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20/09/2018 | FRANCE | N°16DA01535

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 20 septembre 2018, 16DA01535


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision du 19 mai 2015 par laquelle le préfet de la zone de défense et de sécurité Nord lui a refusé l'agrément aux fonctions de gardien de la paix, d'enjoindre au préfet de lui délivrer l'agrément aux fonctions de gardien de la paix de la police nationale sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de la notification du jugement à intervenir, d'enjoindre au préfet de procéder à son intégration dans le corps des ga

rdiens de la paix de la police nationale et à la reconstitution de sa carrière ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision du 19 mai 2015 par laquelle le préfet de la zone de défense et de sécurité Nord lui a refusé l'agrément aux fonctions de gardien de la paix, d'enjoindre au préfet de lui délivrer l'agrément aux fonctions de gardien de la paix de la police nationale sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de la notification du jugement à intervenir, d'enjoindre au préfet de procéder à son intégration dans le corps des gardiens de la paix de la police nationale et à la reconstitution de sa carrière sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de la notification du jugement à intervenir et de condamner l'Etat à lui verser 50 000 euros en réparation du préjudice moral qu'il estime avoir subi en raison du refus d'agrément dont il a fait l'objet.

Par un jugement n° 1506084 du 5 juillet 2016, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 26 août 2016, M.B..., représenté par Me E...C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 5 juillet 2016 du tribunal administratif de Lille ;

2°) d'annuler la décision du 19 mai 2015 du préfet de la zone de défense et de sécurité Nord ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer l'agrément aux fonctions de gardien de la paix de la police nationale sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) d'enjoindre au préfet de procéder à son intégration dans le corps des gardiens de la paix de la police nationale et à la reconstitution de sa carrière sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

5°) de condamner l'Etat à lui verser la somme 50 000 euros en réparation du préjudice moral qu'il estime avoir subi en raison du refus d'agrément dont il a fait l'objet ;

6°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 9 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n°79-597 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 ;

- le décret n°95-654 du 9 mai 1995 ;

- le décret n°2004-1439 du 23 décembre 2004 ;

- l'arrêté du 2 août 2010 relatif aux conditions d'aptitude physique particulières pour l'accès aux emplois de certains corps de fonctionnaires ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Valérie Petit, président-assesseur,

- les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public,

- et les observations de Me E...C..., représentant M.B....

Considérant ce qui suit :

1. M. A...B...a été reçu au concours de gardien de la paix le 10 septembre 2008. Avant de procéder à son admission définitive, M. B... a passé plusieurs visites médicales afin de s'assurer de son aptitude médicale et a également fait l'objet d'une enquête administrative en vue de l'agrément de sa candidature. Par une décision du 1er juin 2011, le préfet de la zone de défense et de sécurité Nord a considéré que M. B... était médicalement inapte aux fonctions de gardien de la paix. Par une seconde décision du 20 mars 2012, le préfet a refusé d'agréer sa candidature. Par un jugement du tribunal administratif de Lille du 29 octobre 2013, confirmé par un arrêt du 19 juin 2014 de la cour administrative d'appel de Douai, ces décisions des 1er juin 2011 et 20 mars 2012 ont été annulées. En exécution de cet arrêt, M. B...a été convoqué, le 24 novembre 2014, au service médical du secrétariat général pour l'administration du ministère de l'intérieur. Par une décision du 19 mai 2015, le préfet de la zone de défense et de sécurité Nord a confirmé son inaptitude médicale au vu de l'avis du médecin chef de la police nationale et que l'agrément ne peut lui être, in fine, accordé. M. B... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision du 19 mai 2015.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article 4 du décret n° 95-654 du 9 mai 1995 fixant les dispositions communes applicables aux fonctionnaires actifs des services de la police nationale : " Outre les conditions générales prévues par l'article 5 de la loi du 13 juillet 1983 susvisée et les conditions spéciales prévues par les statuts particuliers, nul ne peut être nommé à un emploi des services actifs de la police nationale : 1° S'il n'a pas la nationalité française ; 2° S'il n'est pas reconnu apte, après examen médical effectué par le médecin agréé de l'administration conformément au décret n° 86-442 du 14 mars 1986, à un service actif de jour et de nuit ; 3° Si sa candidature n'a pas reçu l'agrément du ministre de l'intérieur. ". Il appartient à l'autorité administrative d'apprécier, dans l'intérêt du service, si les candidats à un emploi des services actifs de la police nationale présentent les garanties requises pour l'exercice des fonctions auxquelles ils postulent.

3. La décision du 19 mai 2015 énonçant que le médecin chef de la police nationale a confirmé l'inaptitude médicale définitive de M. B...doit être regardée comme un refus de nomination au grade de gardien de la paix en raison de cette inaptitude au sens du 2° de l'article 4 du décret précité et non, comme l'ont estimé les premiers juges, comme un refus d'agrément au sens des dispositions du 3° du même article, dont il ressort que dans l'intérêt du service, l'autorité administrative doit apprécier si les candidats à un emploi des services actifs de la police nationale présentent les garanties requises. Alors même que le préfet a estimé que M. B... ne pourrait finalement pas être agréé pour sa nomination dans un emploi des services actifs de la police nationale, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que le préfet ait entendu se fonder sur son comportement pour prendre la décision en litige. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet ne pouvait se fonder sur un motif d'inaptitude médicale pour refuser de l'agréer au sens des dispositions du 3° de l'article 4 du décret du 9 mai 1995 cité au point 2 est inopérant.

4. Eu égard à ce qui vient d'être dit, M. B...ne peut également utilement faire valoir que le préfet ne justifie d'aucun fait relatif à son comportement ou à ses fréquentations susceptible de justifier un refus d'agrément, puisque la décision en litige ne repose que sur son inaptitude physique à un service actif de jour et de nuit. Il ne peut davantage utilement soutenir que la décision ne saurait être fondée sur les mêmes motifs que la décision du 20 mars 2012, sauf à méconnaitre l'autorité de chose jugée du jugement du 19 octobre 2013 du tribunal administratif de Lille.

5. Si M B...fait aussi valoir qu'il n'a pas eu connaissance des raisons médicales pour lesquelles son inaptitude médicale a été confirmée, le préfet a, en tout état de cause, suffisamment motivé sa décision au regard du secret médical, en se référant aux termes de l'avis du médecin chef de la police nationale et de son adjoint, dont il est établi qu'il lui a été communiqué. Aucune disposition légale ou réglementaire n'imposait au préfet de joindre à la décision en cause les pièces médicales ou antécédents médicaux sur lesquels se sont fondés le médecin chef de la police nationale et son adjoint pour rendre leur avis. Il appartient, le cas échéant, uniquement à l'autorité médicale de communiquer à M. B...les motifs médicaux de son inaptitude, qu'il n'a, au demeurant, pas demandés.

6. Il ressort des pièces du dossier qu'en exécution du jugement du 29 novembre 2013 du tribunal administratif de Lille, confirmé par un arrêt de la cour du 19 juin 2014, M. B...a subi une nouvelle visite médicale le 24 novembre 2014, effectuée par le DrD..., médecin inspecteur régional, à la suite de laquelle un avis a été émis, sur pièces, par le médecin chef de la police nationale et par son adjoint. Aucune circonstance ne faisait ainsi obstacle à ce que le médecin-chef et son adjoint se prononcent sur dossier et au vu de l'ensemble des pièces médicales du dossier de M.B..., alors même que certaines remonteraient à plusieurs années. Le moyen tiré de ce que la décision en litige ne pouvait se fonder sur la situation médicale antérieure de M. B...ne peut qu'être écarté.

7. Aux termes de l'article 2 de l'arrêté du 2 août 2010 relatif aux conditions d'aptitude physique particulières pour l'accès aux emplois de certains corps de fonctionnaires : " L'appréciation des conditions d'aptitude physique particulières pour l'accès aux corps de fonctionnaires visés en annexe ne peut porter que sur la capacité de chaque candidat, estimée au moment de l'admission, à exercer les fonctions auxquelles ces corps donnent accès. Lorsque, en application du statut particulier, une période de formation obligatoire préalable à la nomination ou la titularisation est requise, l'appréciation des conditions d'aptitude physique particulière doit avoir lieu préalablement à la période de formation. ". Aux termes de l'article 8 du même arrêté : "Les dispositions du présent arrêté s'appliquent aux concours ouverts à compter du 1er juillet 2010 ". Le requérant, qui a passé le concours de gardien de la paix en 2008, ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article 2 de l'arrêté du 2 août 2010 précité.

8. En tout état de cause, si M. B...se prévaut de l'avis du 29 janvier 2009 aux termes duquel il a été déclaré apte médicalement aux fonctions de gardien de la paix, cette seule circonstance ne saurait faire obstacle à ce que l'administration réexamine l'état de santé de l'intéressé en fonction de nouveaux éléments portés à sa connaissance et ce, tant qu'il n'a pas été titularisé dans le grade de gardien de la paix. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet aurait commis une erreur de droit en ne se fondant pas sur l'appréciation de son état de santé au moment de l'admission doit être écarté.

9. M. B...se prévaut aussi de la décision initiale d'aptitude médicale du 29 janvier 2009 citée au point précédent, du certificat médical de son médecin généraliste du 24 juin 2011 et du rapport d'expertise établi le 24 novembre 2012, à la suite d'une ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Lille, indiquant qu'il n'était pas atteint d'une pathologie psychiatrique, ni ne présentait de trouble de la personnalité significatif. Il ressort toutefois des pièces du dossier que, par un avis des 17 et 20 mai 2011, le médecin psychiatre agréé par le ministère de l'intérieur relève que l'intéressé, qui a été hospitalisé durant une semaine en 2009 en psychiatrie, présente une personnalité fragile avec des difficultés d'adaptation à la réalité et une tendance interprétative. M. B...a, au demeurant, été exempté du service national pour un classement P4. Dans ces conditions, si le requérant peut se prévaloir du rapport d'expertise favorable établi en 2012, il n'apporte aucun nouvel élément depuis cette date de nature à remettre en cause l'appréciation portée par le médecin chef de la police nationale et par son adjoint en 2014. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que la décision contestée serait entachée d'une erreur d'appréciation doit être écarté.

10. Les éléments de l'instruction ne comportent pas d'indice de nature à révéler qu'à la date à laquelle la décision en litige a été prise, l'intention véritable de l'administration aurait été de ne pas intégrer M. B...au sein de la police nationale pour un autre motif que celui tiré de son inaptitude médicale. Par suite, le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi.

11. Il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 19 mai 2015. Ses conclusions à fin d'injonction doivent, par voie de conséquence, être rejetées.

Sur les conclusions indemnitaires :

12. Il résulte de ce qui a été dit précédemment, qu'aucune illégalité n'entache la décision du 19 mai 2015. Par suite, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée par l'Etat, les conclusions indemnitaires doivent, par voie de conséquence, être rejetées.

Sur les frais liés à l'instance :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat une somme au titre des frais exposés par M. B...et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

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N°16DA01535

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16DA01535
Date de la décision : 20/09/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-03-01-01 Fonctionnaires et agents publics. Entrée en service. Conditions générales d'accès aux fonctions publiques. Aptitude physique à exercer.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: Mme Valérie Petit
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : MOCK-FREDERIC ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 23/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2018-09-20;16da01535 ?
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