Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 1er septembre 2017 par lequel le préfet du Nord a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 1708679 du 29 décembre 2017, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 7 avril 2018, et un mémoire enregistré le 13 juin 2018, M. B... A..., représenté par Me F...E..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté préfectoral ;
3°) d'enjoindre au préfet du Nord de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai de quinze jours à compter du jugement à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'état la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Burkina Faso sur la circulation et le séjour des personnes du 14 septembre 1992 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code du travail ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Michel Richard, président-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M.A..., ressortissant burkinabè né le 26 février 1996, est entré en France au mois de mai 2013, alors qu'il était encore mineur. Il a été placé auprès de l'aide sociale à l'enfance jusqu'à sa majorité, date à laquelle il a bénéficié d'un accueil provisoire " jeuneC... " jusqu'au 21 février 2017. Il a, parallèlement, été admis au séjour par le préfet du Nord, en qualité d'étudiant, à compter du 26 juillet 2015. A l'occasion de la demande de renouvellement de ce titre de séjour, formée le 25 juillet 2016, M. A...a également sollicité le bénéfice d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", avant de communiquer à l'autorité préfectorale, au mois de septembre 2016, un contrat de travail à temps complet le liant à la SARL Soli, pour une activité d'employé de vente. M. A...relève appel du jugement du 29 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er septembre 2017 par lequel le préfet du Nord a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement.
Sur la décision refusant le titre de séjour
2. La décision attaquée énonce l'ensemble des considérations de droit et de fait sur lesquels elle se fonde, notamment les conditions dans lesquelles M. A...est arrivé en France et a été confié aux services de l'aide sociale à l'enfance avant d'entamer un parcours scolaire au bénéfice duquel il a formulé une demande de titre de séjour, et les raisons pour lesquelles ce titre lui a été refusé au regard des fondements invoqués successivement par l'intéressé. Par suite, et alors même que le préfet n'a pas détaillé, dans ses motifs, la nature précise des liens de l'intéressé avec les membres de sa famille demeurant.dans son pays d'origine, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du refus de titre de séjour doit être écarté
3. Il ne résulte ni de la motivation de la décision en litige, ni d'aucune pièce du dossier, que le préfet du Nord n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de M. A...avant de prendre la décision contestée.
4. L'article 6 de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Burkina Faso sur la circulation et le séjour des personnes du 14 septembre 1992 stipule que : " Les ressortissants de chacun des États contractants désireux d'exercer sur le territoire de l'autre État une activité professionnelle industrielle, commerciale ou artisanale doivent, outre le visa de long séjour prévu à l'article 4, avoir été autorisés à exercer leur activité par les autorités compétentes de l'État d'accueil. ". L'article 10 de la même convention dispose que : " Pour tout séjour sur le territoire français devant excéder trois mois, les ressortissants burkinabé doivent posséder un titre de séjour. (...). Ces titres de séjour sont délivrés conformément à la législation de l'État d'accueil. ". Aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Une carte de séjour temporaire, d'une durée maximale d'un an, autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée à l'étranger : / 1° Pour l'exercice d'une activité salariée sous contrat de travail à durée indéterminée, dans les conditions prévues à l'article L. 5221-2 du code du travail. Elle porte la mention " salarié ". / (...) ". Aux termes de l'article L. 5221-2 du code du travail : " Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : / 1° Les documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ; / 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail. ". Il résulte de ces stipulations que la convention franco-burkinabé renvoie, par son article 10, à la législation nationale pour la délivrance et le renouvellement des titres de séjour. Ainsi, les ressortissants burkinabés souhaitant exercer une activité professionnelle, industrielle, commerciale ou artisanale en France doivent solliciter un titre de séjour en application du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
5. Il ressort des pièces du dossier que, pour refuser le titre de séjour " salarié " à M. A... qui s'était prévalu d'un contrat de travail avec la SARL Soli, le préfet a constaté qu'un refus d'autorisation de travail avait été opposé à cette dernière, laquelle n'avait pas répondu à la demande de pièces complémentaires qui lui avait été transmise le 13 avril 2017. M. A...ne conteste pas sérieusement la réalité de cette demande de pièces transmise à la SARL Soli. Le préfet disposait ainsi d'éléments suffisants de nature à lui permettre de statuer sur la demande de titre de séjour formée par M. A...sur le fondement des dispositions visées au point 5, la SARL Soli, pas plus que l'intéressé d'ailleurs, n'ayant réagi à la notification du refus d'autorisation de travail qui leur avait été faite le 30 juin 2017. Le requérant n'est donc pas fondé à soutenir qu'en ne l'invitant pas à compléter sa demande de titre de séjour, le préfet a méconnu les dispositions des articles L. 114-5 et L. 114-6 du code des relations entre le public et l'administration.
6. Il résulte de ce qui a été dit au point précédent qu'en l'absence de contrat de travail visé ou d'une autorisation de travail délivrée à son profit, M. A...ne justifiant pas non plus, en tout état de cause, de son entrée régulière sur le territoire français, la décision portant refus de titre de séjour n'a pas été prise en méconnaissance des stipulations précitées de la convention du 14 septembre 1992 et des dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
7. Aux termes du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; / (...) ".
8. M.A..., ressortissant burkinabé né le 26 février 1996, déclare être entré sur le territoire français le 20 mai 2013. Il a été confié à l'aide sociale à l'enfance, le 30 septembre 2013, par un jugement en assistance éducative du tribunal de grande instance de Lille et maintenu auprès de ces services jusqu'à sa majorité. Il a ensuite bénéficié du dispositif " Accueil Provisoire JeuneC... " jusqu'au 31 mai 2014. Scolarisé à son arrivée en France, il a obtenu un certificat d'aptitude professionnelle " serrurier métallier " en juillet 2016. Toutefois, il ressort des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté en litige, M. A...est célibataire et sans enfant à charge. Il n'établit pas être dépourvu de toute attache familiale dans son pays d'origine dans lequel résident ses parents ainsi que ses quatre frères et soeurs et n'apporte aucun élément précis et probant de nature à démontrer, comme il le soutient, qu'il n'est plus susceptible de renouer de liens avec eux. Il ressort des pièces du dossier qu'il n'était plus scolarisé à la date de la décision attaquée. Dans ces conditions et en dépit de la durée de son séjour en France et des efforts d'intégration fournis par l'intéressé, le préfet du Nord n'a pas porté à son droit au respect de la vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision a été prise. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
9. Pour les mêmes raisons que celles énoncées au point 8, M. A...n'est pas fondé à soutenir que le préfet du Nord a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé.
10. Il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que le refus de titre de séjour est entaché d'illégalité.
Sur l'obligation de quitter le territoire français
11. Il résulte de ce qui a été dit au point 10 que M. A...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité du refus de titre de séjour à l'encontre de la décision l'obligeant à quitter le territoire français.
12. Par un arrêté du 18 mai 2017, régulièrement publié au recueil des actes administratifs spécial de la préfecture du même jour, le préfet du Nord a donné délégation à Mme G...D..., cheffe de bureau de la lutte contre l'immigration irrégulière, signataire de la décision contestée, à l'effet de signer notamment la décision en litige. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision d'obligation de quitter le territoire doit être écarté.
13. Pour les mêmes raisons que celles énoncées au point 8, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que le préfet aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé.
14. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant à l'encontre de la décision attaquée, qui ne fixe pas le pays à destination duquel l'intéressé est susceptible d'être renvoyé.
15. Il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire est entachée d'illégalité.
Sur la décision relative au délai de départ volontaire :
16. Par un arrêté du 18 mai 2017, régulièrement publié au recueil administratif spécial du même jour, le préfet du Nord a donné délégation à Mme G...D..., cheffe du bureau de lutte contre l'immigration irrégulière, à l'effet de signer notamment la décision en litige. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision octroyant un délai de départ volontaire doit être écarté.
17. Aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) L'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas (dans son pays d'origine, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du refus de titre de séjour doit être écarté) ".
18. Il ne ressort pas des pièces du dossier que la situation personnelle de M. A...justifie que lui soit accordé, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet lui aurait accordé un délai de départ volontaire insuffisant doit être écarté.
19. Il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que la décision lui octroyant un délai de départ volontaire de trente jours est entachée d'illégalité.
Sur la décision fixant le pays de destination
20. Il résulte de ce qui a été dit au point 15 que M. A...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français à l'encontre de la décision fixant le pays de destination.
21. La décision attaquée comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.
22. M. A...soutient qu'il serait victime de représailles en cas de retour au Burkina Faso en raison d'un incendie qu'il aurait provoqué. Il n'apporte toutefois pas d'éléments suffisamment précis et probants de nature à établir la réalité des risques personnels, directs et actuels qu'il encourrait, en raison de ces faits, en cas de retour dans son pays d'origine. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
23. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2: Le présent arrêt sera notifié à M. B...A..., au ministre de l'intérieur et à Me F...E.dans son pays d'origine, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du refus de titre de séjour doit être écarté
Copie en sera transmise pour information au préfet du Nord.
N°18DA00722 2