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17/08/2017 | FRANCE | N°15DA01807

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre - formation à 3, 17 août 2017, 15DA01807


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...A...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 3 mars 2014 par laquelle le directeur du centre hospitalier de Valenciennes a prononcé sa révocation, ensemble la décision du 29 avril 2014 rejetant son recours gracieux et d'enjoindre au centre hospitalier de Valenciennes de le réintégrer dans ses fonctions dans un délai d'un mois à compter du jugement à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 1404182 du 1

6 septembre 2015, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procé...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...A...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 3 mars 2014 par laquelle le directeur du centre hospitalier de Valenciennes a prononcé sa révocation, ensemble la décision du 29 avril 2014 rejetant son recours gracieux et d'enjoindre au centre hospitalier de Valenciennes de le réintégrer dans ses fonctions dans un délai d'un mois à compter du jugement à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 1404182 du 16 septembre 2015, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 16 novembre 2015, M.A..., représenté par Me B...F..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 16 septembre 2015 du tribunal administratif de Lille ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 3 mars 2014, ainsi que la décision du 29 avril 2014 de rejet de son recours gracieux ;

3°) d'enjoindre au centre hospitalier de Valenciennes de le réintégrer dans ses fonctions dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Valenciennes la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

- le décret n° 89-822 du 7 novembre 1989 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Olivier Nizet, président-assesseur,

- les conclusions de M. Hadi Habchi, rapporteur public,

- et les observations de Me C...D..., représentant le centre hospitalier de Valenciennes.

1. Considérant que M.A..., aide-soignant au centre hospitalier de Valenciennes depuis le 15 mars 2004 exerce ses fonctions au sein de l'unité de soins de longue durée de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) Val d'Escaut ; qu'après avoir été suspendu de ses fonctions le 17 mai 2013, pour une durée de quatre mois, il a été réintégré et affecté dans le service de stérilisation centrale dans l'attente des résultats de l'enquête administrative diligentée par la direction de l'établissement ; que, par une décision du 3 mars 2014, le directeur du centre hospitalier de Valenciennes a prononcé la révocation de M. A... ; que ce dernier relève appel du jugement du 16 septembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision et de celle rejetant son recours gracieux du 29 avril 2014 ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'en estimant qu'aucun texte n'enferme l'exercice de l'action disciplinaire dans un délai déterminé, les premiers juges ont nécessairement répondu au moyen tiré de ce que le conseil de discipline n'a pas été saisi concomitamment au prononcé de la mesure de suspension ; que, par suite, le moyen tiré de l'omission à statuer doit être écarté ;

Sur la légalité externe de la décision du 3 mars 2014 :

3. Considérant qu'il ressort des pièces versées au dossier de première instance que par décision du 1er juillet 2008, régulièrement publiée au recueil des actes administratifs de la préfecture du Nord, le directeur du centre hospitalier de Valenciennes a donné à Mme G..., directrice adjointe, en charge de la direction des ressources humaines, délégation à l'effet de signer au nom du directeur tous les actes et décisions relevant de la direction des ressources humaines ; que cette délégation n'est ni générale, ni absolue ; que le moyen tiré de ce que la directrice adjointe n'aurait pas eu la compétence pour mettre en oeuvre la procédure disciplinaire engagée à l'encontre de M. A...doit, en tout état de cause, être écarté ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article 30 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " En cas de faute grave commise par un fonctionnaire, qu'il s'agisse d'un manquement à ses obligations professionnelles ou d'une infraction de droit commun, l'auteur de cette faute peut être suspendu par l'autorité ayant pouvoir disciplinaire qui saisit sans délai le conseil de discipline (...) Sa situation doit être définitivement réglée dans le délai de quatre mois. Si à l'expiration de ce délai aucune décision n'a été prise par l'autorité ayant pouvoir disciplinaire, l'intéressé, sauf s'il est l'objet de poursuites pénales est rétabli dans ses fonctions " ; que la mesure provisoire de suspension prévue par ces dispositions législatives ne présente pas par elle-même un caractère disciplinaire ; qu'elle est uniquement destinée à écarter temporairement un agent du service, en attendant qu'il soit statué disciplinairement ou pénalement sur sa situation ; qu'elle peut être légalement prise dès lors que l'administration est en mesure d'articuler à l'encontre de l'intéressé des griefs qui ont un caractère de vraisemblance suffisant et qui permettent de présumer que celui-ci a commis une faute grave ;

5. Considérant que les dispositions précitées n'ont toutefois pour objet que de limiter les conséquences de la suspension, aucun texte n'enfermant dans un délai déterminé l'exercice de l'action disciplinaire ; que, dès lors, M. A...n'est pas fondé à soutenir que l'action disciplinaire ne pouvait être légalement engagée postérieurement à l'expiration du délai de quatre mois de suspension et que le conseil de discipline aurait dû être saisi dès le prononcé de la mesure de suspension ;

6. Considérant qu'aux termes qu'aux termes de l'article 83 de la loi du 9 janvier 1986 : " (...) Le conseil de discipline est saisi par un rapport de l'autorité investie du pouvoir de nomination. Ce rapport précise les faits reprochés et les circonstances dans lesquelles ils ont été commis.(...) " ; qu'aux termes de l'article 1er du décret du 7 novembre 1989 : " Le fonctionnaire contre lequel est engagée une procédure disciplinaire doit être informé qu'il a le droit d'obtenir la communication intégrale de son dossier individuel et de se faire assister par un ou plusieurs défenseurs de son choix. Il doit être invité à prendre connaissance du rapport mentionné à l'article 83 de la loi du 9 janvier 1986 (...) " ;

7. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que M. A...a obtenu la communication du rapport établi par l'autorité disciplinaire ainsi que de ses annexes ; que si le requérant fait grief à l'autorité d'avoir procédé à l'anonymisation des témoignages, alors que cette pratique a été rendu nécessaire par les craintes exprimées par les agents et les résidents à l'égard de l'intéressé, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette anonymisation n'aurait pas permis à M. A...de contester utilement les fautes qui lui ont été reprochées ; qu'en second lieu, le requérant ayant pu contester ces témoignages et faire valoir tous les arguments qu'il jugeait utiles lors de la procédure disciplinaire, y compris en produisant des témoignages qui lui sont favorables, la circonstance alléguée selon laquelle le rapport présenté aux membres du conseil de discipline, aurait été rédigé à charge, ce qui selon le requérant serait de nature à vicier la procédure disciplinaire, n'est, en tout état de cause, pas établie ;

8. Considérant qu'aux termes de l'article 9 du décret du décret du 7 novembre 1989 : " Le conseil de discipline, compte tenu des observations écrites et des déclarations orales produites devant lui, ainsi que des résultats de l'enquête à laquelle il a pu être procédé, émet un avis motivé sur les suites qui lui paraissent devoir être réservées à la procédure disciplinaire engagée. A cette fin, le président du conseil de discipline met aux voix la proposition de sanction la plus sévère parmi celles qui ont été exprimées lors du délibéré. Si cette proposition ne recueille pas l'accord de la majorité des membres présents, le président met aux voix les autres sanctions figurant dans l'échelle des sanctions disciplinaires en commençant par la plus sévère après la sanction proposée jusqu'à ce que l'une d'elles recueille un tel accord. Si aucune proposition de sanction n'est adoptée, le président propose qu'aucune sanction ne soit prononcée. " ; qu'il ressort des pièces du dossier et, en particulier du procès-verbal du conseil de discipline, que les membres de la commission administrative paritaire réunie en conseil de discipline ne sont pas parvenus à dégager une majorité sur le choix de la sanction à proposer en application de l'article 9 du décret précité lors de la mise aux voix de chacune des sanctions figurant dans l'échelle des sanctions disciplinaires, en commençant par la plus sévère après la sanction proposée ; que si la présidente du conseil de discipline a fait procéder à un ultime vote afin de faire constater, par le conseil, cette absence de majorité des membres présents, elle n'a cependant pas soumis au vote des membres du conseil de discipline la proposition qu'aucune sanction ne soit prononcée à l'encontre de l'agent ; qu'à supposer que cette absence de vote soit constitutif d'un vice de procédure, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette irrégularité ait, en l'espèce, exercé une influence sur le sens de la décision qui a été prise ou qu'elle ait privé l'intéressé d'une garantie ; que, par suite, le moyen tiré du vice de procédure doit être écarté ;

9. Considérant qu'il ressort des termes de la décision contestée que pour prendre la sanction disciplinaire en litige, le directeur du centre hospitalier a pris connaissance du contenu de l'avis émis le 21 février 2014 par le conseil de discipline ; que la circonstance que le procès-verbal dudit conseil ait été signé le 20 mars 2014, soit postérieurement à la décision de révocation est sans incidence sur sa légalité ;

Sur la légalité interne de la décision du 3 mars 2014 :

10. Considérant qu'aux termes de l'article 81 de la loi n°86-33 du 9 janvier 1986 : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : (...)/ Quatrième groupe : La mise à la retraite d'office, la révocation. " ;

11. Considérant qu'il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes ;

12. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment des témoignages recueillis lors de l'enquête administrative réalisée par le centre hospitalier, tant auprès des collègues de M. A...que de certains des résidents de l'EHPAD Val d'Escaut, que M. A...a, durant son service, tenu des propos irrespectueux à l'égard des résidents et fait preuve, à de multiples reprises, d'un comportement particulièrement inadapté à l'égard de personnes âgées en situation de vulnérabilité ; qu'ainsi, il ressort des témoignages produits que M. A...a notamment demandé à un résident s'il prévoyait de rédiger prochainement son testament et a tenu des propos déplacés sur la poitrine d'une résidente tout en pratiquant un attouchement sur celle-ci ; que, par ailleurs, il ressort également de l'enquête administrative que M. A...se livrait régulièrement à des pauses longues et abusives, qu'il refusait d'accomplir certaines tâches lui incombant telles que notamment le changement des poches d'urine ou encore qu'il a été à plusieurs reprises constaté qu'il consommait les denrées alimentaires destinées aux résidents ; que si M. A...fait état de témoignages en sa faveur de la part de certains de ses collègues, leur teneur favorable, au demeurant relative, n'est pas de nature à remettre sérieusement en cause les faits qui lui sont reprochés ; que, par suite, l'autorité disciplinaire, en prenant la décision en litige, ne s'est pas fondée sur des faits matériellement inexacts ;

13. Considérant que les faits reprochés à M.A..., qui révèlent un grave manquement aux obligations professionnelles incombant à un aide-soignant étaient de nature à justifier légalement une sanction ; qu'eu égard aux fonctions de M. A...et à la particulière vulnérabilité des personnes auprès desquelles il devait intervenir, et alors même qu'il a produit plusieurs témoignages en sa faveur, compte tenu de la gravité des fautes commises par l'intéressé, la sanction de révocation prononcée à raison de ces faits n'est pas disproportionnée ;

14. Considérant que si, par une décision du 16 septembre 2013 procédant à sa réintégration à l'issue de la période de suspension, M. A...a été affecté dans un autre service du centre hospitalier de Valenciennes, la décision de modifier l'affectation de l'intéressé était justifiée par l'intérêt du service et n'a pas présenté, en l'espèce, le caractère d'une sanction disciplinaire déguisée susceptible de se cumuler avec la sanction de révocation ; que, par suite, le moyen tiré de ce que M. A...aurait été sanctionné deux fois pour les mêmes faits doit être écarté ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ; que ses conclusions à fin d'injonction, assorties d'astreinte ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... la somme que demande le centre hospitalier de Valenciennes sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le centre hospitalier de Valenciennes au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E...A...et au centre hospitalier de Valenciennes.

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N°15DA01807

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15DA01807
Date de la décision : 17/08/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-09 Fonctionnaires et agents publics. Discipline.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Olivier Nizet
Rapporteur public ?: M. Habchi
Avocat(s) : BELKEBIR

Origine de la décision
Date de l'import : 29/08/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2017-08-17;15da01807 ?
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