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09/05/2017 | FRANCE | N°15DA00277

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre - formation à 3, 09 mai 2017, 15DA00277


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B...a demandé au tribunal administratif de Rouen de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 1999 au 31 décembre 2003, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par deux requêtes distinctes, M. B... a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des mêmes impositions. Par deux ordonnances du 13 octobre 2014, le président de la première section de ce tribunal a transmis les dos

siers au tribunal administratif de Rouen.

Par un jugement commun n° 1200711-1403496-...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B...a demandé au tribunal administratif de Rouen de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 1999 au 31 décembre 2003, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par deux requêtes distinctes, M. B... a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des mêmes impositions. Par deux ordonnances du 13 octobre 2014, le président de la première section de ce tribunal a transmis les dossiers au tribunal administratif de Rouen.

Par un jugement commun n° 1200711-1403496-1403499 du 11 décembre 2014, le tribunal administratif de Rouen, après avoir joint ces trois requêtes, a rejeté les demandes de M. B... et l'a condamné au paiement d'une amende de 1 500 euros pour recours abusif.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 18 février 2015 et 18 février 2016, M. B..., représenté par Me C...A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;

3°) d'en ordonner le sursis de paiement.

Il soutient que :

- le tribunal administratif de Rouen n'était pas territorialement compétent pour connaître de sa demande ;

- la procédure est entachée d'irrégularité dans la mesure où les impositions au titre des années 1999 et 2000 procèdent de documents obtenus dans le cadre d'une enquête pénale alors qu'ils se rapportaient à des faits pénalement prescrits et au moyen d'un détournement du droit de communication de l'administration fiscale auprès de l'autorité judiciaire, qui a fait saisir ces documents à des fins purement fiscales ;

- l'administration fiscale ne pouvait faire application des dispositions alors en vigueur de l'article L. 170 du livre des procédures fiscales, car elle disposait des moyens de connaître son activité occulte et de déterminer le montant des omissions d'imposition ;

- l'exercice, à titre onéreux, d'une activité occulte n'est pas établie dès lors qu'aucun élément recueilli par l'administration fiscale ne corrobore les déclarations enregistrées lors des auditions de la procédure judiciaire ;

- l'administration ne justifie pas du montant des bénéfices imposables, dès lors qu'elle ne précise pas la méthode retenue pour fixer les bases d'imposition et que celles-ci ne pouvaient inclure l'intégralité des dépôts d'espèces et des encaissements de chèques constatés sur les comptes bancaires des parents de son épouse ;

- s'agissant des pénalités, l'administration ne démontrant pas l'exercice d'une activité occulte, seuls les intérêts de retard pourraient être appliqués et non la majoration de 80 % ;

- l'amende pour recours abusif prononcée par le tribunal n'est pas fondée dès lors que leurs demandes successives étaient recevables.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 22 septembre 2015 et 24 mars 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- l'autorité de la chose jugée par le tribunal administratif de Rouen dans son jugement n° 0800584 du 30 décembre 2010 s'oppose à ce que les impositions en litige soient à nouveau contestées ;

- les moyens soulevés par M. B...ne sont pas fondés ;

- les conclusions relatives au maintien du sursis de paiement ne peuvent être accueillies car, en application des dispositions de l'article L. 277 du livre des procédures fiscales, il y est mis fin par le jugement rendu sur le fond par le tribunal administratif.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code civil ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dominique Bureau, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Jean-Marc Guyau, rapporteur public.

1. Considérant que la direction nationale des vérifications de situations fiscales (DNVSF) a procédé à une vérification de comptabilité portant, au titre de la période du 1er janvier 1999 au 31 décembre 2004, sur une activité occulte de conseil fiscal exercée par M.D... B... ; qu'à l'issue de ce contrôle, le service a notifié à M. B...des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 1999 au 31 décembre 2003 ; que ces rappels de taxe sur la valeur ajoutée, assortis de la majoration de 80 % pour manoeuvres frauduleuses prévue par l'article 1729 du code général des impôts au titre de la période correspondant à l'année 1999 et de la majoration de 80 % pour activité occulte prévue par l'article 1728 du même code au titre de la période du 1er janvier 2000 au 31 décembre 2003, ont ainsi été mis en recouvrement le 30 novembre 2006 ; que, par un jugement n° 0800584 du 30 décembre 2010, le tribunal administratif de Rouen a rejeté le recours formé par M. B...contre ces impositions à la suite du rejet, le 27 décembre 2007, de sa première réclamation préalable ; que M. B... a ensuite formé contre les mêmes impositions trois autres réclamations successives, rejetées par la DNVSF, avant d'en demander la décharge au tribunal administratif de Rouen, par une demande enregistrée le 29 février 2012, puis au tribunal administratif de Paris, par deux demandes distinctes enregistrées le 20 avril 2013 ; que, par deux ordonnances du 13 octobre 2014, le président de la première section du tribunal administratif de Paris, faisant application de l'article R. 351-3 du code de justice administrative, a transmis les dossiers au tribunal administratif de Rouen, sur le fondement du premier alinéa de l'article R. 312-12 de ce code ; que, par un jugement commun du 11 décembre 2014, dont M. B... relève appel, le tribunal administratif de Rouen, après les avoir jointes, a rejeté ces trois demandes ;

Sur la compétence territoriale du tribunal administratif de Rouen :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 351-3 du code de justice administrative : " Lorsqu'une cour administrative d'appel ou un tribunal administratif est saisi de conclusions qu'il estime relever de la compétence d'une juridiction administrative autre que le Conseil d'Etat, son président, ou le magistrat qu'il délègue, transmet sans délai le dossier à la juridiction qu'il estime compétente " ; qu'aux termes de l'article R. 351-6 du même code : " (...) Lorsque le président de la cour administrative d'appel ou du tribunal administratif, auquel un dossier a été transmis en application du premier alinéa (...) de l'article R. 351-3, estime que cette juridiction n'est pas compétente, il transmet le dossier, dans le délai de trois mois suivant la réception de celui-ci, au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat, qui règle la question de compétence et attribue le jugement de tout ou partie de l'affaire à la juridiction qu'il déclare compétente (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 351-9 du même code : " Lorsqu'une juridiction à laquelle une affaire a été transmise en application du premier alinéa de l'article R. 351-3 n'a pas eu recours aux dispositions du deuxième alinéa de l'article R. 351-6 ou lorsqu'elle a été déclarée compétente par le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat, sa compétence ne peut plus être remise en cause ni par elle-même, ni par les parties, ni d'office par le juge d'appel ou de cassation, sauf à soulever l'incompétence de la juridiction administrative " ;

3. Considérant que, par deux ordonnances du 13 octobre 2014, le tribunal administratif de Paris, saisi le 20 avril 2013, par M. B..., de deux demandes distinctes tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels il a été assujetti au titre de la période du 1er janvier 1999 au 31 décembre 2003, ainsi que des pénalités correspondantes, a transmis les dossiers au tribunal administratif de Rouen ; que ce tribunal, qui se trouvait déjà saisi de conclusions identiques, présentées par une demande de M. B... enregistrée à son greffe le 29 février 2012, n'a pas fait application de la procédure de transmission au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat prévue par les dispositions de l'article R. 351-6 du code de justice administrative mais a statué sur les trois demandes, après les avoir jointes, par un seul jugement ; que, par conséquent, en application des dispositions de l'article R. 351-9 de ce code, la compétence territoriale du tribunal administratif de Rouen pour connaître des conclusions en décharge des ces impositions, formulée dans les trois demandes, ne peut être utilement contestée en appel ;

Sur les impositions contestées :

4. Considérant que, par un jugement n°0800584 du 30 décembre 2010, non frappé d'appel, le tribunal administratif de Rouen, saisi par M. B..., à la suite du rejet de sa première réclamation contre les impositions en litige, de conclusions tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 1999 au 31 décembre 2003, s'est prononcé sur la régularité de la procédure d'imposition, sur le bien-fondé du rappel de taxe sur la valeur ajoutée et sur les pénalités correspondantes, soit sur l'ensemble des causes juridiques ouvertes en contentieux fiscal ; qu'ainsi, comme le fait valoir l'administration en appel, l'autorité de la chose jugée qui s'attache à ce jugement fait obstacle à ce que les nouvelles demandes, ayant le même objet et fondées sur les mêmes causes, présentées par le même contribuable tant devant le tribunal administratif de Rouen que devant le tribunal administratif de Paris, puissent être accueillies ;

Sur le sursis de paiement :

5. Considérant que les dispositions de l'article L. 277 du livre des procédures fiscales, qui ont pour objet de permettre de surseoir au paiement des impositions lorsqu'il a été formé contre elles une réclamation contentieuse, n'ont de portée que pendant la durée de l'instance devant le tribunal administratif ; que, comme le fait valoir l'administration, lorsque le tribunal s'est prononcé au fond, son jugement rend à nouveau exigibles les impositions dont il n'a pas prononcé la décharge ; qu'en l'état actuel du droit, hormis les procédures spécialement édictées en matière de référé suspension ou de sursis à exécution, aucune disposition législative ou réglementaire n'a prévu une procédure de sursis de paiement des impositions contestées pendant la durée de l'instance devant la cour administrative d'appel ; que, par suite, les conclusions de M. B... tendant au bénéfice du sursis de paiement des impositions maintenues à sa charge par le jugement attaqué ne peuvent être accueillies ;

Sur l'amende pour recours abusif appliquée en première instance :

6. Considérant qu'aux termes de l'article R. 741-12 du code de justice administrative, dans sa rédaction en vigueur à la date du jugement attaqué : " Le juge peut infliger à l'auteur d'une requête qu'il estime abusive une amende dont le montant ne peut excéder 3 000 euros " ;

7. Considérant qu'eu égard à l'objet des demandes de M. B... et aux moyens qui y étaient développés, et compte tenu de ce qu'une demande similaire avait déjà été rejetée par le jugement du tribunal administratif de Rouen du 30 décembre 2010, les premiers juges ne l'ont pas inexactement qualifiée d'abusive ; que n'est pas, dans les circonstances de l'espèce, de nature à lui ôter ce caractère, la possibilité pour le contribuable de formuler devant l'administration fiscale, jusqu'à l'expiration du délai imparti à cet effet, des réclamations successives dirigées contre les mêmes impositions, même sans invoquer des faits ou des éléments nouveaux ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est fondé ni à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions contestées, ni à soutenir que c'est à tort que le tribunal lui a infligé une amende pour recours abusif, ni à demander le maintien du sursis de paiement ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B...et au ministre de l'économie et des finances.

Copie sera transmise à la direction nationale des vérifications de situations fiscales.

Délibéré après l'audience publique du 25 avril 2017 à laquelle siégeaient :

- Mme Odile Desticourt, présidente de chambre,

- Mme Muriel Milard, premier conseiller,

- Mme Dominique Bureau, premier conseiller.

Lu en audience publique le 9 mai 2017.

Le rapporteur,

Signé : D. BUREAU La présidente de chambre,

Signé : O. DESTICOURT

Le greffier,

Signé : M.T. LEVEQUE La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Le greffier

Marie-Thérèse Lévèque

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N°15DA00277


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15DA00277
Date de la décision : 09/05/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Compétence - Compétence à l'intérieur de la juridiction administrative - Compétence en premier ressort des tribunaux administratifs - Compétence territoriale.

Contributions et taxes - Règles de procédure contentieuse spéciales - Questions communes - Pouvoirs du juge fiscal - Autorité de la chose jugée.

Procédure - Jugements - Amende pour recours abusif.


Composition du Tribunal
Président : Mme Desticourt
Rapporteur ?: Mme Dominique Bureau
Rapporteur public ?: M. Guyau
Avocat(s) : OHAYON

Origine de la décision
Date de l'import : 30/05/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2017-05-09;15da00277 ?
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