Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
L'office public de l'habitat de Rouen a demandé au tribunal administratif de Rouen de condamner la SARL Grands travaux de Décontamination (GTD) à lui verser, d'une part, une somme de 20 570 euros, assortie des intérêts aux taux légal à compter du 19 septembre 2011, correspondant aux pénalités contractuelles émises en conséquence du retard pris par cette société dans l'exécution des travaux de désamiantage de bâtiments existants sur le site de réalisation d'un projet de construction d'un ensemble immobilier neuf comportant 82 logements à Rouen, d'autre part, une somme de 37 782,28 euros à titre d'indemnisation de ses pertes de loyers.
Par un jugement n° 1200829 du 30 septembre 2014, le tribunal administratif de Rouen a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 27 novembre 2014, l'office public de l'habitat de Rouen, représenté par Me B...A..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rouen du 30 septembre 2014 ;
2°) de condamner la SARL GTD à lui verser la somme de 20 570 euros, assortie des intérêts comme rappelé précédemment, et de 37 782,28 euros demandées ;
3°) de mettre à la charge de la SARL GTD une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- il était fondé à appliquer à la SARL GTD les pénalités prévues à l'article 4-2-1 du cahier des clauses administratives particulières applicables au marché en cause, compte tenu des retards pris par elle dans l'exécution des obligations énoncées par les documents contractuels et de ses absences à trois réunions de chantier ;
- il a subi, en conséquence du retard de livraison généré par la défaillance de la SARL GTD, un préjudice correspondant à des pertes de loyers ;
- il appartenait aux soumissionnaires, en vertu du règlement de la consultation, de justifier de qualifications appropriées pour effectuer des travaux de retrait de matériaux amiantés.
Une mise en demeure a été adressée le 7 juillet 2016 à la SARL GTD, qui en a accusé réception le lendemain, mais n'a pas produit de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des marchés publics ;
- le code de la santé publique ;
- le décret n° 76-87 du 21 janvier 1976 approuvant le cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Hadi Habchi, rapporteur public.
1. Considérant que l'office public de l'habitat de Rouen a décidé d'engager une opération de construction d'un ensemble immobilier neuf comportant 82 logements à Rouen ; que la réalisation de cette opération rendait nécessaire la démolition de bâtiments existants, constitués d'entrepôts désaffectés et d'une maison d'habitation abandonnée, situés 17 rue aux Anglais à Rouen ; que l'office a engagé une procédure de consultation en vue de l'attribution des travaux de démolition de ces bâtiments, ce chantier étant séparé en deux lots distincts, le premier afférent aux opérations de désamiantage préalables et le second à la démolition ; qu'après mise en oeuvre d'une procédure négociée, le lot correspondant au désamiantage des bâtiments a été attribué à la société à responsabilité limitée Grands Travaux de Décontamination (GTD), l'acte d'engagement ayant été signé le 16 novembre 2010 pour un montant de 6 925 euros hors taxes ; que, toutefois, cette société n'étant pas représentée aux premières réunions de chantier et l'inspecteur du travail territorialement compétent ayant émis, le 26 mai 2011, un avis défavorable à la mise en oeuvre du plan de retrait de l'amiante proposé par elle, la SARL GTD a fait connaître à l'office, par un courrier du 8 juin 2011, qu'elle entendait dénoncer purement et simplement son marché, en précisant qu'elle n'était pas en mesure d'effectuer les travaux qui lui avaient été confiés ; qu'estimant que l'attitude de la SARL GTD était à l'origine du retard pris par la réalisation de son opération immobilière, l'office public de l'habitat de Rouen a décidé d'infliger à cette société les pénalités contractuellement prévues en cas de retard dans l'exécution des prestations et d'absence injustifiée aux réunions ; qu'il a ainsi notifié à cette société un décompte de pénalités faisant apparaître un montant de 20 570 euros ; que la SARL GTD ayant contesté ces pénalités, l'office public de l'habitat de Rouen a demandé au tribunal administratif de Rouen, de la condamner à lui verser, d'une part, la somme de 20 570 euros, assortie des intérêts aux taux légal à compter du 19 septembre 2011, correspondant aux pénalités contractuelles émises, d'autre part, une somme de 37 782,28 euros à titre d'indemnisation de ses pertes de loyers ; que la SARL GTD a formé des conclusions reconventionnelles, tendant à la condamnation de l'établissement requérant à réparer, par le versement d'une somme de 5 000 euros, le préjudice qu'elle estime avoir subi ; que l'office public de l'habitat de Rouen relève appel du jugement du 30 septembre 2014 du tribunal administratif de Rouen, en tant qu'il a rejeté sa demande ;
Sur les pénalités de retard :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 4-1-1 du cahier des clauses administratives particulières applicables au marché en cause : " Le délai d'exécution de l'ensemble des lots est de 4 mois à compter de la date fixée par l'ordre de service de démarrage prescrivant à l'entrepreneur de commencer l'exécution des travaux. / (...) " ; qu'aux termes de l'article 4-1-2 de ce cahier : " Les délais d'exécution incluent la période de préparation. / (...) / Chaque intervention de l'entrepreneur sur le chantier fait l'objet d'un délai particulier ; la durée cumulée de ces délais particuliers est au plus égale à la durée du délai d'exécution global. " ; qu'aux termes de l'article 4-1-3 du même cahier : " a) Le calendrier détaillé d'exécution est établi par l'entrepreneur, ainsi que le planning détaillé fournis par l'entrepreneur dans son offre. Le calendrier détaillé d'exécution distingue les différents ouvrages, parties d'ouvrages faisant l'objet des travaux. Il indique, en outre, pour chacun des ouvrages, parties d'ouvrages : / - la durée et la date de départ du délai d'exécution qui lui est propre ; / - la durée et la date de départ des délais particuliers correspondant aux interventions successives de l'entrepreneur sur le chantier (...) ; / - les différentes dates d'achèvement qui permettront le calcul d'éventuelles pénalités de retard. / (...) / b) Le délai d'exécution propre à chacun des ouvrages, parties d'ouvrages commence à la date d'effet de l'ordre de service prescrivant à l'entrepreneur concerné de commencer l'exécution des travaux lui incombant. / (...) / d) Le calendrier est soumis à l'approbation du maître d'oeuvre et du maître d'ouvrage et notifié à l'entrepreneur par ordre de service, le planning approuvé devient alors contractuel. " ;
3. Considérant qu'il résulte de ces stipulations qu'il appartient à l'entrepreneur de fournir, à l'appui de son offre, un calendrier détaillé d'exécution de ses prestations fixant, dans la limite de la durée globale d'exécution du chantier, les points de départ et durées de ses interventions successives, lequel document doit être soumis à l'approbation du maître d'oeuvre et du maître d'ouvrage ; que ce calendrier détaillé, ainsi approuvé puis notifié par ordre de service à l'entrepreneur, revêt alors une valeur contractuelle et constitue, le cas échéant, la référence permettant de déterminer le montant des pénalités qui seraient infligées à l'entrepreneur à raison de retards pris dans l'exécution de ses obligations contractuelles ;
4. Considérant qu'il ne résulte d'aucun élément de l'instruction, ni n'est même allégué, que l'office public de l'habitat de Rouen aurait, conformément à ces stipulations, approuvé conjointement avec le maître d'oeuvre puis notifié dans les formes requises le calendrier détaillé qui avait été fourni à l'appui de son offre par la SARL GTD, la circonstance que ce calendrier était joint au marché notifié à la société après sa signature par le maître d'ouvrage étant sans incidence à cet égard ; que, dans ces conditions, l'office public de l'habitat de Rouen n'a pu, pour déterminer le quantum des pénalités de retard émises à l'encontre de la SARL GTD, se fonder sur ce calendrier détaillé, qui doit être regardé comme dépourvu de valeur contractuelle et, par suite, comme inopposable à cette dernière ; que, dès lors et en tout état de cause, des pénalités contractuelles de retard n'ont pu valablement être émises à l'encontre de la SARL GTD et les conclusions de l'office public de l'habitat de Rouen tendant à la condamnation de cette dernière à lui verser une somme de 20 300 euros à ce titre doivent être rejetées ;
Sur les pénalités pour absence à des réunions de chantier :
5. Considérant que, si l'office public de l'habitat de Rouen a aussi émis des pénalités forfaitaires pour absence à des réunions de chantier, telles que prévues par les stipulations de l'article 4-3-2 du cahier des clauses administratives particulières, représentant une somme totale de 270 euros à l'encontre de la SARL GTD, en invoquant trois absences non justifiées par cette dernière à de telles réunions, et si l'office reprend en appel ses conclusions tendant à ce que cette société soit condamnée à lui verser cette somme, il n'apporte toutefois aucune critique au motif que lui ont opposé les premiers juges, selon lequel il n'établissait pas, par les seules pièces versées à l'instruction, avoir convoqué la SARL GTD aux réunions du 28 mars et des 14 et 28 avril 2011 en cause, ni n'apporte aucune justification pertinente sur ce point en cause d'appel ; que, par suite, ces conclusions ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur le préjudice invoqué :
6. Considérant que, compte tenu de ce qui a été dit aux points 4 et 5, l'office public de l'habitat de Rouen, qui ne peut notamment démontrer l'existence d'un retard de la SARL GTD dans la réalisation de ses prestations au regard d'un calendrier détaillé ayant valeur contractuelle, n'établit pas que la livraison tardive des logements neufs faisant l'objet de l'opération engagée par lui, à la supposer même établie, trouverait son origine directe et certaine dans un manquement de la SARL GTD à ses obligations contractuelles ; qu'en outre, il ne résulte pas de l'instruction que l'office aurait fait procéder, avant d'engager l'opération en cause, à un repérage suffisamment précis, au sein des bâtiments existants voués à la démolition, des matériaux contenant de l'amiante, tel que le lui imposaient les dispositions des articles R. 1334-18 et suivants du code de la santé publique, ni qu'il ait porté les éléments d'information résultant d'un tel repérage, notamment l'importante friabilité présentée par les plaques de fibrociment composant certaines toitures vétustes, dans le dossier de la consultation, afin de mettre à même les entreprises soumissionnaires de déterminer le niveau de qualification requis pour pouvoir présenter une offre ; qu'ainsi, s'il est constant que la SARL GTD a constaté, après avoir pris connaissance de l'avis défavorable émis le 26 mai 2011 par l'inspecteur du travail sur le plan de retrait qu'elle avait présenté, qu'elle n'était pas en mesure, compte tenu des qualifications dont elle-même et son sous-traitant pouvaient se prévaloir, de réaliser les travaux de désamiantage pour lesquels elle s'était portée candidate, il n'est pas établi que cette abstention ait, eu égard aux insuffisances du dossier de consultation des entreprises, présenté, par elle-même, un caractère fautif ; qu'il suit de là que les conclusions de l'office public de l'habitat de Rouen tendant à la condamnation de la SARL GTD à réparer le préjudice subi par lui en conséquence du retard de livraison de ses logements doivent être rejetées ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'office public de l'habitat de Rouen n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement du 30 septembre 2014, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande ; que les conclusions qu'il présente au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de l'office public de l'habitat de Rouen est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'office public de l'habitat de Rouen et à la société à responsabilité limitée Grands Travaux de Décontamination (GTD).
Délibéré après l'audience publique du 9 février 2017 à laquelle siégeaient :
- M. Paul-Louis Albertini, président de chambre,
- M. Olivier Nizet, président-assesseur,
- M. Jean-François Papin, premier conseiller.
Lu en audience publique le 2 mars 2017.
Le rapporteur,
Signé : J.-F. PAPINLe président de chambre,
Signé : P.-L. ALBERTINILe greffier,
Signé : I. GENOT
La République mande et ordonne au ministre du logement et de l'habitat durable en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
Le greffier,
Isabelle Genot
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N°14DA01846
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