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23/06/2016 | FRANCE | N°15DA01972

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 23 juin 2016, 15DA01972


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler la décision du 9 juin 2015 par laquelle le préfet de l'Eure a fixé comme pays de destination de la mesure d'éloignement dont il a fait l'objet, le pays dont il a la nationalité ou tout autre pays dans lequel il établit être légalement admissible.

Par un jugement n° 1502595 du 1er décembre 2015, le tribunal administratif de Rouen a annulé cette décision.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 11

décembre 2015, le préfet de l'Eure demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 1er décemb...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler la décision du 9 juin 2015 par laquelle le préfet de l'Eure a fixé comme pays de destination de la mesure d'éloignement dont il a fait l'objet, le pays dont il a la nationalité ou tout autre pays dans lequel il établit être légalement admissible.

Par un jugement n° 1502595 du 1er décembre 2015, le tribunal administratif de Rouen a annulé cette décision.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 11 décembre 2015, le préfet de l'Eure demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 1er décembre 2015 du tribunal administratif de Rouen ;

2°) de rejeter la demande de M. A...devant le tribunal administratif.

Il soutient que :

- il ne s'est pas estimé lié par les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile et a procédé à un examen de l'ensemble de la situation de M.A... ;

- la décision fixant le pays de destination ne méconnaît pas les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions de l'article L. 512-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 janvier 2016, M.A..., représenté par Me D...C..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de l'Etat d'une somme de 1 500 euros à verser à son conseil au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, ou, dans l'hypothèse où M. A...ne serait pas admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l'Etat cette même somme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le préfet s'est estimé en situation de compétence liée au vu des décisions du juge de l'asile ;

- il n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle ;

- il encourt des risques en cas de retour dans son pays.

M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 janvier 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Olivier Nizet, président-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant qu'il ressort de la motivation de l'arrêté du 9 juin 2015 fixant notamment le pays à destination duquel M.A..., ressortissant turc pourrait être reconduit en cas d'exécution de la mesure d'éloignement, que l'autorité administrative a examiné le dossier de M. A... avant de considérer que la décision ne contrevenait pas aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que si le préfet a également indiqué dans la décision en litige " suivant les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile, Monsieur A... n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme en cas de retour dans son pays d'origine ", il ne ressort pas de cette formulation qu'il se serait estimé lié par l'appréciation portée par ces deux institutions ; que, par suite, le préfet de l'Eure est fondé à soutenir que c'est à tort que, pour annuler la décision fixant le pays de destination, le tribunal administratif de Rouen a retenu un tel motif ;

2. Considérant qu'il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par M. A...devant le tribunal administratif et la Cour ;

3. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle de M.A... ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 512-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné : / 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; / 2° Ou à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; / 3° Ou à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ; qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants " ;

5. Considérant que M.A... fait état de son engagement politique en faveur de la cause kurde et de son refus d'accomplir son service militaire ; qu'il se prévaut notamment d'un procès-verbal rédigé lors d'une perquisition des forces de l'ordre turques qui aurait eu lieu chez son père le 7 mai 2015 ; que ce faisant, l'intéressé, dont la demande d'asile a au demeurant été rejetée, n'apporte pas d'élément suffisamment probant à l'appui de ses allégations quant aux craintes qu'il prétend encourir en cas de retour dans son pays d'origine ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 512-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut être qu'écarté ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de l'Eure est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a annulé la décision du 9 juin 2015 fixant le pays de destination ; que les conclusions présentées par M. A... au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 1er décembre 2015 tribunal administratif de Rouen est annulé.

Article 2 : La demande de M. A...présentée devant le tribunal administratif de Rouen ainsi que ses conclusions présentées en appel au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à M. B...A...et à Me D...C....

Copie en sera adressée pour information au préfet de l'Eure.

Délibéré après l'audience publique du 9 juin 2016 à laquelle siégeaient :

- M. Paul-Louis Albertini, président de chambre,

- M. Olivier Nizet, président-assesseur,

- M. Jean-François Papin, premier conseiller.

Lu en audience publique le 23 juin 2016.

Le rapporteur,

Signé : O. NIZET

Le président de chambre,

Signé : P.-L. ALBERTINILe greffier,

Signé : I. GENOT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le greffier,

Isabelle Genot

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N°15DA01972

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15DA01972
Date de la décision : 23/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Olivier Nizet
Rapporteur public ?: Mme Pestka
Avocat(s) : BIDAULT

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2016-06-23;15da01972 ?
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