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20/09/2016 | FRANCE | N°16DA00326

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre - formation à 3 (quater), 20 septembre 2016, 16DA00326


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 8 septembre 2015 du préfet du Nord lui faisant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixant le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office et le plaçant en rétention administrative.

Par un jugement n° 1507317 du 23 décembre 2015, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 16 février 2016, M.

B..., représenté par Me C...F..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal admi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 8 septembre 2015 du préfet du Nord lui faisant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixant le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office et le plaçant en rétention administrative.

Par un jugement n° 1507317 du 23 décembre 2015, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 16 février 2016, M.B..., représenté par Me C...F..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Lille du 23 décembre 2015 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 8 septembre 2015 du préfet du Nord ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son avocat dans les conditions prévues par l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français a été signée par une autorité incompétente ;

- il est mineur et, par suite, le préfet du Nord a, en prononçant à son encontre une mesure d'éloignement, entaché la décision en litige d'une erreur de fait et d'une erreur d'appréciation ;

- elle méconnaît les stipulations du 1. de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la décision fixant le pays de destination a été signée par une autorité incompétente ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est illégale à raison de l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision de placement en rétention administrative a été prise par une autorité incompétente ;

- elle est illégale à raison de l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ;

- elle méconnaît les dispositions du 1° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations du 1. de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 554-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 15 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 juin 2016, le préfet du Nord conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- à titre principal, la requête présentée par M. B...ne critique pas le jugement attaqué et, par suite, elle est irrecevable ;

- à titre subsidiaire, les moyens soulevés par M. B...ne sont pas fondés.

M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 25 janvier 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- la directive 2008/115/CE 16 décembre 2008 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code civil ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Muriel Milard, premier conseiller,

- et les observations de Me G...E..., représentant le préfet du Nord.

1. Considérant qu'à la suite de l'interpellation le 8 septembre 2015 par les services de la police nationale de M.B..., de nationalité malienne, né le 22 février 1998 selon ses déclarations, le préfet du Nord a pris à son encontre le même jour un arrêté lui faisant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixant le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office et le plaçant en rétention administrative ; que M. B...relève appel du jugement du 23 décembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;

Sur le moyen commun aux arrêtés attaqués :

2. Considérant que M. B...soutient que les décisions en litige ont été signées par une autorité incompétente ; que toutefois, ce moyen, qui n'est assorti d'aucune précision nouvelle en appel, a été à bon droit écarté par les premiers juges, dont il y a lieu d'adopter les motifs sur ce point ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil " ; qu'aux termes de l'article 47 du code civil : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité " ; que cet article pose une présomption de validité des actes d'état civil établis par une autorité étrangère ; qu'il incombe à l'administration de renverser cette présomption en apportant la preuve du caractère irrégulier, falsifié ou non conforme à la réalité des actes en question ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.B..., entré sur le territoire français en 2015, dépourvu de tout document de voyage, s'est déclaré mineur en produisant un extrait d'acte de naissance et un jugement supplétif d'acte de naissance du tribunal de grande instance de la commune II du district de Bamako précisant qu'il est né à Bamako le 22 février 1998 alors qu'après consultation du système " Visabio ", il a été identifié, comme étant né le 22 février 1990 après avoir présenté dans le cadre de sa demande de visa effectuée en 2009 un passeport précisant qu'il était né à cette date ; que la copie de l'extrait d'acte de naissance et le jugement supplétif produits par M.B..., qui ne mentionnent pas les âges des parents du requérant et qui font apparaître une divergence en ce qui concerne le prénom de sa mère, ne sont pas de nature à infirmer les éléments figurant dans la base de données " Visabio " ; que dans ces conditions, le préfet du Nord a pu, sans entacher sa décision d'une erreur de fait, ni d'une erreur d'appréciation, estimer que la minorité de l'intéressé n'était pas établie et prononcer à l'encontre de M. B...une obligation de quitter le territoire français ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 4, que M. B...est majeur ; que par suite, il ne saurait utilement invoquer à l'encontre de la décision en litige le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du 1. de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Sur le pays de destination :

6. Considérant que si la motivation de fait de la décision fixant le pays de destination ne se confond pas nécessairement avec celle obligeant l'étranger à quitter le territoire, la motivation en droit de ces deux décisions est identique et résulte des termes mêmes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lequel est, d'ailleurs mentionné dans la décision attaquée ; que, par ailleurs, le préfet a suffisamment motivé en fait sa décision en mentionnant que le requérant n'établissait pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à exciper, à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination, de l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ;

8. Considérant que M. B...n'établit pas, en l'absence de tout élément produit au soutien de ses allégations, la réalité des risques auxquels il serait personnellement exposé en cas de retour dans son pays d'origine alors qu'au demeurant, il n'a pas demandé l'asile en France ; que par suite, la décision en litige ne méconnaît pas les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur le placement en rétention administrative :

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à exciper, à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision de placement en rétention administrative, de l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ;

10. Considérant que pour les mêmes motifs que ceux retenus au point 5, M. B...ne saurait utilement invoquer à l'encontre de la décision en litige le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 1° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations du 1. de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

11. Considérant qu'aux termes de l'article L. 554-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et droit d'asile : " Un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration doit exercer toute diligence à cet effet " ;

12. Considérant que l'arrêté contesté a fixé un délai de cinq jours pendant lesquels l'intéressé, qui n'était pas mineur contrairement à ce qu'il soutient, sera maintenu dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire ; que par suite, le préfet du Nord n'a pas méconnu les dispositions précitées de l'article L. 554-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et droit d'asile ;

13. Considérant que M. B...ne peut utilement invoquer les stipulations de l'article 15 de la directive 2008/115/CE dès lors qu'elles ont été transposées en droit interne par la loi du 16 juin 2011 ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision attaquée méconnaîtrait cet article de la directive est inopérant ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le préfet du Nord, que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B..., au ministre de l'intérieur et à Me C...F....

Copie sera adressée au préfet du Nord.

Délibéré après l'audience publique du 6 septembre 2016 à laquelle siégeaient :

- Mme Odile Desticourt, présidente de chambre,

- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,

- Mme Muriel Milard, premier conseiller.

Lu en audience publique le 20 septembre 2016.

Le rapporteur,

M. D...La présidente de chambre,

O. DESTICOURT

Le greffier,

M.T. LEVEQUE La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le greffier,

Marie-Thérèse Lévèque

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N°16DA00326


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre - formation à 3 (quater)
Numéro d'arrêt : 16DA00326
Date de la décision : 20/09/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière. Règles de procédure contentieuse spéciales.


Composition du Tribunal
Président : Mme Desticourt
Rapporteur ?: Mme Muriel Milard
Rapporteur public ?: M. Guyau
Avocat(s) : DEWAELE

Origine de la décision
Date de l'import : 28/09/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2016-09-20;16da00326 ?
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