Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 4 décembre 2017 par lequel la préfète de la Seine-Maritime lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 1703936 du 22 février 2018, le tribunal administratif de Rouen a annulé l'arrêté de la préfète de la Seine-Maritime du 4 décembre 2017.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 20 mars 2018, la préfète de la Seine-Maritime demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de rejeter la demande de M.A....
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Hervé Cassara, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. Chaque année, un rapport présente au Parlement l'activité réalisée au titre du présent 11° par le service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ainsi que les données générales en matière de santé publique recueillies dans ce cadre. ". Aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. / (...). ".
2. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration venant au soutien de ses dires doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.
3. Pour rejeter la demande de titre de séjour présentée par M.A..., la préfète de la Seine-Maritime a considéré, au vu de l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 10 juillet 2017, que si son état de santé nécessite une prise en charge médicale, le défaut d'une telle prise en charge ne devrait pas entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Toutefois, il ressort des pièces produites par M. A... devant les premiers juges, en particulier de l'attestation du 6 octobre 2016 émanant d'un psychiatre du centre hospitalier du Rouvray, que l'état de santé du requérant " nécessite des soins continus en France " et qu' " un retour dans son pays d'origine aurait des conséquences d'une extrême gravité sur sa santé ". Il ressort aussi de l'attestation établie le 14 avril 2017 par un psychologue du pôle psychiatrique de ce même centre hospitalier, que " M. A...évolue dans cet état mental pathologique négativement combiné avec une précarité extrême ", que " son maintien nécessite donc toute notre attention et nos efforts thérapeutiques tels qu'existants depuis l'été 2016 " et que " l'état de désespoir absolu dans lequel nous l'avons rencontré nous permet de considérer qu'une rupture des aides pourrait s'avérer particulièrement dangereuse ". A supposer même que ces deux attestations aient été prises en compte par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration pour rendre son avis, ce que la préfète de la Seine-Maritime n'établit au demeurant pas plus en cause d'appel que devant les premiers juges, il ressort de ces attestations concordantes, émanant de professionnels de santé qui suivent M. A... régulièrement depuis l'été 2016, que le défaut de prise en charge devrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité au sens des dispositions citées au point 2.
4. Il résulte de ce qui précède que la préfète de la Seine-Maritime n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a annulé son arrêté du 4 décembre 2017 par lequel elle a refusé à M. A...la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de l'éloignement.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la préfète de la Seine-Maritime est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. B...A....
Copie en sera transmise pour information à la préfète de la Seine-Maritime.
N°18DA00612 2