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15/11/2016 | FRANCE | N°16DA00391

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre - formation à 3 (bis), 15 novembre 2016, 16DA00391


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision du préfet du Nord du 6 décembre 2013 refusant de l'admettre provisoirement au séjour au titre de l'asile.

Par un jugement n° 1401924 du 30 novembre 2015, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 22 février 2016, M. B..., représenté par Me C... D..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif d

e Lille du 30 novembre 2015 ;

2°) d'annuler la décision du préfet du Nord du 6 décembre 2013 refusan...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision du préfet du Nord du 6 décembre 2013 refusant de l'admettre provisoirement au séjour au titre de l'asile.

Par un jugement n° 1401924 du 30 novembre 2015, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 22 février 2016, M. B..., représenté par Me C... D..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Lille du 30 novembre 2015 ;

2°) d'annuler la décision du préfet du Nord du 6 décembre 2013 refusant de l'admettre provisoirement au séjour au titre de l'asile ;

3°) d'enjoindre au préfet du Nord de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à son avocat sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

- la décision attaquée est insuffisamment motivée ;

- le préfet a procédé à un examen insuffisant de sa situation ;

- le préfet a procédé à une application erronée des dispositions de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision attaquée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête a été communiquée au préfet du Nord qui n'a pas produit de mémoire en défense.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 1er février 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés ;

- le règlement (CE) n° 2725/2000 du 11 décembre 2000 concernant la création du système Eurodac pour la comparaison des empreintes digitales aux fins de l'application efficace de la convention de Dublin ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Dominique Bureau, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant, d'une part qu'aux termes de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, l'admission en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si (...) 4° La demande d'asile repose sur une fraude délibérée ou constitue un recours abusif aux procédures d'asile ou n'est présentée qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement prononcée ou imminente. (...) Constitue une demande d'asile reposant sur une fraude délibérée la demande présentée par un étranger qui fournit de fausses indications, dissimule des informations concernant son identité, sa nationalité ou les modalités de son entrée en France afin d'induire en erreur les autorités (...) " ;

2. Considérant, d'autre part, qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 18 du règlement (CE) n° 2725/2000 du 11 décembre 2000 concernant la création du système Eurodac pour la comparaison des empreintes digitales aux fins de l'application efficace de la convention de Dublin : " Toute personne visée par le présent règlement est informée par l'Etat membre d'origine : (...) / d) dans le cas des personnes visées à l'article 4 ou à l'article 8, de l'obligation d'accepter que ses empreintes digitales soient relevées (...) " ; qu'aux termes de l'article 4 de ce règlement : " Collecte, transmission et comparaison des empreintes digitales. 1. Chaque Etat membre relève sans tarder l'empreinte digitale de tous les doigts de chaque demandeur d'asile âgé de 14 ans au moins et transmet rapidement à l'unité centrale les données visées à l'article 5, paragraphe 1, points a) à f). La procédure de relevé des empreintes digitales est déterminée conformément à la pratique nationale de l'Etat membre concerné et dans le respect des dispositions de sauvegarde établies dans la convention européenne des droits de l'homme et dans la convention des Nations unies relative aux droits de l'enfant (...) " ;

3. Considérant que si le droit d'asile, garanti notamment par la convention de Genève, implique nécessairement que l'étranger qui sollicite la reconnaissance de la qualité de réfugié soit en principe autorisé à demeurer provisoirement sur le territoire jusqu'à ce qu'il ait été statué sur sa demande, l'étranger qui demande à bénéficier de l'asile doit justifier de son identité, de manière à permettre aux autorités nationales de s'assurer notamment qu'il n'a pas formulé d'autres demandes ; qu'il résulte, en particulier, des dispositions du règlement du 11 décembre 2000 que les demandeurs d'asile âgés de plus de quatorze ans ont l'obligation d'accepter que leurs empreintes digitales soient relevées ; que l'altération volontaire et réitérée des empreintes digitales, ne permettant pas leur identification et interdisant par là même aux autorités nationales de s'assurer notamment que le demandeur d'asile n'a pas formulé d'autres demandes dans un autre Etat membre, peut être regardée, sous le contrôle du juge, comme relevant d'une intention de fraude au sens du 4°) de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de refuser pour ce motif de l'admettre provisoirement au séjour ;

4. Considérant, en premier lieu, qu'en se référant, après avoir précisé que les empreintes de M. B..., relevées les 7, 8, 15, 23 et 25 octobre 2013, étaient inexploitables, à l'obligation fixée par le règlement (CE) 2725/200 du 11 décembre 2000, ainsi qu'aux dispositions du 4° de l'article L. 741-4 dont il a fait application, la décision contestée du préfet du Nord comporte un énoncé suffisant des considérations de droit et de fait sur lesquelles celui-ci s'est fondé pour refuser de délivrer à l'intéressé une autorisation provisoire de séjour ; qu'en outre, les mentions de cette décision permettent de s'assurer que le préfet a pris en considération l'atteinte portée au droit du requérant au respect de sa vie familiale ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cette décision manque en fait ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Nord, qui a procédé à cinq reprises au relevé des empreintes décadactylaires de M. B..., et a précisé dans sa décision qu'il n'est pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée, aurait procédé à un examen insuffisant de sa situation particulière ; qu'à cet égard, le requérant ne saurait utilement invoquer les instructions adressées par le ministre de l'intérieur aux préfets dans la circulaire du 20 avril 2010, dépourvues de valeur réglementaire, sur les conséquences à tirer de la jurisprudence du Conseil d'Etat en matière de refus d'admission au séjour au titre de l'asile ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la suite du dépôt de sa demande d'admission au séjour au titre de l'asile, M. B... a été reçu en préfecture où il a été procédé, les 7, 8, 15, 23 et 25 octobre 2013 au relevé de ses empreintes digitales, lesquelles se sont révélées inexploitables ; que ce constat n'est pas contredit par les résultats de l'examen auquel a procédé un praticien hospitalier spécialisé en dermato-vénéréologie, relevant le 19 mars 2014, près de cinq mois après le relevé des empreintes, que les pulpes des doigts étaient, " parfaitement normales et les empreintes digitales parfaitement visibles et faciles à prendre ", et notant l'absence de maladie dermatologique comme l'eczéma ou le psoriasis ; que, dans ces conditions, le préfet du Nord a pu, sans commettre d'erreur de droit en s'abstenant de rechercher la véracité des craintes exprimées par l'intéressé, ni entacher sa décision d'erreur d'appréciation, estimer que le requérant avait tenté de se soustraire, de manière frauduleuse, à la détermination de son identité et refuser, pour ce motif, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, en application des dispositions du 4° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

7. Considérant, en quatrième lieu, que, pour soutenir que la décision attaquée méconnaîtrait les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et de libertés fondamentales, M. B... ne saurait utilement se prévaloir des risques auxquels il serait exposé en cas de retour en République de Guinée, son pays d'origine, dès lors que le refus de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour n'a ni pour objet, ni pour effet de le renvoyer à destination d'un pays déterminé ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ; que, par suite, ses conclusions à fin d'annulation, ainsi que, par voie de conséquence, celles à fin d'injonction et d'astreinte et celles présentées sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique doivent être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au ministre de l'intérieur et à Me C... D....

Copie en sera adressée au préfet du Nord.

Délibéré après l'audience publique du 18 octobre 2016 à laquelle siégeaient :

- Mme Odile Desticourt, président de chambre,

- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,

- Mme Dominique Bureau, premier conseiller.

Lu en audience publique le 15 novembre 2016.

Le rapporteur,

Signé : D. BUREAULe président de chambre,

Signé : O. DESTICOURT

Le greffier,

Signé : M.T. LEVEQUE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le greffier,

Marie-Thérèse Lévèque

2

N°16DA00391


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 16DA00391
Date de la décision : 15/11/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

095-02-04


Composition du Tribunal
Président : Mme Desticourt
Rapporteur ?: Mme Dominique Bureau
Rapporteur public ?: M. Guyau
Avocat(s) : DEWAELE

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2016-11-15;16da00391 ?
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