonne a donné délégation à Mme Françoise Fugier, secrétaire générale de la préfecture, à l'effet de signer, notamment, les décisions contestées. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur des décisions attaquées doit être écarté.

Sur l'obligation de quitter le territoire :

6. La décision attaquée comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et est par suite suffisamment motivée.

7. Il ne ressort pas des pièces du dossier et des motifs de la décision en litige que le préfet de l'Yonne ne se serait pas livré à un examen sérieux de la situation personnelle de M. A...avant d'adopter la décision litigieuse.

8. Si M. A...soutient que l'expertise médicale ordonnée par le procureur de la république près le tribunal de grande instance d'Auxerre a été réalisée sans avoir recueilli son consentement, il ressort cependant des pièces du dossier, et notamment de l'audition de M. A...par les services de police, que celui-ci a accepté la pratique d'un examen osseux pour la reconnaissance de sa minorité. En outre, si les motifs de l'arrêté en litige ne précisent pas qu'un entretien préalable a été conduit avec l'intéressé afin qu'il soit mis à même de donner son consentement éclairé à cet examen, cette circonstance ne permet pas de mettre sérieusement en doute la régularité de l'utilisation par le préfet de l'Yonne de cette méthode pour confirmer les éléments recueillis sur le fichier informatisé Visabio mentionnés au point 3 selon lesquels l'intéressé était majeur. Par suite, le moyen présenté par M. A...doit être écarté. Il en est de même, en tout état de cause, de celui tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 1111-4 du code de la santé publique en vertu desquelles aucun acte médical ni aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne concerné, qui est inopérant à l'égard de la décision faisant obligation à l'intéressé de quitter le territoire français.

9. Aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ou d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : 1° L'étranger mineur de dix-huit ans (...) ".

10. Il ressort de ce qui a été dit au point 3 que le préfet de l'Yonne, qui ne s'est pas fondé uniquement sur les résultats de l'expertise osseuse, a pu estimer que le requérant n'était pas mineur à la date de la décision en litige. Il n'a ainsi pas méconnu les dispositions précitées du 1° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni commis d'erreur de fait, ni d'erreur dans l'appréciation de la situation personnelle de M.A....

11. Pour les mêmes motifs que ceux retenus précédemment, le moyen de M. A...tiré de la méconnaissance des dispositions du code de l'action sociale et des familles relatives à la procédure de mise à l'abri des mineurs étrangers isolés et d'évaluation de leur situation et du Protocole du 31 mai 2013 relatif à la mise à l'abri, l'évaluation et l'orientation des mineurs doit être écarté.

Sur le refus de délai de départ volontaire :

12. Aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification pour rejoindre le pays dont il possède la nationalité ou tout autre pays non membre de l'Union européenne ou avec lequel ne s'applique pas l'acquis de Schengen où il est légalement admissible. (...) / Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : 1° Si le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public (...) ".

13. Il ressort de l'examen des motifs de l'arrêté en litige que le préfet de l'Yonne a précisé, qu'au regard du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la présence de M. A...constituait une menace pour l'ordre public en raison de la dissimulation de son identité dans le but de bénéficier d'un droit indu et que M. A...ne présentait pas les garanties de représentation suffisantes en retenant qu'il était sans ressources, célibataire et sans enfant sur le territoire et qu'il ne démontrait pas être isolé dans son pays d'origine. Dans ces conditions, la décision en litige comporte les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde et est, par suite, suffisamment motivée.

14. Il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français à l'encontre de la décision de refus de délai de départ volontaire.

15. Aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification pour rejoindre le pays dont il possède la nationalité ou tout autre pays non membre de l'Union européenne ou avec lequel ne s'applique pas l'acquis de Schengen où il est légalement admissible. (...) / Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français :/ (...) / 3° s'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque peut être établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / (...) / f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentations suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il a dissimulé des éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente (...) ".

16. Il ressort des pièces du dossier que M. A...est entré irrégulièrement sur le territoire français, qu'il est sans ressource, célibataire, sans enfant et n'a déclaré aucune adresse de résidence effective et permanente. Dans ces conditions, le préfet de l'Yonne n'a pas entaché sa décision refusant d'accorder un délai de départ volontaire d'erreur de droit, ni d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle du requérant.

Sur le pays de destination :

17. La décision contestée vise les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en particulier, l'article L. 513-2 de ce code. Elle indique que l'intéressé n'est pas en mesure de justifier de risques éventuels en cas de retour en Guinée et qu'elle ne méconnaît ainsi pas les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Elle est, par suite, suffisamment motivée.

18. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que M. A...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français à l'encontre de la décision fixant le pays de destination.

19. Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné : / 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; / 2° Ou, en application d'un accord ou arrangement de réadmission communautaire ou bilatéral, à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; / 3° Ou, avec son accord, à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible ".

20. Après avoir mentionné, dans son arrêté, que M. A...était de nationalité guinéenne, le préfet de l'Yonne lui a fait obligation, par l'article 1er de son arrêté, " de quitter le territoire français sans délai ", et par l'article 2, a indiqué qu'il " sera reconduit à destination du pays dont il a la nationalité ou de toute autre pays non membre de l'Union européenne ou avec lequel ne s'applique pas l'acquis de Schengen où il est légalement admissible ". Il doit ainsi être regardé comme ayant, par une décision distincte de l'obligation de quitter le territoire français, décidé que l'intéressé pourrait notamment être reconduit en Guinée. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées des articles L. 513-2 et L. 513-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

Sur l'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an :

21. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) III. - L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger (...). / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. / (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) ".

22. Il ressort de ces dispositions que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux ; que la décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaître les motifs. Si cette motivation doit attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi, aucune règle n'impose que le principe et la durée de l'interdiction de retour fassent l'objet de motivations distinctes, ni que soit indiquée l'importance accordée à chaque critère.

23. Il incombe ainsi à l'autorité compétente qui prend une décision d'interdiction de retour d'indiquer dans quel cas susceptible de justifier une telle mesure se trouve l'étranger. Elle doit par ailleurs faire état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels elle a arrêté, dans son principe et dans sa durée, sa décision, eu égard notamment à la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et, le cas échéant, aux précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet. Elle doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifient sa décision une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace. En revanche, si, après prise en compte de ce critère, elle ne retient pas cette circonstance au nombre des motifs de sa décision, elle n'est pas tenue, à peine d'irrégularité, de le préciser expressément.

24. La décision en litige vise les dispositions précitées du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et énonce que M. A...est célibataire, dépourvu de toute attache familiale sur le territoire français et que la sollicitation d'un droit au séjour sur une fausse identité dans le but d'obtenir un avantage indu caractérise une menace pour l'ordre public. En outre, l'allégation de M. A...selon laquelle il serait en quête d'une protection internationale en raison de ses craintes en cas de retour en Guinée ne permet pas de le regarder comme s'étant sérieusement prévalu de circonstances humanitaires au sens des dispositions précitées du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, M. A...n'est pas fondé à soutenir que le préfet de l'Yonne était tenu de se prononcer expressément sur celles-ci. Dans ces conditions, la décision attaquée comporte l'ensemble des considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde et est ainsi suffisamment motivée.

25. Si M. A... soutient qu'il n'a pas été destinataire de l'information prévue par l'article 42 du règlement du 20 décembre 2006 sur l'établissement, le fonctionnement et l'utilisation du système d'information Schengen de deuxième génération, conformément aux exigences de la directive du 24 octobre 1995 relative à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, cette circonstance est sans incidence sur la légalité de la décision en litige. Au demeurant, l'intéressé a été informé, aux termes de l'article 4 de l'arrêté en litige, qu'il faisait l'objet d'un signalement aux fins de non admission dans le système d'information Schengen.

26. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que M. A...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français à l'encontre de la décision en litige.

27. Il ressort des pièces du dossier que M. A...ne justifie pas d'une entrée régulière sur le territoire français et que celle-ci est récente. En outre, il est célibataire, sans enfant, et se déclare sans ressources. Par ailleurs, il n'établit pas être isolé dans son pays d'origine et ne justifie pas plus des risques personnels qu'il y encourrait en cas de retour. Il résulte de ces éléments que le préfet de l'Yonne n'a pas, en prononçant à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an, commis d'erreur d'appréciation au regard des dispositions précitées.

28. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de l'Yonne est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a annulé l'arrêté du 3 novembre 2017 en litige.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1703329 du 13 novembre 2017 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif de Rouen est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. D...A....

Copie en sera adressée au préfet de l'Yonne.

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N°18DA00004


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18DA00004
Date de la décision : 04/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Sorin
Rapporteur ?: Mme Muriel Milard
Rapporteur public ?: Mme Leguin
Avocat(s) : CLAISSE et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 11/12/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2018-12-04;18da00004 ?
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