Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La commune d'Hautmont et la communauté de communes Sambre-Avesnois ont, par deux requêtes distinctes, demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du préfet du Nord du 30 mai 2013 portant création, à compter du 31 décembre 2013, d'une communauté d'agglomération issue de la fusion de la communauté d'agglomération Maubeuge-Val de Sambre, de la communauté de communes frontalière Nord Est Avesnois, de la communauté de communes Nord Maubeuge, de la communauté de communes Sambre-Avesnois et du SIVU pour la requalification de la friche industrielle CLECIM.
Le tribunal administratif de Lille a, après les avoir jointes, rejeté ces deux requêtes par un jugement nos 1304297,1304298 du 14 avril 2015.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 15 juin 2015, 14 et 27 avril 2017, la commune d'Haumont et la communauté de communes Sambre-Avesnois, représentées par la SELAS Adamas affaires publiques, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du préfet du Nord du 30 mai 2013 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elles soutiennent que :
- le jugement est insuffisamment motivé ;
- il est irrégulier faute d'avoir été notifié au président de la communauté de communes Sambre-Avesnois ;
- il est irrégulier car la mention de l'intervention de l'avocat des requérantes lors de l'audience est doublement erronée ;
- l'arrêté en litige n'est pas motivé, en méconnaissance des dispositions de l'article 60 III alinéa 2 de la loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 ;
- il est entaché d'un vice de procédure, faute de transmission au directeur départemental des finances publiques ;
- l'information des conseillers municipaux et communautaires a méconnu les articles L. 2121-13 et L. 5211-1 du code général des collectivités territoriales ;
- l'arrêté en litige est illégal en raison de l'illégalité de l'arrêté du 17 septembre 2012 fixant le périmètre du nouvel établissement public de coopération intercommunale, qui méconnaît les prescriptions de la note ministérielle d'avril 2012 quant aux conditions de la majorité requise ;
- le préfet ne pouvait recourir à la procédure dérogatoire prévue à l'alinéa 2 du III de l'article 60 de la loi du 16 décembre 2010 dès lors qu'un schéma départemental de coopération intercommunale avait été arrêté le 20 mars 2012 ;
- le projet n'a pas été soumis au vote de la commission départementale de coopération intercommunale ;
- l'arrêté est entaché de vices de forme, faute des mentions imposées par la circulaire ministérielle du 12 janvier 2012 ;
- il méconnaît les instructions données par le ministre de l'intérieur et des finances publiques pour la mise en oeuvre des projets de fusion d'établissements publics de coopération intercommunale ;
- il méconnaît l'article 72 de la constitution ;
- il est entaché d'erreurs manifestes d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales en l'absence de cohérence financière, d'amélioration de la cohérence spatiale, de cohérence du périmètre et de prise en compte des compétences des groupements préexistants.
Par un mémoire en défense, enregistré le 24 avril 2017, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- la loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 ;
- la décision QPC n° 2013-315 du 26 avril 2013 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Amélie Fort-Besnard, premier conseiller,
- les conclusions de M. Jean-Marc Guyau, rapporteur public,
- et les observations de Me D...B..., représentant la commune d'Hautmont et la communauté de communes Sambre-Avesnois, et de Mme A...C..., ayant reçu mandat pour représenter le ministre de l'intérieur.
1. Considérant que le préfet du Nord a, par un arrêté du 17 septembre 2012, délimité le périmètre d'une nouvelle communauté d'agglomération issue de la fusion de la communauté d'agglomération Maubeuge - Val de Sambre, de la communauté de communes frontalière Nord Est Avesnois, de la communauté de communes Nord Maubeuge, de la communauté de communes Sambre-Avesnois et du syndicat intercommunal à vocation unique (SIVU) pour la requalification de la friche industrielle CLECIM ; qu'après transmission de cet arrêté aux collectivités territoriales concernées, le préfet du Nord a constaté que les conditions de majorité requises par le III de l'article 60 de la loi du 16 décembre 2010 étaient atteintes ; qu'il a décidé la création, par arrêté du 30 mai 2013, de la communauté d'agglomération issue de la fusion des communautés de communes et syndicat déjà cités ; que la commune d'Hautmont et la communauté de communes Sambre-Avesnois relèvent appel du jugement du 14 avril 2015 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de cet arrêté ;
Sur la régularité du jugement :
2. Considérant que, pour écarter le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation commise par le préfet du Nord quant à la fixation du périmètre de la fusion, le tribunal administratif de Lille a apprécié la pertinence de l'argument tiré du faible nombre de compétences exercées en commun avant la fusion au regard d'autres caractéristiques du nouvel établissement public de coopération intercommunal ; que les requérantes ne sont pas fondées à soutenir qu'en procédant ainsi, le tribunal aurait entaché son jugement d'un défaut de motivation ;
3. Considérant que l'absence de notification du jugement à l'une des parties n'affecte pas sa régularité mais seulement le déclenchement des délais de recours ; que, dès lors, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement faute de notification à la communauté de communes Sambre-Avesnois doit, dès lors, en tout état de cause, être écarté ;
4. Considérant que si le jugement attaqué a mal orthographié le nom de l'avocat des requérantes, cette circonstance n'est pas de nature à entacher d'irrégularité le jugement attaqué ;
5. Considérant que si le jugement attaqué n'a pas précisé dans le visa de l'audience que l'avocat des requérantes intervenait non seulement au nom de la commune d'Haumont, mais aussi au nom de la communauté de communes Sambre-Avesnois, cet oubli, aussi regrettable soit-il, relève, en l'espèce, d'une simple erreur matérielle qui ne l'entache pas d'irrégularité ;
Sur la légalité de la décision attaquée :
6. Considérant qu'aux termes du III de l'article 60 de la loi du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales, dans sa rédaction applicable à la date de la décision contestée : " Dès la publication du schéma départemental de coopération intercommunale prévu au même article L. 5210-1-1 ou au plus tard à compter du 1er janvier 2012, le représentant de l'Etat dans le département propose, jusqu'au 31 décembre 2012, pour la mise en oeuvre du schéma, la fusion d'établissements publics de coopération intercommunale dont l'un au moins est à fiscalité propre. / A défaut de schéma arrêté, il peut proposer, par arrêté pris avant le 31 décembre 2012 après avis de la commission départementale de la coopération intercommunale, la fusion de plusieurs établissements publics de coopération intercommunale dont l'un au moins est à fiscalité propre, sous réserve du respect des objectifs mentionnés aux I et II du même article L. 5210-1-1 et de la prise en compte des orientations définies au III dudit article. / (...) / Lorsqu'elle est saisie pour avis en application des deuxième et troisième alinéas du présent III, la commission départementale de la coopération intercommunale dispose d'un délai de trois mois à compter de sa saisine pour se prononcer. A défaut de délibération dans ce délai, l'avis est réputé favorable. (...) / Un arrêté de projet de périmètre du nouvel établissement public de coopération intercommunale dresse la liste des établissements publics de coopération intercommunale appelés à fusionner. Il peut en outre comprendre des communes appartenant ou non à un autre établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre. / Cet arrêté est notifié par le représentant de l'Etat dans le département aux présidents des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre intéressés afin de recueillir l'avis de l'organe délibérant et, concomitamment, au maire de chaque commune incluse dans le projet de périmètre afin de recueillir l'accord de chaque conseil municipal. (...) / La fusion est prononcée par arrêté du ou des représentants de l'Etat dans le ou les départements concernés après accord des conseils municipaux des communes incluses dans le projet de périmètre. L'accord des communes doit être exprimé par la moitié au moins des conseils municipaux des communes intéressées, représentant la moitié au moins de la population totale de celles-ci, y compris le conseil municipal de la commune dont la population est la plus nombreuse si cette dernière représente au moins le tiers de la population totale. / A défaut d'accord des communes et sous réserve de l'achèvement des procédures de consultation, le ou les représentants de l'Etat dans le ou les départements concernés peuvent, jusqu'au 1er juin 2013, par décision motivée, après avis de la commission départementale de la coopération intercommunale, fusionner des établissements publics de coopération intercommunale. (...) " ;
En ce qui concerne les moyens de légalité externe :
7. Considérant que les dispositions du III de l'article 60 de la loi du 16 décembre 2010 ne prévoient l'obligation pour le préfet de motiver son arrêté de fusion que dans le cas où il passe outre le désaccord des collectivités locales consultées ; que tel n'a pas été le cas pour la fusion en litige ; que, dès lors, le moyen tiré du défaut de motivation de l'arrêté de fusion doit être écarté comme inopérant ;
8. Considérant qu'il est constant que l'arrêté en litige a été transmis au directeur régional des finances publiques, qui occupe également les fonctions de directeur départemental des finances publiques du Nord ; que, par suite, le moyen tiré de ce défaut de transmission doit, en tout état de cause, être écarté ;
9. Considérant que les mentions proposées, à titre indicatif, pour la rédaction des arrêtés préfectoraux par l'annexe à la circulaire ministérielle du 12 janvier 2012 sont dénuées de caractère impératif ; qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'impose que ces mentions figurent obligatoirement dans un arrêté de fusion ; que, dès lors, le moyen tiré de l'absence de ces mentions dans l'arrêté en litige doit être écarté comme inopérant ;
10. Considérant que le moyen tiré de ce que les conseillers municipaux et communautaires n'ont pas été mis en mesure de se prononcer en connaissance de cause sur le projet qui leur était soumis, en méconnaissance des articles L. 2121-13 et L. 5211-1 du code général des collectivités territoriales, est dépourvu des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ; qu'en outre, les requérantes ne mettent pas la cour à même d'apprécier les erreurs qu'aurait pu commettre le tribunal en répondant de manière détaillée à ces moyens aux points 8 et 9 de son jugement ;
11. Considérant que la commission départementale de coopération intercommunale a été consultée en juillet 2012 au titre du deuxième alinéa du III de l'article 60 de la loi du 16 décembre 2010, cité au point 6 ; qu'elle avait été auparavant consultée sur le même projet de fusion au titre de l'élaboration du schéma départemental de coopération intercommunale et avait émis un avis favorable ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la procédure serait irrégulière faute de consultation de cette commission, doit être écarté comme manquant en fait ;
En ce qui concerne la légalité interne :
12. Considérant qu'aux termes de l'article 37 de la loi du 16 décembre 2010 : " Le schéma départemental de coopération intercommunale mentionné à l'article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales est arrêté par le représentant de l'Etat dans le département avant le 31 décembre 2011 " ; que le schéma départemental de coopération intercommunale du Nord n'ayant pas été arrêté au plus tard le 31 décembre 2011, mais seulement le 20 mars 2012, le préfet du Nord n'a pas commis d'erreur de droit en mettant en oeuvre la procédure de fusion fixée au deuxième alinéa du III de l'article 60 de la loi du 16 décembre 2010, au terme duquel : " A défaut de schéma arrêté, il peut proposer, par arrêté pris avant le 31 décembre 2012 après avis de la commission départementale de la coopération intercommunale, la fusion de plusieurs établissements publics de coopération intercommunale dont l'un au moins est à fiscalité propre " ;
13. Considérant que la note de la direction générale des collectivités locales et de la direction générale des finances publiques d'avril 2012 rappelle la procédure de droit commun applicable pour la fusion des établissements publics de coopération intercommunale, prévue au II de l'article L. 5211-41-3 du code général des collectivités territoriales ; que l'arrêté en litige a été pris sur le fondement de la procédure dérogatoire prévue au III de l'article 60 de la loi du 16 décembre 2010 ; que le moyen tiré de la méconnaissance des instructions ministérielles relatives à la procédure de fusion de droit commun doit dès lors, en tout état de cause, être écarté comme inopérant ;
14. Considérant que, saisi de la question de la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit, du paragraphe III de l'article 60 de la loi du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales, le Conseil constitutionnel a estimé, dans sa décision n° 2013-315 QPC du 26 avril 2013, que ces dispositions ne méconnaissent pas le principe de libre administration des collectivités territoriales, énoncé à l'article 72 de la Constitution ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 72 de la Constitution par la décision en litige, au demeurant non assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé, doit être écarté ;
15. Considérant que le moyen tiré de ce que l'arrêté en litige serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales en raison de l'absence de cohérence financière de la fusion en litige, de l'absence d'amélioration de la cohérence spatiale, de l'absence de cohérence du périmètre retenu et du faible nombre de compétences communes aux groupements préexistants, est dépourvu des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ; qu'en outre, les requérantes ne mettent pas la cour à même d'apprécier les erreurs qu'aurait pu commettre le tribunal en répondant de manière détaillée à ce moyen aux points 14 à 18 de son jugement ;
16. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la commune d'Hautmont et la communauté de communes Sambre-Avesnois ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Nord du 30 mai 2013 ; que, par voie de conséquence, leurs conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être également rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la commune d'Hautmont et de la communauté de communes Sambre-Avesnois est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'Hautmont, à la communauté de communes Sambre-Avesnois et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera transmise pour information au préfet du Nord.
Délibéré après l'audience publique du 18 mai 2017 à laquelle siégeaient :
- M. Olivier Yeznikian, président de chambre,
- M. Christian Bernier, président-assesseur,
- Mme Amélie Fort-Besnard, premier conseiller.
Lu en audience publique le 1er juin 2017.
Le rapporteur,
Signé : A. FORT-BESNARDLe premier vice-président de la cour,
Président de chambre,
Signé : O. YEZNIKIAN
Le greffier,
Signé : C. SIRE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
Le greffier en chef,
Par délégation,
Le greffier,
Christine Sire
N°15DA00986 7