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01/12/2016 | FRANCE | N°16DA01019

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre - formation à 3, 01 décembre 2016, 16DA01019


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. M'B... C...a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 20 janvier 2016 du préfet de l'Oise lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination duquel il pourrait être reconduit d'office.

Par un jugement n° 1600531 du 28 avril 2016, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par un

e requête, enregistrée le 2 juin 2016, M.C..., représenté par Me A...E..., demande à la cour ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. M'B... C...a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 20 janvier 2016 du préfet de l'Oise lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination duquel il pourrait être reconduit d'office.

Par un jugement n° 1600531 du 28 avril 2016, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 2 juin 2016, M.C..., représenté par Me A...E..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 28 avril 2016 du tribunal administratif d'Amiens ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 20 janvier 2016 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Oise de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est entaché d'une contradiction de motifs et d'erreur de fait ;

- le tribunal a omis de se prononcer sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant en tant qu'il concerne sa belle-fille ;

- l'arrêté méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- l'arrêté méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 août 2016, le préfet de l'Oise conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens présentés par M. C...ne sont pas fondés.

Un mémoire présenté pour M.C... a été enregistré le 14 novembre 2016, soit après la clôture d'instruction.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signé à New-York le 26 janvier 1990 ;

- l'accord franco-algérien modifié du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus le rapport au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Olivier Nizet, président-assesseur,

- les observations de M.C....

Sur la régularité du jugement attaqué:

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les premiers juges n'ont pas répondu au moyen, qui n'était pas inopérant, tiré de ce que l'arrêté du préfet de l'Oise en litige méconnaît les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, en tant qu'il concerne l'intérêt supérieur de la belle-fille de M. C...; que le jugement attaqué est, par suite, irrégulier et doit être annulé ;

2. Considérant qu'il y a lieu de statuer, par la voie de l'évocation, sur la demande présentée par le requérant devant le tribunal administratif d'Amiens et tendant à l'annulation de l'arrêté de refus de titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire ;

3. Considérant que M. Blaise Gourtay, secrétaire général de la préfecture de l'Oise, qui a signé l'arrêté contesté, bénéficiait d'une délégation de signature du préfet de l'Oise en date du 1er janvier 2016, régulièrement publiée au recueil des actes administratifs de l'Oise du même jour, à l'effet de signer " tout arrêté, correspondance, décision, requête et circulaire relevant des attributions de l'Etat dans le département de l'Oise ", à l'exclusion de certains actes et décisions limitativement énumérés ; que les décisions relatives au séjour et à l'éloignement des étrangers ne font pas partie de ces exclusions ; que, dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté manque en fait ;

4. Considérant que l'arrêté en litige comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent son fondement ; que, par suite, le moyen tiré du défaut de motivation doit être écarté ;

5. Considérant qu'il ne résulte d'aucune pièce du dossier que le préfet de l'Oise n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de M.C..., ressortissant algérien, avant de prendre l'arrêté contesté ; que, dès lors, le moyen tiré du défaut d'examen de la situation particulière du requérant doit être écarté ;

6. Considérant qu'aucun principe ni aucun texte n'impose que le refus de titre de séjour opposé à M. C...ne soit pris qu'après que l'intéressé ait été mis à même de présenter ses observations, alors que celui-ci a pu faire valoir tous les éléments de fait et de droit concernant sa situation lors de la présentation de sa demande de titre de séjour ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision de refus de titre de séjour aurait été prise en méconnaissance du " principe du contradictoire " doit être écarté ;

7. Considérant qu'il est constant que M. C...a sollicité un titre de séjour sur le fondement du 2° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 selon lequel " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 2. Au ressortissant algérien marié à un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière (...). " ;

8. Considérant, d'une part, qu'il est constant que M. C...ne justifie pas d'une entrée régulière sur le territoire français ; que, par suite, le préfet pouvait légalement lui refuser le séjour pour ce seul motif ;

9. Considérant, d'autre part, que lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou des stipulations d'un accord bilatéral, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'étranger peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux ; qu'il ressort du formulaire de demande de titre de séjour rempli par M. C...que celui-ci a coché la case " une carte de séjour valable 1 an " conjoint de français (L. 313-11 4° du CESEDA ou son équivalent dans un accord bilatéral) " dont l'équivalent est, s'agissant des ressortissants algériens, l'article 6-2° de l'accord franco-algérien précité ; que, par suite, le préfet de l'Oise, qui ne s'est pas mépris sur le fondement de la demande de titre de séjour de M.C..., n'était pas tenu d'examiner sa demande sur le fondement du 6-5° de l'accord franco-algérien ;

10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3 (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du cas des seuls ressortissants algériens qui remplissent effectivement les conditions prévues à l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé, équivalentes à celles de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les ressortissants algériens qui se prévalent de ces stipulations ; que M. C...n'étant pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour en application de l'article 6-2° de l'accord franco-algérien, le préfet de l'Oise n'était pas tenu de consulter la commission du titre de séjour avant de prendre à son encontre l'arrêté en litige ;

11. Considérant que M.C..., âgé alors de vingt-six ans, déclare être entré en France au cours de l'année 2012 ; qu'il s'est marié le 5 septembre 2015 avec une ressortissante française, mère d'une enfant âgée de six ans issue d'une précédente union ; qu'à la date de l'arrêté en litige, à laquelle la situation de M. C...doit être appréciée, aucun enfant n'était encore né de leur union ; qu'il ne produit aucune pièce de nature à justifier de la réalité d'une vie commune avant le mariage ; que l'intéressé ne fait état d'aucune insertion sociale, ni d'aucun projet professionnel ; que si le requérant se prévaut aussi de prétendues conséquences de l'arrêté sur l'exercice par le père biologique de sa belle-fille de l'autorité parentale, l'arrêté en litige n'a pas en lui-même pour effet d'obliger son épouse à l'accompagner en Algérie ; qu'ainsi, eu égard aux conditions irrégulières de séjour de M. C...et du caractère récent de son mariage, le préfet de l'Oise n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressé une atteinte disproportionnée aux buts poursuivis par l'arrêté en litige et n'a, par suite, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas davantage commis d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de son arrêté sur la situation personnelle de M.C... ;

12. Considérant qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; qu'elles sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation ;

13. Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que la relation qu'entretiendrait M. C...avec sa belle-fille est récente à la date de l'arrêté contesté ; qu'il allègue par ailleurs que le père biologique de cette dernière exerce de manière effective son autorité parentale ; que, dans ces circonstances, le préfet n'a pas porté atteinte à l'intérêt supérieur de cette enfant et n'a par suite pas méconnu les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

14. Considérant, d'autre part, que le requérant ne peut utilement se prévaloir de la présence de son enfant, née le 22 mars 2016, soit postérieurement à l'arrêté ; que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées ne peut qu'être aussi écarté ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 20 janvier 2016 du préfet de l'Oise ; que ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative tant en première instance qu'en appel doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 28 avril 2016 du tribunal administratif d'Amiens est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. C...devant le tribunal administratif d'Amiens ainsi que le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. M'B... C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet de l'Oise.

Délibéré après l'audience publique du 17 novembre 2016 à laquelle siégeaient :

- M. Paul-Louis Albertini, président de chambre,

- M. Olivier Nizet, président-assesseur,

- M. Jean-François Papin, premier conseiller.

Lu en audience publique le 1er décembre 2016.

Le rapporteur,

Signé : O. NIZET

Le président de chambre,

Signé : P.-L. ALBERTINILe greffier,

Signé : I. GENOT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le greffier,

Isabelle Genot

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N°16DA01019

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16DA01019
Date de la décision : 01/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Olivier Nizet
Rapporteur public ?: M. Habchi
Avocat(s) : CHERGUI

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2016-12-01;16da01019 ?
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