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25/01/2018 | FRANCE | N°15DA01470

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre - formation à 3 (bis), 25 janvier 2018, 15DA01470


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...C...a demandé au tribunal administratif d'Amiens de condamner la chambre de commerce et d'industrie de l'Aisne au paiement de la somme de 638 071,02 euros en réparation des préjudices subis en raison de l'illégalité de la décision du 6 mai 2003 prononçant son licenciement, assortie des intérêts au taux légal à compter du 2 juillet 2013 et de la capitalisation des intérêts.

Par un jugement n° 1303160 du 30 juin 2015, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté cette demande.

Proc

édure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 3 septembre 2015,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...C...a demandé au tribunal administratif d'Amiens de condamner la chambre de commerce et d'industrie de l'Aisne au paiement de la somme de 638 071,02 euros en réparation des préjudices subis en raison de l'illégalité de la décision du 6 mai 2003 prononçant son licenciement, assortie des intérêts au taux légal à compter du 2 juillet 2013 et de la capitalisation des intérêts.

Par un jugement n° 1303160 du 30 juin 2015, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 3 septembre 2015, le 21 septembre 2015 et le 23 mai 2016, M.C..., représenté par la SCP Masse-Dessen-Thouvenin-Coudray, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 30 juin 2015 du tribunal administratif d'Amiens ;

2°) de condamner la chambre de commerce et d'industrie de l'Aisne au paiement de la somme de 638 071,02 euros en réparation des préjudices subis en raison de l'illégalité de la décision du 6 mai 2003 prononçant son licenciement, assortie des intérêts au taux légal à compter du 2 juillet 2013 et de la capitalisation des intérêts ;

3°) de mettre à la charge de la chambre de commerce et d'industrie de l'Aisne le versement de la somme de 3 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- la loi n° 52-1311 du 10 décembre 1952 ;

- l'arrêté du 25 juillet 1997 relatif au statut du personnel de l'assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie, des chambres régionales de commerce et d'industrie et des groupements interconsulaires ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Paul-Louis Albertini, président de chambre,

- les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public,

- et les observations de Me B...A..., représentant la chambre de commerce et de l'industrie de l'Aisne.

1. Considérant que M. D...C..., qui a été recruté par contrat à durée déterminée de trois mois par la chambre de commerce et d'industrie (CCI) de l'Aisne le 1er mars 1988, en tant qu'assistant technique au commerce extérieur, a été titularisé le 1er juin 1988, sur ce poste ; qu'il a ensuite été nommé chef de service du second degré, en qualité de chef du département " Salons internationaux " au sein de cette compagne consulaire ; qu'à la suite du transfert des activités de ce département vers l'Agence régionale d'exportation de Picardie (AREX), association créée entre le conseil régional de Picardie et la chambre régionale de commerce et d'industrie de Picardie, l'assemblée générale de la CCI de l'Aisne a décidé, par une délibération du 4 septembre 2000, de supprimer l'emploi de M. C...ainsi que celui de sa collaboratrice ; que, toutefois, afin d'éviter le licenciement du requérant par suppression de poste, celui-ci a été mis à disposition de l'AREX, en application de l'article 28 de l'arrêté du 25 juillet 1997 constituant le statut du personnel des chambres de commerce et d'industrie, pour une durée de cinq ans, par trois conventions du 25 septembre 2000 prenant effet, rétroactivement, au 1er janvier 2000 ; que, dès le 11 juin 2002, M. C...a demandé la fin de cette mise à disposition ; que celle-ci a été fixée au 28 décembre 2002 ; que M.C..., qui a réintégré, à cette date, la chambre de commerce et d'industrie de l'Aisne, a été licencié le 6 mai 2003 par suppression de poste, après les deux consultations de la commission paritaire locale prévue par l'article 35-1 de l'arrêté précité du 25 juillet 1997 ; que, par un jugement du 29 décembre 2006, confirmé par un arrêt du 28 mai 2008 de la cour administrative d'appel de Douai et par la décision du Conseil d'Etat n° 318892 du 20 mars 2010, le tribunal administratif d'Amiens a annulé le licenciement de M. C...au motif que la mise à disposition et la situation de l'agent d'une compagnie consulaire qui est réputé occuper son emploi et continue de percevoir sa rémunération mensuelle brute, mais qui exerce son activité dans un autre établissement ; que, du fait du maintien de l'emploi budgétaire occupé par M. C...durant sa mise à disposition et durant la courte période pendant laquelle il a été réintégré à la chambre de commerce et d'industrie, celle-ci ne pouvait procéder légalement à son licenciement sans consulter à nouveau au préalable l'assemblée générale sur la suppression de ce poste budgétaire comme le prévoit l'article 35-1 du statut du personnel administratif des chambres de commerce et d'industrie ; que M.C..., après avoir été juridiquement réintégré, a été licencié par une nouvelle décision du 8 février 2010 prenant effet au 8 juin 2010, suite à une suppression de poste intervenue par une délibération du 8 juin 2009 de l'assemblée générale de la CCI de l'Aisne ; que par un jugement du 27 juillet 2010 du tribunal administratif d'Amiens, confirmé par un arrêt du 2 mai 2012 de la cour administrative d'appel de Douai, ses conclusions à fin d'annulation de cette décision ont été rejetées ; que toutefois, par une décision n° 361675 du 10 février 2014, le Conseil d'Etat, tout en annulant ce dernier arrêt pour erreur de droit sur la procédure suivie, a confirmé au fond la légalité du second licenciement du requérant ; que M. C...relève appel du jugement du 30 juin 2015 par lequel le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la chambre de commerce et d'industrie de l'Aisne au paiement d'une somme de 638 071,02 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 2 juillet 2013 et de la capitalisation des intérêts, en réparation d'une part, des préjudices subis en raison de l'illégalité de la décision du 6 mai 2003 et, d'autre part, du montant insuffisant de l'indemnité de licenciement à laquelle il estime avoir droit ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant, d'une part, que le tribunal administratif d'Amiens, après avoir jugé que les postes de reclassement envisagés ne correspondaient pas au profil de M. C...ou à son niveau de qualification ou de compétence, en renvoyant au procès-verbal de la seconde réunion de la commission paritaire locale du 30 avril 2003, a suffisamment motivé son jugement dès lors qu'il n'existe aucune obligation légale d'examiner les possibilités de reclassement de l'agent sur des postes sans rapport avec sa qualification et son rang hiérarchique ; que, d'autre part, M. C...n'établit pas, en tout état de cause, avoir demandé à être reclassé dans une situation inférieure à celle qu'il occupait auparavant ; qu'il ne peut, dès lors, soutenir que le tribunal aurait aussi insuffisamment motivé son jugement sur la possibilité d'occuper un tel emploi ;

Sur les fautes commises lors de la procédure de licenciement du 6 mai 2003 :

3. Considérant qu'aux termes de l'article 35-1 de l'arrêté du 25 juillet 1997 relatif au statut du personnel de l'assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie, des chambres régionales de commerce et d'industrie et des groupements interconsulaires : " Lorsqu'une Compagnie Consulaire décide de prendre des mesures pouvant entraîner un ou plusieurs licenciements par suppression d'emploi, le Président, au vu de la délibération prise en Assemblée Générale, convoque la Commission Paritaire Locale aux fins de l'informer. Un dossier est communiqué, au plus tard quinze jours avant la date de la réunion, aux membres de la Commission Paritaire Locale et aux délégués syndicaux. Ce dossier comprend : / - une information sur les raisons économiques, financières et techniques qui sont à l'origine de la suppression d'un ou plusieurs postes de travail ; / - une information sur les moyens examinés par la Compagnie Consulaire pour éviter les suppressions d'emplois tels que notamment : / les possibilités de création d'activités nouvelles, d'augmentation de ressources ou de diminution de charges, d'aménagement du temps de travail et/ou de réduction du temps de travail, de reclassement des agents dont l'emploi pourrait être supprimé dans d'autres services de la Compagnie Consulaire, d'autres Compagnies Consulaires ou à l'extérieur de l'Institution Consulaire ainsi que toutes autres mesures alternatives au licenciement ; / - la liste des emplois susceptibles d'être supprimés et les critères retenus ; / - le coût et les modalités de mise en oeuvre des mesures annoncées ; / - les aides et mesures d'accompagnement apportées aux agents licenciés pour faciliter leur réemploi telles que bilan de compétences ou financement de formations. / Au plus tard dans le mois qui suit la réunion de cette commission et au plus tôt après huit jours francs, les agents dont l'emploi est menacé sont convoqués à un entretien individuel avec le Président ou son délégataire. Dans le délai d'un mois et au plus tôt dans le délai de huit jours francs qui suit le ou les entretiens individuels, la Commission Paritaire Locale est convoquée de nouveau pour émettre un avis d'une part, sur les démarches, propositions et actions entreprises pour éviter les licenciements et, d'autre part, sur les mesures individuelles de licenciement envisagées. : (... ) La Compagnie Consulaire ne peut effectuer de recrutement sur poste permanent correspondant à un ou plusieurs emplois supprimés pendant un délai de dix-huit mois à compter de la (des) notification(s) de licenciement pour suppression d'emploi. Les autres emplois mis en recrutement pendant cette période doivent être proposés en priorité aux agents licenciés " ; qu'aux termes de l'article 35-3 du même statut : " L'agent qui, dans la même compagnie consulaire, aura été reclassé, avec son accord, dans une situation inférieure à celle qu'il occupait auparavant, aura droit au paiement d'une indemnité différentielle pendant une durée maximum de trois ans " ;

4. Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions qu'avant de prononcer le licenciement pour suppression d'emploi d'un agent soumis au statut du personnel des chambres de commerce et d'industrie, il appartient à la compagnie consulaire d'examiner les possibilités de reclassement de cet agent notamment en son sein, tant sur des emplois équivalents que sur des emplois de rang hiérarchique inférieur ; que, toutefois, ces dispositions ne sauraient être interprétées comme faisant obligation au président de la chambre de commerce et d'industrie, préalablement à tout licenciement pour suppression d'emploi, d'examiner les possibilités de reclassement de l'agent concerné sur des postes sans rapport avec sa qualification et son rang hiérarchique ;

5. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier et qu'il n'est pas même allégué par M. C...qu'il ait demandé au président de la CCI de l'Aisne d'examiner les possibilités de reclassement sur un poste sans rapport avec ses qualifications et son rang hiérarchique ; qu'en application du principe rappelé au point précédent le président de la compagnie consulaire n'avait pas de lui-même à procéder à une telle recherche, sans que M.C..., chef de service de second degré, puisse sérieusement soutenir à cet égard, qu'ayant commencé sa carrière à la CCI de l'Aisne en 1988 en tant qu'assistant technique, ce poste devait lui être proposé ;

6. Considérant qu'en cause d'appel M. C...se prévaut aussi d'une insuffisance de recherche de postes de reclassement dans le réseau des chambres de commerce et d'industrie ; que les chambres du commerce et de l'industrie constituant un réseau, ainsi que le consacre le titre premier du livre VII du code du commerce, l'obligation de rechercher un reclassement porte, en cas d'absence d'emploi vacant approprié dans la chambre de commerce et de l'industrie qui envisage de procéder au licenciement, sur les emplois correspondants aux compétences de l'agent dans l'ensemble des établissements du réseau ; qu'il est constant qu'aucune diffusion du profil professionnel de M. C...n'a été opérée au sein de ce réseau, lors de sa procédure de licenciement ; que M. C...est donc fondé à soutenir que contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif d'Amiens, une faute de nature à engager la responsabilité de la chambre de commerce et d'industrie de l'Aisne, pour autant qu'il en soit résulté un préjudice direct et certain,,a été commise lors de son licenciement ;

Sur le montant insuffisant de l'indemnité de licenciement :

7. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. C...a, d'une part, perçu le 30 juin 2010 une indemnité de licenciement d'un montant de 70 150 euros, correspondant à la période courant de 1988 au 6 mai 2003 et, d'autre part, le 23 juillet 2013, une indemnité de 45 613,40 euros, correspondant à la période courant de sa réintégration juridique à son second licenciement prenant effet au 8 juin 2010, soit au total la somme de 115 763 euros ; qu'en se limitant à soutenir qu'une indemnité de licenciement d'un montant supérieur de 69 129,31 euros au montant déjà versé, lui serait due, pour une période au demeurant non précisée, M. C...n'assortit son moyen d'aucune précision suffisante permettant à la cour d'en apprécier le bien-fondé ;

Sur le préjudice :

8. Considérant qu'une personne publique ne peut être condamnée à verser une indemnité en réparation des fautes commises que si le demandeur, à qui incombe la charge de la preuve, établit la réalité du préjudice invoqué et l'existence d'un lien de causalité direct et certain entre la faute alléguée et ce préjudice ; que, M. C...se bornant à alléguer des préjudices, sans en préciser la nature ni même discuter le bien-fondé des motifs par lesquels les premiers juges les ont écartés, les conclusions indemnitaires qu'il présente devant le juge d'appel ne peuvent, par suite et en tout état de cause, qu'être rejetées ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement du 30 juin 2015, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande ; que ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. C...le versement à la chambre de commerce et d'industrie de l'Aisne d'une somme sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de chambre de commerce et d'industrie de l'Aisne fondées sur les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...C...et à la chambre de commerce et d'industrie de l'Aisne.

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N°15DA01470

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 15DA01470
Date de la décision : 25/01/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Commerce - industrie - intervention économique de la puissance publique - Organisation professionnelle des activités économiques - Chambres de commerce et d'industrie - Personnel.

Fonctionnaires et agents publics - Contentieux de la fonction publique - Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Paul Louis Albertini
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : SCP MASSE-DESSEN - THOUVENIN - COUDRAY

Origine de la décision
Date de l'import : 01/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2018-01-25;15da01470 ?
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