Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société civile immobilière SIV a demandé au tribunal administratif d'Amiens de condamner la société coopérative d'intérêt collectif agricole de l'Oise (SICAE-Oise) et la commune de Choisy-au-Bac à lui verser une indemnité de 69 000 euros en réparation des préjudices qu'elle a subis, en raison des refus qui lui ont été opposés de procéder au raccordement électrique de l'immeuble dont elle est propriétaire, situé 20 rue des Orfèvres à Choisy-au-Bac et de mettre à la charge de la SICAE-Oise et de la commune de Choisy-au-Bac une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1203479 du 8 juillet 2014, le tribunal administratif d'Amiens a prononcé, par son article 1er, la mise hors de cause de la SICAE-Oise, et a rejeté, par son article 2, la demande de la SCI SIV.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 4 septembre 2014, la société civile immobilière SIV, représentée par Me B...A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de condamner solidairement la commune de Choisy-au-Bac et la SICAE-Oise à lui verser une indemnité de 147 053 euros, en réparation des préjudices subis, cette somme étant assortie des intérêts au taux légal et de leur capitalisation ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Choisy-au-Bac et de la SICAE-Oise une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les travaux qu'elle a effectués ne relèvent pas du champ d'application de l'article L. 111-6 du code de l'urbanisme ;
- les préjudices économiques et financiers qu'elle a subis s'élèvent à la somme de 147 053 euros, comprenant les pertes de loyers escomptés, ainsi que les frais de réhabilitation de l'immeuble en cause.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 février 2015, la société coopérative d'intérêt collectif agricole de l'Oise, dénommée SICAE-Oise, représentée par Me D...C..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la SCI SIV de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le tribunal administratif d'Amiens a prononcé sa mise hors de cause, qui n'est pas critiquée par la société appelante ;
- sa responsabilité ne peut être engagée dès lors qu'elle s'est conformée à l'injonction du maire de la commune de Choisy-au-Bac, de ne pas procéder au raccordement électrique de l'immeuble appartenant à la SCI SIV, en application du 1er alinéa de l'article 23 du cahier des charges de la concession d'énergie électrique.
Par un mémoire en défense, enregistré le 18 juin 2015, la commune de Choisy-au-Bac, représentée par la SCP Gossard-Bolliet-Melin, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la société civile immobilière SIV de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision de refus de raccordement n'était pas illégale, dès lors que les travaux entrepris relèvent du champ d'application de l'article R. 421-17 du code de l'urbanisme ;
- le maire était tenu de refuser le raccordement sollicité, conformément aux dispositions de l'article L. 111-6 du code de l'urbanisme ;
- les préjudices, dont la société appelante se prévaut ne sont, en tout état de cause, qu'éventuels.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Hadi Habchi, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Jean-Michel Riou, rapporteur public.
1. Considérant que, par acte de vente du 28 novembre 2007, la SCI SIV a acquis un immeuble situé au 20, rue des orfèvres à Choisy-au-Bac, dans le département de l'Oise, au bénéfice duquel elle a entrepris la réalisation de travaux de rénovation et d'aménagement intérieur ; que, par deux courriers des 6 mai 2008 et 10 juin 2008, après avoir estimé que ces travaux avaient été effectués sans autorisation d'urbanisme, le maire de la commune de Choisy-au-Bac a mis en demeure la SCI SIV de régulariser cette situation par le dépôt d'une déclaration préalable de travaux ; que, par une décision du 7 juin 2011, la société coopérative d'intérêt collectif agricole de l'Oise, gestionnaire du réseau de production d'énergie électrique, alors dénommé SICAE- Oise, a refusé de procéder au raccordement électrique de l'immeuble en se prévalant d'une injonction délivrée en ce sens par le maire de la commune de Choisy-au-Bac ; qu'en outre, par une décision du 27 septembre 2012, le maire de cette commune s'est opposé, d'une part, au raccordement de l'immeuble en cause au réseau local d'électricité, en application des dispositions de l'article L. 111-6 du code de l'urbanisme et a rejeté, d'autre part, la demande indemnitaire préalable formée par la SCI SIV en réparation des préjudices économiques et financiers qu'elle allègue avoir subis ; que la SCI SIV relève appel du jugement du 8 juillet 2014 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté ses demandes indemnitaires ;
Sur la mise hors de cause de la SICAE-Oise et la portée des conclusions d'appel :
2. Considérant qu'il résulte des énonciations du jugement attaqué que le tribunal administratif d'Amiens a prononcé, par son article 1er, la mise hors de cause de la SICAE- Oise, en sa qualité de gestionnaire du réseau de production d'énergie électrique ; que si la SCI SIV, qui conclut à la condamnation de cet exploitant, indique succinctement dans le corps de son mémoire du 4 septembre 2014 que la " décision du 7 juin 2011, caractérisant un refus explicite (...) [est] motivée par des faits imputables à la commune de Choisy-au-Bac ", elle ne formule explicitement aucun grief à l'encontre de l'exploitant du réseau d'électricité, qui tendrait à remettre en cause l'article 1er du jugement qui a mis hors de cause la SICAE-Oise sur ce point, et ne présente, au demeurant, aucun moyen d'appel critiquant la solution retenue par le tribunal pour rejeter la demande d'indemnisation qu'elle avait formée devant lui, contre ce même exploitant ; que, par suite, les conclusions de la SCI SIV dont la cour est saisie doivent être regardées comme étant dirigées contre l'article 2 du jugement en litige ;
Sur les conclusions indemnitaires présentées par la société appelante :
3. Considérant, en premier lieu, qu'il ne résulte pas de l'instruction que la SCI SIV a contracté d'engagement de location à l'égard de tiers, ni même qu'elle avait lancé une procédure de mise en location des logements en cause ; qu'en outre, elle n'établit pas plus en première instance qu'en appel que les caractéristiques des logements destinés à être loués correspondraient à une valeur locative de 1 500 euros mensuels ; que, dès lors, ce chef de préjudice, dont la réalité n'est d'ailleurs pas établie, ne présente à ce stade qu'un caractère éventuel ; que, par suite, la SCI SIV n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté sa demande de réparation du préjudice financier lié à l'impossibilité de louer des logements ;
4. Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction que la SCI SIV, qui ne pouvait compte tenu de son objet ignorer les exigences en matière d'urbanisme pour la réalisation des travaux de réaménagement d'une certaine importance, aurait dû, notamment à la suite des courriers des 6 mai et 10 juin 2008 du maire de la commune de Choisy-au-Bac, prendre l'initiative de s'assurer de la possibilité d'entreprendre les travaux envisagés sans autorisation d'urbanisme préalable ; qu'elle a cependant procédé aux travaux de réaménagement avant l'intervention de la décision de l'administration et sans avoir même sollicité une autorisation de raccordement au réseau d'électricité ; que, si elle réclame l'indemnisation des frais de travaux et de réhabilitation de l'édifice en litige pour lesquels l'appelante a engagé un prêt de 82 000 euros contracté auprès d'un établissement bancaire le 28 décembre 2007, ces dépenses trouvent leur cause dans la précipitation avec laquelle la société a entrepris ces travaux ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que ces sommes auraient d'ailleurs été dépensées en pure perte ; que, dans ces conditions, la société s'est elle-même exposée à un risque de nature à exonérer la responsabilité de la commune ; qu'en tout état de cause, l'existence du préjudice que la société invoque sur ce point ne trouve pas son origine directement dans l'illégalité du refus de raccordement en litige ;
5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur le principe de la responsabilité, que la SCI SIV n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté ses demandes indemnitaires ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par la SCI SIV sur leur fondement ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SCI SIV une somme de 1 000 euros à verser respectivement à la commune de Choisy-au-Bac et au SICAE-Oise sur ce fondement ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société civile immobilière SIV est rejetée.
Article 2 : La société civile immobilière SIV versera une somme de 1 000 euros à la commune de Choisy-au-Bac et une somme de 1 000 euros à la société coopérative d'intérêt collectif agricole de l'Oise (SICAE-Oise) sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société civile immobilière SIV, à la société coopérative d'intérêt collectif agricole de l'Oise (SICAE-Oise) et à la commune de Choisy-au-Bac.
Délibéré après l'audience publique du 4 mai 2016 à laquelle siégeaient :
- M. Olivier Yeznikian, président de chambre,
- M. Christian Bernier, président-assesseur,
- M. Hadi Habchi, premier conseiller.
Lu en audience publique le 19 mai 2016.
Le rapporteur,
Signé : H. HABCHILe premier vice président de la cour,
Président de chambre,
Signé : O. YEZNIKIAN
Le greffier,
Signé : S. DUPUIS
La République mande et ordonne à la ministre du logement et de l'habitat durable en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
Le greffier en chef,
Par délégation,
Le greffier,
Sylviane Dupuis
''
''
''
''
N°14DA01505 2