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14/09/2017 | FRANCE | N°17DA00061

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre - formation à 3 (bis), 14 septembre 2017, 17DA00061


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...A...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 29 juin 2016 par lequel le préfet du Nord a décidé sa remise aux autorités italiennes en vue de l'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 1606085 du 19 août 2016, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 10 janvier 2017, M. D...A..., représenté par Me B...

C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet ar...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...A...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 29 juin 2016 par lequel le préfet du Nord a décidé sa remise aux autorités italiennes en vue de l'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 1606085 du 19 août 2016, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 10 janvier 2017, M. D...A..., représenté par Me B...C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Nord de lui délivrer une attestation provisoire de séjour en tant que demandeur d'asile ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la constitution ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- la directive 2003/09/CE du 27 janvier 2003 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Olivier Yeznikian, président de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que l'arrêté attaqué comporte la mention des motifs de droit et des circonstances de fait qui en constituent le fondement ; qu'en effet, après avoir visé les textes applicables à la situation de l'intéressé, et en particulier le règlement n° 604/2013 et les articles L. 742-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet du Nord précise la situation personnelle du requérant et les raisons pour lesquelles sa demande d'asile relève de la responsabilité de l'Italie ; que, par suite, le préfet a suffisamment motivé sa décision ;

2. Considérant qu'aux termes de l'alinéa 2 de l'article 53-1 de la Constitution : " Toutefois, même si la demande n'entre pas dans leur compétence en vertu de ces accords, les autorités de la République ont toujours le droit de donner asile à tout étranger persécuté en raison de son action en faveur de la liberté ou qui sollicite la protection de la France pour un autre motif. " ; qu'aux termes de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque Etat membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement (...) " ;

3. Considérant que la faculté laissée à chaque Etat membre, par les dispositions précitées, de décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement, est discrétionnaire et ne constitue nullement un droit pour les demandeurs d'asile ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que le préfet du Nord aurait entaché sa décision d'un défaut d'examen particulier de la situation de M. A...en ne prenant pas en compte cette faculté doit être écarté ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Lorsque l'enregistrement de sa demande d'asile a été effectué, l'étranger se voit remettre une attestation de demande d'asile dont les conditions de délivrance et de renouvellement sont fixées par décret en Conseil d'Etat. La durée de validité de l'attestation est fixée par arrêté du ministre chargé de l'asile. / La délivrance de cette attestation ne peut être refusée au motif que l'étranger est démuni des documents et visas mentionnés à l'article L. 211-1. Elle ne peut être refusée que dans les cas prévus aux 5° et 6° de l'article L. 743-2. / Cette attestation n'est pas délivrée à l'étranger qui demande l'asile à la frontière ou en rétention. " ; qu'aux termes de l'article L. 742-1 du même code : " (...) L'attestation délivrée en application de l'article L. 741-1 mentionne la procédure dont il fait l'objet. Elle est renouvelable durant la procédure de détermination de l'Etat responsable et, le cas échéant, jusqu'à son transfert effectif à destination de cet Etat. (...) " ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les services de la préfecture du Nord ont délivré une attestation de demande d'asile " procédure Dublin " à M. A...le 14 mars 2016 ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des articles L. 741-1 et L. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;

6. Considérant qu'aux termes des articles 4 et 5 du règlement (UE) n° 604/2103, les autorités de l'Etat membre procédant à la détermination de l'Etat membre responsable doivent, afin d'en faciliter la détermination et de vérifier que le demandeur d'asile a bien reçu et compris les informations prévues par l'article 4 du même règlement, mener un entretien individuel avec le demandeur ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A...a bénéficié de cet entretien le 13 avril 2016 dans les locaux de la préfecture du Nord ; que l'intéressé ne fait état d'aucun élément qui conduirait la cour à constater que cet entretien ne s'est pas déroulé dans les conditions prévues par le règlement (UE) n° 604-2013 ; qu'il a pu, pendant cet entretien, faire état de ses observations ; qu'il ressort également des pièces du dossier que les services de la préfecture ont remis à M.A..., le jour de l'entretien, les brochures destinées à l'information des demandeurs d'asile, à savoir la brochure A " J'ai demandé l'asile dans l'Union européenne - quel pays sera responsable de l'analyse de ma demande " et la brochure B " Je suis sous procédure Dublin - qu'est ce cela signifie ", rédigées en français, langue que l'intéressé a déclaré comprendre ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions des articles 4 et 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit être écarté ;

8. Considérant qu'aux termes de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 : " 2. (...) / Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'État membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre État membre peut être désigné comme responsable. " ;

9. Considérant que l'Italie étant membre de l'Union Européenne et partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New-York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il doit alors être présumé que le traitement réservé aux demandeurs d'asile dans cet Etat membre est conforme aux exigences de la convention de Genève ainsi qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que cette présomption est toutefois réfragable lorsqu'il y a lieu de craindre qu'il existe des défaillances systémiques de la procédure d'asile et des conditions d'accueil des demandeurs d'asile dans l'Etat membre responsable, impliquant un traitement inhumain ou dégradant ; que, dans cette hypothèse, il appartient à l'administration d'apprécier dans chaque cas, au vu des pièces qui lui sont soumises et sous le contrôle du juge, si les conditions dans lesquelles un dossier particulier est traité par les autorités italiennes répondent à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile ;

10. Considérant que les documents d'ordre général relatifs à la procédure d'asile et au conditions d'accueil en Italie que produit le requérant, ne suffisent pas à établir que la situation générale dans ce pays ne permettrait pas d'assurer un niveau de protection suffisant aux demandeurs d'asile et que sa réadmission vers ce pays l'exposerait à un risque personnel de traitement inhumain ou dégradant ; qu'il ne fournit aucune précision ni aucun élément sur le séjour qu'il a effectué en Italie avant de se rendre en France, sa durée et les difficultés qu'il aurait rencontrées dans ce pays, notamment en termes d'accueil ou de traitement de sa demande d'asile ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que sa demande ne serait pas traitée par les autorités italiennes dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 et des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

11. Considérant qu'aux termes de l'article 13 de la directive 2003/09/CE du 27 janvier 2003 : " 1. Les États membres font en sorte que les demandeurs d'asile aient accès aux conditions matérielles d'accueil lorsqu'ils introduisent leur demande d'asile. / 2. Les États membres prennent des mesures relatives aux conditions matérielles d'accueil qui permettent de garantir un niveau de vie adéquat pour la santé et d'assurer la subsistance des demandeurs. / (...) " ;

12. Considérant que M.A..., en sa qualité de demandeur d'asile dont la demande relevait de la compétence d'un autre Etat européen, pouvait solliciter le bénéfice des conditions minimales d'accueil en France jusqu'à sa remise effective aux autorités de l'autre Etat de l'Union en application des dispositions de la directive 2003/09/CE du 27 janvier 2003, conformément à ce qu'a jugé la Cour de justice de l'Union européenne dans son arrêt du 27 septembre 2012 (aff. C-179/11) ; qu'il pouvait, également, le cas échéant, saisir le juge des référés en application de l'article L. 521-2 du code de justice administrative afin de faire respecter son droit à un hébergement ou au bénéfice de l'allocation temporaire d'attente ; qu'en revanche, il ne peut utilement se prévaloir d'éventuels manquements commis à ce titre par l'administration, pour demander l'annulation de la décision de remise aux autorités de l'autre Etat de l'Union, qui est prise indépendamment de ces modalités d'accueil ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ; que, dès lors, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...A..., au ministre de l'intérieur et à Me B...C....

Copie en sera transmise pour information au préfet du Nord.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 17DA00061
Date de la décision : 14/09/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335 Étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: M. Olivier Yeznikian
Rapporteur public ?: Mme Fort-Besnard
Avocat(s) : CLAISSE et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 26/09/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2017-09-14;17da00061 ?
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