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21/09/2017 | FRANCE | N°17DA00267

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre - formation à 3 (bis), 21 septembre 2017, 17DA00267


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 31 mars 2016 de la préfète de la Seine-Maritime refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination de l'éloignement.

Par un jugement n° 1602779 du 19 janvier 2017 le tribunal administratif de Rouen a annulé l'arrêté du 31 mars 2016 et a enjoint à la préfète de la Seine-Maritime

de délivrer un certificat de résidence mention " vie privée et familiale " à M. A...da...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 31 mars 2016 de la préfète de la Seine-Maritime refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination de l'éloignement.

Par un jugement n° 1602779 du 19 janvier 2017 le tribunal administratif de Rouen a annulé l'arrêté du 31 mars 2016 et a enjoint à la préfète de la Seine-Maritime de délivrer un certificat de résidence mention " vie privée et familiale " à M. A...dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 8 février 2017, la préfète de la Seine-Maritime demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 19 janvier 2017 du tribunal de Rouen ;

2°) de rejeter la demande de M. B...A...devant le tribunal administratif.

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Vu les autres pièces du dossier,

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté ministériel du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Paul-Louis Albertini, président-rapporteur, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.A..., ressortissant algérien né en 1948, est entré en France le 17 septembre 2014 muni de son passeport en cours de validité revêtu d'un visa de court séjour " visiteur " ; qu'il a sollicité, le 16 décembre 2014, un titre de séjour en qualité d'étranger malade ; qu'il a obtenu la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour, régulièrement renouvelée jusqu'au 10 septembre 2015 ; qu'il a sollicité, le 11 juin 2015, le renouvellement de titre de séjour ; que, par un avis du 16 décembre 2015, le médecin de l'agence régionale de santé a conclu que le défaut de traitement de sa pathologie pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que les soins nécessaires devaient être poursuivis pendant une durée de douze mois mais que toutefois, un traitement approprié à sa pathologie existait dans son pays d'origine vers lequel il pouvait voyager sans risque ; que, par l'arrêté en litige du 31 mars 2016, la préfète de la Seine-Maritime a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et a fixé le pays de renvoi d'office, passé ce délai ; que la préfète de la Seine-Maritime relève appel du jugement du 19 janvier 2017 par lequel le tribunal administratif de Rouen a annulé cet arrêté ;

Sur la décision de refus de tire de séjour :

2. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 6 de l'accord franco-algérien relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) / 7° au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) " ; qu'aux termes des dispositions de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général (...) / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur l'existence d'un traitement dans le pays d'origine de l'intéressé " ; et qu'aux termes des dispositions de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé " Au vu de ce rapport médical et des informations dont il dispose, le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant : / - si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; - s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale ; - la durée prévisible du traitement. (...) / Dans le cas où un traitement approprié existe dans le pays d'origine, il peut, au vu des éléments du dossier du demandeur, indiquer si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers ce pays ".

3. Considérant qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui en fait la demande sur le fondement des stipulations de l'article 6-7 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, de vérifier, au vu de l'avis émis par le médecin mentionné à l'article R. 313-22 précité, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire ; que lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans le pays dont l'étranger est originaire et pour le cas des ressortissants algériens, que ces derniers aient effectivement accès à ces soins ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A...a produit devant le premier juge un certificat médical du médecin chef des urgences de l'établissement public hospitalier Akloul Ali- Akbou de BejaÏa du 25 avril 2016, qui mentionne la pathologie cardiaque dont il est atteint et précise qu'il " ne peut être suivi dans ce service par manque de moyens spécialisés " ; que, toutefois, la préfète de la Seine-Maritime justifie, en appel, que les médicaments prescrits à M. A..., qui sont le Rampiril, l'Atorvastatine et le Furosemide, figurent sur la liste des médicaments disponibles et remboursables par la sécurité sociale en Algérie ; que ce pays dispose, notamment à Bejaïa, ville dont est originaire le requérant, de structures médicales telles que le service de cardiologie et chirurgie cardiaque de l'hôpital Khemil Amrane et que des services comparables ont été mis en place dans les principales villes d'Algérie, où exercent en outre des médecins spécialisés en cardiologie ; qu'en alléguant qu'il n'est pas titulaire d'un permis de conduire, ou qu'il serait dépourvu de ressources en cas de retour dans son pays d'origine, alors au demeurant qu'il ne donne aucune précision sur ses ressources et qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le système de sécurité sociale existant en Algérie n'assurerait pas la prise en charge des soins aux personnes financièrement démunies, M. A...n'établit pas que des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'accéder au traitement approprié pour sa prise en charge médicale ; que, par suite, la préfète de la Seine-Maritime, qui apporte des éléments nouveaux en appel suffisamment précis pour démontrer que M. A...peut bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine, est fondée à soutenir qu'elle n'a ainsi pas méconnu les stipulations précitées du 7° de l'article 6 de l'Accord franco-algérien et que c'est à tort que le tribunal administratif de Rouen a retenu ce motif pour annuler l'arrêté du 31 mars 2016 ;

5. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A...devant le tribunal administratif de Rouen ;

6. Considérant que l'arrêté de la préfète de la Seine-Maritime énonce les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que dès lors, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation manque en fait ;

7. Considérant qu'il ressort des motifs de l'arrêté attaqué du 31 mars 2016 et des pièces du dossier que, pour refuser la demande d'admission au séjour, la préfète s'est fondée sur l'avis du médecin de l'agence régionale de santé du 16 décembre 2015 qui indique que l'état de santé de M. A... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais que l'intéressé peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine et que son état de santé lui permet de voyager ; que, par conséquent, le moyen tiré du défaut d'examen particulier de la situation de l'intéressé doit être écarté ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

8. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version applicable à la date de l'arrêté attaqué : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) / 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé (...) " ;

9. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit au point 4, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A...ne pourrait pas bénéficier d'un traitement approprié à sa pathologie en Algérie ; que l'avis du médecin de l'agence régionale de santé en date du 16 décembre 2015 indique que l'état de santé de M. A...lui permet de voyager sans risque vers le pays d'origine ; que, par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir qu'en lui faisant obligation de quitter le territoire français, la préfète de la Seine-Maritime a méconnu les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Sur la décision fixant le pays de destination :

10. Considérant que si la motivation de fait de la décision fixant le pays de destination ne se confond pas nécessairement avec celle obligeant l'étranger à quitter le territoire français, la motivation en droit de ces deux décisions est identique et résulte des termes mêmes des dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, expressément visé par l'arrêté attaqué ; que la préfète indique dans l'arrêté attaqué que M. A...n'allègue ni n'établit être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine, la préfète a suffisamment motivé sa décision ; que, par suite, le moyen tiré du défaut de motivation suffisante de la décision fixant le pays de destination ne peut qu'être écarté ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 9 que M. A...n'est pas fondé à exciper, à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination de l'éloignement, l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la préfète de la Seine-Maritime est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a annulé son arrêté du 31 mars 2016 ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Rouen du 19 janvier 2017 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif de Rouen est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise pour information à la préfète de la Seine-Maritime.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 17DA00267
Date de la décision : 21/09/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Paul Louis Albertini
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier

Origine de la décision
Date de l'import : 24/10/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2017-09-21;17da00267 ?
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