Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Me B...C..., agissant en qualité de mandataire judicaire, liquidateur de la SELARL pharmacie docteurD..., a demandé au tribunal administratif de Lille l'annulation de la décision implicite de la ministre chargée des affaires sociales et de la santé rejetant son recours hiérarchique dirigé contre l'arrêté du directeur de l'agence régionale de santé du Nord-Pas-de-Calais (ARS) du 17 juillet 2014 rejetant sa demande de transfert d'officine de pharmacie.
Par un jugement n° 1409528 du 19 mai 2016, le tribunal administratif de Lille a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 16 août 2016, Me B...C..., agissant en qualité de mandataire judicaire, liquidateur de la SELARL pharmacie docteurD..., représenté par Me A...E..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Lille du 19 mai 2016 ;
2°) d'annuler la décision de la ministre des affaires sociales et de la santé rejetant implicitement son recours hiérarchique dirigé contre l'arrêté du directeur de l'agence régionale de santé du Nord-Pas-de-Calais du 17 juillet 2014 rejetant sa demande de transfert d'officine de pharmacie ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,
- et les conclusions de M. Jean-Michel Riou, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. D...a demandé le transfert de l'officine de pharmacie qu'il exploite 5 place Léo Lagrange à Outreau vers le centre commercial de la Liane, situé sur la même commune. Par décision du 7 mai 1999, le préfet du Pas-de-Calais a refusé d'autoriser ce transfert. Cette décision a été annulée par un jugement du tribunal administratif de Lille du 13 février 2003. Par un arrêté du 22 décembre 2010, l'agence régionale de santé Nord-Pas-de-Calais a refusé d'autoriser M. D...à effectuer le transfert de son officine de pharmacie vers le même centre commercial. Cet arrêté a été annulé par un jugement du tribunal administratif de Lille du 15 octobre 2013. M. D...a, une nouvelle fois, demandé le transfert de son officine de pharmacie vers le centre commercial de la Liane. Cette autorisation a été refusée par un arrêté du 17 juillet 2014 du directeur de l'agence régionale de santé Nord-Pas-de-Calais. Le recours hiérarchique introduit contre cet arrêté auprès de la ministre chargée de la santé et des affaires sociales a été implicitement rejeté. Une procédure de liquidation judiciaire de la pharmacie docteur D...a été ouverte par le tribunal de commerce de Boulogne-sur-Mer le 25 novembre 2014. Me B...C..., agissant en qualité de mandataire judiciaire, liquidateur de la pharmacie docteur D...relève appel du jugement du 19 mai 2016 du tribunal administratif de Lille rejetant sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet du recours hiérarchique.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article L. 5125-3 du code de la santé publique : " Les créations, les transferts et les regroupements d'officines de pharmacie doivent permettre de répondre de façon optimale aux besoins en médicaments de la population résidant dans les quartiers d'accueil de ces officines. Les transferts et les regroupements ne peuvent être accordés que s'ils n'ont pas pour effet de compromettre l'approvisionnement nécessaire en médicaments de la population résidente de la commune ou du quartier d'origine. / Les créations, les transferts et les regroupements d'officines de pharmacie ne peuvent être effectués que dans un lieu qui garantit un accès permanent du public à la pharmacie et permet à celle-ci d'assurer un service de garde ou d'urgence mentionné à l'article L. 5125-22. ".
3. L'agence régionale de santé du Nord-Pas-de-Calais a fondé l'arrêté de refus de transfert du 17 juillet 2014 sur la compromission de l'approvisionnement en médicaments des habitants du secteur avoisinant l'officine actuelle de M. D...et l'absence d'amélioration de la desserte pharmaceutique du secteur de la nouvelle implantation. Le dossier présenté par M. D... au soutien de sa demande de transfert d'officine est toutefois similaire à ceux présentés lors de ses demandes précédentes, et pour lesquels les refus opposés par l'administration ont été annulés par les premiers juges. Les éléments factuels tels que la population du quartier Manihen-Salengro et la distance entre l'officine et le centre commercial ont peu évolué. Il ressort des pièces du dossier que la place Léo Lagrange, où se situe l'officine actuelle de la pharmacie docteurD..., et le centre commercial de la Liane, au sein duquel le transfert est sollicité, sont situés dans un seul et même quartier de la commune d'Outreau, nommé Manihen-Salengro, et appartiennent au même îlot regroupé pour l'information statistique (IRIS), tel que défini par l'institut national de la statistique et des études économiques en 1999. Aucune autre officine de pharmacie n'est située dans le quartier Manihen-Salengro. De plus, Me C... soutient, sans être contredit par la ministre des solidarités et de la santé, que les principales voies de circulation de l'ensemble du quartier mènent au centre commercial, tant depuis la zone nord que depuis la zone sud où est implantée l'officine actuelle. Si le centre commercial de la Liane est séparé du reste du quartier par une voie ferrée, il ressort des pièces du dossier que celle-ci est traversée par un passage à niveau, et que les piétons bénéficient d'un chemin dédié pour franchir la voie ferrée et se rendre au centre commercial. Il ressort en outre des pièces du dossier que les quelques places de stationnement de la place Léo Lagrange sont séparés de l'officine actuelle par une rue passante, et que l'officine n'est pas accessible aux personnes à mobilité réduite. En revanche, la desserte du centre commercial est facilitée par un grand parking et le nouvel emplacement sera accessible aux personnes à mobilité réduite. De plus, un arrêt de bus est situé à environ cent mètres de l'entrée du centre commercial, et Me C... soutient, sans être contredit, que les déplacements en transport public sont gratuits pour les personnes âgées. Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, le transfert de l'officine pharmacie docteur D...répondait de façon optimale aux besoins de la population du quartier Manihen-Salengro de la commune d'Outreau. Par suite, la décision en litige, rejetant implicitement le recours hiérarchique introduit contre l'arrêté du 17 juillet 2014 du directeur de l'agence régionale de santé Nord-Pas-de-Calais, est entachée d'une erreur d'appréciation quant au caractère non optimal de la réponse aux besoins de la population et doit être annulée.
4. Il résulte de ce qui précède que Me C...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Il y a lieu d'annuler, par suite, l'arrêté du 17 juillet 2014 du directeur de l'agence régionale de santé Nord-Pas-de-Calais et la décision implicite de la ministre des solidarités et de la santé rejetant le recours hiérarchique introduit par M. D...contre cet arrêté.
Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
5. Il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à Me C..., agissant en qualité de mandataire judicaire, liquidateur de la pharmacie docteur D... sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n°1409528 du 19 mai 2016 du tribunal administratif de Lille est annulé.
Article 2 : L'arrêté du 17 juillet 2014 du directeur de l'agence régionale de santé Nord-Pas-de-Calais et la décision implicite de la ministre des solidarités et de la santé rejetant le recours hiérarchique introduit par M. D...contre cet arrêté sont annulés.
Article 3 : L'Etat versera à Me C...une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Me B...C...et à la ministre des solidarités et de la santé.
Copie sera adressée à l'agence régionale de santé Hauts-de-France.
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N°16DA01491