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28/09/2017 | FRANCE | N°16DA00951

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre - formation à 3 (bis), 28 septembre 2017, 16DA00951


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La préfète de la Seine-Maritime a déféré au tribunal administratif de Rouen, en application de l'article L. 774-2 du code de justice administrative, M. A...C..., comme prévenu d'une contravention de grande voirie, et a demandé au tribunal de le condamner au paiement d'une amende en répression de la méconnaissance des articles R. 5333-9 et R. 5333-12 du code des transports.

Par un jugement n° 1502596 du 22 mars 2016, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen, en a

pplication de l'article L. 774-1 du code de justice administrative, a condamné M....

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La préfète de la Seine-Maritime a déféré au tribunal administratif de Rouen, en application de l'article L. 774-2 du code de justice administrative, M. A...C..., comme prévenu d'une contravention de grande voirie, et a demandé au tribunal de le condamner au paiement d'une amende en répression de la méconnaissance des articles R. 5333-9 et R. 5333-12 du code des transports.

Par un jugement n° 1502596 du 22 mars 2016, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen, en application de l'article L. 774-1 du code de justice administrative, a condamné M. C...à payer deux amendes de 750 euros pour chacune des infractions distinctes relevées à son encontre.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 23 mai, 21 juillet et 27 octobre 2016, M. A... C..., représenté par la SCP Morin, Barbier, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la relaxe des fins de la poursuite ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code de procédure pénale ;

- le code des transports ;

- l'arrêté ministériel du 27 octobre 2006 fixant la liste des ports maritimes relevant des collectivités territoriales et de leurs groupements où l'autorité investie du pouvoir de police portuaire est le représentant de l'Etat ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Michel Richard, président-assesseur,

- les conclusions de Mme Amélie Fort-Besnard, rapporteur public,

- et les observations de Me E...F..., représentant M.C.chez lui

Sur la régularité du jugement :

1. Considérant qu'il ressort des termes du jugement que le tribunal administratif n'a pas répondu au moyen, qui n'était pas inopérant, tiré de l'incompétence de l'auteur du procès-verbal du 1er juillet 2015 ; que, par suite, le jugement attaqué doit être annulé ;

2. Considérant qu'il y a lieu de statuer, par la voie de l'évocation, sur la saisine présentée par la préfète de la Seine-Maritime devant le tribunal administratif de Rouen ;

Sur la régularité de la procédure de contravention de grande voirie :

En ce qui concerne la compétence de l'auteur du procès-verbal :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 5331-6 du code des transports : " L'autorité investie du pouvoir de police portuaire est : / (...) / 3° Dans les ports maritimes, relevant des collectivités territoriales et de leurs groupements, dont l'activité dominante est le commerce ou qui accueillent des marchandises dangereuses et qui figurent sur une liste fixée par voie réglementaire, l'autorité administrative ; / (...) " ; que le port du Tréport est placé dans cette catégorie par l'article 1er de l'arrêté ministériel du 27 octobre 2006 fixant la liste des ports maritimes relevant des collectivités territoriales et de leurs groupements où l'autorité investie du pouvoir de police portuaire est le représentant de l'Etat ; qu'aux termes de l'article L. 5337-2 du code des transports : " Ont compétence pour constater les contraventions de grande voirie prévues par les dispositions du présent titre et les textes pris pour leur application : / 1° Les officiers de port et officiers de port adjoints / (...) " ;

4. Considérant qu'il résulte des dispositions combinées des articles cités au point précédent, que les officiers de port du Tréport sont compétents pour constater les contraventions de grande voirie ; que la préfète de la Seine-Maritime produit l'arrêté du 24 mars 2011 par lequel M. B...D..., lieutenant de port classe fonctionnelle, est muté à la capitainerie du Tréport, la carte de commission de M.D..., ainsi que la copie de sa prestation de serment devant le tribunal de police de Dieppe ; que cet agent était ainsi habilité pour dresser le procès-verbal du 1er juillet 2015 ;

5. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. D...n'est pas le signataire de ce procès-verbal ; qu'en particulier, les différences qui existeraient, selon M.C..., entre la signature portée sur le procès-verbal et celle de la commission de M.D..., au demeurant peu flagrantes, ne contredisent pas les mentions portées sur le procès-verbal ; que, par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la procédure serait irrégulière en raison de l'incompétence de l'auteur du procès-verbal de contravention de grande voirie ;

En ce qui concerne l'information du contrevenant lors de la constatation des infractions :

6. Considérant qu'aucune disposition légale ou réglementaire n'exige qu'un procès-verbal soit rédigé contradictoirement ; que M. D...n'était donc pas tenu d'informer le requérant de ce qu'il rédigeait un procès-verbal constatant les infractions commises ;

En ce qui concerne la notification du procès-verbal :

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 774-2 du code de justice administrative dans sa rédaction alors applicable : " Dans les dix jours qui suivent la rédaction d'un procès-verbal de contravention, le préfet fait faire au contrevenant notification de la copie du procès-verbal. / (...) / La notification est faite dans la forme administrative, mais elle peut également être effectuée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception / (...) " ;

8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. Dugelay, secrétaire général de la Direction départementale des territoires et de la mer, a reçu, par arrêté du 23 avril 2015, délégation afin de notifier aux contrevenants les contraventions de grande voirie ; qu'en tout état de cause, le dépôt de conclusions par une autorité compétente devant le tribunal administratif a régularisé la procédure ; que, par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le procès-verbal lui a été notifié par une autorité incompétente ;

9. Considérant qu'il est constant que le procès-verbal d'infraction dressé à l'encontre de M. A... C...le 1er juillet 2015 lui a été notifié le 24 juillet 2015 et qu'il en a accusé réception le 27 juillet 2015 ; que le délai de dix jours mentionné à l'article L. 774-2 du code de justice administrative précité n'est pas prescrit à peine de nullité de la procédure dès lors qu'il n'est pas porté atteinte aux droits de la défense ; qu'il ne résulte pas, en l'espèce, de l'instruction que le retard de dix-sept jours avec lequel le procès-verbal du 1er juillet a été notifié au requérant aurait présenté un caractère excessif de nature à porter atteinte à ses droits ; qu'en tout état de cause, le second procès-verbal, rédigé le 22 juillet 2015, n'a fait l'objet d'aucune transmission à la juridiction administrative ; que, dès lors, le moyen soulevé, tiré du non-respect du délai de notification du procès-verbal de contravention de grande voirie par le préfet, doit être écarté ;

En ce qui concerne le défaut de mention de la sanction encourue :

10. Considérant qu'aucune disposition légale ou réglementaire n'exige qu'un procès-verbal mentionne le montant des amendes encourues ;

Sur le bien-fondé de la contravention de grande voirie :

En ce qui concerne le fondement juridique des poursuites :

11. Considérant que si le procès-verbal relève des contraventions aux articles L. 5334-5 du code des transports et 13 du règlement particulier de police du port du Tréport, cette circonstance ne fait pas obstacle à ce que l'autorité préfectorale engage les poursuites sur la base d'autres dispositions, dès lors que les faits qui y sont constatés constituent une infraction réprimée par ces articles ; qu'en outre, il appartient au juge administratif saisi d'un procès-verbal de contravention de grande voirie de rechercher, même d'office, les dispositions législatives ou réglementaires auxquelles contreviennent les faits qui y sont rapportés ;

12. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 5337-1 du code des transports : " Sans préjudice des sanctions pénales encourues, tout manquement aux dispositions du chapitre V du présent titre, à celles du présent chapitre et aux dispositions réglementant l'utilisation du domaine public, notamment celles relatives aux occupations sans titre, constitue une contravention de grande voirie réprimée dans les conditions prévues par les dispositions du présent chapitre. " ; qu'aux termes de l'article R. 5337-1 du même code : " Constitue une contravention de grande voirie la violation des interdictions ou le manquement aux obligations prévues par le règlement général de police défini au chapitre III et par les règlements locaux le complétant. / Sauf disposition législative contraire, ces contraventions sont punies de l'amende prévue par le premier alinéa de l'article L. 2132-26 du code général de la propriété des personnes publiques " ;

13. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article R. 5333-9 du même code : " Il est interdit à tout navire, bateau ou engin flottant, à l'intérieur du port et dans la zone maritime et fluviale de régulation, de stationner hors des emplacements qui lui ont été attribués et de faire obstacle à la libre circulation. Les règlements particuliers précisent les conditions dans lesquelles le stationnement et le mouillage des ancres sont autorisés dans le port à l'exception des chenaux d'accès. (...) " et qu'aux termes de l'article R. 5333-12 du même code : " Tout navire, bateau ou engin flottant amarré dans le port et armé doit avoir à bord le personnel nécessaire pour effectuer toutes les manoeuvres qui peuvent s'imposer et pour faciliter les mouvements des autres navires, bateaux ou engins flottants. S'il est désarmé, il doit comporter au moins un gardien à bord. / Il ne peut être dérogé aux dispositions de l'alinéa précédent que sur autorisation de l'autorité portuaire, et à condition que les dispositions applicables en matière de sûreté et de marchandises dangereuses le permettent. La dispense est subordonnée à la remise préalable à la capitainerie d'une déclaration mentionnant le nom, le domicile à terre et le numéro de téléphone d'une personne capable d'intervenir rapidement en cas de besoin, et contresignée par celle-ci " ;

En ce qui concerne la qualité de propriétaire ou de gardien de M.C... :

14. Considérant que la personne qui peut être poursuivie pour contravention de grande voirie est, soit celle qui a commis ou pour le compte de laquelle a été commise l'action qui est à l'origine de l'infraction, soit celle sous la garde de laquelle se trouvait l'objet qui a été la cause de la contravention ;

15. Considérant qu'il ressort des termes du procès-verbal du 1er juillet 2015, dont les mentions font foi jusqu'à preuve du contraire et ne sont pas sérieusement contestées par l'intéressé, que M. C... a refusé d'amarrer le navire de pêche " Ludovic Geoffray II " au poste n° 4 bis qui lui avait été attribué et qu'il s'est accosté au quai Michel Lebail ; qu'à cette occasion, M. A... C...a indiqué à l'agent verbalisateur que le navire serait vide pendant le mois de juillet ; que, par ailleurs, il résulte de l'instruction que le navire " Ludovic Geoffray II " est la propriété de la SARL C...et fils dont M. C...est associé, qui est d'ailleurs domiciliée... ; qu'il participe ainsi à sa gestion ; que, compte tenu des faits constatés lors de l'opération d'accostage du 1er juillet 2015 et notamment du refus de déplacer le bateau qu'il a opposé à l'ordre de l'agent, il doit être regardé comme ayant fait application à cette occasion d'un pouvoir d'usage, de direction et de contrôle du bateau de pêche ; que, dès lors, il a assumé la qualité de gardien du navire ; que les circonstances dont il se prévaut liées à ses problèmes de santé et sa qualité de retraité sont, en l'espèce, sans influence sur cette qualification ; que, par suite, le moyen tiré de ce qu'étant ni propriétaire, ni gardien du navire, il ne pouvait être poursuivi au titre de la contravention de grande voirie, doit être écarté ;

En ce qui concerne la matérialité des infractions :

S'agissant du stationnement du bateau :

16. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit au point précédent, il ressort des termes du procès-verbal du 1er juillet 2015 que M. C... a refusé d'amarrer le navire de pêche " Ludovic Geoffray II " au poste n° 4 bis qui lui avait été attribué et qu'il s'est accosté au quai Michel Lebail, soit un quai de pêche qui n'est pas dédié au stationnement mais au déchargement ou à l'avitaillement des navires de pêche ; qu'il résulte de l'instruction et notamment de la lettre du président du comité régional des pêches maritimes et des élevages marins de Haute-Normandie du 21 août 2015 que ce choix a été fait sciemment pour faciliter l'entretien du bateau et éviter le risque de dégradations auxquelles se serait exposé le navire en cas d'amarrage à l'endroit qui lui était désigné ;

17. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et, en particulier, des termes du procès-verbal que M. C...a été informé de l'attribution du poste n° 4 bis ; que le requérant ne produit aucun élément de nature à contredire les mentions du procès-verbal sur ce point ; que, par suite, le moyen tiré du défaut d'information sur l'emplacement qui lui a été attribué dont M. C...se prévaut afin d'être relaxé des fins de la poursuite doit être écarté ;

18. Considérant que si l'appelant fait également valoir que le bassin de commerce, où est situé le poste n° 4 bis, n'est pas adapté au stationnement des navires de pêches, qu'il n'est pas établi que le stationnement de son navire au quai de pêche Michel Le Bail aurait gêné la bonne exploitation du bassin de pêche, qu'il s'acquitte de taxes portuaires et que d'autres navires de pêches stationnés au même endroit n'auraient pas été verbalisés, ces moyens qui ne remettent pas en cause la matérialité des faits, ne sont pas davantage de nature à exonérer M. C...des fins de la poursuite ;

19. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 16 à 18 que le navire de pêche " Ludovic Geoffray II " a été stationné hors de l'emplacement qui lui avait été attribué ; qu'un tel fait constitue une infraction prévue à l'article R. 5333-9 du code des transports cité au point 13 ;

S'agissant du défaut de gardien dans le bateau :

20. Considérant qu'il n'est pas contesté qu'aucun gardien ne se trouvait à bord du navire pendant le mois de juillet 2015 ; que cette absence de gardien à bord du navire constitue une infraction prévue à l'article R. 5333-12 du code des transports cité au point 13 ;

Sur la contravention de grande voirie au regard des infractions constatées :

21. Considérant que les infractions constatées au regard des dispositions des articles R. 5333-9 et R. 5333-12 du code des transports, ainsi qu'il a été dit aux points 19 et 20, constituent des contraventions de grandes voiries imputables à M. C...en application des dispositions des articles L. 5337-1 et R. 5337-1 du code des transports citées au point 12 ;

Sur le montant de l'amende :

22. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2132-26 du code général de la propriété des personnes publiques : " Sous réserve des textes spéciaux édictant des amendes d'un montant plus élevé, l'amende prononcée pour les contraventions de grande voirie ne peut excéder le montant prévu par le 5° de l'article 131-13 du code pénal. (...) " ; qu'aux termes de l'article 131-13 du code pénal : " Constituent des contraventions les infractions que la loi punit d'une amende n'excédant pas 3 000 euros. Le montant de l'amende est le suivant : / (...) / 5° 1 500 euros au plus pour les contraventions de la 5e classe (...) " ;

23. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner M. C... à payer à l'Etat une amende de 750 euros pour chacune des deux infractions relevées à son encontre par le procès-verbal du 1er juillet 2015, ainsi que le prévoit l'article L. 2132-26 du code général de la propriété des personnes publiques cité au point précédent ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

24. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'a pas dans la présente instance la qualité de partie perdante, la somme que demande M. C...sur ce fondement ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 22 mars 2016 du tribunal administratif de Rouen est annulé.

Article 2 : M. C...est condamné à payer une amende de 750 euros pour l'infraction à l'article R. 5333-9 du code des transports, constatée le 1er juillet 2015.

Article 3 : M. C...est condamné à payer une amende de 750 euros pour l'infraction à l'article R. 5333-12 du code des transports, constatée le 1er juillet 2015.

Article 4 : Le surplus des conclusions de M. C...est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C...et au ministre de la transition écologique et solidaire.

Copie en sera transmise pour information à la préfète de la Seine-Maritime.

N°16DA00951 7


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Domaine - Domaine public - Protection du domaine - Contraventions de grande voirie.

Ports - Police des ports - Contraventions de grande voirie.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: M. Michel Richard
Rapporteur public ?: Mme Fort-Besnard
Avocat(s) : MORIN et BARBIER

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre - formation à 3 (bis)
Date de la décision : 28/09/2017
Date de l'import : 26/06/2018

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 16DA00951
Numéro NOR : CETATEXT000035736430 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2017-09-28;16da00951 ?
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