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20/09/2016 | FRANCE | N°16DA00879

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre - formation à 3 (bis), 20 septembre 2016, 16DA00879


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 6 janvier 2016 de la préfète du Pas-de-Calais l'obligeant à quitter sans délai le territoire français, fixant l'Afghanistan comme pays de destination et ordonnant son placement en rétention administrative.

Par un jugement n° 1600140 du 13 janvier 2016, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lille a annulé l'arrêté de la préfète du Pas-de-Calais en tant qu'il fixe l'Afghanistan comme

pays de destination.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 11 m...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 6 janvier 2016 de la préfète du Pas-de-Calais l'obligeant à quitter sans délai le territoire français, fixant l'Afghanistan comme pays de destination et ordonnant son placement en rétention administrative.

Par un jugement n° 1600140 du 13 janvier 2016, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lille a annulé l'arrêté de la préfète du Pas-de-Calais en tant qu'il fixe l'Afghanistan comme pays de destination.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 11 mai 2016, la préfète du Pas-de-Calais demande à la cour :

1°) d'annuler les articles 1er et 2 du jugement du magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lille du 13 janvier 2016 ;

2°) de rejeter la demande de première instance tendant à l'annulation de la décision du 6 janvier 2016 fixant le pays de destination.

Elle soutient que M. A...n'établit pas être exposé à des risques en cas de retour dans son pays d'origine.

La requête a été communiquée à M.A..., qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Dominique Bureau, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant qu'à la suite de son interpellation le 6 janvier 2016, dans une zone d'accès restreint du port de Calais, par les services de la police de l'air et des frontières, M. A..., de nationalité afghane, a fait l'objet d'un arrêté de la préfète du Pas-de-Calais pris le même jour lui faisant obligation de quitter sans délai le territoire français, fixant le pays de destination et ordonnant son placement en rétention administrative ; que la préfète du Pas-de-Calais relève appel du jugement du 13 janvier 2016 par lequel le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lille a annulé cet arrêté en tant qu'il fixe l'Afghanistan comme pays de destination ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ; que selon les termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ; que la Cour européenne des droits de l'Homme a rappelé qu'il appartenait en principe au ressortissant étranger de produire les éléments susceptibles de démontrer qu'il serait exposé à un risque de traitement contraire aux stipulations précitées de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, à charge ensuite pour les autorités administratives " de dissiper les doutes éventuels " au sujet de ces éléments (28 février 2008, Saadi c. Italie, n° 37201/06, paragraphes 129-131 et 15 janvier 2015, AA. C. France, n° 18039/11) ;

3. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en dépit de la gravité de la situation en Afghanistan, rendue publique par des rapports émanant d'organisations non gouvernementales et d'instances officielles, il règnerait dans cet Etat une situation de violence généralisée telle qu'un civil de nationalité afghane devrait de ce seul fait être regardé comme personnellement soumis à des risques de traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, si M. A...fait valoir qu'il est originaire de la province du Logar située au Sud de Kaboul, désignée comme particulièrement dangereuse, notamment, par les services du ministère en charge des affaires étrangères, et qu'il serait menacé par les talibans, il n'apporte à l'appui de ses allégations aucun élément probant et ne peut, eu égard au caractère succinct et peu précis de ses déclarations, être regardé comme établissant qu'il serait effectivement originaire de cette province ; que, dans ces conditions, la préfète du Pas-de-Calais est fondée à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lille a retenu, pour annuler la décision fixant le pays de destination, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et, estimant que l'Etat était la partie perdante, a mis à sa charge la somme de 1 000 euros, sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

4. Considérant qu'il y a lieu pour la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'écarter par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif aux points 2 à 6 du jugement attaqué, les moyens soulevés par M. A...devant le tribunal administratif de Lille contre la décision fixant le pays de renvoi, tirés de l'incompétence du signataire de l'acte, du défaut de motivation de cette décision, ainsi que, par voie d'exception, de l'incompétence du signataire de l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre, du défaut de motivation de cette obligation, de la méconnaissance du droit d'être entendu et de présenter ses observations préalablement à l'édiction de cette mesure, et de l'erreur manifeste commise par la préfète dans l'appréciation des conséquences de celle-ci sur la situation personnelle de l'intéressé ;

5. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la préfète du Pas-de-Calais aurait omis de procéder à un examen suffisant de la situation particulière de M. A... avant de l'obliger à quitter le territoire français ; que ce moyen, également soulevé par M.A..., par voie d'exception, à l'encontre de la décision fixant le pays de destination doit également être écarté ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la préfète du Pas-de-Calais est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lille a annulé sa décision fixant le pays de destination et mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre des frais de l'instance ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les articles 1er et 2 du jugement du magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lille du 13 janvier 2016 sont annulés.

Article 2 : La demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif de Lille tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de destination est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. C...A....

Copie sera adressée à la préfète du Pas-de-Calais.

Délibéré après l'audience publique du 6 septembre 2016 à laquelle siégeaient :

- Mme Odile Desticourt, présidente de chambre,

- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,

- Mme Dominique Bureau, premier conseiller.

Lu en audience publique le 20 septembre 2016.

Le rapporteur,

Signé : D. BUREAULa présidente de chambre,

Signé : O. DESTICOURT

Le greffier,

Signé : M.T. LEVEQUE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le greffier,

Marie-Thérèse Lévèque

4

N°16DA00879


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 16DA00879
Date de la décision : 20/09/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière. Règles de procédure contentieuse spéciales.


Composition du Tribunal
Président : Mme Desticourt
Rapporteur ?: Mme Dominique Bureau
Rapporteur public ?: M. Guyau

Origine de la décision
Date de l'import : 07/03/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2016-09-20;16da00879 ?
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