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15/03/2018 | FRANCE | N°17DA02136

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre - formation à 3, 15 mars 2018, 17DA02136


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...D...a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler pour excès de pouvoir, d'une part, l'arrêté du 25 juillet 2017 du préfet du Nord ordonnant son transfert vers l'Allemagne, en tant que les autorités de cet Etat sont responsables de sa demande d'asile et, d'autre part, l'arrêté du 31 octobre 2017 du préfet de l'Aisne l'assignant à résidence.

Par un jugement n° 1703059 du 10 novembre 2017, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif d'Amiens a fait droit à

cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 15 novem...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...D...a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler pour excès de pouvoir, d'une part, l'arrêté du 25 juillet 2017 du préfet du Nord ordonnant son transfert vers l'Allemagne, en tant que les autorités de cet Etat sont responsables de sa demande d'asile et, d'autre part, l'arrêté du 31 octobre 2017 du préfet de l'Aisne l'assignant à résidence.

Par un jugement n° 1703059 du 10 novembre 2017, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif d'Amiens a fait droit à cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 15 novembre 2017, le préfet de l'Aisne demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 10 novembre 2017 de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif d'Amiens ;

2°) de rejeter la demande de M. D...devant le tribunal administratif.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Paul-Louis Albertini, président de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.D..., ressortissant irakien né le 1er septembre 1992, a sollicité l'asile, le 21 février 2017, auprès de la préfecture du Nord ; qu'à l'occasion de l'enregistrement de sa demande, le préfet du Nord a procédé à la consultation du ficher Eurodac, laquelle a permis d'établir que l'intéressé avait déjà sollicité l'asile en Allemagne, le 8 mars 2016 ; que, par l'arrêté en litige du 25 juillet 2017, le préfet du Nord a ordonné le transfert de M. D... auprès des autorités allemandes, responsables de l'examen de sa demande d'asile ; que, le 31 octobre 2017, le préfet de l'Aisne l'a assigné à résidence ; que le préfet de l'Aisne relève appel du jugement du 10 novembre 2017 par lequel la magistrate désignée par le président du tribunal administratif d'Amiens a annulé ces arrêtés ;

Sur la recevabilité des conclusions du préfet de l'Aisne à fin d'annulation du jugement de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif d'Amiens annulant l'arrêté du 25 juillet 2017 du préfet du Nord :

2. Considérant que si le préfet de l'Aisne est recevable à faire appel du jugement en tant que la magistrate désignée par le président du tribunal administratif a annulé son arrêté assignant à résidence M.D..., il est en revanche sans qualité et, par suite, sans intérêt à contester ce jugement en tant que le tribunal a annulé l'arrêté du préfet du Nord du 25 juillet 2017 ; que, par suite, les conclusions du préfet de l'Aisne tendant à l'annulation du jugement de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif d'Amiens sont irrecevables et doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation du jugement de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif d'Amiens en tant qu'il annule l'arrêté du 31 octobre 2017 :

3. Considérant qu'aux termes de termes de l'article L. 742-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I.- L'étranger qui a fait l'objet d'une décision de transfert mentionnée à l'article L. 742-3 peut, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de cette décision, en demander l'annulation au président du tribunal administratif (...) / L'étranger peut demander au président du tribunal ou au magistrat désigné par lui le concours d'un interprète. L'étranger est assisté de son conseil, s'il en a un. Il peut demander au président du tribunal administratif ou au magistrat désigné à cette fin qu'il lui en soit désigné un d'office.(...) " ; qu'aux termes de l'article R. 777-3-1 du code de justice administrative : " I. Conformément aux dispositions du I de l'article L. 742-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la notification d'une décision de transfert fait courir un délai de quinze jours pour contester cette décision (...) " ; que l'article R. 777-3-2 du même code dispose que : " Les délais de recours contentieux mentionnés à l'article R. 777-3-1 ne sont susceptibles d'aucune prorogation. (...) " ;

4. Considérant qu'il incombe à l'administration, lorsqu'elle oppose une fin de non-recevoir tirée de la tardiveté d'une action introduite devant une juridiction administrative, d'établir la date à laquelle la décision attaquée a été régulièrement notifiée à l'intéressé ; qu'en cas de retour à l'administration, au terme du délai de mise en instance, du pli recommandé contenant la décision, la notification est réputée avoir été régulièrement accomplie à la date à laquelle ce pli a été présenté à l'adresse de l'intéressé, dès lors du moins qu'il résulte soit de mentions précises, claires et concordantes portées sur l'enveloppe, soit, à défaut, d'une attestation du service postal ou d'autres éléments de preuve, que le préposé a, conformément à la réglementation en vigueur, déposé un avis d'instance informant le destinataire que le pli était à sa disposition au bureau de poste ; que, compte tenu des modalités de présentation des plis recommandés prévues par la réglementation postale, doit être regardé comme portant des mentions précises, claires et concordantes suffisant à constituer la preuve d'une notification régulière le pli recommandé retourné à l'administration auquel est rattaché un volet " avis de réception " sur lequel a été apposé par voie de duplication la date de vaine présentation du courrier et qui porte, sur l'enveloppe ou l'avis de réception, l'indication du motif pour lequel il n'a pu être remis ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet du Nord a informé M. D...de ce que l'Allemagne était responsable de sa demande d'asile par une lettre recommandée avec accusé de réception du 16 août 2017 avisée le 27 juillet 2017 à une adresse connue de l'administration que le requérant avait déclaré lors de sa demande d'asile ; que l'avis de réception attaché aux plis recommandés contenant l'arrêté de réadmission adressé au requérant et retournés à l'administration, comportent la mention " avisé le 27 juillet 2017 " ; que la case " pli avisé et non réclamé ", correspondant au motif de distribution y est cochée ; qu'ainsi, l'arrêté du 25 juillet 2017 lequel mentionnait les voies et délais de recours doit être regardé comme ayant été régulièrement notifié à l'intéressé au plus tard le 27 juillet 2017 ; que le délai de recours contentieux de quarante-huit heures, déclenché par cette notification, était expiré lorsque M. D...a, le 7 novembre 2017, saisi le tribunal administratif d'Amiens d'une demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Nord du 25 juillet 2017 ordonnant son transfert aux autorités allemandes, responsables de sa demande d'asile et l'arrêté du préfet de l'Aisne du 31 octobre 2017 ordonnant son assignation à résidence ; que si le requérant se prévaut du fait qu'il se trouvait dans la " jungle " de Calais au moment de la notification de l'arrêté du 25 juillet 2017, ces circonstances ne sont pas de nature à établir qu'il aurait été empêché d'informer le préfet du Nord de son changement d'adresse antérieurement à la notification de l'arrêté contesté ; que, dès lors, le préfet de l'Aisne est fondé à soutenir que c'est à tort que la magistrate désignée par le président du tribunal administratif d'Amiens a annulé, par voie de conséquence, son arrêté du 31 octobre 2017 ;

6. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. D... contre la décision l'assignant à résidence devant le tribunal administratif d'Amiens ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui a été précédemment que le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision ordonnant le transfert aux autorités allemandes de M. D... doit être écarté ;

8. Considérant que l'arrêté attaqué précise que M. D...a fait l'objet d'un arrêté du préfet du Nord du 25 juillet 2017 par lequel il a ordonné son transfert aux autorités allemandes, responsables de sa demande d'asile, que celui-ci n'a pas exécuté volontairement cette mesure dans le délai de trente jours imparti, qu'il s'est maintenu sciemment en situation irrégulière sur le sol français, qu'il justifiait d'un domicile et présentait des garanties propres à prévenir le risque qu'elle se soustrait à ses obligations ; que si M. D...soutient que l'arrêté ordonnant son transfert aux autorités allemandes a été notifié à une adresse qui n'était plus la sienne, il ne démontre, toutefois, pas que cette information a été portée à la connaissance de l'administration ; que, par suite, le moyen tiré du défaut d'examen particulier de sa situation personnelle manque en fait et ne peut qu'être écarté ;

9. Considérant que l'arrêté du 31 octobre 2017 du préfet de l'Aisne vise les textes sur lesquels il se fonde, notamment les articles L. 561-2, R. 561-2 et R. 561-3 du code de l'entée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et mentionne les éléments relatifs à la situation de M. D...de nature à justifier le recours à l'assignation à résidence ; que, dès lors, l'arrêté du 31 octobre 2017 est suffisamment motivé en droit et en fait ;

10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans les cas prévus à l'article L. 551-1, l'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger pour lequel l'exécution de l'obligation de quitter le territoire demeure une perspective raisonnable et qui présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque, mentionné au II de l'article L. 511-1, qu'il se soustraie à cette obligation " ;

11. Considérant que M. D...a fait l'objet, le 25 juillet 2017, d'un arrêté du préfet du Nord ordonnant son transfert aux autorités allemandes, responsables de l'examen de sa demande d'asile ; que, si cet arrêté a été annulé par la magistrate désignée par le président du tribunal administratif d'Amiens, cette annulation n'a été prononcée que le 10 novembre 2017 ; que M. D...a déclaré au préfet de l'Aisne, être hébergé auprès de COALLIA, à Soissons, où il établit y avoir sa résidence effective et stable ; qu'il devait, en outre, se présenter tous les jours au commissariat de Soissons ; que, dans ces conditions, le préfet de l'Aisne, en assignant M.D..., à résidence, par un arrêté du 31 octobre 2017, n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de l'Aisne est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif d'Amiens a annulé, par voie de conséquence, son arrêté du 31 octobre 2017 ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, les conclusions de M. D...tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'article 2 du jugement de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif d'Amiens du 10 novembre 2017 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. D...devant le tribunal administratif d'Amiens tendant à l'annulation de la décision du 31 octobre 2017 du préfet de l'Aisne l'assignant à résidence est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à M. D... et à Me A...C....

Copie en sera adressée pour information au préfet de l'Aisne et au préfet du Nord.

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N°17DA02136

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17DA02136
Date de la décision : 15/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Paul Louis Albertini
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : FAVRE GUERREIRO

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2018-03-15;17da02136 ?
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