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20/09/2016 | FRANCE | N°16DA00372

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre - formation à 3 (quater), 20 septembre 2016, 16DA00372


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...E...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 27 mai 2015 du préfet du Nord refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office.

Par un jugement n° 1507306 du 17 décembre 2015, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 1

9 février 2016, M.E..., représenté par Me B...D..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugeme...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...E...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 27 mai 2015 du préfet du Nord refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office.

Par un jugement n° 1507306 du 17 décembre 2015, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 19 février 2016, M.E..., représenté par Me B...D..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Lille du 17 décembre 2015 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 27 mai 2015 du préfet du Nord ;

3°) d'enjoindre au préfet du Nord de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à défaut, de procéder à un nouvel examen de sa demande de titre de séjour dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son avocat dans les conditions prévues par l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- sa requête est recevable ;

- la décision de refus de titre de séjour a été signée par une autorité incompétente ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'une erreur de fait quant à ses conditions d'entrée sur le territoire français ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français a été signée par une autorité incompétente ;

- elle est illégale à raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision lui accordant un délai de départ volontaire de trente jours a été prise par une autorité incompétente ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle dans la mesure où le préfet du Nord aurait dû lui accorder un délai de départ volontaire supérieur à trente jours ;

- la décision fixant le pays de destination est insuffisamment motivée ;

- elle est illégale à raison de l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er juin 2016, le préfet du Nord conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- à titre principal, la requête présentée par M. E...ne critique pas le jugement attaqué et, par suite, elle est irrecevable ;

- à titre subsidiaire, les moyens soulevés par M. E...ne sont pas fondés.

M. E...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 1er février 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Muriel Milard, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.E..., ressortissant azerbaïdjanais, né le 6 octobre 1969 entré en France le 6 octobre 2010 selon ses déclarations, a demandé son admission au séjour au titre de l'asile ; que sa demande a été rejetée par une décision du 19 septembre 2011 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par une décision du 30 mai 2012 de la Cour nationale du droit d'asile ; que sa demande de réexamen a également été rejetée par une nouvelle décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 31 octobre 2012 ; qu'après s'être vu délivrer une carte de séjour temporaire sur le fondement du 11° de l'article L.313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, valable du 30 janvier 2013 au 29 janvier 2014, M. E...a le 31 mars 2014 demandé le renouvellement de son titre de séjour ; qu'il relève appel du jugement du 17 décembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 mai 2015 du préfet du Nord refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office ;

Sur le moyen commun aux décisions attaquées :

2. Considérant que M. Christophe Debeyer, conseiller d'administration de l'intérieur et de l'outre mer, directeur de l'immigration et de l'intégration à la préfecture du Nord, qui a signé les décisions attaquées, bénéficiait d'une délégation du préfet du Nord, par un arrêté n° 2014272-0002 du 29 septembre 2014, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture, à l'effet notamment de signer les décisions en litige ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de ces décisions doit être écarté comme manquant en fait ;

Sur le refus de titre de séjour :

3. Considérant que la décision attaquée, qui vise le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, comporte les considérations de droit qui en constituent le fondement ; qu'elle comporte également les considérations de fait sur lesquelles elle se fonde en mentionnant les éléments relatifs à la situation personnelle et familiale de M. E...alors même que les motifs ne reprennent pas l'ensemble des éléments caractérisant la situation de l'intéressé ; que par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté ;

4. Considérant que, si M. E...soutient que la décision attaquée serait entachée d'une erreur de fait quant à ses conditions d'entrée en France, il ressort toutefois des termes mêmes de l'arrêté en litige que le préfet du Nord, qui s'est fondé sur les déclarations initiales de l'intéressé lors de sa demande d'admission au séjour au titre de l'asile précisant qu'il était entré le 6 octobre 2010 muni d'une carte nationale d'identité et ainsi démuni des documents et visa requis par l'article L. 211-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a, par la suite, constaté qu'en 2013, M. E...avait produit la copie de son passeport délivré le 12 mai 2010 revêtu d'un visa de circulation délivré par les autorités consulaires allemandes autorisant un séjour d'une durée maximale de dix jours ; que par suite, elle ne comporte aucune contradiction révélant une erreur de fait susceptible de modifier le sens de la décision prise ;

5. Considérant que, si M. E...fait valoir qu'il est entré en France en octobre 2010 et qu'il y est demeuré depuis après le rejet de sa demande d'asile, que son frère réside également sur le territoire français et qu'il est employé en qualité d'agent polyvalent en contrat à durée déterminée d'insertion, il ressort toutefois des pièces du dossier que M. E...est célibataire et sans charge de famille et n'établit pas avoir constitué de vie privée et familiale en France ; qu'en outre, il dispose d'attaches familiales dans son pays d'origine où réside sa soeur ; que, dans les circonstances de l'espèce, eu égard aux conditions de séjour en France de M.E..., ce dernier n'est pas fondé à soutenir que la décision de refus de titre de séjour en litige aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise et n'a ainsi pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par ailleurs, si le requérant fait valoir qu'il souffre de problèmes de santé à raison notamment d'une hépatite chronique de type C, de troubles psychologiques et d'une insuffisance veino-lymphatique des membres inférieurs, toutefois, il ressort d'un certificat médical établi le 19 décembre 2013 par le chef de service de l'hôpital Saint-Philibert de Lomme que l'intéressé a été jugé guéri de cette hépatite ; qu'en outre, si par un avis du 23 septembre 2014, le médecin de l'agence régionale de santé a précisé que M. E...nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il existe toutefois un traitement approprié dans son pays d'origine ; que les pièces médicales produites par M.E..., dont leur teneur est insuffisamment circonstanciée, ne permettent pas d'infirmer l'appréciation portée par le médecin de l'agence régionale de santé sur son état de santé ; que par suite, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision du préfet serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences qu'elle comporte sur sa situation personnelle ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. E...n'est pas fondé à exciper, à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français, de l'illégalité de la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour ;

7. Considérant que pour les mêmes motifs que ceux retenus au point 5, la décision contestée ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'elle n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

Sur le délai de départ volontaire de trente jours :

8. Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours (...) " ;

9. Considérant que dans la présente espèce, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. E... ait demandé au préfet du Nord à bénéficier d'une prolongation du délai accordé pour exécuter volontairement l'obligation de quitter le territoire français ; qu'il n'allègue pas plus s'être prévalu auprès de l'administration de circonstances particulières nécessitant que, à titre exceptionnel, un délai de départ supérieur à trente jours lui fût accordé ; que par suite, le préfet du Nord n'a pas méconnu les dispositions précitées en octroyant à M. E...un délai de départ volontaire de trente jours, ni commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé ;

Sur le pays de destination :

10. Considérant que si la motivation de fait de la décision fixant le pays de destination ne se confond pas nécessairement avec celle obligeant l'étranger à quitter le territoire, la motivation en droit de ces deux décisions est identique et résulte des termes mêmes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lequel est, d'ailleurs mentionné dans la décision attaquée ; que, par ailleurs, le préfet a suffisamment motivé en fait sa décision en mentionnant que le requérant ne produisait aucun élément et qu'ainsi la décision ne méconnaissait pas les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. E...n'est pas fondé à exciper, à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination, de l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ;

12. Considérant que M. E...n'établit pas, en l'absence de tout élément produit au soutien de ses allégations, la réalité des risques auxquels il serait personnellement exposé en cas de retour dans son pays d'origine alors qu'au demeurant, sa demande d'asile a été rejetée par une décision du 19 septembre 2011 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par une décision du 30 mai 2012 de la Cour nationale du droit d'asile ; que par suite, la décision en litige ne méconnaît pas les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que pour les mêmes motifs, il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que la décision du préfet en litige serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences qu'elle comporte sur sa situation personnelle ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le préfet du Nord, que M. E...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. E...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...E...au ministre de l'intérieur et à Me B...D....

Copie sera adressée au préfet du Nord.

Délibéré après l'audience publique du 6 septembre 2016 à laquelle siégeaient :

- Mme Odile Desticourt, présidente de chambre,

- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,

- Mme Muriel Milard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 20 septembre 2016.

Le rapporteur,

Signé : M. C...La présidente de chambre,

Signé : O. DESTICOURT

Le greffier,

Signé : M.T. LEVEQUE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le greffier,

Marie-Thérèse Lévèque

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N°16DA00372


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre - formation à 3 (quater)
Numéro d'arrêt : 16DA00372
Date de la décision : 20/09/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière. Règles de procédure contentieuse spéciales.


Composition du Tribunal
Président : Mme Desticourt
Rapporteur ?: Mme Muriel Milard
Rapporteur public ?: M. Guyau
Avocat(s) : DEWAELE

Origine de la décision
Date de l'import : 28/09/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2016-09-20;16da00372 ?
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