La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/10/2016 | FRANCE | N°15DA00132

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3 (ter), 18 octobre 2016, 15DA00132


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...E...a demandé au tribunal administratif de Rouen l'annulation de la décision du directeur régional des finances publiques de Haute-Normandie et du département de la Seine-Maritime rejetant sa demande de décharge de responsabilité solidaire prononcée par le juge judiciaire pour le paiement de la dette fiscale de la SARL Optimum demeurée à sa charge en sa qualité de gérant majoritaire.

Par un jugement n° 1203056 du 20 novembre 2014, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 26 ja...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...E...a demandé au tribunal administratif de Rouen l'annulation de la décision du directeur régional des finances publiques de Haute-Normandie et du département de la Seine-Maritime rejetant sa demande de décharge de responsabilité solidaire prononcée par le juge judiciaire pour le paiement de la dette fiscale de la SARL Optimum demeurée à sa charge en sa qualité de gérant majoritaire.

Par un jugement n° 1203056 du 20 novembre 2014, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 26 janvier 2015 et le 30 septembre 2016, M.E..., représenté par Me D...A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rouen du 20 novembre 2014 ;

2°) d'annuler la décision du directeur régional des finances publiques de Haute-Normandie et du département de la Seine-Maritime rejetant sa demande de décharge de responsabilité solidaire prononcée par le juge judiciaire ;

3°) d'enjoindre au directeur régional des finances publiques de Haute-Normandie et du département de la Seine-Maritime de réexaminer sa demande dans un délai de trente jours ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il est recevable à demander la décharge de la responsabilité solidaire prononcée par le juge judiciaire sur le fondement de l'article L. 247 du livre des procédures fiscales dans la mesure où il s'agit d'une demande de remise gracieuse de l'obligation de payer qui relève de la compétence du juge administratif dans le cadre du recours pour excès de pouvoir ;

- en sa qualité de débiteur solidaire de la dette fiscale de la société Optimum, il est fondé à contester le bien-fondé des impositions dont elle est redevable dans la mesure où la nature de l'obligation qui incombe à la société est commune à tous les codébiteurs conformément aux dispositions de l'article 1208 du code civil ;

- la société Optimum n'était pas redevable de la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux acquisitions communautaires et, par suite, l'administration a obtenu un avantage indu d'un montant de 211 292 euros, somme de laquelle il convient de déduire la somme de 73 814,13 euros correspondant à la dette fiscale demeurée à sa charge à raison de la déclaration de responsabilité solidaire dont il a fait l'objet par le juge judiciaire ; l'administration peut imputer cette somme, en opérant une compensation, sur celle de 211 291,90 euros restant due par la société ; l'absence de recouvrement des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre des acquisitions intra-communautaires pour la période du 1er janvier 1994 au 31 mars 1997 n'est établie par aucun acte de procédure ;

- la décision en litige est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 mai 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. E...d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens.

Il soutient que :

- il ne conteste pas que M. E...est recevable à demander l'annulation de la décision de rejet de sa demande tendant à la décharge de la responsabilité solidaire prononcée par le juge judiciaire sur le fondement de l'article L. 267 du livre des procédures fiscales des impositions au paiement desquelles il est tenu ;

- après le dégrèvement partiel accordé le 17 août 2007, le requérant demeure tenu au paiement de la somme de 73 814,13 euros ;

- M. E...ne peut utilement contester la décision en litige par un moyen ayant trait au bien-fondé des impositions relatives à la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux acquisitions communautaires ;

- en tout état de cause, le requérant n'a invoqué aucun autre motif tiré de l'existence d'une disproportion entre le montant de la dette fiscale dont il est redevable du fait de sa responsabilité solidaire et de sa situation financière et patrimoniale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Muriel Milard, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Jean-Marc Guyau, rapporteur public.

1. Considérant qu'à la suite d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 1994 au 31 mars 1997 de la SARL Optimum dont M. E... était le gérant majoritaire, l'administration a mis en recouvrement des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de cette période d'un montant de 211 291,90 euros à raison d'acquisitions intracommunautaires non déclarées par la société ainsi que des cotisations supplémentaires de taxe d'apprentissage et de participation des employeurs à la formation professionnelle continue pour un montant de 3 002,64 euros pour les années 1993 à 1995 ; que par jugement du 11 mai 2005 du tribunal de grande instance de Pontoise, confirmé par un arrêt du 7 septembre 2006 de la cour d'appel de Versailles, M. E... a été déclaré, en application des dispositions de l'article L. 267 du livre des procédures fiscales, solidairement responsable du paiement d'une partie de ces rappels de taxe sur la valeur ajoutée ainsi que de ces cotisations supplémentaires de taxe d'apprentissage et de participation des employeurs à la formation professionnelle continue mis à la charge de la SARL Optimum, pour un montant total de 158 764,52 euros ; que par une décision du 17 août 2007, l'administration a partiellement fait droit à la réclamation de M.E..., en procédant au dégrèvement des majorations de taxation d'office pour un montant de 84 950,39 euros sur la taxe sur la valeur ajoutée due au titre de la période de septembre 1995 à décembre 1996 ; que M. E...relève appel du jugement du 20 novembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du directeur régional des finances publiques de Haute-Normandie et du département de la Seine-Maritime rejetant sa demande tendant à la décharge de responsabilité solidaire prononcée par le juge judiciaire pour le paiement de la dette fiscale de la SARL Optimum demeurée à sa charge ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 247 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable au litige : " L'administration peut accorder sur la demande du contribuable ; (...) / 3° Par voie de transaction, une atténuation d'amendes fiscales ou de majorations d'impôts lorsque ces pénalités et, le cas échéant, les impositions auxquelles elles s'ajoutent ne sont pas définitives. / Les dispositions des 2° et 3° sont le cas échéant applicables s'agissant des sommes dues au titre de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 du code général des impôts. / L'administration peut également décharger de leur responsabilité les personnes tenues au paiement d'impositions dues par un tiers " ; que, si la décision de l'administration fiscale refusant une remise gracieuse ou une proposition de transaction prévue par l'article L. 247 du livre des procédures fiscales peut être déférée au juge administratif par la voie du recours pour excès de pouvoir, cette décision ne peut être annulée que si elle est entachée d'une erreur de droit, d'une erreur de fait, d'une erreur manifeste d'appréciation ou encore si elle est révélatrice d'un détournement de pouvoir ;

3. Considérant que comme cela a été dit au point 1, M. E... a été déclaré, par le juge judiciaire, solidairement responsable du paiement d'une partie des rappels de taxe sur la valeur ajoutée ainsi que des cotisations supplémentaires de taxe d'apprentissage et de participation des employeurs à la formation professionnelle continue mis à la charge de la SARL Optimum dont il était le gérant majoritaire ; qu'il n'est pas contesté qu'en sa qualité de tiers mis en cause, il était fondé à demander à l'administration, sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 247 du livre des procédures fiscales, la décharge de sa responsabilité du paiement des impositions mises à sa charge ;

4. Considérant que le dirigeant d'une société déclaré solidaire du paiement d'une partie des impositions mises à la charge de cette société, sur le fondement des dispositions de l'article L. 267 du livre des procédures fiscales, n'est recevable à contester que le bien-fondé de la partie des impositions réclamées à la société au paiement desquelles le juge judiciaire l'a déclaré solidairement responsable ; qu'il n'est en revanche pas recevable à contester le bien-fondé des impositions dont il n'a pas été déclaré redevable au titre de cette solidarité par le juge judiciaire et pour le paiement desquelles il n'est pas recherché par le comptable public ;

5. Considérant que M. E...fait valoir qu'en sa qualité de débiteur solidaire de la dette fiscale de la société Optimum, il est fondé à contester le bien-fondé des impositions réclamées à cette société sur le fondement des dispositions de l'article 1208 du code civil prévoyant, dans sa rédaction en vigueur jusqu'au 1er octobre 2016, que le codébiteur solidaire poursuivi par le créancier peut opposer toutes les exceptions qui sont communes à tous les codébiteurs, que la société Optimum n'était pas redevable de la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux acquisitions communautaires, que l'administration a ainsi obtenu un avantage indu et qu'elle peut opérer une compensation, en imputant la somme de 73 814,13 euros mise à sa charge sur celle de 211 291,90 euros due par la société, l'absence de recouvrement des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre des acquisitions intra-communautaires pour la période du 1er janvier 1994 au 31 mars 1997 n'étant, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, établie par aucun acte de procédure ; que toutefois, il est constant que ces rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre d'acquisitions intracommunautaires réalisées par cette société au cours des années 1994 à 1996 ne sont pas au nombre des impositions dont le requérant a été déclaré solidairement responsable du paiement par le juge judiciaire ; qu'ils ne sont pas davantage au nombre des impositions qu'à la suite de l'arrêt du 7 septembre 2006 de la cour d'appel de Versailles et par lettre du 5 janvier 1997, il a été mis en demeure de payer par l'administration fiscale ; que dans ces conditions, et que le recouvrement de ces rappels de TVA ait été ou non poursuivi auprès de la société Optimum, ces moyens sont sans incidence sur la légalité de cette décision ;

6. Considérant que si M. E...soutient que la décision en litige est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, ce moyen, qui n'est assorti d'aucune précision nouvelle en appel, a été à bon droit écarté par le tribunal administratif, dont il y a lieu d'adopter les motifs sur ce point ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. E...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. E...la somme que le ministre des finances et des comptes publics demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. E...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du ministre de l'économie et des finances présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...E...et au ministre de l'économie et des finances.

Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques Nord Pas-de-Calais Picardie.

Délibéré après l'audience publique du 4 octobre 2016 à laquelle siégeaient :

- Mme Odile Desticourt, présidente de chambre,

- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,

- Mme Muriel Milard, premier conseiller.

Lu en audience publique le 18 octobre 2016.

Le rapporteur,

Signé : M. B...La présidente de chambre,

Signé : O. DESTICOURT

Le greffier,

Signé : M.T. LEVEQUE

La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le greffier,

Marie-Thérèse Lévèque

''

''

''

''

5

N°15DA00132


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3 (ter)
Numéro d'arrêt : 15DA00132
Date de la décision : 18/10/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-05-02-03 Contributions et taxes. Généralités. Recouvrement. Paiement de l'impôt. Questions diverses.


Composition du Tribunal
Président : Mme Desticourt
Rapporteur ?: Mme Muriel Milard
Rapporteur public ?: M. Guyau
Avocat(s) : SCP NATAF et PLANCHAT

Origine de la décision
Date de l'import : 29/10/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2016-10-18;15da00132 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award