Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 8 juillet 2016 du préfet du Loiret l'obligeant à quitter le territoire français, lui refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire, fixant le pays de destination et ordonnant son placement en rétention.
Par un jugement n° 1602309 du 11 juillet 2016, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 30 septembre 2016, M. A..., représenté par Me B...C..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 11 juillet 2016 du tribunal administratif de Rouen ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 8 juillet 2016 du préfet du Loiret l'obligeant à quitter le territoire français, fixant le pays de destination, lui refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire et ordonnant son placement en rétention ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- il incombait au préfet du Loiret, avant d'envisager la mesure d'éloignement, de lui permettre de faire valoir ses arguments au regard de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 et de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'une erreur de droit, a défaut d'examen personnalisé de sa situation par le préfet, qui n'a pas exercé les compétences qu'il détient en application des articles L. 511-1 paragraphe I alinéa 1 et L. 511-4 alinéa 1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il a entaché sa décision d'une erreur de fait et méconnu le 1° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'il était mineur à la date de la décision l'obligeant à quitter le territoire, étant né le 15 janvier 1999 à Conakry, en Guinée ;
- il a enfin entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 4 novembre 2016, le préfet du Loiret conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. A...ne sont pas fondés.
M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 août 2016.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code civil ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. François Vinot, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant qu'il ressort des dispositions du livre V du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et notamment du III de son article L. 512-1 issu de la loi susvisée n° 2011-672 du 16 juin 2011 et de son article L. 551-2, que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger l'obligation dans laquelle il se trouve de quitter le territoire ; que, dès lors, 1'article 24 de la loi du 12 avril 2000 susvisée ne saurait être utilement invoqué à l'encontre d'une décision portant obligation de quitter le territoire français, sans délai de départ volontaire, ainsi que d'une décision de placement en rétention ;
2. Considérant que lorsqu'il oblige un étranger à quitter le territoire français sur le fondement des dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dont les dispositions sont issues de la transposition en droit national de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008, relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, le préfet doit appliquer les principes généraux du droit de l'Union européenne, dont celui du droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle défavorable ne soit prise à son encontre, tel qu'il est énoncé notamment au 2 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; que, toutefois, ce droit n'oblige l'autorité nationale compétente ni à prévenir le ressortissant, préalablement à l'audition organisée en vue de l'adoption de la mesure d'éloignement, de ce qu'elle envisage d'adopter à son égard une décision de retour, ni à communiquer les éléments sur lesquels elle entend fonder celle-ci, ni à lui laisser un délai de réflexion avant de recueillir ses observations, dès lors qu'il a la possibilité de présenter, de manière utile et effective, son point de vue au sujet de l'irrégularité de son séjour et des motifs pouvant justifier, en vertu du droit national, que cette autorité s'abstienne de prendre une décision de retour ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et notamment du procès-verbal des déclarations de M.A..., que contrairement à ce qu'il allègue, il a été invité, au cours de son audition par un officier de police, le 8 juillet 2016, à faire valoir ses observations au sujet de la mesure d'éloignement que le préfet envisageait de prendre à son encontre ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de ce que son droit d'être entendu préalablement au prononcé de l'obligation de quitter le territoire français attaquée manque en fait et doit donc être écarté ;
4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : 1° L'étranger mineur de dix-huit ans (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 111-6 du même code : " La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil " ; qu'aux termes de l'article 47 du code civil : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ";
5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le requérant, qui serait entré en France en mars 2016 selon ses déclarations, s'est présenté auprès des services de police en faisant valoir sa qualité de mineur ; que, si M. A...produit un extrait d'acte de naissance dont il ressort qu'il serait né le 15 janvier 1999 à Conakry, accompagné d'un document présenté comme un jugement d'un tribunal guinéen, il est constant qu'au cours de la vérification de son identité, le relevé de ses empreintes digitales et la consultation du système " Visabio " ont fait apparaître qu'il avait déposé une demande de visa auprès des autorités belges, le 18 avril 2013, sous l'identité de M. D...A..., né le 15 février 1993 à Conakry, en Guinée ; que le requérant qui, lors de son audition, a déclaré être âgé de dix-sept ans, ne donne aucune explication précise et vérifiable quant à cette discordance d'identité ; qu'il s'est aussi contenté d'avancer, lors de sa seconde audition et alors qu'il se trouvait informé de cette circonstance, que les autorités consulaires belges " se sont trompées " ; que, compte tenu des déclarations de l'intéressé aux services de police et des contradictions relevées entre les document produits et les informations recueillies à partir du système " Visabio ", au regard du relevé de ses empreintes digitales, le préfet du Loiret a pu, sans méconnaître les dispositions de l'article 47 du code civil, écarter l'acte de naissance et les documents produits par M. A...comme dépourvus d'authenticité ; que, par suite, le requérant, qui ne peut être regardé comme mineur à la date de la décision contestée, n'était pas au nombre des étrangers insusceptibles de faire l'objet d'une mesure d'éloignement ; qu'ainsi le préfet du Loiret, qui ne s'est pas fondé sur des faits inexacts, et a procédé à un examen sérieux et personnalisé de la situation du requérant, n'a pas entaché sa décision d'une erreur de droit ni méconnu les dispositions du 1° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il n'a pas davantage commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de son arrêté sur la situation personnelle de M. A... ;
6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte et celles présentées au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article : Le présent jugement sera notifié à M. A..., au ministre de l'intérieur et à Me B...C....
Copie en sera adressée, pour information, au préfet du Loiret.
Délibéré après l'audience du 15 décembre 2016, à laquelle siégeaient :
M. Paul-Louis Albertini, président de chambre,
M. Olivier Nizet, président assesseur,
M. François Vinot, premier conseiller.
Lu en audience publique le 30 décembre 2016.
Le rapporteur,
Signé : F. VINOTLe président de chambre,
Signé : P.-L. ALBERTINILe greffier,
Signé : I. GENOT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
Le greffier,
Isabelle Genot
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N°16DA01731