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02/10/2018 | FRANCE | N°16DA01582

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre - formation à 3, 02 octobre 2018, 16DA01582


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société d'exercice libéral à responsabilité limitée (SELARL) Biodiagnostic a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler la décision implicite du directeur de l'agence régionale de santé (ARS) de Haute-Normandie refusant de procéder au retrait de la décision du 24 septembre 2013 portant modification de l'agrément de la société Rosebe et de l'arrêté du même jour portant autorisation de fonctionnement du laboratoire de biologie médicale société Centre de biologie médicale.

Par

un jugement n° 1403627 du 5 juillet 2016, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société d'exercice libéral à responsabilité limitée (SELARL) Biodiagnostic a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler la décision implicite du directeur de l'agence régionale de santé (ARS) de Haute-Normandie refusant de procéder au retrait de la décision du 24 septembre 2013 portant modification de l'agrément de la société Rosebe et de l'arrêté du même jour portant autorisation de fonctionnement du laboratoire de biologie médicale société Centre de biologie médicale.

Par un jugement n° 1403627 du 5 juillet 2016, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande et a mis à sa charge la somme de 1 000 euros à verser à la société Centre de biologie médicale.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 6 septembre 2016, la SELARL Biodiagnostic, représentée par Me D...A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 5 juillet 2016 du tribunal administratif de Rouen ;

2°) d'annuler la décision implicite de rejet du directeur de l'ARS de Haute-Normandie ;

3°) d'enjoindre au directeur de l'agence régionale de santé de Haute-Normandie de procéder au retrait de la décision n° DSP 2013 049 du 24 septembre 2013 modifiant l'agrément de la SELARL Rosebe et de l'arrêté n° DSP 2013 050 du même jour portant autorisation de fonctionnement du laboratoire de biologie multi-sites SELARL Centre de biologie médicale ou, à défaut, de procéder au réexamen de la demande de retrait de la décision relative à la SELARL Centre de biologie médicale ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'administration pouvait procéder au retrait des décisions du 24 septembre 2013 sans condition de délai ;

- l'autorisation de fonctionnement du laboratoire devait être retirée, les conditions de sa délivrance n'étant plus remplies ;

- l'agrément du laboratoire devait également être retiré, suite à des modifications dans sa forme juridique non conformes à la législation en vigueur ;

- la société Centre de biologie médicale aurait dû informer l'agence régionale de santé des modifications effectuées.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 novembre 2016, la SELARL Centre de biologie médicale, représentée par MeF..., conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) à ce qu'une amende pour recours abusif soit infligée à la SELARL Biodiagnostic ;

3°) à ce que les entiers dépens de l'instance soient mis à la charge de la SELARL Biodiagnostic, ainsi que la somme de 20 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- le code de la santé publique ;

- l'ordonnance n° 2010-49 du 13 janvier 2010 ;

- la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 ;

- la loi n° 2013-442 du 30 mai 2013 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Julien Sorin, président-assesseur,

- les conclusions de Mme Anne-Marie Leguin, rapporteur public,

- et les observations de Me C...B..., substituant MeE..., représentant Cerballiance Normandie, anciennement SELARL Centre de biologie médicale.

Considérant ce qui suit :

1. Par une décision du 24 septembre 2013, le directeur de l'agence régionale de santé de Haute-Normandie a modifié l'agrément de la société Rosebe, devenue société Centre de biologie médicale. Par un arrêté du même jour, il a autorisé le fonctionnement du laboratoire de biologie médicale géré par la société Centre de biologie médicale (CMB) sur neuf sites. Par un courrier du 12 juin 2014, la SELARL Biodiagnostic a demandé au directeur de l'agence régionale de santé de Haute-Normandie de procéder au retrait de ces deux décisions. La SELARL Biodiagnostic interjette appel du jugement du 5 juillet 2016 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet née du silence gardé par le directeur de l'agence régionale de santé de Haute-Normandie.

2. L'ordonnance du 13 janvier 2010 relative à la biologie médicale susvisée a remplacé l'autorisation, qui était jusqu'alors, en application du premier alinéa de l'article L. 6211-2 du code de la santé publique, nécessaire à un laboratoire d'analyses de biologie médicale pour fonctionner, par une accréditation, en l'absence de laquelle l'article L. 6221-1 du code de la santé publique prévoit désormais, depuis sa modification par cette ordonnance, qu'un laboratoire de biologie médicale ne peut réaliser d'examen de biologie médicale. Le I de l'article 7 de l'ordonnance du 13 janvier 2010 prévoit cependant, à titre de dispositions transitoires, que, jusqu'au 31 octobre 2020, un laboratoire de biologie médicale privé doit, pour fonctionner, détenir, s'il n'est pas accrédité, l'autorisation administrative prévue antérieurement à cette ordonnance au premier alinéa de l'article L. 6211-2 du code de la santé publique. Cet article disposait qu'" aucun laboratoire d'analyses de biologie médicale ne peut fonctionner sans une autorisation administrative (...). / Toute modification survenue postérieurement à la décision d'autorisation soit dans la personne d'un directeur ou d'un directeur adjoint, soit dans les conditions d'exploitation, doit faire l'objet d'une déclaration. / L'autorisation est retirée lorsque les conditions légales ou réglementaires cessent d'être remplies ". Il résulte par ailleurs de la loi du 31 décembre 1990 relative à l'exercice sous forme de sociétés des professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé et aux sociétés de participations financières de professions libérales susvisée que l'exploitation d'un laboratoire d'analyses médicales sous la forme d'une société d'exercice libérale nécessite la délivrance d'un agrément par l'autorité administrative compétente ou son inscription sur la liste ou les listes ou au tableau de l'ordre ou des ordres professionnels. Les dispositions de l'article R. 6212-76 du code de la santé publique prévoyaient que la demande d'agrément de la société d'exercice libéral constituée pour l'exploitation d'un laboratoire était présentée en même temps que la demande d'autorisation de fonctionnement prévue au premier alinéa de l'article L. 6211-2. L'article R. 6212-79 du même code disposait que : " la demande d'agrément de la société ne peut être rejetée que pour des motifs tirés du non-respect des dispositions législatives et réglementaires en vigueur, notamment de celles des articles L. 6221-1, L. 6221-2 et L. 6221-9, ou du refus d'autorisation du laboratoire, ou de la non-conformité de la demande aux conditions exigées aux articles R. 6212-76 et R. 6212-77. ". Enfin, l'article R. 6212-80 de ce code disposait, dans sa rédaction alors applicable, que : " La décision de refus ou de retrait d'agrément est motivée. Elle ne peut être prise qu'après que la société a été mise en mesure de présenter ses observations orales ou écrites. ".

3. Il résulte de l'ensemble de ces dispositions que, pour pouvoir exploiter un laboratoire d'analyse médicale sous la forme d'une société d'exercice libéral, une société devait obtenir, avant l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 13 janvier 2010 dans les conditions énoncées au point précédent, une autorisation d'exploitation relative aux conditions d'exercice de son activité et un agrément relatif à sa forme commerciale. Ces deux autorisations pouvaient faire l'objet d'un " retrait " pour l'avenir, par décision motivée et contradictoire, si les conditions d'octroi cessaient d'être remplies, ce " retrait " constituant ainsi juridiquement une abrogation.

4. Il en résulte que la société Biodiagnostic doit être regardée comme ayant sollicité, tant dans sa demande préalable que dans le cadre de ses écritures contentieuses, l'abrogation de l'agrément délivré à la société CBM, et de son autorisation d'exploiter un laboratoire d'analyses médicales.

5. S'il est constant que la répartition des parts sociales du capital de la société CBM, ainsi que sa forme juridique ont été modifiées à plusieurs reprises en décembre 2013, il n'est pas plus contesté, et il ressort des pièces du dossier, qu'à la date où la société requérante a demandé l'abrogation de l'autorisation d'exploiter et de l'agrément de la société CBM, ainsi qu'à la date à laquelle le directeur de l'agence régionale de santé a refusé de procéder à ces abrogations, les conditions légales et réglementaires de délivrance de l'autorisation de fonctionnement du laboratoire d'analyses médicales CBM, et de délivrance de son agrément étaient remplies. S'il ressort, par ailleurs, des pièces du dossier que la société CBM n'avait pas informé l'agence régionale de santé de Haute-Normandie de ces modifications, en méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 6211-2 du code de la santé publique, cette circonstance est, en tout état de cause, sans incidence sur la légalité du refus opposé par l'administration, l'information de l'administration de toute modification de la société n'étant pas prescrite à peine d'abrogation et n'étant, à la date de la décision en litige, soumise à aucun délai. En outre, la circonstance, au demeurant non établie, selon laquelle la société CBM aurait procédé à de nouvelles modifications de la répartition des parts sociales de son capital en janvier 2015 est postérieure aux décisions litigieuses et, par suite, sans incidence sur leur légalité. Dans ces conditions, le directeur de l'agence régionale de santé de Haute-Normandie a pu, sans méconnaître les dispositions citées au point 2 des articles L. 6211-2 et R. 6212-79 du code de la santé publique, refuser d'abroger la décision du 24 septembre 2013 modifiant l'agrément de la société Rosebe devenue CBM, et l'arrêté du même jour l'autorisant à exploiter un laboratoire d'analyses médicales sur neuf sites.

6. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la société CBM, que la SELARL Biodiagnostic n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite du directeur de l'agence régionale de santé de Haute-Normandie refusant de procéder à l'abrogation de la décision et de l'arrêté du 24 septembre 2013.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article R. 741-12 du code de justice administrative :

7. Aux termes de l'article R. 741-12 du code de justice administrative, dans sa rédaction issue du décret n° 2016-1480 du 2 novembre 2016 portant modification du code de justice administrative : " Le juge peut infliger à l'auteur d'une requête qu'il estime abusive une amende dont le montant ne peut excéder 10 000 euros ".

8. La faculté ouverte par ces dispositions constitue un pouvoir propre du juge. Par suite, les conclusions de la société Centre de biologie médicale tendant à ce que la société Biodiagnostic soit condamnée au paiement d'une amende pour recours abusif ne peuvent être accueillies.

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant qu'il n'y a pas lieu de mettre à la charge de la société CBM, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par la société Biodiagnostic au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Biodiagnostic la somme demandée par la société CBM au titre des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SELARL Biodiagnostic est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la société CBM sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SELARL Biodiagnostic, au ministre des solidarités et de la santé et à Cerballiance Normandie, anciennement SELARL Centre de biologie médicale.

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N°16DA01582


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16DA01582
Date de la décision : 02/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

61-08-01 Santé publique. Divers établissements à caractère sanitaire. Laboratoires d'analyses de biologie médicale.


Composition du Tribunal
Président : M. Sorin
Rapporteur ?: M. Julien Sorin
Rapporteur public ?: Mme Leguin
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS LUSSAN

Origine de la décision
Date de l'import : 09/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2018-10-02;16da01582 ?
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