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25/01/2018 | FRANCE | N°15DA02072

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre - formation à 3 (bis), 25 janvier 2018, 15DA02072


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme H...B...a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 3 décembre 2013 par laquelle le président du conseil général de l'Aisne a prononcé son licenciement et la décision du 13 janvier 2014 par laquelle cette autorité lui a retiré son agrément d'assistante familiale, de condamner le département de l'Aisne à lui verser la somme de 1 801,03 euros en réparation du préjudice subi du fait de l'irrégularité de la procédure de licenciement et la somme de 1

0 806,18 euros en réparation du préjudice né de l'absence de cause réelle et séri...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme H...B...a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 3 décembre 2013 par laquelle le président du conseil général de l'Aisne a prononcé son licenciement et la décision du 13 janvier 2014 par laquelle cette autorité lui a retiré son agrément d'assistante familiale, de condamner le département de l'Aisne à lui verser la somme de 1 801,03 euros en réparation du préjudice subi du fait de l'irrégularité de la procédure de licenciement et la somme de 10 806,18 euros en réparation du préjudice né de l'absence de cause réelle et sérieuse de ce licenciement.

Par un jugement n° 1400359 du 3 novembre 2015, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 28 décembre 2015 et le 21 avril 2016, MmeB..., représentée par Me D...C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 3 novembre 2015 du tribunal administratif d'Amiens ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 26 novembre 2013 du président du conseil général de l'Aisne procédant à son licenciement et la décision du 13 janvier 2014 de cette autorité lui retirant son agrément ;

3°) d'enjoindre au président du conseil départemental de l'Aisne de la réintégrer ;

4°) de condamner le département de l'Aisne à lui verser la somme de 46 826 euros à titre de rappel de salaire et la somme de 10 806,18 euros en réparation du préjudice subi.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution du 4 octobre 1958 ;

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Paul-Louis Albertini, président de chambre,

- les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public,

- et les observations de Me G...E...-I..., substituant Me F...E..., représentant le département de l'Aisne.

1. Considérant que MmeB..., née le 10 mars 1959, a été recrutée le 26 novembre 2009 comme assistante familiale par le département de l'Aisne ; que, le 2 octobre 2013, son contrat d'accueil des enfants Melvin et Liana a été rompu à titre conservatoire à compter du 30 septembre 2013, dans l'attente de l'issue de l'enquête ouverte à son encontre à propos de faits concernant l'enfant Melvin ; que Mme B...a ensuite été suspendue de ses fonctions, le 10 octobre 2013, au motif d'une absence d'information de la responsable du service de la protection maternelle et infantile (PMI) pour les faits survenus sur l'enfant Melvin ; qu'après avoir été convoquée le 24 octobre 2013 à un entretien préalable, Mme B... a été licenciée le 26 novembre 2013, au motif de son insuffisance professionnelle ; qu'après un avis du 17 décembre 2013 de la commission consultative paritaire départementale des assistants maternels et familiaux de l'Aisne, son agrément d'assistante familiale lui a été retiré par un arrêté du 13 janvier 2014 du président du conseil général de l'Aisne ; que Mme B... relève appel du jugement du 3 novembre 2015 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation des deux décisions du 26 novembre 2013 et 13 janvier 2014 et, d'autre part, à être indemnisée des préjudices nés de ces décisions ;

Sur les conclusions dirigées contre la décision du 26 novembre 2014 licenciant Mme B... :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 423-10 du code de l'action sociale et des familles : " L'employeur qui envisage, pour un motif réel et sérieux, de licencier un assistant maternel ou un assistant familial qu'il emploie depuis trois mois au moins convoque celui-ci et le reçoit en entretien dans les conditions prévues aux articles L. 1232-2 à L. 1232-4 du code du travail. Au cours de l'entretien, l'employeur est tenu d'indiquer le ou les motifs de la décision envisagée et de recueillir les explications du salarié. / L'employeur qui décide de licencier un assistant maternel ou un assistant familial relevant de la présente section doit notifier et motiver sa décision dans les conditions prévues à l'article L. 1232-6 du code du travail. La date de présentation de la lettre recommandée fixe le point de départ du préavis éventuellement dû en vertu de l'article L. 773-21. L'inobservation du préavis donne lieu au versement d'une indemnité compensatrice " ; qu'aux termes de l'article L.1232-6 du code du travail : " Lorsque l'employeur décide de licencier un salarié, il lui notifie sa décision par lettre recommandée avec avis de réception. /Cette lettre comporte l'énoncé du ou des motifs invoqués par l'employeur. / Elle ne peut être expédiée moins de deux jours ouvrables après la date prévue de l'entretien préalable au licenciement auquel le salarié a été convoqué. / Un décret en Conseil d'Etat détermine les modalités d'application du présent article " ;

3. Considérant que l'entretien préalable au licenciement de Mme B...s'est déroulé le 24 octobre 2013 et que son licenciement est intervenu le 26 novembre 2013 ; que, dès lors, le délai de deux jours ouvrables prévu par la combinaison des articles L. 423-10 du code de l'action sociale et des familles et L. 1232-6 du code du travail a été respecté ; que le moyen tiré de l'existence d'un vice de procédure doit, dès lors, être écarté ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le 30 septembre 2013, après avoir constaté chez l'enfant Melvin, âgé de trois ans, l'existence d'une plaie à la verge, Mme B...s'est limitée à y mettre un antiseptique et un pansement puis à envoyer l'enfant à l'école maternelle ; que le médecin de protection maternelle et infantile (PMI), présent ce jour là dans la classe, a noté, lors de l'examen de l'enfant, outre plusieurs hématomes et petites ecchymoses, une plaie rectiligne de la base de la verge, avec de petits hématomes pubiens, ainsi qu'une plaie béante de la verge en " V " maintenue par deux petits pansements ; que cette plaie a, ensuite, nécessité la mise en place de points de suture à l'hôpital ;

5. Considérant que MmeB..., qui n'était pas mise en examen à la date de la décision en litige pour des faits de maltraitance ou d'abus sexuel, ne peut par suite utilement se prévaloir des stipulations de l'article 14 de son contrat de travail, lesquelles sont relatives à la situation des assistantes familiales ou à celle de leurs proches faisant l'objet d'une mise en examen pour de tels faits ; que son licenciement, au demeurant, n'est pas fondé sur une faute, mais sur son insuffisance professionnelle ; qu'elle ne peut en outre et en tout état de cause, se prévaloir de la méconnaissance des dispositions de l'article 11 de la Déclaration universelle des droits de l'homme, laquelle ne figure pas au nombre des textes diplomatiques qui ont été ratifiés dans les conditions fixées par l'article 55 de la Constitution du 4 octobre 1958 ;

6. Considérant qu'il est constant Mme B...n'a pas emmené l'enfant Melvin chez un médecin ou aux urgences et n'a pas non plus informé son employeur de cette situation gravement anormale décrite au point 4, alors qu'elle était tenue, en application des stipulations de l'article 6-2 de son contrat de travail, de lui déclarer sans délai tout accident grave survenu à un mineur qui lui était confié ; que dès lors, le président du conseil général de l'Aisne, a pu, sans erreur d'appréciation, procéder à son licenciement pour insuffisance professionnelle, sans que la requérante ne puisse sérieusement soutenir qu'elle avait signalé cette situation au personnel de la cantine de l'école, qu'elle avait l'intention de conduire l'enfant le soir chez le médecin ou que son ancienneté dans la fonction d'assistante familiale et la production d'attestations mettant en avant ses qualités professionnelles prouveraient l'absence d'insuffisance professionnelle ; que le moyen tiré de l'absence de motif réel et sérieux à son licenciement, par suite, doit être écarté ;

7. Considérant qu'ainsi qu'il est dit au point 5, Mme B...ne peut utilement se prévaloir de l'absence de faute, dès lors que son licenciement est fondé sur son incompétence professionnelle ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions de Mme B...dirigées contre la décision du 26 novembre 2013 en litige doivent être rejetées ;

Sur les conclusions dirigées contre la décision du 13 janvier 2014 retirant son agrément à MmeB... :

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 421-3 du code de l'action sociale et des familles, dans sa rédaction applicable au litige : " L'agrément nécessaire pour exercer la profession d'assistant maternel ou d'assistant familial est délivré par le président du conseil général du département où le demandeur réside (...) L'agrément est accordé (...) si les conditions d'accueil garantissent la sécurité, la santé et l'épanouissement des mineurs et majeurs de moins de vingt et un ans accueillis, en tenant compte des aptitudes éducatives de la personne (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 421-7 du même code : " Si les conditions de l'agrément cessent d'être remplies, le président du conseil général peut, après avis d'une commission consultative paritaire départementale, modifier le contenu de l'agrément ou procéder à son retrait. En cas d'urgence, le président du conseil général peut suspendre l'agrément. Tant que l'agrément reste suspendu, aucun enfant ne peut être confié (...) " ;

10. Considérant qu'il résulte de ces dispositions, en vigueur à la date de la décision en litige, qu'il incombe au président du conseil général de s'assurer que les conditions d'accueil garantissent la sécurité, la santé et l'épanouissement des enfants accueillis et de procéder au retrait de l'agrément si ces conditions ne sont plus remplies ; qu'à cette fin, dans l'hypothèse où il est informé de suspicions de comportements susceptibles de compromettre la santé, la sécurité ou l'épanouissement d'un enfant de la part du bénéficiaire de l'agrément ou de son entourage, il lui appartient de tenir compte de tous les éléments portés à la connaissance des services compétents du département ou recueillis par eux et de déterminer si ces éléments sont suffisamment établis pour lui permettre raisonnablement de penser que l'enfant est victime des comportements en cause ou risque de l'être ;

11. Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6, le président du conseil de l'Aisne a pu, sans erreur d'appréciation, retirer l'agrément de MmeB... ; que les conclusions de la requérante dirigées contre la décision du 13 janvier 2014 doivent être rejetées ;

12. Considérant qu'en l'absence de toute illégalité fautive entachant les décisions du 26 novembre 2013 et 13 janvier 2014, les conclusions indemnitaires de Mme B...ne peuvent qu'être rejetées ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement du 3 novembre 2015, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande ; que ses conclusions à fin d'injonction doivent dès lors être rejetées ; que dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions du département de l'Aisne présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du département de l'Aisne présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme H...B...et au département de l'Aisne.

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N°15DA02072


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 15DA02072
Date de la décision : 25/01/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-10-06-03 Fonctionnaires et agents publics. Cessation de fonctions. Licenciement. Insuffisance professionnelle.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Paul Louis Albertini
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS VIGNON et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 01/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2018-01-25;15da02072 ?
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