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20/02/2018 | FRANCE | N°17DA01194

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre - formation à 3, 20 février 2018, 17DA01194


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au tribunal administratif de Lille de lui accorder le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire et d'annuler l'arrêté du 30 mars 2017 par lequel le préfet du Nord a ordonné son transfert aux autorités danoises et son assignation à résidence.

Par un jugement n° 1703004 du 6 avril 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille l'a admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire et a rejeté le surplus de sa demande.

Proc

dure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 20 juin 2017, M.C..., représenté par...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au tribunal administratif de Lille de lui accorder le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire et d'annuler l'arrêté du 30 mars 2017 par lequel le préfet du Nord a ordonné son transfert aux autorités danoises et son assignation à résidence.

Par un jugement n° 1703004 du 6 avril 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille l'a admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire et a rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 20 juin 2017, M.C..., représenté par Me B...D..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Lille du 6 avril 2017 en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 mars 2017 du préfet du Nord ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Nord du 30 mars 2017 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Nord d'enregistrer sa demande d'asile et de lui délivrer une attestation de dépôt de demande d'asile ou, à défaut, d'enjoindre au préfet de procéder à un nouvel examen de sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 200 euros sur le fondement des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- le protocole n° 22 sur la position du Danemark annexé au traité sur l'Union européenne et au traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- l'accord entre la Communauté européenne et le Royaume de Danemark concernant les critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée par un ressortissant d'un pays tiers au Danemark ou dans tout autre État membre de l'Union européenne et le système "Eurodac" pour la comparaison des empreintes digitales aux fins de l'application efficace de la convention de Dublin publié au journal officiel de l'Union européenne du 8 mars 2006 ;

- le règlement (CE) n° 1560/2003 de la Commission du 2 septembre 2003 ;

- le règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le règlement d'exécution (UE) n° 118/2014 de la Commission du 30 janvier 2014 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M. A...C..., ressortissant afghan né le 13 juillet 1997, relève appel du jugement du 6 avril 2017 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 mars 2017 du préfet du Nord ordonnant son transfert aux autorités danoises et son assignation à résidence ;

Sur la décision de transfert :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 2 du protocole n° 22 annexé au Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne : " Aucune des dispositions de la troisième partie, titre V, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, aucune mesure adoptée en application dudit titre, aucune disposition d'un accord international conclu par l'Union en application dudit titre et aucune décision de la Cour de justice de l'Union européenne interprétant ces dispositions ou mesures ou toute mesure modifiée ou modifiable en application dudit titre, ne lie le Danemark ou n'est applicable à son égard ; ces dispositions, mesures ou décisions ne portent en rien atteinte aux compétences, aux droits et aux obligations du Danemark (...) " ; que le considérant 42 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013, dit " règlement Dublin III ", ne fait que rappeler ces dispositions en prévoyant que : " Conformément aux articles 1er et 2 du protocole n° 22 sur la position du Danemark annexé au traité sur l'Union européenne et au traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, le Danemark ne participe pas à l'adoption du présent règlement et n'est pas lié par celui-ci ni soumis à son application " ;

3. Considérant, cependant, qu'en vertu d'un accord international conclu avec la Communauté européenne et approuvé par une décision du Conseil du 21 février 2006, le Danemark s'est engagé à participer aux mécanismes prévus par les règlements (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des Etats membres par un ressortissant d'un pays tiers, dit " règlement Dublin II ", et (CE) n° 2725/2000 du Conseil du 11 décembre 2000 concernant la création du système " Eurodac " pour la comparaison des empreintes digitales aux fins de l'application efficace de la convention de Dublin, dit " règlement Eurodac " ; qu'aux termes du paragraphe 2 de l'article 3 de cet accord : " Le Danemark notifie à la Commission sa décision d'appliquer ou non toute modification des règlements adoptée. La notification est effectuée lors de l'adoption des modifications ou dans un délai de trente jours à compter de celle-ci. " ; qu'ainsi, ce pays avait, en application de cet accord, la possibilité de décider d'appliquer le règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013, dit " règlement Dublin III ", procédant à une refonte du règlement n° 343/2003 du Conseil, donc à sa modification au sens de l'accord de 2006, à condition d'en avertir l'Union européenne dans les trente jours suivant son adoption ; que par un courrier du 5 juillet 2013, donc dans le délai des trente jours précités, le Danemark a notifié à la commission européenne sa décision d'appliquer le règlement (UE) n° 604/2013 ; que, dès lors, cet Etat applique le règlement Dublin III et, d'ailleurs, a donné son accord, le 16 janvier 2017, pour la reprise en charge de M. C...sur le fondement des dispositions du d) du paragraphe 1 de l'article 18 de ce règlement ; que, par suite, M. C...n'est pas fondé à soutenir que, le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 n'étant pas applicable au Danemark, la décision ordonnant son transfert aux autorités danoises est dépourvue de base légale ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'Etat membre responsable, l'Etat membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. / 2. L'entretien individuel peut ne pas avoir lieu lorsque : / a) le demandeur a pris la fuite ; ou / b) après avoir reçu les informations visées à l'article 4, le demandeur a déjà fourni par d'autres moyens les informations pertinentes pour déterminer l'Etat membre responsable. L'Etat membre qui se dispense de mener cet entretien donne au demandeur la possibilité de fournir toutes les autres informations pertinentes pour déterminer correctement l'Etat membre responsable avant qu'une décision de transfert du demandeur vers l'Etat membre responsable soit prise (...) / 5. L'entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national (...) " ;

5. Considérant que M. C...soutient que l'entretien individuel dont il a bénéficié n'a pas été mené par une personne qualifiée au sens des dispositions citées au point 2 ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que le requérant a bénéficié, le 11 janvier 2017, d'un entretien individuel au centre d'examen de situation administrative où il s'était présenté volontairement ; que pendant cet entretien, mené avec le concours, par voie téléphonique, d'un interprète en langue farsi qu'il comprend, il a été informé que des mesures d'éloignement et d'assignation à résidence étaient susceptibles d'être prises à son encontre ; qu'il a pu être vérifié qu'il avait correctement compris les informations dont il devait avoir connaissance ; qu'il a aussi été invité à répondre à des questions concernant son identité, son parcours, sa situation administrative, ainsi qu'à présenter toutes les informations qu'il a pu estimer utiles à la bonne connaissance de sa situation par le préfet du Nord ; qu'il ne ressort pas non plus des pièces du dossier que l'intéressé ait été empêché de présenter des informations utiles ou qu'il ait sollicité, en vain, un entretien avec les services préfectoraux ; que, dans ces conditions, M. C...n'est pas fondé à se prévaloir de la circonstance, au demeurant non établie, que l'agent de la préfecture de police de Paris qui a mené l'entretien n'était pas une personne qualifiée en vertu du droit national ; qu'ainsi, le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/ 213 doit être écarté ;

Sur l'assignation à résidence :

6. Considérant qu'une atteinte au droit d'être entendu n'est susceptible d'entraîner l'annulation de la décision faisant grief que si la procédure administrative en cause aurait pu, compte tenu des circonstances de fait et de droit propres au cas d'espèce, aboutir à un résultat différent du fait des observations et éléments que l'étranger a été privé de faire valoir ; qu'ainsi qu'il a été dit au point 3, M. C...a bénéficié, le 11 janvier 2017, d'un entretien individuel au centre d'examen de situation administrative ; que s'il soutient qu'il n'a pas été informé de la possibilité qu'une décision d'assignation à résidence soit prise, il ressort des pièces du dossier qu'il a eu, durant cet entretien, la possibilité de faire valoir tous les éléments relatifs à son parcours ou à sa situation personnelle qu'il jugeait utiles, ou de présenter des observations et éléments de nature à faire obstacle à une assignation à résidence ; que, dans ces conditions, il n'est pas établi que M. C...aurait été empêché de présenter des éléments ou observations propres à amener le préfet du Nord à prendre une autre décision que l'arrêté en litige ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance du principe général du droit à être entendu, qui est au nombre des principes fondamentaux du droit de l'Union européenne, ne peut qu'être écarté ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, lorsque cet étranger : / 1° Doit être remis aux autorités compétentes d'un État membre de l'Union européenne en application des articles L. 531-1 ou L. 531-2 ou fait l'objet d'une décision de transfert en application de l'article L. 742-3 (...) " et qu'aux termes de l'article L. 561-1 du même code : " (...) La décision d'assignation à résidence est motivée (...) " ; que l'article L. 561-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : " Les étrangers assignés à résidence sur le fondement des articles L. 552-4 et L. 561-2 se voient remettre une information sur les modalités d'exercice de leurs droits, sur les obligations qui leur incombent et, le cas échéant, sur la possibilité de bénéficier d'une aide au retour " et qu'aux termes de l'article R. 561-5 du même code : " L'étranger auquel est notifiée une assignation à résidence en application de l'article L. 552-4 ou de l'article L. 561-2 est informé de ses droits et obligations par la remise d'un formulaire à l'occasion de la notification de la décision par l'autorité administrative ou, au plus tard, lors de sa première présentation aux services de police ou de gendarmerie. / (...) Ce formulaire est traduit dans les langues les plus couramment utilisées désignées par un arrêté du ministre chargé de l'immigration " ;

8. Considérant que le requérant soutient qu'il n'est pas établi que le formulaire prévu par les dispositions citées au point 7 lui ait été remis ; que, toutefois, la légalité d'un acte s'apprécie à la date de son édiction ; qu'il résulte des dispositions des articles L. 561-2-1 et R. 561-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, citées au point 7, que la remise du formulaire relatif aux droits et obligations des étrangers assignés à résidence doit s'effectuer au moment de la notification de la décision d'assignation à résidence ou, au plus tard, lors de la première présentation de l'étranger aux services de police ou de gendarmerie ; qu'elle constitue ainsi une formalité postérieure à l'édiction de la décision d'assignation à résidence dont les éventuelles irrégularités sont, en tout état de cause, sans incidence sur la légalité de cette décision ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 5, que le moyen tiré de l'illégalité de la décision portant assignation à domicile du fait de l'illégalité de la décision ordonnant le transfert de M. C...aux autorités danoises ne peut qu'être écarté ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 mars 2017 du préfet du Nord ordonnant son transfert aux autorités danoises et son assignation à résidence ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C..., au ministre de l'intérieur et à Me B...D....

Copie sera adressée au préfet du Nord.

5

N°17DA01194


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17DA01194
Date de la décision : 20/02/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Quencez
Rapporteur ?: M. Marc (AC) Lavail Dellaporta
Rapporteur public ?: M. Riou
Avocat(s) : DANSET-VERGOTEN

Origine de la décision
Date de l'import : 27/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2018-02-20;17da01194 ?
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