Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. E...D...a demandé au tribunal administratif de Lille de condamner France Télécom à lui verser la somme de 15 000 euros, augmentée des intérêts au taux légal et de leur capitalisation, en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de son affectation, du 5 janvier 2009 au 1er février 2011, sur un emploi ne correspondant pas à son grade et de mettre à la charge de cet établissement public la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de même que les dépens de l'instance.
Par un jugement n° 1204336 du 2 juin 2015, le tribunal administratif de Lille, faisant partiellement droit à cette demande, a condamné la société Orange, venue aux droits et obligations de France Télécom, à verser à M. D...une somme de 5 000 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 8 mars 2012 et de la capitalisation des intérêts échus au 8 mars 2013, à titre de réparation du préjudice moral dont l'intéressé avait fait état, a mis à la charge de la même société les sommes de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de 35 euros au titre des dépens de l'article R. 761-1 de ce code et a rejeté le surplus des conclusions de cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 27 juillet 2015 et le 29 novembre 2016, M.D..., représenté par Me B...C..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Lille du 2 juin 2015 en tant qu'il a limité à 5 000 euros la réparation de son préjudice moral et rejeté les conclusions de sa demande tendant à la réparation des troubles dans les conditions d'existence qu'il a subis ;
2°) de condamner la société Orange à lui verser la somme de 20 000 euros à titre de réparation de son préjudice moral, ainsi que la somme de 20 000 euros à titre de réparation de ses troubles dans les conditions d'existence, ces sommes étant augmentées des intérêts au taux légal et de la capitalisation de ces intérêts ;
3°) de mettre à la charge de la société Orange la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 ;
- le décret n° 54-865 du 2 septembre 1954 ;
- le décret n° 90-1225 du 31 décembre 1990 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,
- les conclusions de M. Jean-Jacques Gauthé, rapporteur public concluant en application de l'article R. 222-24 du code de justice administrative,
- et les observations de Me B...C..., représentant M.D..., et de MeG..., substituant Me A...F..., représentant la société Orange.
1. Considérant que M.D..., agent titulaire de France Télécom ayant accédé, à compter du 6 décembre 1988, au grade de conducteur de travaux des lignes, s'est rapidement vu confier des fonctions impliquant l'encadrement d'équipes importantes, telles que celles de responsable du service des dérangements au centre principal d'exploitation de Roubaix, puis du service après-vente des terminaux à l'agence commerciale de Villeneuve-d'Ascq, au sein de la direction régionale Nord - Pas-de-Calais ; qu'ayant effectué un détachement durant quelques mois, à la fin de l'année 2008, au sein d'une collectivité territoriale, il a été réintégré à sa demande dans les effectifs de France Télécom, à compter du 1er janvier 2009 ; qu'estimant toutefois que le poste d'agent d'accueil clientèle qui lui avait été attribué dans ce cadre et qui impliquait notamment qu'il se rende régulièrement sur les sites de différents magasins de la direction territoriale Nord pour effectuer des recensements physiques de leur fréquentation et pour recueillir leurs archives ne correspondait pas à son grade, ni à son niveau d'expérience, M. D...a demandé, d'abord de façon informelle auprès de sa hiérarchie, puis officiellement, par un courrier daté du 3 juillet 2009 et reçu le 7 juillet suivant par la direction des ressources humaines de France Télécom, à obtenir une affectation plus conforme à son niveau d'aptitude ; que, par un jugement du 25 novembre 2011 devenu définitif, le tribunal administratif de Lille a annulé pour excès de pouvoir, à la demande de l'intéressé, la décision implicite de refus née du silence gardé par France Télécom sur cette demande ; que M. D... relève appel du jugement du 2 juin 2015 par lequel le tribunal administratif de Lille a seulement condamné la société Orange, venue aux droits et obligations de France Télécom, à lui verser la somme de 5 000 euros, augmentée des intérêts au taux légal et de leur capitalisation, à titre de réparation du préjudice moral qu'il a subi en raison de cette affectation, du 5 janvier 2009 au 1er février 2011, sur un poste ne correspondant pas à son grade et a rejeté le surplus des conclusions de cette demande, tendant à obtenir la réparation des troubles dans les conditions d'existence dont il a fait, en outre, état ;
Sur la responsabilité :
2. Considérant que, comme il vient d'être dit au point 1, par un jugement du 25 novembre 2011 devenu définitif, le tribunal administratif de Lille a annulé la décision implicite par laquelle France Télécom, d'une part, a refusé de donner à M. D...une affectation correspondant à son grade et, d'autre part, a maintenu celui-ci, du 5 janvier 2009 au 1er février 2011, sur un emploi d'agent d'accueil ; que le tribunal s'est fondé sur le motif tiré de ce que cet emploi n'était pas au nombre de ceux susceptibles d'être légalement confiés à un contrôleur de travaux des lignes ; que l'illégalité entachant cette décision constitue une faute de nature à engager la responsabilité de la société Orange, venant aux droits et obligations de France Télécom, à l'égard de M.D... ;
Sur la réparation :
3. Considérant, d'une part, que M. D...soutient que les démarches qu'il a accomplies, pour partie sur son temps personnel ou sur celui réservé à sa vie de famille, en vue d'obtenir l'attribution d'une affectation correspondant à son grade et à ses qualifications lui auraient, par elles-mêmes, occasionné des troubles dans les conditions d'existence ; qu'il n'établit toutefois pas que ces démarches, qui correspondent à quelques courriers électroniques et au courrier officiel du 3 juillet 2009 mentionné au point 1, excéderaient, par leur volume, leur fréquence et le temps qu'ils représentent, celles qui incombent normalement à tout agent dans le cadre de la gestion de sa carrière ; qu'enfin, si M. D...invoque le sentiment de dévalorisation que lui a occasionné son cantonnement à des tâches matérielles et sa mise à l'écart et s'il fait état du retentissement que sa situation a comporté sur sa vie familiale, il n'assortit pas davantage en cause d'appel qu'en première instance ces allégations d'éléments de nature à lui permettre d'établir qu'il aurait subi, en conséquence de l'illégalité de la décision implicite refusant de lui attribuer une affectation correspondant à son grade, des troubles dans les conditions d'existence distincts du préjudice moral que le jugement attaqué a condamné la société Orange à indemniser ;
4. Considérant, d'autre part, que le tribunal administratif de Lille n'a pas fait une insuffisante évaluation du préjudice moral subi, dans les circonstances exposées aux points précédents, par M. D...en conséquence de son reclassement et de son maintien illégal sur un poste créé hors de l'organigramme du service et de sa mise à l'écart, en le fixant, en tenant compte du retentissement que cette situation a comporté sur sa vie familiale, à la somme de 5 000 euros ;
5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement du 2 juin 2015, le tribunal administratif de Lille n'a fait que partiellement droit à sa demande ; que les conclusions qu'il présente au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M.D..., sur le fondement des mêmes dispositions, une somme au titre des frais exposés par la société Orange et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la société Orange au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E...D...et à la société anonyme Orange.
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N°15DA01264
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