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08/12/2016 | FRANCE | N°16DA01332

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre - formation à 3, 08 décembre 2016, 16DA01332


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 8 décembre 2015 du préfet de l'Eure refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il pourra être reconduit.

Par un jugement n° 1600782 du 9 juin 2016, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enreg

istrée le 21 juillet 2016, M.B..., représenté par Me C...D..., demande à la cour :

1°) d'annule...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 8 décembre 2015 du préfet de l'Eure refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il pourra être reconduit.

Par un jugement n° 1600782 du 9 juin 2016, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 21 juillet 2016, M.B..., représenté par Me C...D..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 9 juin 2016 du tribunal administratif de Rouen ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 8 décembre 2015 ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ou à défaut, si seul un moyen de légalité externe est retenu, de procéder à un nouvel examen de sa situation et de lui délivrer durant cet examen une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, à verser à son conseil, ou à défaut, à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision de refus de titre de séjour est intervenue à l'issue d'une procédure irrégulière, dès lors qu'il remplit les conditions d'octroi du titre prévu par le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la commission devait être saisie en application de l'article R. 312-2 du même code ;

- elle méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision l'obligeant à quitter le territoire est entachée d'un vice de procédure, tiré de la méconnaissance de son droit d'être entendu ;

- elle est entachée d'un vice de procédure, tiré du défaut de saisine du médecin de l'agence régionale de santé préalablement à son édiction ;

- elle est illégale, par la voie de l'exception d'illégalité de la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;

- elle méconnaît les dispositions du 10°de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

- la décision fixant le pays de destination est illégale, par la voie de l'exception d'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 septembre 2016, le préfet de l'Eure conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 4 juillet 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le charte des droits fondamentaux de l'Union européen ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- l'ordonnance n° 2015-1341 du 23 octobre 2015 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Paul-Louis Albertini, président de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.B..., de nationalité nigériane, né le 12 août 1980, a déclaré être entré irrégulièrement en France le 31 octobre 2011 ; que sa demande d'asile a été rejetée par une décision du 30 novembre 2012 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) ; que cette décision a été confirmée par une décision du 3 juillet 2013 de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) ; que, le 5 septembre 2013, M. B... a fait l'objet d'un arrêté refusant de l'admettre au séjour, l'obligeant à quitter le territoire et fixant son pays de destination ; qu'après avoir été interpellé le 28 août 2014, il a fait l'objet d'un arrêté de placement en rétention administrative le jour même, dont le tribunal de grande instance de Rennes a ordonné la prolongation par un jugement du 2 septembre 2014, confirmé par un arrêt de la Cour d'appel de Rennes du 5 septembre 2014 ; que, M. B...a, le 8 septembre 2014, demandé à l'OFPRA de réexaminer sa demande ; que cette demande a été rejetée par une décision du 10 septembre 2014 ; que, le 26 décembre 2014, il a de nouveau sollicité le réexamen de sa demande d'asile ; qu'il a fait l'objet d'un refus d'autorisation provisoire de séjour et a été placé en procédure dite prioritaire ; que, par une décision du 30 janvier 2015 notifiée le 12 février suivant, l'OFPRA a rejeté sa demande ; que, par un arrêté du 18 mars 2015, le préfet de l'Eure a décidé de rejeter sa demande d'admission au séjour, de l'obliger à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ; que cet arrêté a été annulé par un jugement du tribunal administratif de Rouen du 13 octobre 2015, au motif que, le préfet n'ayant pas indiqué que M. B...aurait effectivement été placé en procédure prioritaire, l'intéressé tenait des dispositions de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile le droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à ce que la CNDA ait statué sur son recours contre la dernière décision de l'OFPRA prise à son égard ; que la CNDA s'est prononcée par une décision du 18 juin 2015, confirmant le refus de l'OFPRA ; que M. B...relève appel du jugement du 9 juin 2016 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté attaqué du 8 décembre 2015 par lequel le préfet de l'Eure a rejeté sa demande d'admission au séjour, l'a obligé à quitter le territoire avec un délai de départ volontaire de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office ;

Sur la légalité de la décision de refus d'admission au séjour :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...) " ;

3. Considérant que M. B...fait valoir qu'il est entré en France le 31 octobre 2011, plus de quatre ans avant la date de la décision attaquée, qu'il a su y tisser des liens personnels et familiaux, qu'il est animé par une réelle volonté d'intégration, qu'il est menacé dans son pays d'origine et qu'il est médicalement suivi en France ; que, toutefois, il n'apporte aucun commencement de preuve au soutien de son intégration sur le territoire français ; qu'il ressort de ce qui a été rappelé au point 1 que sa présence en France a, pour l'essentiel, été dévolue à l'examen de ses multiples demandes d'asile, toutes rejetées par l'OFPRA et la CNDA, l'intéressé ne pouvant en outre justifier de liens privés et familiaux intenses, anciens et stables ; que, s'il soutient que son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, le certificat médical qu'il produit, établi 17 décembre 2015 par un psychiatre, se borne à indiquer que sa prise en charge médicale ne pourrait être assurée dans les mêmes conditions qu'en France, sans préciser qu'une prise en charge médicale ne pourrait être assurée dans ce pays ; qu'il n'est en outre pas dépourvu de liens dans son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à l'âge de trente-et-un-ans ; que, dans ces conditions, les moyens de M. B...tirés de l'atteinte disproportionnée à la vie privée et familiale au regard de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés ; que le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la décision attaquée doit être écarté pour les mêmes motifs ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) " ;

5. Considérant que si M. B...fait encore valoir qu'il réside depuis quatre ans en France, qu'il est suivi médicalement et qu'il est menacé en cas de retour dans son pays d'origine, ces seules circonstances ne peuvent être regardées comme des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels au sens des dispositions précitées ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;

6. Considérant que le préfet n'est tenu de saisir la commission du titre de séjour que du seul cas des étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues à l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et non du cas de tous les étrangers qui se prévalent du bénéfice de ces dispositions ; qu'il résulte de ce qui a été dit au point 3 que M. B...pouvant prétendre à la délivrance de plein droit d'une carte de séjour temporaire, le préfet de la Seine-Maritime n'était pas tenu de consulter cette commission avant de statuer sur sa demande et n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Sur la légalité de la décision d'obligation de quitter le territoire :

7. Considérant que M. B...se borne à reprendre en cause d'appel, sans les assortir d'éléments nouveaux les moyens tirés de ce que la décision du préfet de l'Eure l'obligeant à quitter le territoire français serait entachée d'un premier vice de procédure, tiré de la méconnaissance de son droit d'être entendu, d'un second vice de procédure, tiré du défaut de saisine du médecin de l'agence régionale de santé préalablement à son édiction, qu'elle serait illégale par la voie de l'exception d'illégalité de la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour, qu'elle serait entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle, qu'elle méconnaitrait les dispositions du 10°de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et qu'elle serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences sur sa situation personnelle ; qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, d'écarter ces moyens ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

8. Considérant que la décision attaquée comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que, par suite, le moyen tiré du défaut de motivation doit être écarté ;

9. Considérant que M. B...se borne à reprendre en cause d'appel, sans les assortir d'éléments nouveaux de fait ou de droit, les moyens tirés de ce que la décision fixant le pays de destination est illégale, par la voie de l'exception d'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français et qu'elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, d'écarter ces moyens ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 9 juin 2016, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à M. A... B... et à Me C...D....

Copie en sera adressée, pour information, au préfet de l'Eure.

Délibéré après l'audience publique du 20 octobre 2016 à laquelle siégeaient :

- M. Paul-Louis Albertini, président de chambre,

- M. Olivier Nizet, président-assesseur,

- M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller.

Lu en audience publique le 8 décembre 2016.

L'assesseur le plus ancien,

Signé : O. NIZETLe président de chambre,

président-rapporteur,

Signé : P.-L. ALBERTINI

Le greffier,

Signé : I. GENOT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le greffier,

Isabelle Genot

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N°16DA01332


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16DA01332
Date de la décision : 08/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Paul Louis Albertini
Rapporteur public ?: M. Papin
Avocat(s) : SELARL MADELINE-LEPRINCE-MAHIEU

Origine de la décision
Date de l'import : 17/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2016-12-08;16da01332 ?
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