Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès pouvoir l'arrêté du 15 décembre 2016 du préfet du Nord lui faisant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de destination de l'éloignement et lui interdisant le retour sur le territoire français pendant un délai de deux ans.
Par un jugement n° 1609866 du 16 mars 2017 le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 16 mai 2017, M.B..., représenté par Me D...C..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 16 mars 2017 du tribunal administratif de Lille ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 15 décembre 2016 ;
3°) d'enjoindre au préfet du nord de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de l'expiration du délai de 15 jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
----------------------------------------------------------------------------------------------------------
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Paul-Louis Albertini, président de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M.B..., ressortissant algérien, né le 19 février 1985, est entré sur le territoire français le 28 septembre 2010, muni d'un visa national long séjour en qualité d'étudiant ; qu'il a obtenu un titre de séjour portant la mention " étudiant " régulièrement renouvelé jusqu'au 30 novembre 2014 ; que, par arrêté du 17 juillet 2015, le préfet de l'Essonne a rejeté sa demande de renouvellement de titre, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jour et a fixé le pays de destination ; qu'il relève appel du jugement du 16 mars 2017, par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 décembre 2016 du préfet du Nord lui faisant obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, fixant le pays de destination de l'éloignement, le plaçant en rétention administrative et lui faisant interdiction de revenir sur le territoire français avant l'expiration d'un délai de deux ans ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que par arrêté du 17 juillet 2015, M. B..., entré régulièrement en France le 28 septembre 2010 sous couvert d'un visa de long séjour en qualité d'étudiant, a fait l'objet d'un refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours ; qu'il s'est maintenu irrégulièrement en France ; que, toutefois, M. B...a déposé en 2016, avec une ressortissante française, un dossier auprès de l'officier d'état civil de la mairie de Lille, en vue de la célébration de leur mariage ; qu'en application des dispositions de l'article 175-2 du code civil, par lettre du 9 novembre 2016, ce projet de mariage a été porté à la connaissance du procureur de la République auprès du tribunal de grande instance de Lille, qui a décidé le 10 novembre 2016 qu'il serait sursis à la célébration du mariage jusqu'au 10 décembre 2016 ; que ce sursis a été prolongé jusqu'au 10 janvier 2017 ; qu'une enquête préliminaire a été confiée aux services de police pour les faits d'organisation de mariage à visée migratoire, pour que les futurs époux soient entendus sur leur projet ; que M. B...a été entendu le 14 décembre 2016 à 17 h 45, sur le fondement des articles 75 et suivants du code de procédure pénale, par un agent de police judiciaire, dans le cadre de cette enquête préliminaire ; qu'à la suite de cette audition concernant son projet de mariage, M. B...s'est vu notifier dès le 15 décembre 2016 à 12 h 30, sans avoir été entendu préalablement à l'initiative du préfet du Nord sur sa situation administrative sur le territoire français en ayant la possibilité de présenter l'ensemble des éléments pertinents qui auraient pu influer sur les décisions en litige, une obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire accompagnée d'une décision fixant le pays de destination ainsi qu'une décision lui faisant interdiction de revenir sur le territoire français avant l'expiration d'un délai de deux ans ; que ces circonstances particulières révèlent la précipitation avec laquelle l'administration a agi, une fois informée de ce projet de mariage ; que, par suite, l'obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, fixant le pays de destination et interdisant le retour sur ce même territoire pendant un délai de deux ans, prononcée par le préfet du Nord doit être regardée comme ayant eu pour motif déterminant de prévenir le mariage de M. B... ; que l'arrêté du 15 décembre 2016 est, dès lors, entaché de détournement de pouvoir ;
3. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. B...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :
4. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. " ; et qu'aux termes des dispositions de l'article L. 911-3 du même code : " Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet. " ;
5. Considérant que l'annulation, pour le motif susmentionné, de l'arrêté du préfet du Nord, implique seulement que soit délivré à M. B...une autorisation provisoire de séjour ; qu'ainsi, il y a lieu d'enjoindre au préfet du Nord de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant que, d'une part, M. B...n'allègue pas avoir exposé de frais autres que ceux pris en charge par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle totale qui lui a été allouée ; que, d'autre part, l'avocat de M. B...n'a pas demandé que lui soit versé par l'Etat la somme correspondant aux frais exposés qu'il aurait réclamés à son client si ce dernier n'avait bénéficié d'une aide juridictionnelle totale ; que dans ces conditions, les conclusions de la requête tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1du code de justice administrative doivent être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du 16 mars 2017 du tribunal administratif de Lille et l'arrêté du 15 décembre 2016 du préfet du Nord sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet du Nord de délivrer à M. B...une autorisation provisoire de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B...est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B..., au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et au préfet du Nord.
N°17DA00909 2